« Les Républicains » : le double flop de Sarkozy
Sarkozy l’a voulu et l’a obtenu : l’UMP, dont le nom est gravement entaché par les fraudes et les affaires financières, se nommera désormais « Les Républicains », dans l’espoir d’une illusoire virginité morale. Le changement de nom a été entériné par les militants en fin de semaine sur internet puis validé samedi lors d’un congrès fondateur. Malheureusement pour Sarkozy, ce double rendez-vous s’est traduit par un double flop...

Disons-le tout net, ce changement de dénomination constitue un scandale, et ce n’est pas un hasard si tant de personnes, au sein même de la droite et du centre-droit, ont émis des réserves quand elles n’ont pas carrément affiché leur opposition à une manœuvre qui s’apparente de facto à un hold-up portant atteinte aux principes de la démocratie. Le problème posé par la nouvelle appellation du parti n’est pas tant l’usage du mot « républicains » que l’emploi de l’adjectif « les ». Cette formulation relève en effet d’une forme d’escroquerie électorale car elle vise à suggérer aux Français qu’il n’existe pas de Républicains hors du parti dirigé par Sarkozy, ou du moins que les « vrais » Républicains sont dans ce parti et nulle part ailleurs.
En conséquence de quoi, et conformément à l’article 4 de la Constitution faisant référence aux « principes de la démocratie » et à une « participation équitable des partis (...) à la vie démocratique de la Nation », le Conseil Constitutionnel devrait pouvoir être saisi. Ce qui pourrait amener cette instance à mettre en demeure le parti de Sarkozy de renoncer purement et simplement à cette appellation si manifestement abusive, ou a minima, à être rebaptisé « Parti républicain ». Tous les partis peuvent en effet revendiquer leur appartenance à la République et leur respect des valeurs qui lui sont attachées, mais aucun ne peut laisser croire à la population qu’il en est le dépositaire exclusif. En cela, l’équité se trouve bel et bien bafouée.
Le Conseil Constitutionnel sera-t-il saisi ? Nous le saurons dans les prochaines semaines. En attendant, Sarkozy a pu mettre sur pied sa grand’ messe de fondation du nouveau parti à l’issue du vote des militants. Et là, malgré les rodomontades habituelles du chef de feue l’UMP et de son entourage, force est de reconnaître qu’en ces deux épisodes du « renouveau » les choses ne se sont pas déroulées comme l’avait souhaité Sarkozy, c’est le moins que l’on puisse en dire. On peut même parler de deux flops qui, n’en doutons pas, ont dû laisser dans la bouche de l’ex-président de la République un goût amer.
Tous autant que nous sommes, nous avons entendu les commentaires condescendants des caciques de la droite à l’énoncé dans les médias de la faible participation des militants du PS appelés à voter le 21 mai sur les motions internes de leur parti : avec 56 % de participants, le fait est que le résultat n’a pas été brillant. Mais ce vote sur des motions en vue d’un futur congrès n’avait pas la même force symbolique qu’un vote sur un changement de nom appelé à être le fer de lance de la communication du nouveau parti pour les années à venir. Dès lors, que penser du score réalisé par la droite ? Avec 46 % de votants les 28 et 29 mai, l’UMP se situe 10 points derrière la participation du PS, pourtant si largement – et si imprudemment – moquée quelques jours plus tôt.
Seulement 37 % des adhérents de l’UMP ont approuvé la dénomination « Les Républicains ». Un pourcentage d’une faiblesse insigne pour un changement aussi important dans la vie d’un parti. Un évènement qui, normalement, aurait dû mobiliser un nombre de votants massif. Mais les faits sont là : manifestement, beaucoup à droite n’ont pas digéré cette initiative de Sarkozy ! Et ils ont tenu à le faire savoir en boycottant ce scrutin interne. Au final, c’est un flop indiscutable pour le président de la vraie-fausse nouvelle formation politique.
Malheureusement pour lui, Sarkozy n’en avait pas fini avec les déceptions. Le congrès de lancement du parti rebaptisé « Les Républicains » devait attirer une foule de militants enthousiastes, venus à La Villette en rangs serrés acclamer la nouvelle dénomination et le promoteur de ce changement. À défaut des rassemblements qui, jadis à droite, pouvaient réunir jusqu’à 80 000 participants, les organisateurs du congrès, Sarkozy en tête, avaient misé sur une affluence de 20 000 personnes. Las ! Malgré le temps clément, 10 000 militants au grand maximum se sont déplacés en laissant dans la Grande Halle des espaces vides du plus mauvais effet. Pire : un écran géant avait été installé à l’extérieur pour permettre à tous ceux qui n’auraient pas pu entrer dans la salle de suivre le déroulement du congrès. Une précaution inutile : mis à part les quelques pigeons qui ont pu s’en servir comme perchoir, cet écran s’est révélé totalement inutile.
Après le flop du vote est venu pour Sarkozy le flop du congrès, et ce ne sont pas ses excès de langage à la tribune qui le sauveront d’un naufrage inéluctable que seuls les militants les plus sectaires ne voient pas venir !
Sauf décision contraire du Conseil Constitutionnel ou de la Cour d’Appel de Paris, appelée(s) à juger sur le fond, la dénomination « Les Républicains » restera. Mais comme le craignent de nombreux sympathisants de droite, ce nom risque fort d’être traîné comme un boulet durant les campagnes électorales à venir : d’ores et déjà, « Les Ripoublicains » sont vilipendés en relation avec les nombreuses affaires héritées de l’UMP et censées avoir subi un coup de Kärcher par la magie d’un changement de dénomination aux allures de tour de passe-passe. « Les Ripoublicains » : un détournement qui pourrait en effet connaître un grand succès sur le net et sur les affiches électorales. Réponse dès l’automne avec la campagne des Régionales.