vendredi 25 septembre 2009 - par Catherine Coste

Flagrant déni de mort ?!

Récupérer le sperme de son mari décédé, ou l’extraction de semence post-mortem, est-ce la même chose ?
 
Que dit l’actu sur l’insémination post-mortem ?
Le 23 septembre 2009, l
e tribunal de Rennes examinait la demande de Fabienne Justel, qui veut récupérer le sperme de son mari décédé. La loi de 1994 l’interdit. Dans l’édition d’Ouest-France du 24 septembre 2009, on pouvait lire :

« Fabienne Justel et son avocat Me Collard répondent aux journalistes à la sortie de l’audience du tribunal de Rennes. Le conjoint, malade, avait fait des dépôts avant sa mort, en 2007. Sa femme veut, à présent,récupérer les gamètes pour se faire inséminer. Jugement le 15 octobre. Fabienne Justel s’est contentée d’une brève déclaration, hier matin, à la sortie du tribunal. Cette Lannionnaise de 39 ans a perdu son mari, en septembre 2008. Aujourd’hui, elle veut se faire inséminer avec les spermatozoïdes que son époux avait déposés, pour une éventuelle insémination, au Centre d’études et de conservation des oeufs et du sperme (Cecos) de Rennes. La loi l’interdit. Le Cecos a donc refusé.

La veuve a saisi le tribunal de grande instance de Rennes, en référé (procédure d’urgence). Hier, à l’audience, Cécile Vivien, vice-procureur, a souhaité le rejet de la demande, estimant qu’’il n’y a pas de trouble manifestement illicite’ qui justifierait que le tribunal se prononce en référé. Le tribunal rendra sa décision le 15 octobre.

’L’épouse ne figure pas au contrat’

’J’irai jusqu’au bout, s’est indignée la veuve. Je me bats pour cet enfant. Je ne perds pas espoir et j’encourage aujourd’hui le tourisme reproductif.’ Pour Me Gilbert Collard, son avocat, ’il y avait un contrat entre le Cecos et les époux Justel. L’engagement de l’époux est valable pour les deux.’

’Le document a été signé entre le Cecos et le mari, rétorque Me Michel Poignard. Son épouse ne figure pas au contrat.’ L’avocat du Cecos rappelle que les dépôts de sperme ont été réalisés alors que le couple vivait encore en concubinage. Ils datent de 2006 ; le mariage a été prononcé en juin 2008.

’La mort du mari met fin au contrat, insiste la représentante du parquet. La veuve souhaite la restitution des gamètes pour contourner la loi.’ Me Collard ne s’en cache pas. Il met en garde : ’Les gens vont aller à l’étranger pour se faire inséminer.’ Aucune dérogation n’a encore été accordée dans l’Hexagone. Me Collard reproche au Cecos de ne pas avoir prévenu les époux Justel de l’interdiction.

’Environ 2 500 hommes viennent chaque année déposer du sperme’, répond plus sereinement le professeur Le Lannou, responsable du Cecos de Rennes. Souvent, c’est par précaution, comme Dominique Justel, qui devait suivre un traitement médical lourd. ’Est-ce la peine d’insister sur leur diagnostic vital et de leur casser le moral ?’, s’interroge le scientifique.

Au printemps 2010, le Parlement débattra du sujet lors de la révision de la loi bioéthique. Le Cecos de Rennes s’est engagé à conserver jusque-là les gamètes réclamées par Fabienne Justel. » (Source)

Mais qu’est-ce donc que l’extraction de sperme post-mortem ?!
Aux Etats-Unis,
En 1993, en Floride, Pam et Manny Maresca, étaient mariés depuis quelques semaines au moment du décès de Manny dans un accident de moto ; la veuve obtient que du sperme soit extrait du corps mort de son mari. Une de ses préoccupations a été de faire accepeter son choix par l’église catholique (source)

En Espagne, en mars 2007, un institut de fertilité a réalisé à Valence la première fécondation in vitro d’une femme dont le mari était décédé un an plus tôt. Le mari avait auparavant indiqué par écrit qu’il autorisait un prélèvement de semence en cas de décès afin que sa femme puisse avoir un enfant. (source)

Petit décryptage de ces cas de procréation post-mortem, dans le cadre des révisions des lois bioéthiques à horizon 2010 ...

Dans son livre "Le coeur réparé", paru aux Editions Robert Laffont en 1999, le Professeur Daniel Loisance, qui dirige le service de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire à l’hôpital Henri-Mondor, Créteil, écrit :

"La mort a disparu.
(...)
En réalité, la société comme la médecine ont plus changé au cours des trente dernières années que pendant plusieurs siècles précédents. Elle a tout fait, et fait encore tout, pour évacuer la maladie, la mort. Progressivement, nous nous sommes mis à vivre dans le culte du moi, le culte du beau, du sain, du sportif triomphant. Les exemples sont trop nombreux pour être cités, qui montreraient que la maladie est désormais vécue comme une injustice, comme une charge inacceptable. Dans cette logique, la mort a disparu. On ne meurt plus à domicile, mais à l’hôpital. Le défunt n’est plus veillé parmi les siens, mais pris en charge par les spécialistes. Nous ne voyons plus les convois funéraires, les marques visibles du deuil. Qui aujourd’hui porte ce ruban noir ou la cravate noire qu’arboraient, il y a encore quelque temps, les proches du défunt ?L’hommage rendu aux morts est programmé, facilité par Interflora et les promotions sur les chrysanthèmes.
Ce souci constant d’évacuer la maladie, la souffrance, la mort explique une réceptivité sans mesure à l’annonce du moindre progrès médical. Cette attente excessive autorise en réalité les excès les plus déraisonnables."
Copyright : Editions Robert laffont S.A., Paris, 1999.
 
Illustration directe de ces propos :
Nous avons évoqué le cas de Pam et Manny Maresca, qui date de 1993. Selon le New York Times, le premier cas identique remonte à 1978. "Le Dr Cappy Rothman aurait prélevé le sperme d’un adolescent récemment décédé dans un accident de la route à Los Angeles. A la demande de sa soeur qui arguait que le jeune homme était le dernier descendant mâle de la famille, le médecin a obtempéré. Quelques années plus tard, il dit ne pas savoir si la famille a fait usage de la semence."
 
"Le Dr. Rothman a été le premier à faire état de cette pratique. Dans un article scientifique publié en 1980, il a décrit comment il avait prélevé, en 1978, du sperme sur un homme de 32 ans qui s’était retrouvé en état de mort encéphalique suite à un accident de la circulation impliquant un camion. [Rappelons que l’état de mort encéphalique permet le prélèvement d’organes vitaux, Ndlr.]
 
Peu après, le Dr. Rothman, de Los Angeles, reçut l’appel d’un avocat de Boston, parlant pour le compte de sa cliente, dont le frère, âgé de 15 ans, ayant reçu une balle dans la tête, se trouvait dans un hôpital à trois heures de voiture de L.A. Ce frère étant le seul héritier mâle de la famille, la soeur demandait si le Dr. Rothman accepterait de se rendre à l’hôpital afin d’effectuer un prélèvement de sperme sur le corps de son frère en état de mort encéphalique. En effet, personne à l’hôpital n’avait voulu endosser la responsabilité de ce prélèvement, jugé contraire à l’éthique. Le Dr. Rothman accéda à la demande de la soeur, et les proches du défunt le suivirent jusqu’à L.A., où il examina le sperme prélevé sous microscope, observant le mouvement de spermatozoïdes. ’La mère se mit à sourire à travers ses larmes’, rapporta le Dr. Rothman. ’Elle se pencha, me baisa la joue en me donnant un billet de 20 $ en guise de pourboire’. ’Mais’, ajouta-t-il, ’à ma connaissance, elle ne fit jamais aucun usage de ce sperme’"
 
"Dr. Rothman was the first to report on the practice. In a paper published in 1980, he described how he retrieved sperm in 1978 from a 32-year-old man who had been hit by a truck and was brain dead.

Shortly afterward, Dr. Rothman got a call from a Boston lawyer whose 15-year-old brother had been shot in the head and was in a hospital that was a three-hour drive from Los Angeles. The boy was the family’s only male heir. No one at the hospital would remove his sperm — they said they thought it would be unethical. And so, the sister asked, would Dr. Rothman do it ?

By the time Dr. Rothman drove to the hospital, the boy had died. He removed the sperm and drove with it back to his hospital in Los Angeles. The family followed him. When Dr. Rothman arrived at his laboratory, he looked under a microscope at the sperm and saw that it was moving.

’’The mother smiled,’’ Dr. Rothman said. ’’There were tears in her eyes. She leaned over, gave me a kiss on the cheek, and tipped me $20.’’

But, he added, ’’to my knowledge, she never used the sperm.’’" (source)

Si on veut rester en amont de ces histoires d’extraction de semence post-mortem, parlons de l’usage militaire des banques de sperme aux USA : en effet, outre-Atlantique, il y aurait plusieurs milliers de "bébés post mortem". Plusieurs veuves de soldats morts en Irak ont utilisé ce mode de procréation. Des soldats ont déposé leur semence dans des banques de sperme avant de partir au front. En 2003, l’une d’elles, California Cryobank, leur offrait même une réduction de 30%. (source)
 
Du sperme en guise de "ruban noir" pour rendre hommage au défunt ? Le Professeur Loisance parle de promotion sur les chrysanthèmes ; ici nous avons une promotion de la California Cryobank. Etrange impression de déjà-vu : le baby boom (comme celui d’après 1945) s’organise désormais avant de partir au front. "Ce souci constant d’évacuer la maladie, la souffrance, la mort explique une réceptivité sans mesure à l’annonce du moindre progrès médical." (Pr. Loisance, cité plus haut). Cela me rappelle une "highway" californienne où, sur un panneau, on pouvait lire, pendant la guerre en Irak : "God save America". Lorsqu’on prenait cette autoroute en sens inverse, à peu près à la même hauteur, on pouvait lire : "America save God".
 
Venons-en à présent à l’affaire Fabienne Justel. Fabienne et son mari, Dominique Justel, souhaitaient un enfant. Se sachant malade, le mari avait effectué des dépôts de sperme au Cecos de leur région (Centre d’Etudes et de Conservation des Oeufs et du Sperme). Mais les conjoints ne savaient pas qu’à la mort de ce dernier, sa veuve ne pourrait pas récupérer les paillettes en vue d’une insémination. Le parquet s’est opposé à la veuve lorsque celle-ci a porté sa demande devant le TGI de Rennes, après s’être heutée au refus du CECOS qui n’a pas accédé à sa demande : récupérer les dépôts en vue d’une insémination post-mortem.
 
Concilier "droit à l’enfant" et "droits de l’enfant" : un exercice difficile :
 
Dans l’Express d’hier, on pouvait lire, au sujet de cette affaire :
"[En France], la loi de 1994 est paradoxale. Tant que la personne est vivante, même si l’on sait qu’elle va mourir, l’insémination est théoriquement possible. Mais dès qu’elle décède, l’insémination devient interdite. Le débat porte donc sur ces cas particuliers. Dans le cas présent, l’époux avait donné son accord. Il faudrait instaurer une ’durée raisonnable’ après la mort du mari, durant laquelle l’insémination resterait possible, dans certains cas uniquement. Il est évidemment hors de question de laisser une femme se présenter dix ans après la mort de son conjoint !

Si l’on procède au cas par cas, un nouveau problème va apparaître, celui du ’droit à l’enfant’ et du ’droit de l’enfant’.

Le problème se pose déjà. Une femme qui a stocké des paillettes en Belgique et vient accoucher de son enfant en France se retrouve avec un enfant considéré comme orphelin alors que du point de vue affectif l’enfant a bien un père ! Dans la législation française, un enfant qui naît plus de neuf mois après la mort du père n’est pas reconnu comme son enfant légitime. Cela pose un problème de filiation et de transmission du patrimoine. Si nous nous orientons vers une autorisation de l’insémination post-mortem, il faudra modifier le droit sur ces points là.

Cela fait plus d’un an que Fabienne Justel a entamé un parcours juridique. Pourra-t-elle obtenir gain de cause ?

Pour être honnête, je ne le pense pas. Mais elle a eu le mérite de soulever le débat. Il faut toujours des cas particuliers pour que des sujets aussi importants soient débattus dans les hautes sphères. Il y a de nombreuses questions fondamentales et quotidiennes qui ne sont pas assez évoquées, bien qu’elles concernent des milliers de personnes : l’euthanasie, l’évolution du consentement dans le don d’organe... Madame Justel bénéficiera très certainement d’un dédommagement pour ’déficit d’information’ mais cela ne lui donnera pas l’enfant qu’elle et son mari ont tant désiré."
 
Et si la justice décidait de lui restituer les paillettes, considerant l’Assistance Médicale à la Procréation comme un ’service’, que Fabienne Justel est en droit d’obtenir dans un autre pays de la Communauté, en Belgique par exemple ? Il y a eu un cas similaire en Grande-Bretagne :
 
"En 2002, l’affaire Diane Blood défraye la chronique ; Son mari ayant contracté une méningite qui l’a plongé dans le coma, Diane Blood sollicite une insémination qui lui est refusée ; elle demande alors à pouvoir exporter le sperme congelé vers la Belgique afin d’y faire procéder à l’insémination. La Cour d’appel lui fait restituer les paillettes, considérant l’Assistance Médicale à la Procréation comme un ’service’, que Mrs Blood est en droit d’obtenir dans un autre pays de la Communauté." (source)
 
Que dit la loi en Belgique ?
 
"En Belgique, où l’implantation d’embryon ou l’insémination post-mortem se pratiquent, chaque centre d’insémination est libre de restituer ou non les gamètes du défunt, pour autant que les parents l’aient expressément précisé. La loi belge prévoit un délai spécifique pour ces opérations, qui ne peuvent avoir lieu ni moins de six mois ni plus de deux ans après le décès." (Source : article cité précédemment).
 
Est-il déraisonnable d’imaginer qu’après une période de deuil de quelques mois, voire d’un an et-demi, la veuve soit en droit de vouloir réaliser, si elle le désire, un projet parental qui avait été partagé, souhaité, par elle-même et par son conjoint, du vivant de ce dernier ? La République (française) est-elle en droit de juger cette demande comme non conforme à l’éthique, a-t-elle une leçon (d’éthique) à donner à cette veuve ?
 
 

 

 

 
 


11 réactions


  • Charles Martel Charles Martel 25 septembre 2009 10:05

    article assez intéressant. néanmoins la république n’est pas là à mon sens pour faire dans le compassionnel mais pour structurer une société via des lois et assurer la justice. Il ne s’agit pas d’éthique à imposer, mais simplement de protéger les plus faibles et conserver un modèle de société pérenne. Aussi, il convient que la loi protège le mort (le plus faible) de toute manipulation ultérieure et non consentie. Le monsieur (qui alors n’était pas marié mais juste concubin) a-t-il signé un document faisant part de sa volonté post mortem ?

    La loi doit également peser entre le droit à l’enfant et le droit de l’enfant. Ce dernier né déjà orphelin, cette situation même si elle peut arriver de manière naturelle est-elle à rendre « systématique » via une loi ? propose-t-on comme modèle de société le besoin personnel d’une femme à avoir un enfant qui naîtra orphelin sans le consentement de son « coup » de l’époque ?
    Ceci étant, dans le cadre d’un contrat légal (mariage par ex) et dun consentement écrit, dans un délai raisonnable et après enquête (pour éviter les manipulations), il faudrait peut être effectivement donner la possibilité d’effectuer cette opération, reste à voir ce que ça doit modifier par rapport aux démarches administratives actuelles.

    Il faut surtout empêcher le seul désir individuel. Un enfant se doit d’être un désir partagé, fruit d’une décision commune.


    • Catherine Coste Catherine Coste 25 septembre 2009 10:47

      Merci pour cet intéressant message. Effectivement, aucune loi ne pourra jamais remplacer la compassion. Sur le point de la volonté « post-mortem » du concubin d’alors :
      Grégoire Moutel, adjoint du laboratoire de la faculté de médecine Descartes à Paris, cité dans l’Express : « On peut penser qu’il y a eu un déficit d’information. Fabienne et Dominique Justel ne savaient pas qu’à la mort de ce dernier, sa veuve ne pourrait pas récupérer les paillettes en vue d’une insémination. Le couple avait pourtant clairement exposé son projet parental et le corps médical savait que Dominique Justel n’avait plus que quelques mois à vivre. Cette loi soulève plusieurs questions, notamment sur la disparité de la réglementation européenne. En Belgique ou en Espagne, le transfert est possible même après la mort du père. S’ils avaient su, les époux auraient très certainement stocké les paillettes de sperme dans un autre pays. »

      Comment faire en sorte que le « droit à l’enfant » ne s’impose pas au détriment des « droits de l’enfant » ? La loi a certainement un rôle à jouer là-dedans.
      Mais il est des cas particuliers, comme celui du couple Justel, vis-à-vis desquels je n’ai pas de leçon à donner. Toutefois : difficile de répondre à la question : le conjoint d’alors voulait-il un enfant post-mortem ?


    • Fergus Fergus 25 septembre 2009 13:09

      Globalement d’accord avec Charles Martel, surtout pour ce qui concerne un enfant qui, in utero, serait déjà orphelin.


    • Mmarvinbear mmarvin 25 septembre 2009 19:46

      Ne risque t-on pas non plus de transformer l’enfant en « lot de consolation » ? En théorie la conception d’un enfant procède d’une volonté double, basée sur l’amour, la confiance et la volonté des deux géniteurs.

      On peut objecter que lorsqu’un époux malade fait congeler sa semence, c’est une façon implicite d’exprimer cette volonté, mais il est également possible que ce dernier change d’avis pour une raison ou une autre, et qu’il n’ait pas eu le temps ou la possibilité matérielle d’exprimer devant témoin ce revirement.

      Dès lors, user de la semence contre sa volonté ne constitue t-il pas une forme de viol ?

      Pour le cas présenté, rien ne permet de dire que ce serait le cas. De toute façon, ayant pris maître Collard, cette pauvre femme est quasiment certaine de perdre sa cause...


  • Jojo 25 septembre 2009 11:32

    Bonjour et merci pour votre article.
    Je cherche à me faire une idée plus précise et je m’interroge comme vous sur la question du quand ?
    Je vous cite :
    Il faudrait instaurer une ’durée raisonnable’ après la mort du mari, durant laquelle l’insémination resterait possible, dans certains cas uniquement. Il est évidemment hors de question de laisser une femme se présenter dix ans après la mort de son conjoint !
    Pardon mais je pense que c’est irrecevable, d’abord parce que la notion de ‘raisonnable’ est toute relative et en tout cas rarement consensuelle. Ensuite et dans l’hypothèse où l’interdiction serait levée, qui décidera qu’après 10 ans c’est (je cite toujours) : é-vi-de-mment hors de question). Pourquoi donc ? Et elle serait où une telle évidence ? Avec des arguments je veux dire, pas parce que vous auriez simplement du mal à l’envisager si la durée était plus longue. Vous savez certains de nos semblables changent d’avis toutes les minutes, pendant que d’autres passent soixante ans à essayer de réaliser le même projet…
    Le législateur belge non plus n’y a pas échappé :
    « La loi belge prévoit un délai spécifique pour ces opérations, qui ne peuvent avoir lieu ni moins de six mois ni plus de deux ans après le décès. »
    Pas moins de six moins, je présume qu’ils ont dû se dire que la veuve n’a pas encore à ce moment là, la tête suffisamment froide (sans jeu de mots morbide), pour prendre une décision aussi importante et aussi lourde de conséquences pour elle, pour l’enfant à naître et pour la société qui l’aura autorisé. C’est un point de vue, mais discutable aussi car depuis quand est-ce qu’on peut définir une durée de deuil normalisée et certifiée ISO truc et qui serait grosso modo valable pour tous ? Sans aller jusqu’à évoquer celles dont la vie est définitivement cassée à la mort de l’autre, qu’en est –il de celles qui des années après la mort de leur conjoint, ne s’en remettent toujours pas. Et dans l’autre sens, de celles qui projettent froidement de mettre au monde un héritier d’un blaireau qu’elles n’auront jamais blairé.  
    Ensuite, pas après deux ans qu’ils disent les belges. Et pourquoi donc derechef. A deux ans moins un jour, c’est légal, aux douze coups de minuit, c’est hors la loi… J’ai connu des lois plus … durables et moins comment dire, cendrillonesques …
    En conclusion et dans l’hypothèse où l’interdiction serait levée, le législateur ne pourra pas faire autrement que de fixer comme les belges une durée de validité et quelque soit icelle, elle sera … indéfendable.
    Admettons Monsieur à quoi pensez-vous ? Moi ? A rien, c’était Papy Mujo pour faire avancer le chinimli inimli.
    PS : Autant te prévenir chérie (non je ne parle pas à l’auteur, je n’oserais jamais voyons. C’est évidemment à ma moitié que je m’adresse) : N’y pense même pas…


    • Catherine Coste Catherine Coste 25 septembre 2009 12:42

      Excellent !
      Je me rappelle que le généticien Axel Kahn s’est penché sur le problème, et avait, comme vous, parlé d’une nécessaire période de deuil servant de temps de réflexion.

      Effectivement fixer des temps à valeur légale relève de l’arbitraire.

      Mais là où les Espagnols veulent que la veuve se décide dans les six mois (où est passée la période de deuil ?), les Belges laissent une « fenêtre d’opportunité » allant de 6 mois à 2 ans. Cette « temporalité » serait « indéfendable », dites-vous.

      On en revient toujours là : comment inscrire la compassion dans la loi ? Aucune loi ne pourra jamais remplacer la compassion.

      Au passage, bravo pour le style de votre message, qui a le don d’insuffler un peu de vie et de rire au guichet du bureau des pleurs smiley


    • Jojo 25 septembre 2009 13:34

      Merci pour votre commentaire, mais ne vous y trompez pas : Votre article et la réflexion qu’il y a derrière sont tellement impressionnants, qu’il ne me restait plus que l’humour pour oser m’adresser à vous en espérant éviter le ridicule smiley.
      Mes respect Madame, chapeau bas et merci encore ! 


    • Fergus Fergus 25 septembre 2009 13:14

      Intéressante, votre remarque, Chantecler. Car ce cas n’existe pas sur le plan juridique. Il pourrait par conséquent donner lieu, si un jugement positif était rendu, à de longues batailles juridiques.


  • Jean-paul 25 septembre 2009 13:12

    Une solution ,eviter les complications de la loi francaise et aller a l’etranger .


    • saint_sebastien saint_sebastien 25 septembre 2009 17:25

      exactement mais avec les risques que cela comporte avec l’administration française une fois de retour sur le sol français.




  • Mmarvinbear mmarvin 25 septembre 2009 19:50

    Le plus simple, c’est quand même pour la femme de faire son deuil, de recommencer une autre vie, de faire une nouvelle rencontre et de faire un enfant qui aura un père présent. Je me demande ce que pensera de lui le gamin qui découvrira que son papa est mort plus d’un an avant sa naissance, et que donc forcément il n’aura pas été conçu par une volonté mutuelle.

    C’est si fragile psychologiquement...


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