samedi 27 juillet 2013 - par jack mandon

Ballade en quête de liberté

(MobiusAnime)

 

Reconnaissance des lieux.

« Je suis le ruban de Moëbius, une figure abstraite, un symbole mathématique.

Le monde onirique dans lequel j'évolue est absolument clos, et pourtant mon univers est infiniment ouvert. Il fallut que la libre intuition d'un savant se manifesta, savant dont je porte le nom, pour que je naquis dans la complétude. En effet, après une longue gestation le cordon ombilical fut sectionné. Suivit un mouvement de torsion de ma section à 180°, et finalement soudé à mes deux extrémités, j'arborais ma forme dynamique infinie.

 

Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable de neige
J’écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom

Dans cette volute rationnelle en forme de vaisseau spatial, on retrouve l'idée de cercle, d'éternel retour, mais aussi l'idée d'inconscient. Ainsi Lacan reprend souvent dans ses séminaires l'image du ruban de Möbius, qu'il compare au noeud borroméen. Cette bande "qui n'a pas d'envers, dont l'endroit continue l'envers" permet à Lacan d'évoquer l'inconscient.

Inconscient et conscient, mais aussi réel et virtuel sont intimement liés. Le ruban de Moëbius, comme le rêve est un espace de liberté et d’interrogation, Il n'a pas de bord, une seule face, un seul côté, interface et intercession. Continuité et passage. Les bords infinis du rêve. Le rêve équivoque, on veut le séparer du réel, le distinguer. Peut on distinguer le rêve du réel ? A quel moment le réveil se distingue-t-il du rêve ? Le rêve nous ramène du côté de l'entrée dans la vie, c'est une intelligence du monde.

La philosophie puise sa source dans le rêve

C'est René Descartes, le fondateur du rationalisme moderne qui théorisera l'émergence de la raison des limbes oniriques. « Ni l'autorité des Anciens, ni les vérités sensibles ne constituent des principes de recherche. »

Descartes avait fait une expérience du rêve en 1619, alors qu'il était âgé de 23 ans, au cours d'une nuit mémorable. Les trois rêves qu'il avait faits (fiches 44 à 46) l'avaient profondément marqué, au point qu'ils orienteront sa vocation et qu'il en gardera le récit sur lui durant toute sa vie.

Dans la première Méditation, il conclut qu'il n'y a guère de différence significative entre l'état de veille et le sommeil. Toutefois, sa réflexion progresse et, dans la sixième, il reconnaît entre ces deux états une différence essentielle, qui réside dans la mémoire et la liaison des faits cognitifs et des images mentales.

« L'illusion est mère de tous les états de conscience » Alain

Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom

Sur chaque bouffées d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom

Poursuivre la méditation en évoluant en toute liberté dans le ruban c'est permettre au rêve d'ouvrir toujours la possibilité d'un avenir. Vivre l'intemporalité.

(mobiusescher)

Bergson, qui fut un peu le philosophe du rêve parle du rêve comme étant le « souvenir du présent et la nostalgie de l'avenir, le futur antérieur. » La philosophie puise sa source dans le rêve. Le philosophe qu'il était affinait cette vision.

Dans cette course impromptue, le rêve est réel et le réel est un rêve. Pas de vie humaine sans rêve, et pas de jour sans souvenir de rêve. A l'état de veille, rêve et réalité s'entremêlent dans une action discontinue. Le rêve est prisonnier d'une réalité qu'il reconfigure. Les grands rêves traumatiques s'invitent et le cauchemar fracasse la vie du rêveur. Vise-versa, le rêve nous invite aussi à sortir d'un trauma.

Le rêve est intemporel, c'est un signal. Rêver, c'est mettre la raison en sommeil.

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom

Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes raisons réunies
J’écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom

L'interprétation des rêves fascine depuis la plus profonde antiquité. La grille de lecture qu'il offre est un immense creuset, un réservoir sans fond, le vivier du collectif humain. La puissance poétique du rêve n'est pas entamée par le désir de l'analyser. J'ai mêlé intentionnellement la volute de Moëbius à l'évocation de la liberté selon Eluard, au mélange ludique du réel et du rêve. Le ruban référentiel, par l'interrogation qu'il suscite, nous engage dans un rêve éveillé. Cette volute magique n'a pas de bord, possède une seule face, un seul côté.

Interface et intercession, comme le rêve, elle représente un processus d'intercession, de continuité et de passage. Les bords infinis d'un rêve. L'équivocité semble de même nature. On voudrait séparer le rêve du réel, le différencier. Mais nous est il possible de distinguer le rêve du réel ? A quel moment le réveil appartient-il toujours au rêve ?

« Le rêve nous ramène du côté de l'entrée de la vie, le rêve est une intelligence du monde » « Intelligence du rêve » Anne Dufourmantelle.

Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom

Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer ...Liberté

Paul Eluard, Poésies et vérités, 1942

Cette vision onirique et vénusienne de la liberté est l'enfant naturelle de celle, plus martiale préconisée par F. Nietzsche, dans le Crépuscule des Idoles, § 38

A l'instar des grands livres religieux qui instaurèrent la tyrannie et la misère en proférant la la gloire de Dieu et la liberté, Nietzsche ne fait pas exception à la règle. Il eut fallu méditer sur le caractère du guerrier avant de s'engouffrer dans la guerre moderne, rationnellement destructrice et complètement inique.

La liberté pour Nietzsche est liée au caractère guerrier. Elle est la volonté de répondre de soi. « C'est devenir plus indifférent aux chagrins, aux duretés, aux privations, à la vie même... Liberté signifie que les instincts virils, les instincts joyeux de guerre et de victoire, prédominent sur tous les autres instincts, par exemple sur ceux du "bonheur". L'homme devenu libre, combien plus encore l'esprit devenu libre, foule aux pieds cette forme méprisable de bien-être réaliste et immédiat. L'homme libre est guerrier. A quoi se mesure la liberté chez les individus comme chez les peuples ? A la résistance qu'il faut surmonter pour rester en haut. Le type le plus élevé de l'homme libre devrait être cherché là, où constamment la plus forte résistance doit être vaincue : à cinq pas de la tyrannie, au seuil même du danger de la servitude... Premier principe : il faut avoir besoin d'être fort, autrement on ne le devient jamais. » La présence séculaire du guerrier amérindien donne sens à cette vision contemporaine. C'est pour moi un des seuls concepts qui honore la pensée de Nietzsche.

Le Guerrier est vertical et présent. C’est l’intelligence du corps, l’expression moderne de la fonction sensation, kinesthésique, la perception au monde à travers les cinq sens, l’attention au réel, au présent. C’est le fondement de la personnalité. Un homme qui pose en lui la présence du guerrier intérieur sécurise son environnement, il dit ce qu’il fait, il fait ce qu’il dit. Il est assimilable à la fonction sensation qui positionne, ancre, affirme, structure, l’épine dorsale de la vie, le bon sens terrien, l’oxygénation des cellules, le mouvement, la santé du corps. « Une âme saine dans un corps sain. » Un sportif de haut niveau est pourvu d’un guerrier intérieur de qualité, mais aussi toute personne bien dans sa tête, animée de projets dans tous les domaines. La vie est affrontée comme un défi, dans un profond respect de la nature...La métaphore mobiusescher)



306 réactions


  • jack mandon jack mandon 27 août 2013 08:02

    Selena,

    Pour être contre cet article, qui au demeurant est celui d’une femme,
    il faut être idiot ou avoir peur du gourou.
    En fait, je dois me confesser, mon nom n’est pas J. M.
    mais garou garou, je suis l’incarnation du héros de « Passe muraille »
    Marcel Aymé ...surtout, c’est un secret entre nous.

    Merci pour vos enquêtes, je vous apprendrez à passer les murailles.


  • jack mandon jack mandon 27 août 2013 18:29

    J’apprendrais...à vous bien sur, une de plus


  • jack mandon jack mandon 28 août 2013 19:32

    Selena bonsoir,

    Très heureux que nous formions une famille.
    Récapitulons, j’appelle Alinea, petite soeur,
    en toute logique elle me nomme grand frère.
    Alinea est rationnelle même si elle flirte avec l’astrologie.
    Il faut bien qu’elle soit féminine quelque part.
    Je suis votre petit frère ? peut être à cause
    de mon humour à deux balles.
    C’est à dire que dans le virtuel, et à travers les mots spontanés,
    vous percevez mon enfant intérieur...c’est réciproque.
    En attendant, vous êtes mon amie.
    Notre enfant intérieur est au coeur du divin,
    Devenez comme des enfants disait Jésus et vous connaitrez Dieu.
    c’est précisément cette sensibilité là qui est attaquée
    avec véhémence dans la forme de communication
    qui nous est tellement difficile. Une preuve supplémentaire
    que le spectre du mal est le prince de ce monde.
    C’est vrai que vos textes sont aussi un peu décalés,
    normal, nous avons le même état d’esprit.
    Au fait, aimez vous les promenades en montagnes,
    trois à six heures de marche en moyenne montagne ?
    La dernière que nous avons faite faisait au moins dix heures.
    Sachez qu’une chambre d’ami vous est offerte. pour 2 personnes,
    si vous le désirez. Au fond nos deux paysages sont similaires,
    le votre peut être moins urbanisé. A partir de 1000 m.
    on a de toutes façons le contact avec une faune authentique.
    Et la Suisse veille à l’écologie des lieux.

    Merci pour le clin d’oeil de tendresse.


    • lunatisme interposé 28 août 2013 22:35

      Bonsoir Selena, bonsoir Jack,

      permettez-moi de m’interposer entre vous smiley.

      Je rougis de vous faire loucher, alors
      j’emprunte ce fil qui se veut être un partage déroulant, déroutant...

      Votre humour à deux balles, garou garou, j’aime beaucoup,

      « Agoravox est authentiquement la représentation d’un mal généralisé. »

      Gare au gorille ou crions au loup ?

      AgoraVox est aussi la représentation de nous, de notre société,
      peut-être même une des plus représentative de part sa diversité citoyenne,
      dans la mesure ou celle-ci soit encore en mesure de se diversifier.

      Est-ce vraiment le mal qui se voit généraliser ou le bien que l’on croit s’amoindrir ?

      Ceci dit, je vous donne raison, les voies dissonantes s’imposent et les enjeux disposent.

      Selena, vos mots ci-dessus, miaou, l’encrier a des secrets que je ne chercherais pas à percer.

      "Viens, mon beau chat, sur mon coeur amoureux ;
      Retiens les griffes de ta patte,
      Et laisse-moi plonger dans tes beaux yeux,
      Mêlés de métal et d’agate.

      Lorsque mes doigts caressent à loisir
      Ta tête et ton dos élastique,
      Et que ma main s’enivre du plaisir
      De palper ton corps électrique,

      Je vois ma femme en esprit. Son regard,
      Comme le tien, aimable bête
      Profond et froid, coupe et fend comme un dard,

      Et, des pieds jusques à la tête,

      Un air subtil, un dangereux parfum

      Nagent autour de son corps brun.« 

      Charles Baudelaire

       
      Le chat n’est-il pas un animal lunatique par excellence ?

      N’oublions pas ce que disait cet Albert au sujet des préjugés,
      mais souvenons-nous qu’il disait surtout cela :

       »N’essayez pas de devenir un homme qui a du succès.
      Essayez de devenir un homme qui a de la valeur
      .« 

      La valeur, voilà bien un mot qui en perd.

       »Et même dans les coins d’articles, on se retrouve avec des -1« 

      Puis-je sereinement passer un amical bonsoir à ce moinsseur bien-veilleur ?
      Puisse-t-il justifier à l’occasion cet acte de répréhension
      par un petit mot moins sournois que ses clics hâtifs,
      qu’il se verrait gratifier de mon humble merci. smiley

       
      Vos textes kiss aux nours, qui s’honorent de part votre plume,
      viendraient à manquer autant à nos yeux, qu’à leur raison sur AG.

      Dites-moi, pourquoi dont ce »jeu" et ces plaisirs risqueraient-ils de ne point durer ?

      Endurer les pages et les articles indélicats, pour retrouver ici bas vos mots si délicats, est un effort pour lequel mes forces ne sauraient s’escompter.

      Bonne soirée.

      P.S : Cette image vous convient-elle ?

      La métaphore est proche du réel, des croissants vous ramènerais-je.
      Jack, si vous avez une préférence pour d’autres mets matinaux, passez commande,
      votre humour (d’esprit) est le bienvenu sur mon lunatisme ambivalent.


  • jack mandon jack mandon 29 août 2013 07:54

    Séléna-Lunatisme interposées

    Dans l’antre de la nuit, Sélène, Perséphone, Coré, Héra, Déméter, Artémis, Hécate,
    dans une ronde endiablée, ordre et désordre chronologique du sens et des sens,
    Eros emporté s’abandonne aux volutes, aux lunaisons de l’espace et du temps.


  • jack mandon jack mandon 29 août 2013 08:05

    Correction entre deux quartiers lunaires,

    Séléna-Lunatisme interposées

    Dans l’antre de la nuit, Sélène, Perséphone, Coré, Héra, Déméter, Artémis, Hécate,
    dans une ronde endiablée, ordre et désordre chronologique du sens et des sens,
    Eros emporté s’abandonne aux volutes, envouté, aux lunaisons de l’espace et du temps.


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