lundi 17 octobre 2011 - par Pierre JC Allard

16 octobre. PS... comme post-scriptum

Quand les jeunes bobos que le Club Med amene en Grèce pour y retrouver l’esprit de Byron font la croisiere-excursion à Mykonos, on leur fait chanter « Haut-les mains  » sur le pont du rafiot, histoire de les préparer au pire, puis les G.O les remettent sur le quai entre les mains palpeuses ou avides des vendeurs de breloques ou de rêves, avec quelques admonestations. « Ne ratez pas les lions de Delos !... Ne buvez pas d’eau fraîche !... Écrivez à vos amis

Le jeune bobo docile visite trois ou quatre boutiques, laisse tomber les lions parce que la houle le fatigue, coupe son ouzo d’eau embouteillée Loutraki, puis écrit des cartes postales… Pour les lions, il écrira qu’il les a vus ; quand on a les images, toutes ces vieilleries se ressemblent. Pour les cartes postales ? N’importe quoi, mais dire en P.S qu’il fait beau.

Brel disait que les toros s’ennuient le dimanche… Mais qu’est-ce qu’on fait en France, les dimanches de primaires, pour retrouver l’esprit de Jaures ? Peut-on laisser tomber les éléphants - toutes ces vieilleries se ressemblent - et se risquer à des idées fraîches ? Que non ! Dans un premier temps, il faut bouter hors du frigo l'eau Montebourg et tout ce qui n’est pas stérile et en bouteille. Ensuite, s’en remettre aux Gentils Organisateurs qui conduiront au meilleur vendeur de breloques. Juste ne pas oublier de dire en post-scriptum qu’on est socialiste…

16 octobre 2011, hold-up consommé et passage à la déchiquetteuse de la "pensée de Gauche". Hollande, c'est un pas vers le Centre et donc un pas vers la victoire. Il fait beau au PS. Mais pour ceux qui font de l’arithmétique, ca laisse un peu songeur…

Songeur, parce que la « Gauche de la Gauche  » - qu’on croyait moribonde et que Melenchon devait aller enterrer après un baroud d’honneur - renaît avec Montebourg, qui n’a pas une tronche assez stalinienne pour faire peur, faisant craindre que le vote du PS ne se scinde bien plus également qu’on ne l’aurait cru entre ceux qui ne font que parler de socialisme et ceux qui en voudraient tout de même un peu. Un repartage qui change tout…

Vous pouvez deviner ce qui se passera, en mai 2012, si tous ceux au PS qui sentent que la limite de la Gauche passe entre eux et Hollande votent pour Melenchon et que les Gauchistes en France se répartissent également entre PS et Front des Gauches ? 

Si vous avez répondu « Oui », mettez le bonnet d’âne, car on manque encore de données pour résoudre cette équation… Mais on peut déjà identifier deux (2) scénarios, dépendant de deux (2) grandes inconnues qui pourraient faire une différence.

La première inconnue, c'est la possible émergence météorique au Centre d’un candidat présidentiel crédible. On ne réalise pas à quel point, avec l’internet et le discrédit des médias, l’électorat est devenu volatil. Au Québec, il y a quelques mois, 50 % des électeurs ont modifié leur intention de vote dans les deux (2) dernières semaines de la campagne électorale  ! 

Et ça, sans même une événement déclencheur significatif. On a changé pour changer. On manquait d’idées neuves, d’espoirs de progrès, d’admiration et même de respect pour les leaders en place… Une étincelle qu’on ne peut même pas identifier a mis le feu à ce maquis qui était trop sec. L’internet a été le mistral qui a fait le reste. Toute la "sagesse politique conventionnelle" a brulé.

C’EST LA MÊME CONJONCTURE QUI PRÉVAUT AUJOURD’HUI EN FRANCE.

Une occurrence encore plus plausible en France, car alors que le Premier Ministre canadien est ce qui ressemble le plus a un dictateur dans nos démocraties, la séparation des pouvoirs entre l’Assemblée et le Président, en France, permet en principe de séparer ce dernier du quotidien et de l’intendance. De l’élire sur la base de grands principes et donc de voter avec son cœur. De chercher, surtout, un homme qui soit un arbitre au-dessus des partis. 

C'est ce que voulait de Gaulle. C’est la création d’un parti comme l’UMP, systématiquement inféodé au Président, qui est un dévoiement évident de l’esprit de la Cinquième République. Il suffit donc d’un moment de réflexion, pour que le citoyen se fasse une toute autre idée de la Présidence et ne cherche plus à la confier à un homme prisonnier d’un idéologie, mais à un libre-penseur politique.

Où vivent les libres-penseurs politiques ? Le métacentre de la pensée politique citoyenne en France est au Centre-droit. C’est là que le poids des intérêts acquis intersecte la ligne des pressions sociales. Joly, Bayrou, Cohn-Bendit, Villepin, Borloo, Asselineau, Dupont-Aignan et d’autres… Une campagne médiatique ou un simple engouement découlant d’une déclaration ou d’un geste populaire peut en transformer l’un ou l’autre en une " jument verte", en un Parsifal, et en faire un favori" : un Golem qui bouffera crû les Sarkozy et Hollande dont le charisme est, disons… imparfait.

La deuxième inconnue, c'est la réaction des Puissants, des « 147 » commanditaires de l’ordre établi qui sont le vrai pouvoir et donc aujourd'hui derrière l’UMP. Si Nicolas Sarkozy ne remonte pas dans les sondages, ON pourrait lui suggérer de prendre - « pour raison de santé », ou cédant aux objurgations de son épouse - la retraite bien méritée à laquelle il ne s’est pas caché d’aspirer.

On verrait alors toute la géniale stratégie de la droite qui, en concentrant depuis des années toutes la critique sur le bouc émissaire-chef Sarkozy et quelques figures emblématiques de la corruption ou de la bêtise, a laissé pratiquement vierge le dossier de l’UMP. Qui est vraiment faché contre Fillon ou Copé … ou n’importe qui de la Droite qui n'est pas mouillé dans un scandale ? La seule Droite méchante, c’est Le Pen, tout le monde l’a dit…. Imaginez la superbe ironie si l’UMP organisait des primaires…

Deux scénarios surprenants ne sont donc pas à écarter. a) Celui d'un candidat hors-parti - comme Asselineau apportant sa compétence ou Villepin apportant son charisme - apparaissant de nulle part pour saisir la présidence sur un coup de coeur des Français ; b) Celui d'une UMP se donnant un autre candidat ... et apparaissant cyniquement comme un "renouveau sans rupture" pour faire suite à la rupture... sans renouveau.

Avec ces scénarios et les inconnues qui les sous-tendent, avec les canons "Segolene" et "Montebourg" en libre déferlante sur le pont, avec son candidat Hollande (rose beige vraiment très pâle), on se demande ce que que va faire maintenant le PS pour demeurer intéressant cet hiver. Sera-t-il même au deuxième tour en 2012 ?

Si j’écrivais ce soir à maman, de Mykonos, je dirais qu’il semble faire beau, mais qu'il y a une méchante meltemi  qui pousse les nuages à l’horizon... Je jurerais, surtout, que PS veut dire « Post Scriptum » et pas autre chose. Car au-dela des mots, on ne sent pas de socialisme dans l'air rue Solférino.

Pierre JC Allard



13 réactions


  • Robert GIL ROBERT GIL 17 octobre 2011 11:40

    Les socialistes font partie d’une famille politique qui a accompagné le libéralisme.
    Le PS a favorisé son avènement par ses capitulations successives et ses décisions
    qui ont libéré les flux financiers. Il a mis en oeuvre une politique qui a été douce
    pour les détenteurs de stock-options, qui a privatisé à tour de bras, qui a oeuvré avec
    zèle pour l’Europe du libre-échange et de la finance toute puissante. Au
    gouvernement, les socialistes font des cadeaux de riches aux riches et des cadeaux
    de pauvres aux pauvres. Seulement les cadeaux pour les pauvres ne durent jamais
    très longtemps et la contrepartie est toujours douloureuse ! Lire :

    http://2ccr.unblog.fr/2011/06/10/rigolo-socialo-ecolo-bobo/


    • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 17 octobre 2011 21:41

      @ RG


      Le socialisme comme concept proposait une alternative à la concurrence entre individus selon les lois du marché comme moteur de production pour la satisfaction des besoins. Cette alternative supposait une planification des ressources et le socialisme s’est vite scindé entre ceux qui voulaient confier à l’État cette planification et ceux qui voulaient laisser les individus le faire en les astreignant a certaines normes.

      Ceux qui voulaient jouer la carte de l’État on assumé une dimension politique, ont pris le pouvoir et ont été vaincus militairement ou par la corruption. Ceux qui voulaient un socialisme "soft’ de compromis ont progressivement été intégrés comme une simple option secondaire d’un système demeurant essentiellement capitaliste.
       
      Le socialisme est une grande bataille qui a été perdue. Le PS français se situe aux derniers jours d’une séquelle de combat d’arrière-garde que le socialisme perd encore chaque jour. De socialiste il ne garde que le nom... qui est bien trompeur.  Si on veut plus de justice sociale et un meilleur partage de la richesse, il faut tout reprendre à la base et en prenant acte que le monde a changé. On doit le faire, mais il serait honnête au moins de changer de nom.



      PJCA





  • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 17 octobre 2011 14:05

    Cher Monsieur,


    Votre analyse sonne très juste. Je la partage :

    - Un outsider, candidat hors parti, libre de toute inféodation et incarnant le rôle d’arbitre au-dessus des factions politiques.
    - Un candidat qui pourrait surgir d’un pronunciamiento interne, sur les débris de la coalition hétéroclite , surannée, délégitimée que représente l’UMP.

    Bien à vous,

    Renaud Bouchard









  • Fergus Fergus 17 octobre 2011 16:10

    Bonjour, Pierre.

    Je ne crois pas à un scénario autre que l’opposition PS-UMP en 2012.

    Le PS est désormais quasiment en ordre de bataille et, bien que je le regrette (je vote Mélenchon), il n’a pas grand chose à craindre sur sa gauche, eu égard d’une part à la sociologie française de moins en moins gauchisante et à une attente de victoire, exacerbée après 3 échecs, qui passera largement par un vote utile de 1er tour.

    Quant à l’UMP, elle n’a ni candidat ni programme et, sauf coup de théâtre dans les toutes prochaines semaines au vu de sondages toujours aussi calamiteux, il sera très vite beaucoup trop tard pour envisager une candidature alternative. A moins que Sarkozy jette lui-même l’éponge pour ne pas courir le risque d’être sévèrement battu, mais alors il précipiterait la droite dans une crise sans précédent.

    Un mot sur des gens comme Asselineau et Villepin : le premier est intéressant mais inaudible ; quant au second, il est plombé par sa médiocre gouvernance et l’affaire des mallettes, comme quoi bien parler et jouer de sa crinière n’est pas suffisant !

    Reste Bayrou, mais il va cette fois souffrir de la candidature de Hollande : le Corrézien devrait attirer à lui de nombreux électeurs séduits par sa modération ; qui plus est, Bayrou ne dispose d’aucun appareil.

    Cordiales salutations.


    • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 17 octobre 2011 22:18

      Bonjour Fergus


      Je désespérais d’être en désacccord avec vous. ! Ici, nous le sommes, car vous croyez que le clivage entre partis va se poursuivre sur son erre, alors que le pense qu’il va disparaître brutalement.

      Pourquoi ? Parce qu’on ne voit plus que des variantes cosmétiques entre les programmes dits de « ’gauche » ou de « droite » et qu’on voit bien au contraire, que la France se divise plutôt en deux strates superposées dont l’une est cent fois l’autre par son nombre et celle-ci cent fois la première par sa richesse. C’est la situation d’avant 1789.

      Dans ce contexte, je crois que la France va se chercher un sauveur. Conditionnée de longue date à la « démocratie », elle va d’abord chercher un ’Chef" dans les cadres que permet la République. Celle-ci lui en donne un bon ersatz dans la fonction de Président. Je pense qu’on va élire un Président CONTRE les partis

      Apres il y aura les Législatives et on cherchera un équilibre... mais de ça nous aurons l’occasion de reparler. Quand les grenouilles veulent un roi, elles ne cherchent pas une grosse grenouille... Je ne crois pas que les gens aient besoin de comprendre Asselineau en détail pour lui faire confiance qu’il saurait ou aller.  

      Je crois qu’il serait bien indulgent avec Villepin, pour le plaisir de s’offrir un président dont il sont fiers pour remplacer celui dont ils ont tellement honte. Je donnerais un mois de ma vie pour entendre Villepin aux Nations Unis dénonçant l’atlantisme, la BCE, les invasions barbares au Moyen Orient et énonçant une politique nationale... ou européenne comme seule la France pourrait en faire une a l’Europe.


       PJCA



    • Furax Furax 17 octobre 2011 23:08

      "Je donnerais un mois de ma vie pour entendre Villepin aux Nations Unis dénonçant l’atlantisme, la BCE, les invasions barbares au Moyen Orient et énonçant une politique nationale... ou européenne comme seule la France pourrait en faire une a l’Europe."

      Vous nous donnez plus à rêver que François Hollande !


    • Fergus Fergus 17 octobre 2011 23:23

      Bonsoir, Pierre.

      Sur l’évolution des clivages, vous avez probablement raison... trop tôt. Sans aucun doute ira-t-on vers un nouveau schéma de sociologie politique. Mais je ne crois pas que tout cela puisse évoluer de manière significative d’ici à la présidentielle de 2012, eu égard à l’inertie de cette sociologie. Sauf évènement spectaculaire susceptible de redistribuer les cartes.

      Cordialement.


    • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 17 octobre 2011 23:36

      @ Furax


      Les rêves ont ceci de bon qu’ils nous précèdent toujours... On va plus vite, ils en font autant. Mais si on arrête, ils continuent... ils nous distancent et, quand on ne les voit plus, on cesse d’y croire et ils s’évanouissent.


       PJCA

    • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 18 octobre 2011 00:40

      @ Fergus


      L’Histoire change son rythme. Quand j’étais enfant et que j’écoutais les nouvelle de la guerre, je me souviens de m’être demandé de quoi pourraient parler la radio, les journaux et les gens quand viendrait la paix...  Quand la paix est venue j’ai compris : quand il ne se passe rien d’important, les gens disent n’importe quoi. 

      Au début on s’aperçoit qu’ils disent des niaiseries... puis on s’habitue et on en vient è mettre la même attention sur la consécration de l’Église de Ste-Emilie-de-l’Énergie qe’on en aurait mis quelques années plus tôt sur la bataille de Stalingrad.

      Aujourd’hui on a l’impression qu’il faudrait des années pour changer les moeurs et habitudes électorales des Français, mais en période de crise tout s’accélère et vous verrez peut-être que tout ça ne prend que quelque jours... je vous mets un lien vers le compte rendu de ce qui se passait quand tout allait vite. Hallucinant


      Si vous lisez l’anglais, je vous mets en divertissement un texte humoristique décrivant ce phénomène à l’envers : Comment compliquer les choses jusqu’a ce que plus rien ne se fasse


  • bernard29 bernard29 17 octobre 2011 17:24

    deux scenariis qui ne tiennent pas la route.

    1) Joly, Bayrou, Cohn-Bendit, Villepin, Borloo, Asselineau, Dupont-Aignan et d’autres… Une campagne médiatique ou un simple engouement découlant d’une déclaration ou d’un geste populaire peut en transformer l’un ou l’autre en une «  jument verte », en un Parsifal, et en faire un favori« .  vous rigolez là ??? un coup de coeur des français ??, c’est vraimant bien mal connaître les pesanteurs de la sociologie électorale française..

    2) Si Nicolas Sarkozy ne remonte pas dans les sondages, ON pourrait lui suggérer de prendre sa retraite... » 
    ça oui ça aurait pu être envisageable. Encore eut ’il fallu que les deux remplaçants possibles Juppé et Fillon se positionnent dès maintenant. Or Fillon se lance dans la bataille de Paris, et Juppé a trop « d’absences » même s’il reconnu commme « Homme d’Etat » selon certains. C’est qd même la vieille école. 

    La vraie inconnue concernant Hollande c’est de savoir si l’adage « La fonction fait l’homme » sera respecté. Et à mon avis, il peut y avoir de bonnes surprises.


  • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 17 octobre 2011 23:10

    @ Bernard29


    Vous et Fergus ci-haut connaissez de bien plus près que moi les traquenards de la politique française, mais les Français ont dit Oui à de Gaulle et avant lui à Napoleon, à Louis-Napoléon.. Il ne me semble pas qu’il faille écarter l’option d’élire un président d’arbitrage, pour favoriser une gouvernance d’Union Nationale  et faire face à la crise sans agendas partisans

    Si on ne le fait pas, de cette façon, sans désordres, sans coup d’État ni bouleversements constitutionnels, qui sait si on ne devra pas le faire sous la pression d’une rue devenue impatiente. On verra bien, car cet hiver pourrait être long...

    PJCA

  • JacquesLaMauragne JacquesLaMauragne 19 octobre 2011 10:45


    @ Pierrejcallard

    J’ai comme l’impression que vous n’avez jamais lu le Projet Socialiste pour 2012 qui ne fait QUE 57 pages.....On dirait même que vous ne savez même pas qu’il existe !

    Avez-vous seulement lu « Le rêve français », aux Editions Privat par un certain...François Hollande ???

    On dirait même que vous ne savez pas que ce livre existe.

    Bonnes lectures, mon Cher ,

    jf.


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