lundi 28 décembre 2009 - par GHEDIA Aziz

Albert Camus : une histoire de malentendus

Le journal algérien « El Watan » a consacré, dans son édition du vendredi 25 décembre, une page spéciale à Albert Camus.

Les deux journalistes Adlène Meddi et Ahmed Tazir ont commencé d’abord par une petite virée au quartier de Belcourt qui a vu grandir Camus. Là, ils ont questionné les habitants du quartier ou des passants qui flânaient sur l’avenue Belouizdad. Mais, oh ! Surprise ! Personne n’avait entendu parler de Camus.

L’image de Camus, jeune étudiant à la fac d’Alger ou gardien de but au Racing d’Alger, s’est, au fil du temps, effacée de la mémoire des plus vieux. Quant aux plus jeunes, ils ne lisent pas. Alors … Camus ? Ça ne leur dit vraiment rien. Acteur, chanteur de Rock ‘n roll ou danseur d’opéra ? Personne n’était en mesure de dire qui était cet homme. Nul n’était en mesure de prononcer ne serait-ce que ces quelques syllabes « é cri vain ». A dire que la seule préoccupation de nos jeunes aujourd’hui c’est le pain quotidien et rien que le pain quotidien. La nourriture de l’esprit, on s’en fout éperdument ! La culture, la littérature, le prix Nobel, tout cela n’intéresse pas grand monde. A Belcourt ou ailleurs. Mais, peut-on les blâmer pour ça tout en sachant que ceci est le résultat d’une école sinistrée ? D’un système éducatif qui n’en finit pas avec ses réformes. En fait, personnellement, je ne blâme pas ces jeunes-là. S’ils ne connaissent pas Camus c’est parce qu’à l’école on ne leur a pas enseigné Camus mais plutôt des poètes de la période préislamique tels que…non, honnêtement, pour ces deux-là, Abou Nouas et El Mutanabbi, j’hésite moi-même à les classer dans une époque précise. Appartiennent-ils vraiment à la période ante islamique comme je viens de le dire ? A l’époque fatimide ? Ou Abbaside ? A dire vrai, je n’en sais rien, j’ai oublié, et je n’ai pas envie de me ré encombrer encore l’esprit avec ces deux lascars de la poésie arabe à cause desquels je n’ai eu que de mauvaises notes en langue arabe lorsque j’étais lycéen. Tenez, en citant ce dernier, il m’est subitement venu à l’esprit une vieille anecdote. Un jour, le prof d’arabe a interrogé l’un des cancres de notre classe. La question portait justement sur Abou Ettayeb El Mutanabbi. « Jeune homme, lui dit-il, parle-moi d’El Mutanabbi ». Visiblement, l’élève n’avait pas préparé son cours. Alors, après un petit instant d’hésitation, il lâcha : « Cheikh, oualah, ana douman’t mâah bach netkalmlek âalih ! » (1) Et, comme on s’y attendait, le zéro s’était imposé de lui-même. L’élève avait sportivement et flegmatiquement accepté sa note.
 
Il faut dire que parmi les gens interrogés, seul celui qui occupe actuellement le petit appartement de deux pièces situé au 124 de l’avenue Belouizdad (là où créchait misérablement Albert pendant sa jeunesse) a pu répondre plus ou moins correctement à la question. Et ceci pour une raison simple : il est souvent sollicité par des étrangers qui viennent se rendre compte par eux-mêmes des conditions dans lesquelles vivait « l’homme révolté ». Forcément donc, on lui susurrait quelques bribes d’information concernant le personnage et son œuvre.
 
Il est vrai qu’à cette époque, les « Arabes » habitaient sur les hauteurs de Belcourt, à Laakiba, et ne côtoyaient pas assez les « Roumis ». Même pas ceux de condition sociale modeste. Un mur psychologique séparait les deux communautés. Et, rares étaient les algériens de « souche » (pour utiliser un mot en vogue actuellement en France) qui fréquentaient les bancs du lycée Bugeaud ou de la fac d’Alger où Camus avait fait ses études. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que Camus a quitté l’Algérie bien avant le déclenchement de la guerre d’Algérie.
 
Dans le quartier, rien n’a changé depuis cette époque. Les escaliers qui mènent à l’appartement sont toujours mal ou pas éclairés. « La rampe existe toujours. Les cafards aussi. » Dans ce quartier, l’Histoire semble s’être arrêté. Aux années de l’époque coloniale. Le seul changement dans le décor c’est le teint basané et les cheveux frisés des occupants du quartier. Et c’est mieux qu’il en soit ainsi. Reste à espérer que les pouvoirs publics prendront le plus tôt possible l’initiative de transformer cet appartement en une sorte de musée que les fans de Camus, ceux qui veulent en faire une icône algérienne, viendront visiter de temps à autre. Car, aucun doute là-dessus, la « Panthéonisation » de Camus va donner un coup de fouet au tourisme culturel dans ce quartier d’Alger. 
 
Déçus peut-être de n’avoir pas pu étancher leur soif en matière de Camus, et ce dans le quartier même où celui-ci avait vécu, nos deux journalistes se sont ensuite retournés vers des hommes qui ont un rapport certain avec le livre et donc avec la littérature. Mais, là aussi les avis sont partagés. Si pour le premier, libraire de son état, Camus n’est rien d’autre qu’un « écrivain français d’Algérie », pour le second (Sofiane HADJADJ), éditeur, « Camus fait partie du patrimoine littéraire algérien ». C’est ainsi que je le vois personnellement.
 
Mais, le must du must de cette page spéciale « Albert Camus » reste l’interview de José Lenzini qui est, selon les journalistes, l’un des spécialistes d’Albert Camus. Alors, écoutons-le : « Les Algériens attendaient, sans doute, de Camus qu’il soit aux côtés des révolutionnaires qui, à partir de novembre 1954, luttèrent pour l’indépendance. Deux raisons au moins faisaient qu’il ne pouvait se joindre à eux... D’abord, il ne croyait pas à la possibilité des différentes communautés de se retrouver dans l’harmonie d’une indépendance, qui lui paraissait vouée à de grosses contradictions du fait de son « usurpation » par le FLN. Camus croyait plus à une fédération, qui aurait une autonomie avec la France et qui pourrait s’en détacher progressivement. En cela, il se sentait beaucoup plus proche des thèses de Messali Hadj dont il fut proche, entre 1935 et 1937, alors qu’il militait au PCA.
Il quitta le parti estimant que le PCF était beaucoup trop en retrait par rapport aux aspirations des Algériens, celles d’une réelle égalité des droits. Il trouvait indécent que le projet Violette -qui d’ailleurs n’arriva pas au Parlement- se contentait de proposer la nationalité française à 60 000 Arabes « méritants » alors que le pays en comptait 6 millions. D’autre part, la mère de Camus vivait à Belcourt et ne voulait pas quitter ce « quartier pauvre » auquel Albert Camus était également très attaché. Il savait qu’elle pouvait être victime d’un attentat aveugle et ne pouvait imaginer (qui l’aurait d’ailleurs fait ?) d’aider ceux dont les armes auraient pu tuer sa mère. Il a dit, juste après l’obtention du Nobel : « j’aime la justice mais je défendrai ma mère avant la justice ». Qui donc d’entre nous aurait pu faire un choix différent ? Interrogé à propos de cette fameuse phrase, le président algérien Bouteflika avait répondu : « n’importe lequel d’entre nous aurait fait la même réponse. Ce qui prouve que Camus est des nôtres »
  
(1) Prof, je n’ai pas joué aux dominos avec lui. Par conséquent, je ne peux vous réciter sa biographie.  
 


12 réactions


  • JoëlP JoëlP 28 décembre 2009 11:46

    Merci pour ce point de vue original sur Camus l’algérien. Par curiosité, je suis allé cherché Al-Mutanabbi, voici ce qu’en dit Wikipedia : (915-965) né dans l’actuel Irak, dans la ville de Koufa. Son père était porteur d’eau, et a exercé plus tard le métier de panégyriste à gage. « panégyriste à gage »... J’adore

    En lisant "Quant aux plus jeunes, ils ne lisent pas. Alors … Camus ? Ça ne leur dit vraiment rien. Acteur, chanteur de Rock ‘n roll ou danseur d’opéra ? Personne n’était en mesure de dire qui était cet homme. Nul n’était en mesure de prononcer ne serait-ce que ces quelques syllabes « é cri vain ». A dire que la seule préoccupation de nos jeunes aujourd’hui c’est le pain quotidien et rien que le pain quotidien. La nourriture de l’esprit, on s’en fout éperdument ! La culture, la littérature, le prix Nobel, tout cela n’intéresse pas grand monde."
    Je me suis que si on menait la même enquête ici, on pourrait bien arriver à la même conclusion... Avec un président qui déteste les intellectuels comme il est dit dans un autre article.


  • Roche 28 décembre 2009 13:10

    « Adlène Meddi et Ahmed Tazir ont commencé d’abord par une petite virée au quartier de Belcourt qui a vu grandir Camus »

    Bah, c’est un peu comme ici lorsque vous parlez aux jeunes de poésies ou d’écrivains qui ont marqué leur passage en Fance ou en Europe ! pas étonnant que les algériens ne connaissent pas Camus, d’autant que l’école en Algérie s’est complètment fermée avec l’arabisation du pays depuis Boumedienne. Il y avait un texte à ce sujet sur AlWattan justement, à propos des universités...


  • Micromegas Micromegas 28 décembre 2009 13:58

     On voit bien que la jeunesse Algérienne, ou celle d’autres pays reflète le même désintéressement pour la lecture qui reste pour moi la seule possibilité pour une âme d’être sauvé dans ce monde rongé par le matérialisme. Sauver une âme ne veut pas dire la préserver ou la rendre plus joyeuse. Néanmoins, l’éveil de l’esprit est très important pour l’équilibre entre l’être et le milieu ou il vit, dénué de tout enchevêtrement qui pourrait brouiller sa vision.

     L’algérien lambda est très limité intellectuellement, le français un peu moins, mais la ressemblance peut être très frappante si on regarde de très près.


    • MICHEL GERMAIN jacques Roux 29 décembre 2009 12:28

      ...« L’algérien lambda est très limité intellectuellement, le français un peu moins, ... » Que dites vous, là ? Que dites vous ?


  • Senatus populusque (Courouve) Senatus populusque 28 décembre 2009 17:09

    Albert Camus à Stockholm devant des étudiants suédois :

     

    Après avoir évoqué l’objection de conscience et le problème hongrois, de lui-même Camus lança l’invite non déguisée : « Je n’ai pas encore donné mon opinion sur l’Algérie, mais je le ferai si vous me le demandez. » Camus affirma la « totale et consolante liberté de la presse métropolitaine. Il n’y a pas de pression gouvernementale en France, mais des groupes d’influence, des conformistes de droite et de gauche. Croyez-moi, c’est ma conviction la plus sincère, aucun gouvernement au monde ayant à traiter le problème algérien ne le ferait avec des fautes aussi relativement minimes que celles du gouvernement français. »

    Un représentant du FLN à Stockholm demanda alors à Camus pourquoi il intervenait si volontiers en faveur des Européens de l’Est mais ne signait jamais de pétition en faveur des Algériens. À partir de ce moment le dialogue devint confus et dégénéra en un monologue fanatique du représentant du FLN, qui lança slogans et accusations, empêcha l’écrivain de prendre la parole, et l’insulta grossièrement. [...] Camus parvint enfin, non sans peine, à se faire entendre. « Je n’ai jamais parlé à un Arabe ou à l’un de vos militants [du FLN] comme vous venez de me parler publiquement ... Vous êtes pour la démocratie en Algérie, soyez donc démocrates tout de suite et laissez-moi parler ... Laissez-moi finir mes phrases, car souvent les phrases ne prennent tout leur sens qu’avec leur fin. »

    Après avoir rappelé qu’il a été le seul journaliste français obligé de quitter l’Algérie pour avoir défendu la population musulmane, le lauréat Nobel ajouta :

    « Je me suis tu depuis un an et huit mois, ce qui ne signifie pas que j’ai cessé d’agir. J’ai été et suis toujours partisan d’une Algérie juste, où les deux populations doivent vivre en paix et dans l’égalité. J’ai dit et répété qu’il fallait faire justice au peuple algérien et lui accorder un régime pleinement démocratique, jusqu’à ce que la haine de part et d’autre soit devenue telle qu’il n’appartenait plus à un intellectuel d’intervenir, ses déclarations risquant d’aggraver la terreur. Il m’a semblé que mieux vaut attendre jusqu’au moment propice d’unir au lieu de diviser. Je puis vous assurer cependant que vous avez des camarades en vie aujourd’hui grâce à des actions que vous ne connaissez pas. C’est avec une certaine répugnance que je donne ainsi mes raisons en public. « J’ai toujours condamné la terreur. Je dois condamner aussi un terrorisme qui s’exerce aveuglément, dans les rues d’Alger par exemple, et qui un jour peut frapper ma mère ou ma famille. Je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice. » Cette déclaration fut ponctuée d’ovations.

    Propos recueillis par Dominique Birmann, Le Monde, 14 décembre 1957 [À l’occasion de la remise à Albert Camus de son Prix Nobel de littérature].


  • sisyphe sisyphe 28 décembre 2009 18:01

    La position d’Albert Camus sur le devenir de l’Algérie est attendue à double titre : d’abord en tant qu’intellectuel, ensuite en tant que Français d’Algérie. Mais dans un climat de passions exacerbées, il sera peu écouté et très souvent mal compris. Aussi arrêtera-t-il dès 1958 de s’exprimer publiquement, laissant son point de vue dans Algérie 1958 (Actuelles III).
    Pour Albert Camus, la revendication arabe est équivoque. Autant sont légitimes la dénonciation du colonialisme, de l’attitude méprisante des Français, d’une répartition agraire injuste et d’une assimilation toujours proposée mais jamais réalisée, autant est illégitime le concept de nation algérienne : l’Algérie est issue d’immigrations successives (Juifs, Turcs, Grecs, Italiens, Berbères, Arabes puis Français), et les Arabes sont poussés par l’impérialisme mené par l’Egypte et soutenu par l’URSS, pas par le sentiment d’appartenance à une nation algérienne.
    La troisième voie qu’il préconise consiste à intégrer davantage les Français Musulmans dans la République :

  • Par la création d’un parlement à deux sections : la première, de 500 membres, composée de 485 élus métropolitains et de 15 élus d’outre-mer gérant seule ce qui n’intéresse que la métropole (le droit civil par exemple), la seconde, de 100 membres composée d’élus musulmans de statut coranique, gérant seule les questions intéressant les Musulmans ; le parlement dans sa totalité gérant les questions communes (fiscalité, budget, défense...)
  • Par l’extension de ce parlement aux autres pays du Maghreb et de l’Afrique Noire, en créant une structure fédérale française (un Sénat fédéral, des Assemblées régionales) compatible avec les institutions européennes à venir, ce qui renforce la pérénité de cette solution.

  • Cette voie doit surmonter deux obstacles majeurs : le cessez-le-feu préalable, difficile à obtenir d’un FLN intransigeant, et la volonté nécessaire à la métropole pour réformer la constitution.
    Elle ne sera jamais retenue : le FLN, loin d’arréter les combats, renforcera les attentats, et la métropole, avec De Gaulle au pouvoir, changera sa constitution mais pas dans le sens de l’intégration des Français Musulmans (au nom d’une certaine idée de la France ?). Aussi la France s’engagera-t-elle dans la voie redoutée par Camus dès Janvier 1958 :
    Un grand nombre de Français, plutôt que de renoncer à leur niveau de vie, préfèreront abandonner les Algériens à leur destin [...] et se désolidariser de leurs compatriotes d’Algérie [...] La France se trouvera forcée de lacher également les Arabes et les Français d’Algérie ; nous sommes devant cet enjeu. Si ce dernier malheur arrivait, les conséquences seraient nécessairement graves et les Algériens ne seraient pas certainement seuls à entrer en sécession. C’est le dernier avertissement qu’il faille honnêtement formuler.

  • sisyphe sisyphe 28 décembre 2009 18:04

    Le drame algérien mit cruellement à l’épreuve cet impératif moral dont il refusa toujours de se départir. Se sentant par toutes ses fibres fils de l’Algérie, l’écrivain ne cessa, dans tous ses écrits, de lutter à la fois contre l’exploitation coloniale et contre le terrorisme du FLN, et de plaider pour une politique qui permettrait aux deux peuples constitutifs de l’Algérie de vivre en bonne entente : "Toute autre politique, concluait-il, n’amènera pas seulement la mort inutile de Français et d’Arabes, elle accentuera la solitude arabe et la solitude française, et le malheur de deux peuples". Dans son appel poignant pour une trêve entre les deux camps, l’écrivain invitait ses frères de sang, pieds-noirs et Arabes, à n’être « ni victimes ni bourreaux », à refuser « d’exercer et de subir la terreur » et à mériter de vivre en hommes libres. On sait ce qu’il en advint mais l’on peut rêver à ce qu’aurait pu être cette Algérie nouvelle qu’il appelait de ses voeux, une Algérie fondée sur une fédération de nationalités différentes associées à la gestion de leur intérêt et de leur devenir communs...


  • sisyphe sisyphe 28 décembre 2009 18:08
    Camus et l’AlgérieExtrait :

    En 1939, Camus publie, dans divers journaux, des articles dénonçant la politique de répression contre les nationalistes algériens et l’étouffement de toutes les revendications du PPA (Parti du peuple algérien) ; un historien comme Charles-Robert Ageron en parle comme d’« une voix où la générosité s’alliait à l’intelligence politique ».

    Mais ce qui a le plus grand retentissement, c’est la série d’articles qu’il publie en juin 1939 dans Alger républicain sous le titre « Misère de la Kabylie » : onze longs articles, fruit d’une enquête de terrain, qui montrent précisément cette misère, dénoncent le système colonial qui la produit et reconnaissent la justesse des revendications d’une « vie plus indépendante et plus consciente » et des initiatives prises en ce sens par les indigènes. Camus y dit nettement sa honte de ce que la France a fait – et surtout n’a pas fait.

    En mai 1945, à la suite des émeutes dans le Constantinois, Camus enquête sur place et publie dans Combat six articles où, contrairement à la majeure partie de la presse française, il dénonce la violence de la répression et affirme la fin inéluctable des « impérialismes occidentaux ». Il prend la défense des nationalistes algériens, modérés comme Fehrat Abbas, ou plus radicaux comme Messali Hadj. « C’est la justice qui sauvera l’Algérie de la haine », conclut-il, mais en vain : ce qui deviendra la guerre d’Algérie est déjà commencé.

    (...)

    Il dénonce sans relâche, comme étant des « crimes », les pratiques de représailles et de torture de l’armée française. Il dénonce tout autant la pratique – et la justification – du terrorisme aveugle par les rebelles. C’est dans ce cadre qu’il faut entendre sa fameuse phrase de Stockholm, au moment de la remise du prix Nobel de littérature (décembre 1957) : « J’ai toujours condamné la terreur. Je dois condamner aussi un terrorisme qui s’exerce aveuglément dans les rues d’Alger, par exemple, et qui un jour peut frapper ma mère ou ma famille. Je crois à la justice mais je défendrai ma mère avant la justice. »


  • anny paule 28 décembre 2009 21:36

    J’étais en troisième lors de « l’accident » qui causa la mort de Camus.
    J’avais seulement lu alors, La Peste et L’Etranger... il n’y avait pas, à ce moment-là, de postes de télévision dans notre maison... cependant, et je ne suis jamais arrivée à m’expliquer pourquoi, le matin suivant cet « accident », et avant même d’avoir pu lire quoi que ce soit, à la Une de tous les journeaux affichés sur la route de mon lycée, j’ai su, en voyant le portrait, qu’il s’agissait de Camus.
    Pourquoi l’Homme photographié à la Une et dont je n’avais aucune idée, aucune image, m’est-il apparu comme tel ? Je ne sais...
    Depuis lors, j’ai lu son oeuvre entière, je me suis rendue à Tipasa et à Alger, dans les années soixante dix (à une époque où les « Français de France , » comme le disaient les Algériens, étaient accueillis à bras ouverts) , j’ai tenté de comprendre et de suivre les pas de « L’Homme révolté »... et je reste circonspecte sur ce qui entoure cet « accident » qui le fit disparaître trop tôt.
    Camus, c’est plus qu’un symbole, c’est celui qui à une certaine époque dérangeait (et faisait de l’ombre à un certain Jean Paul Sartre qui entendait occuper l’espace littéraire et philosophique public)... Je reste très attachée à la rigueur de sa pensée, à l’homme qui, issu de rien, s’est hissé au sommet... en parfait décalage avec le monde en train de se construire...
    J’avoue, humblement, que nous aurions besoin de Camus (au pluriel et en tant qu’entités) en cette époque barbare qui est la nôtre, et non pas de philosophes de cour comme on en entend et voit trop !!! 


  • Ibn Taymiyya 29 décembre 2009 07:17

    Mettre sur le même plan la terreur des rebelles avec celle de l’Etat français est une imposture , que dénoncait déjà Sartre. Contre 132 ans d’humiliation la fin justifie les moyens. Voilà camus rhabillé par Sartre pour l’éternité.

     Comme si l’Egypte de Nasser était responsable de l’orientation arabo musulmane des Marocains , des Tunisiens , des Algériens et des Libyens. Alllons allons , soyons sérieux.....

    Camus ne pouvait tout simplement concevoir une Algérie arabo musulmane et la seule conception disponible dans son esrpit de colon étant une Algérie de culture francaise et , donc, blanche et occidentale. A ce titre il fallait combattre ses idées par tous les moyens. D’ailleurs Lui- même se donnait un mal fou pour dissimuler son accent pied-noir devant les français de métropole ....alors ses articles prétendument pro kabyles , ceux qui les sortent aujourdh’ui peuvent se les carrer dans...comment disent les alégriens au fait...


    • MICHEL GERMAIN jacques Roux 29 décembre 2009 13:17

      Camus ne pouvait concevoir une Algérie Arabo Musulmane comme il n’aurait pu concevoir une France Occidentalo-Chrétienne. Il entrait avec finesse, humanité et de façon prémonitoire, issu qu’il était d’une classe prolétaire Algérienne de naissance et européenne d’origine, dans les questions sordides de l’identité nationale. Une nation Algérienne dont la découpe géographique était, comme celle de la France d’aujourd’hui, construite par la colonisation.
      Est ce que je sais, moi, qui suis Français par ma carte d’identité et Méditerranéen par ma culture si mes arrière grands parents étaient des « salauds » (vision Sartrienne) du nord ou de braves opprimés dans leur langue ? Et lui, Albert Camus, croyez vous qu’il ressentait autre chose que ce que vivrait un arabe francais ne pouvant se résoudre au choix d’un camp que le délire identitaire lui imposerait de faire ?

      Sartre chantre du parti du Prolétariat dont l’olympe était à Moscou refusant de reconnaître publiquement le sort réservé au peuples d’URSS par la phrase célèbre mais tue "il ne faut pas déstabiliser Billancourt (usines Renault aux ouvriers majoritairement Communistes) de peur de perdre leur soutien national. Stratégie contre Doute.

      Dissimuler son accent, ou tenter de le faire, n’est rien d’autre que la preuve d’un colonialisme linguistique que l’on subit aussi au quotidien. En arriver à trouver son accent gênant, presque ridicule, lorsqu’on l’entend à la TV est une véritable infamie vécue.

      L’enfer n’est pas les autres, pas tous les autres, pour Camus et je veux m’y tenir...


  • Micromegas Micromegas 8 janvier 2010 16:50

    Par jacques Roux :

    ...« L’algérien lambda est très limité intellectuellement, le français un peu moins, ... » Que dites vous, là ? Que dites vous ?

    Que dis-je là ? Vous ne savez pas lire ? Le jeune algérien moyen ou autre est très limité intellectuellement, oui oui . Le français est son ipod, show tv, attrapes nigauds, musique sans art...etc et j’en passe.

    Ou voyez-vous le hic dans tout cela ?


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