vendredi 7 septembre 2018 - par Desmaretz Gérard

Comment aménager une cache en pleine nature

Dimanche 8 juillet 2018, un chasseur découvre dans la forêt de Verneuil-en-Halatte (Oise), un sac avec à l'intérieur : deux armes longues, des gilets pare-balles, des vêtements et cagoules, une disqueuse, une pelle et une pioche. La police alertée pense immédiatement à du matériel utilisé pour l'évasion de Redoine Faïd. La police technique va procéder à 140 prélèvements... Pour les enquêteurs de la Direction centrale de la police judiciaire, les malfaiteurs n'auraient pas eu l'intention d'abandonner le sac ni son contenu dans la forêt. Ils auraient été dérangés lors d'une tentative d'enfouissement pour une réutilisation ultérieure.

Les caches n'appartiennent pas seulement au domaine du banditisme, elles concernent le survivalisme, le monde de l'espionnage, les militaires, les clandestins, les terroristes, les pervers, les délinquants, les enfants, etc. L'homme peut avoir recours à différents types de caches pour : s'y dissimuler, y accueillir d'autres personnes, du matériel, des vivres, des documents,etc. Toute construction clandestine est interdite en France. La sûreté d'une cache réside dans le choix du site et de l'attention apportée aux moindres détails dans son agencement (installation minimaliste, aération, drainage, solidité). Trois types sont possibles : au sol, semi-enfoui (hogan des Navahos) ou enfoui. Si l'abri forme un relief sur le sol, il faut en atténuer la présence par des formes arrondies et choisir son emplacement afin qu'il ne se désilhouette pas sur le fond (camouflage).

Il faut différencier la cache préparée en prévision de circonstances futures, d'une cache d'urgence. Avant d'en déterminer l'endroit, il faut en déterminer le contenu, la raison, le but, l'accessibilité, la surveillance (continue, aléatoire, planifiée), le piègeage, le risque de compromission, sa découverte fortuite (chiens truffiers, chasseurs, prospecteurs, etc.), une trahison. Toujours s'assurer qu'elle restera accessible à n'importe quel moment (zone interdite, sous surveillance, travaux d'urbanisation, destruction militaire, risques naturels saisonniers ou non). L'activité d'urbanisation ou la construction d'un nouveau bâtiment ou infrastructure peut suffire à en révéler l'existence ou à en entraver l'accès ! Il faut commencer par éviter les zones touristiques, parcs animaliers et privilégier les zones non constructibles, ou procéder à l'achat par un prête-nom d'une parcelle de terrain dans une région accidentée isolée.

Le risque de sa découverte ne peut jamais être évité totalement, mais il peut être réduit par l'attention apportée au projet. La sélection du site commence par l'examen attentif d'une carte d'état-major de la région de façon à écarter les endroits à exclure : les ponts, voies de triage, certaines usines, les intersections, les centrales nucléaires, électriques, les zones parcourues par les douaniers, etc., d'en apprécier le relief ainsi que la végétation. La France est une région tempérée couverte de prairies et de forêts décidues, la chute des feuilles qui se décomposent forme une litière d'humus qui recouvre la terre brune. L'examen topographique permet ensuite la sélection des endroits favorables : la proximité de sentiers naturels, dissimulation (végétation environnante persistante, repli de terrain), un drainage adéquat, la nature géologique du sous-sol ; un terrain sableux se laisse plus facilement creuser qu'un terrain argileux. Selon la nature de la cache, celle-ci peut être située en hauteur à flanc de colline, sur une paroi rocheuse, dans un arbre. Dans une zone de sous-bois ou de maquis très dense, l’accès peut en être défendu par un « trou de serpent » que même un sanglier aurait du mal à en forcer le passage.

Les différents emplacements sélectionnés sur les cartes doivent faire l'objet d'une reconnaissance in-situ sans attirer l'attention sur soi ou le déplacement et toujours sous un faux prétexte plausible en adéquation avec la région, la saison (pas de partie de pêche en dehors de la période d'ouverture !), surtout sans téléphone cellulaire et en empruntant un moyen de locomotion anonyme... Si le « vérificateur » est un autochtone, il ne peut bouleverser ses habitudes ni son emploi du temps habituel sans éveiller la curiosité des autres personnes. Il est prudent de prévoir un second site afin de pouvoir palier à des difficultés de dernières minutes. S'il s'agit d'une cache pour du matériel, le site secondaire doit être assez éloigné du site principal, mais suffisamment proche pour permettre son approvisionnement sans avoir à nécessiter un second voyage. Ne jamais mélanger les genres, une cache pour l'homme, une autre pour le matériel, sans jamais mettre tous ses « œufs » dans le même panier (le militaire évitera la cache mixte, par exemple armes et munitions, explosifs et détonateurs), et en prenant en compte la protection des objets contre l'humidité, le ruissellement, la contamination géologique, etc. En cas de découverte, la cache ne doit pas conduire à l'autre cache ni à ses utilisateurs...

L'emplacement de la cache déterminé, il faut en consigner les informations indispensables à sa localisation et les différents itinéraires d'accès par des instructions qui seront sans ambiguïté à quelqu'un qui n'a jamais visité l'emplacement : cours d'eau, jonctions de voies de communication, agglomérations, points remarquables, les bornes géodésiques (rares sont les promeneurs à les remarquer), kilométriques, poteaux ou pylônes, ruines, intersections, confluents, etc. Un site peut être idéal à tous égards, mais l'absence de repères permanents, d'azimuts, de distances parfaitement établis peuvent suffire à l'exclure. Le site retenu présente-t-il au moins deux itinéraires sécurisés y menant et en partant ? Des caractéristiques permanentes artificielles ou naturelles, un masque visuel, un feuillage persistant en toutes saisons ou caduc ? Le sol conserve-t-il les traces (herbe foulée, branches cintrées, neige, boue), l'odeur du passage d'une personne (chien), le sol permet-il une approche silencieuse ? facilite-t-il la dissimulation (un tapis d'humus ou d'herbe permet de restituer l'aspect normal du sol ). Si le temps (chrono) le permet, placer la zone sous surveillance en dissimulant un appareil photographique qui se déclenche à la chaleur ou toutes les x secondes (une centaine d'euros) dont l'opérateur n'oubliera pas d'en détruire la carte après usage...

Retrouver une cache ne doit jamais s'apparenter à un jeu de piste. Les informations qui en permettent la localisation peuvent être échelonnées. Un premier point permet de localiser les indications conduisant à un deuxième point, etc., un code visuel indiquera si la cache est enfouie, au sol, dans une anfractuosité, en hauteur, approvisionnée, etc. Il suffit en cas d'alerte de détruire un point pour rompre le cheminement.

Le point de localisation d'une cache doit répondre à trois exigences :

- être identifiable et accessible en tout temps (saison et durée) ;

- être suffisamment proche de la cache pour en déterminer l'emplacement avec certitude ;

- être relié sans équivoque au chainage des points balisant l'itinéraire.

En l'absence de points de référence fiables, des coordonnées géographiques et GPS (le service peut être suspendu) sont nécessaires pour localiser un endroit précis clairement identifiable (cairn, roche, etc.), de bonnes connaissances en orientation restent indispensables pour utiliser le compas, l'altimètre, le clissimètre, le podomètre, le Topofil®, de façon à pouvoir se situer avec précision sur la carte même entre les courbes de niveau. L'emplacement de la cache ne sera atteint qu'après avoir effectué un parcours de sécurité propre à la nature des lieux. On ne rejoint jamais une cache par le chemin le plus direct ni le plus facile. On met en œuvre des techniques particulières : boîtes - volutes - changement d'azimuts, etc., enseignées lors de certains « stages ».

On se doit de déterminer les besoins en outillage. Un outil adapté est un moyen d'aboutir à un résultat escompté en un minimum de temps et avec le maximum de discrétion. La végétation peut compliquer le travail (épineux, racines), un sécateur et un filet de camouflage peuvent être les bienvenus. Il convient de prévoir l'horaire des travaux, leur durée (de nuit, il faut la majorer de 40 %), des vêtements (on privilégie le principe des trois couches...), des gants résistants . On n'utilise surtout pas une paire de gants en latex ou en vinyle, ou alors en sous-gants seulement (ils sont trop fragiles. Si l'opérateur vient à s'entailler la peau, son ADN pourrait un jour venir le trahir), lunettes de protection, lampe frontale avec filtre ambre ou rouge foncé pour les opérations nocturnes, une trousse de premiers soins, etc. La localisation difficile du site ou la nature des travaux entrepris peut être à l'origine d'un accident. Si on opère seul, il faut convenir d'une date et heure de retour avec une personne de « confiance ».

La chaîne de confiance ne devrait jamais être partagée. Michel Fourniret a récupéré 34 lingots d'or et des milliers de pièces d'or grâce aux confidences d'un codétenu qui tenait les informations d'un braqueur italien qui avait lui même croisé un membre du gang des Postiches lors d'une évasion rocambolesque. Le butin avait été enterré dans le cimetière de Fontenay-en-Parisis (Val-d'Oise). Après avoir acheter le château de Sautou dans les Ardennes, Fourniret en dissimula le reliquat, 25.000 pièces d'or, dans une lessiveuse enfouie à proximité du camping d'Hermeton-sur-Meuse (Belgique). Conclusion, l'opérateur méfiant prépare deux caches, mais n'en communique qu'une seule, la moins compromettante, puis il revient sur les lieux pour la vider et en transférer le contenu dans la cache connue de lui seul.

Les outils : pelle, pioche, scie, hachette, fil de fer, pince universelle, etc., ne doivent pouvoir être identifiables afin qu'en cas de perte, d'oubli, ou contraint à s'en débarrasser, de s'alléger pour quitter les lieux au plus vite, ne pas attirer l'attention sur soi en les transportant. Ne jamais utiliser les outils de son employeur, d'un proche, et encore moins une partie de l'outillage courant que l'on conserve à la maison. La criminalistique peut faire des choses étonnantes... Il ne faut rien rapporter chez soi, absolument rien : outils, vêtements, gants, pas même le moindre indice terre, feuillage qui pourrait rattacher une personne à la scène d'action. Si l'opérateur doit acheter des outils, il les paiera en espèces, ne jamais les acheter par correspondance ou sur Internet. Il faut, si possible, les acheter dans différents bazars très éloignés et en répartir les achats, par emplacement, par produit, et sur un laps de temps le plus large possible (préparation).

Quand l'homme doit creuser un trou (certains enterrent une vieille caravane ou un abri de jardin en bois en ménageant un puits d'accès étroit...), il pense souvent à une ouverture verticale qui s'enfonce dans le sol, rarement à pratiquer un conduit horizontal dans le flan d'un talus, d'un monticule, ou d'une colline escarpée... Si le sol est recouvert d'humus, celui-ci doit être ôté et épargné afin de pouvoir être replacé sur l'emplacement du sol remanié. S'il s'agit d'un tapis d'herbe, celui-ci sera découpé et roulé afin de pouvoir être reposé. On procède ensuite à un trou de sondage afin de s'assurer de la nature du sol (terre meuble, végétale, grasse, argileuse, crayeuse) sur la profondeur escomptée. Attention, un abris enterré se doit de respecter des impératifs de construction. Si on opte pour une fouille couverte, il faut : excaver, étayer, couvrir de branchages, placer la trappe d'accès, poser une feuille plastique ou bâche, recouvrir avec de la terre extraite puis l'humus ou tapis végétal.

La terre remuée voit son volume augmenter de 20 %, son excédent doit être ensaché afin d'être évacué loin de la zone et dissimulé en prenant sa teinte en compte (un cour d'eau proche pourra faciliter la tâche). Le travail terminé, le site est remis en son état d'origine afin qu'aucune trace de passage ne subsiste (stérilisation). Une trace peut alerter d'une activité clandestine dans la région. Quel que soit le type de cache, l'opérateur ne quittera jamais les environs dans les vêtements utilisés pour aménager celle-ci. Selon la nature des travaux, prévoir une toilette ou faire un « saut » à la piscine.

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12 réactions


  • Francis, agnotologue JL 7 septembre 2018 09:22

    De même qu’il existe de profiler’s, existerait-il des spécialistes en recherche de caches ?


  • MagicBuster 7 septembre 2018 10:51

    Ca fait longtemps que les terroristes sont logés dans les HLM de banlieues avec nos impots.


  • zygzornifle zygzornifle 7 septembre 2018 16:33

    La plus grosse cache de survivaliste se trouve bien en dessous des caves de l’Élysée mais pour le président on l’appelle « the bunker » avec centre de commande des armées , des mois de bouffe , air conditionné en circuit fermé, une armurerie , une pharmacie etc , de quoi survivre a l’extinction de l’espèce Française et le tout payé par le contribuable qui lui crèvera au dehors ....


  • zygzornifle zygzornifle 7 septembre 2018 16:41

    Si vous voulez des armes il faut demander a Benalla ou aller au QG d’En Marche ....


  • sls0 sls0 7 septembre 2018 16:43

    Mon père avait enterré des armes et des explosifs.

    Qu’elle fut pas sa surprise de voir la semaine suivant les allemands construire un blockaus à 4m de là.
    Les armes doivent encore toujours y être, après la guerre il est devenu moins turbulent.
    Pendant longtemps quand on voulait des armes allemandes il y en avait tout un stock à la citadelle de Liège, le libre service s’est arrêté dans les années 80.
    Pour ceux qui ont connu le service militaire, au 13RDP il y avait des cours gratuits pour faire des trous invisibles.
    Grand promeneur devant l’éternel. Pour le peu qu’on regarde avec un oeil de géologue ou de chasseur d’images, on repère parfois.
    Derrière ma maison c’était la cambrousse, ça descendait sec mais c’était d’une richesse géologique intéressante, sur 80m de dénivellé 170 millions d’années. Je connaissais bien.
    Il y avait un endroit c’était presque un cul de sac, il y avait un deuxième accès pas trop visible en venant de chez moi qui m’évitait un détour de 2km. Le paradis des escargots.
    J’y avais mis une planche vermoulue pour attiré les escargots.
    Un jour je suis passé à la gendarmerie et j’ai dit :
    Polack (oui c’était le surnom du chef de brigade) je viens porter plainte parce que l’on m’a piqué ma planche à escargot. Il m’a répondu qu’une planche vermoulue pour une plainte ça fait léger. Je lui ai dit que maintenant c’est de la drogue et non des escargots qui se trouve sous la planche.
    Une planque dans un cul de sac pourquoi pas. Deux nuits de surveillance de la part des gendarmes et j’ai récupérer ma planche à escargots.
    On oublie pafois l’oeil exercé du garde-chasse, de l’amateur de champignons, d’escargots, de celui qui aime le géologie. On bouscule parfois un monde sans le savoir.

    • Gilbert Spagnolo dit P@py Gilbert Spagnolo dit P@py 7 septembre 2018 20:18

      @sls0


      Il y a une semaine tu avais eu la gentillesse de faire une réponse à mon article sur le moustiques ;

      Pour cause de retour séjour montagne, plus blêmes connexion internet ,et ciboulot défaillant ( pt’être âge !! ) j’ai excuses moi omis de te répondre.

      Alors comment se passe la vie en RD ?.. et les escargots ?enfin bien la vie dans ce pays lointain, pas de blêmes pour la sécurité de personnes et des biens, la vie doit être nettement moins chère et questions climatiques,.. et bien sur les moustiques ???


      @+P@py  


    • carolucem 7 septembre 2018 21:42

      @sls0

      On bouscule parfois un monde sans le savoir.

      Tres vrai et une belle histoire. 


    • sls0 sls0 17 septembre 2018 01:50

      @Gilbert Spagnolo dit P@py
      Une vie zen et 35kg de bien.

      Zen c’est un peu le non égo donc pas de problème de discussion.
      Peu de biens donc pas de jalousie ou attraction.
      Zen c’est vivre simplement donc la vie n’est jamais chère où que l’on soit. Ici si on ne peut pas se passer du camenbert et pinard, la vie est chère, sinon elle est moins chère.
      Le climat le problème c’est l’humidité. Faire du vélo au Maroc avec 32° et une vitesse de 25km/h, si on s’hydrate on tient 7h. Ici avec l’humidité au bout de 40 minutes on doit arrêter pour cause d’élévation de température. Et oui, le coup de chaleur avec ses 30-50% de mortalité. Grand marcheur devant l’éternel ça me fait chier.
      Les moustiques tigres piquent le matin et le soir, ils ne sont pas bruyants. Pas trop génants sauf en cas de dengue, chik et malaria.


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