samedi 2 juin 2012 - par Sylvain Reboul

De la contradiction de toute pensée de droite

La pensée de doite prétend justifier les inégalités sociales au nom d'une inégalité naturelle intangible, en tant que celle-ci serait nécessaire à l'ordre public et donc à la paix civile.

Ce faisant elle tente de justifier l'ordre existant inégalitaire en niant qu'il puisse être fondamentalement contradictoire et en permanence menacé par ses contradictions internes. Elle est conduite par là à faire de la répression policière la seule solution, violente, à ces contradictions sociales déniées. 

Mais elle reconnait par cette justification et la montée des moyens de répression jusqu'au déni des droits humains pour lesquels elle milite :

1) que cet ordre est précisément fondé sur un désordre et que, pour le figer, il lui faut impérativement faire recours au surréel divin afin de faire croire aux dominés que cet ordre est bénéfique à tous, c'est à dire à l'ordre public confondu avec l'ordre social existant. Les dominés sont invités, voire contraints par la force dite publique, s'ils n'en sont pas suffisament convaincus, d'accepter cet ordre inégalitaire au nom de leur propre sécurité.

2) que le réalisme dont se réclame la pensée de droite est fondé en sous main sur une vision surréelle ou métaphysique de la réalité qui voit en elle un ordre transcendfant permanent inchangeable et naturel, c'est à dire biologoque et/ou divin.

3) qu'elle est dans une contradiction performative, dès lors qu'elle est obligée de mettre Dieu et/ou la nature immuable, comme justification idéelle, au service de la domination réelle, sans pour autant croire forcément elle même à l'existence réelle d'un Dieu créateur de la nature et de son ordre, ce qui était le cas par exemple de Maurras.

Il suffit alors d’exhiber cette contradiction -dont l'histoire de l'église catholique et du christianisme historique sont l'expression- pour faire de cette justification irréelle du réalisme, ce qu'elle est : une mystification idéologique au service d'une domination fondamentalement injustifiable. C'est pourquoi cette mystification de la permanence des inégalités naturelles au nom de Dieu est en permanence auto-démentie par la réalité historique, y compris des religions.

Le libéralisme économique se charge du reste de ruiner cette vision inégalitaire de la pensée de droite au nom de l'égalité idéalement supposée des acteurs économiques.
Cette dernière contre-vérité neutralise la vision de droite. Ce qui fait que le pseudo-libéralisme économique inégalitaire ne sait toujours pas à quel saint se vouer




15 réactions


  • jef88 jef88 2 juin 2012 11:29

    BOOOOFFFFFFF !!
    Le fric et les saints ??? 
    Incompatibles !


  • Christian Labrune Christian Labrune 2 juin 2012 12:09

    De quelle « droite » parlez-vous et quelle « gauche » lui opposeriez-vous ? On a l’impression, à vous lire, que ces notions sont parfaitement claires, mais je ne pense même pas qu’il soit possible de s’entendre sur les présupposés.
    Logiquement, la droite que vous définissez, et qui ne reconnaît que la force justifiée par une métaphysique ad hoc devrait pouvoir accepter n’importe quel système esclavagiste ; l’hitlérisme, même, devrait lui convenir parfaitement. Or, il s’est trouvé bien des conservateurs républicains pour lutter contre le nazisme et, au lendemain de la guerre, vouloir mettre en oeuvre une politique sociale.
    En tout cas la théorie libérale, du moins à ses origines, ne correspondrait guère à la définition que vous donnez de la droite, même si la forme que le libéralisme a prise depuis trente ans tend à renvoyer au oubliettes de l’histoire un principe d’égalité fondateur de l’idéal démocratique ; partant, à faire le jeu des politiques « de droite ».
    La gauche autoritaire inspirée par l’eschatologie manichéenne et marxiste de la fin de l’histoire n’a pas produit moins d’horreurs que les autres formes de tyrannie. Au nom de la liberté, de l’égalité et du bonheur des prolétaires à la fin des temps, on a massacré à tour de bras pendant près d’un siècle. Je ne pense pas que vous puissiez prendre la défense du totalitarisme communiste. Et l’expérience a montré par ailleurs que les gouvernements roses en France à la fin du siècle dernier, après l’expérience Maurois, avaient été tout à fait capables, et mieux que la droite (l’anesthésiant idéologique du PS est efficace) de mettre en oeuvre une politique réactionnaire et de brader tous les acquis sociaux en obéissant aux ukases d’un libéralisme économique mondialisé.
    Resterait la gauche libertaire, qu’on n’a jamais vue au pouvoir, du moins en France, et ce n’est pas demain que cela risque d’arriver. Elle correspond à une zone intellectuelle très évanescente et changeante. En dehors de ce courant inconsistant, traversé de contradictions et quelque peu naïf, il me semble qu’on peut bien mettre dans le même sac la « gauche » et la « droite ». Qu’on massacre pour de mauvaises raisons ou pour la bonne cause, je ne vois pas trop la différence pour ceux qui crèvent, même si leur opinion n’était pas celle qui convenait à l’air du temps.

     


    • Sylvain Reboul Sylvain Reboul 2 juin 2012 12:49

      Je parle de la pensée de droite, pas de la droite politique que cette pensée inspire plus ou moins et encore moins de la gauche dont la pensée ne sépare pas la liberté de l’égalité.
      La pensée de gauche mériterait un autre article en effet

      La gauche stalinienne était politiquement et socialement et encore plus politiquement inégalitaire. Elle était plutôt d’extrême droite nationaliste et totalitaire par l’oubli des libertés. Dans la pratique cette prétendue gauche était nationale-socialiste derrière un paravent de référence de gauche internationaliste.


    • Christian Labrune Christian Labrune 2 juin 2012 17:21

      "Dans la pratique cette prétendue gauche était nationale-socialiste derrière un paravent de référence de gauche internationaliste."

      @Sylvain Reboul
      Je suis bien d’accord et je ne saurais vous démentir sur ce point. Mais ce qui m’embarrasse, c’est l’interpénétration des idéologies et la récupération constante, dans le réel, de la thématique d’un bord par ceux du bord opposé. Après tout, les fascismes se réclament bien d’un certain « socialisme » en même temps qu’ils brouillent les pistes et ne veulent être « ni droite ni gauche », pour reprendre le titre que donne Sternhell à son bouquin sur l’idéologie fasciste française. Le pétainisme se réclamera encore d’une « révolution » nationale, sans craindre le ridicule.
      Quand on regarde les débats politiques actuels, on voit bien que beaucoup de « nouveaux réactionnaires » - dont je crains d’être ! - se réclament encore de bien des valeurs que la gauche réelle a complètement abandonnées. On a très bien vu cela lorsque les socialistes ont entrepris de détruire l’Education nationale en laissant délibérément la bride sur le cou à des « pédagogues » qu’ils savaient capables du pire. Et demain, si les mêmes socialistes essayent de trafiquer la loi Léonetti pour permettre à leurs électeurs de se débarrasser plus commodément de leurs vieux et des infirmes qui les encombrent, ce sont les mêmes nouveaux réactionnaires athées qui s’y opposeront, partant de principes purement éthiques et qui ne devront rien, évidemment, aux impositions des Eglises. Vous évoquiez l’influence des thématiques religieuses dans le système de légitimation des idéologies de la droite, mais la doctrine sociale de l’Eglise - dont, il est vrai, j’aurais plutôt tendance à rigoler - n’est plus quand même celle de Pie IX et de son Syllabus. Aujourd’hui, dans le temps même où la « gauche » abandonne, de fait, la classe ouvrière et les « travailleurs » chers à Arlette à la logique de destruction d’un libéralisme des plus féroces, on voit un parti authentiquement d’extrême droite développer non sans succès la thématique ouvriériste qui avait fait les beaux jours du PC. L’antisionisme, qui est une forme aggravée de l’antisémitisme, on pouvait croire qu’il resterait le fonds de commerce de la pire des droites. Il constitue désormais le trait d’union qui relie les verts et les antiques chapelles de l’extrême gauche. Et tous ces braves gens sont désormais tout à fait prêts aussi à s’asseoir sur un principe de laïcité conçu par la gauche d’autrefois pour donner des gages à l’islamo-fascisme montant : déjà, on a vu Rocard au pays des mollahs. Qu’allait-il donc faire dans cette galère ? Bref, si je continue bien à voir très clairement d’où surgissent encore les vieux thèmes de l’extrême droite (et c’est aussi bien à gauche qu’à droite), je ne vois plus que des simulacres d’une pensée « de gauche » devenue vraiment comparable au Canada dry - encore qu’elle puisse très bien saouler, comme l’a fait voir clairement l’hystérie du deuxième Front.


  • zelectron zelectron 2 juin 2012 14:00

    Je trouve curieux que pour un ancien professeur de philosophie votre expression ait été si imprécise et qui plus est sur un sujet aussi grave et polémique.


  • bourrak 2 juin 2012 14:03

    Alain de Benoist donne les valeurs communes suivantes des mouvements de droite :

    • L’idée que l’homme est toujours modelé (mais pas forcément déterminé) par des valeurs qui lui sont antécédentes et dont il a hérité ;
    • L’idée que les institutions sont nécessaires à l’homme pour se mettre en forme lui-même ;
    • Une certaine aspiration à l’ordre social ;
    • La tendance à pencher en faveur de la liberté et non de l’égalité, lorsque l’une et l’autre entrent en conflit ;
    • L’idée que la société est plus que l’addition des seuls individus qui la composent ;

    • jef88 jef88 2 juin 2012 14:27

      OUI ! quand on est dans les couches supérieures !!!!

      • La tendance à pencher en faveur de la liberté et non de l’égalité, lorsque l’une et l’autre entrent en conflit ;

      OUI ! quand on est dans les couches supérieures !!!!


  • Marc P 2 juin 2012 14:20

    - s’agissant simplement des inégalités de revenus entre les différents niveaux de la hiérarchie professionnelle (inégalités qui en entraînent bien d’autres sociale, culturelle, santé, comportements de consommateur etc etc...), je trouve qu’on n’entend pas souvent ce que ce professeur d’économie disait chaque année à ses nouveaux étudiants en introduction à sa discipline :

    « l’impotance de la différence de salaire entre les cadres et les autres employés a pour but d’acheter la paix sociale »... J’ajouterais « et le but est atteint » ....

    en clair cela veut dire que le pouvoir a plus à craindre d’un comportement subversif de la part des cadres ou encore que des cadres mieux payés collaborent mieux pour limiter ou endiguer e comportement subversif des non cadres...

    - la droite opte pour des choix « de gauche » lorsque cela l’arrange, par exemple le recours aux eurobonds ou la mutualisation des dettes entre européen est une forme de collectivisation, les mutuelles, les allocations familiales, les congés payés, la sécurités sociale, le système éducatif et les grandes écoles où on est rémunérés pour étudier, la liste est infinie....

    - je suis tenté d’adhérer au titre de l’article sauf qu’on trouverait certainement bien des contradictions dans une pensée de gauche.....

    - j’ai appris que dans l’église catholique, un prêtre, un évêque ou un archevêque perçoivent le même salaire... En effet une certaine église s’est compromise et souvent fourvoyée dans une connivence excessive avec les élites de l’argent ou autres...
    Je pense que ce que propose l’évangile ôte son sens à la notion d’égalité.... L’idéal proposé fait que chacun serait comblé selon toutes ses attentes et ses besoins dès lors qu’ils sont légitimes en terme de ce qui correspond au Royaume (sauf par exemple l’avide de biens ou de pouvoir évidemment)... Mais l’évangile tout en tolérant les différence dénonce les injustices, en cela elle a fait preuve d’égalitarisme surtout chez les 1ers chrétiens... Et l’église composée d’humains n’est pas infaillible...

    Je pense qu’un certain catholicisme est de droite car il considèrent que ce monde est celui de l’injustice acceptable avant le prochain de l’au delà qui sera parfait...
    Je vous rejoins pour pointer une contradiction avec l’évangile selon lequel le Royaume est déjà au milieu e nous...
    Mais les catholiques de gauches ne sont pas exempts de contradiction non plus...
    Enfin que signifie être chrétien et voter Bleu Marine si ce n’est être victime de manipulation ou ne pas comprendre le sens du message chrétien
     


  • Axel de Saint Mauxe Axel de Saint Mauxe 2 juin 2012 15:52

    Vouloir gommer les inégalités est le grand enjeu religieux et politique depuis des siècles.


    Vouloir gommer les inégalités c’est détruire ce que nous avons en nous de meilleur au profit de ce qui est le plus médiocre.

    Ce ne sont pas les inégalités qui sont violentes : la violence vient de ceux qui veulent gommer les inégalités. CF histoire du XXème siècle.

    J’ose espérer que le XXIème siècle déjà entamé sera celui d’un renouveau de la pensée, la marginalisation ou la disparation du marxisme, du libéralisme (culte de l’argent, nivellement par le bas), au profit d’une renaissance de l’individu, de l’être humain, broyé et marginalisé par les philosophes et les politiciens.

    En savoir plus : Nouvelle Droite Française





    • Christian Labrune Christian Labrune 2 juin 2012 17:45

      "J’ose espérer que le XXIème siècle déjà entamé sera celui d’un renouveau de la pensée, la marginalisation ou la disparation du marxisme, du libéralisme (culte de l’argent, nivellement par le bas), au profit d’une renaissance de l’individu, de l’être humain, broyé et marginalisé par les philosophes et les politiciens.« 

      @Axel de Saint Mauxe

      Si les philosophes ont pour vocation de »broyer« et »marginaliser« l’être humain - idée qui me paraît tout à fait saugrenue !- je me demande bien d’où pourrait venir un »renouveau de la pensée«  : tout homme qui s’efforce de penser le monde occupe nécessairement la place du philosophe. Cela signifie-t-il qu’il faudrait penser un peu, mais pas trop quand même ?
       Et du »plus médiocre", que faut-il en faire ? Le laisser crever ? La charité n’imposerait-elle pas, pour reprendre l’idée d’un petit poème paradoxal de Baudelaire, d’assommer les pauvres ? Cela leur éviterait en tout cas bien des souffrances et le thème de l’euthanasie est très à la mode actuellement. Jonathan Swift proposait que, pour résoudre partiellement la question sociale on utilisât comme viande de boucherie les nourrissons des classes défavorisées : bien rôti, un enfant de deux ans, c’est vraiment délicieux. Et cela fait tout de suite un pauvre et un médiocre de moins. Quelquefois, on mangera bien un petit génie, on ne sait jamais, mais s’il fallait penser à tout, on ne dormirait plus.


    • Axel de Saint Mauxe Axel de Saint Mauxe 2 juin 2012 22:38

      Je crois que vous confondez tout. Vous n’avez rien compris.


  • gordon71 gordon71 2 juin 2012 18:38

    « le rasoir philosophique » 


     complètement raccord
    je n’aurais pas trouvé mieux 
    le sujet s’accorde tellement bien avec le nom du site 

    j’en baille déjà 

  • Sylvain Reboul Sylvain Reboul 3 juin 2012 07:59

    Je suppose que la plupart de ceux qui défendent ici les inégalités sociales seraient d’accord pour refuser de faire de ces inégalités la justification de la domination de l’homme par l’homme et/ou de la femme par l’homme. C’est en effet cette inégalité dominatrice qui est précisément inégalitaire, les autres ne sont que des formes de pouvoir de direction selon le mérite ; ce qui est une inégalité, quant à son but, égalitaire (juste) !

    Reste à considérer la possibilité pratique d’une nette séparation entre le pouvoir de direction et le pouvoir de domination et de ses conditions réelles et démocratiques de possibilité, qui sont loin, c’est le moins qu l’on puisse dire, d’être remplies

    Quant à ceux qui défendent la domination, il faut supposer qu’ils s’estiment à tout point de vue plus (in)humains que les autres parce que faisant partie d’une espèce supérieure...
    Je les laisse à leur délire paranoïaque qui ne mérite aucun commentaire rationnel.


    • Marc P 3 juin 2012 13:51


      En effet Monsieur Reboul, « qui sont loin, c’est le moins qu l’on puisse dire, d’être remplies »... Un peu d’attention pour les autres de la part des méritants rendrait ce monde un peu plus accueillant pour le grand nombre.....

      http://www.salairemoyen.com/

      Abuser de la loi de l’offre et de la demande, invoquer l’interchangeabilité entre les employés pour les sous payer (ou surpayer les cadres ce ui revient au même) ne me paraît ni chrétien, ni humain....
      Hollande imprime des orientations très honorables , espérons qu’il ne s’agit que d’un début... Il nous reste heureusement l’espérance avec la parabole de l’ouvrier de la 11ème heure prononcée non pas par un polytechnicien ou un hec mais pour les croyants par un potentat de direction qui a pris la condition d’homme....
      Cdlt


  • Marc P 3 juin 2012 14:04

    ne me paraît ni chrétien, ni humain.... ni rationnel... smiley

    (pour) selon les croyants par un potentat de direction qui a pris la condition d’homme....


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