samedi 16 octobre 2010 - par armand

Immobilier - folies parisiennes ?

L’immobilier parisien flambe, nous assènent les médias, hausse de 9% depuis le début de l’année, quand ce n’est pas le double, disent certains, rupture de stocks dans les agences, prétentions stratosphériques des vendeurs. Pour résumer, nos expliquent les éditorialistes, les classes moyennes sont chassées de la capitale, même à un candidat aisé l’achat est impossible s’il n’est pas déjà propriétaire, disposant de revenus énormes, ou aidé par sa famille. Le scénario londonien, écarté avec indignation par la Mairie de Paris voici quelques années, à savoir une ville dont la population se limite désormais aux riches et à quelques pauvres maintenus sous perfusion dans les logements sociaux, s’est réalisé, alors même que les deux capitales de référence, New York et Londres, ont l’immobilier en chute libre.

Tout le monde, ou presque, semble ajouter son clou au cercueil du Paris populaire de jadis. Les propriétaires, bien entendu, qui refusent tout plafonnage des loyers ; le gouvernement, qui chasse les classes moyennes des logements sociaux à coup de surloyers vertigineux, la municipalité qui proclame que ses efforts pour aménager quelques immeubles sociaux au milieu d’arrondissements chers permettront à de modestes et symboliques caissières et employés de s’y maintenir… alors que leurs supérieurs devront tous se reloger en banlieue lointaine.

On voit fleurir, avec une insolence magistrale, les panneaux triomphants d’une véritable « Gated Community » à la française, installée sur l’emplacement de l’ancien hopital Laënnec (à 20 000E le m2) tandis que tout près on déloge les squatters – des étudiants des classes moyennes – d’un immeuble de la rue de Sèvres en deshérance depuis des années, et qu’une magnifique construction du XIXe siècle – où vécut le poète François Coppée – achève de s’émietter dans la rue Oudinot après trente ans de conflits avec un promoteur intransigeant. Sans parler d’un certain hôtel particulier de la place des Vosges, inoccupé depuis 1965 ! Pendant ce temps, des SDF toujours plus nombreux dorment dans la rue, on loue à prix d’or des 9m2 à des étudiants, les innombrables et interminables trajets banlieue-centre ville font perdre un temps précieux, polluent et épuisent. Dans quelque temps, grâce à la démission de nos édiles, le milliardaire Arnault pourra inaugurer son hôtel de luxe sur l’emplacement de la défunte Samaritaine, et offrir à la convoitise des riches amateurs de pieds-à-terre le patrimoine immobilier que ces patrons à l’ancienne, les Cognacg-Jay, avaient réservé à leurs employés.

L’on ne saurait répéter combien cette situation malmène la continuité des générations au sein d’un même environnement humain. Des familles, parisiennes depuis des générations, sont contraintes à l’exode, trop pauvres pour se maintenir dans le libre, trop riches pour accéder aux logements sociaux, qu’on réserve en priorité à des populations nouvelles, nullement inscrites dans la mémoire des lieux.

Force est de constater que devant cet état de fait, ni l’Etat, ni la municipalité ne se bousculent pour réagir. Or il faut se rendre à l’évidence, du fait de sa configuration particulière, de son parcellaire ancien, du souci de la préservation de ses bâtiments historiques et des limites exiguës de ses frontières, seule une règlementation dissuasive a pu, dans le passé, juguler la spéculation. En d’autres mots, il est illusoire d’imaginer que la « main invisible » de l’offre et de la demande y fera quoi que ce soit pour calmer le jeu. Cela est encore plus vrai depuis que l’extension de la copropriété a intéressé tout une population de propriétaires à une hausse régulière de la valeur de leur bien, quitte à entraver la mobilité et l’accès à une surface plus importante.

Ce ne sont pas les politiques de relance du gouvernement – prêts à taux zéro, aides diverses et variées, qui y changeront quelque chose – elles ne font que grossir les prétentions des vendeurs qui auront toujours une longueur d’avance.

L’on aurait envie de poser une question à brûle-pourpoint aux responsables gouvernementaux ainsi qu’aux édiles parisiens : êtes vous décidés, enfin, à mettre en œuvre une vraie politique de retour des classes intermédiaires – l’immense majorité de la population nationale – dans le centre-ville ? Quitte à bousculer la bienséance libérale en faisant prévaloir l’intérêt collectif (dont le terme ne devrait pas choquer, puisque la propriété immobilière, dans la plupart des cas, n’est qu’une copropriété.)

Quelques pistes de réflexion s’imposent :

La cherté de l’immobilier parisien étant directement en rapport avec sa rareté, l’on pourrait pratiquer comme suit :

  • Une redensification du centre-ville pour remédier aux coupes sombres pratiquées par les développeurs urbains depuis Haussmann. En effet, nombre de quartiers ont vu disparaître des rangées d’immeubles entières et se former des terrains vagues simplement dans le but d’élargir inutilement les avenues ou dégager des monuments.

  • Une lutte efficace contre les immeubles gardés inoccupés, pour des raisons spéculatives ou juridiques. Outre la taxation des logements vides, la municipalité pourrait créer une agence de gestion qui, sans procéder à la moindre expropriation, se chargerait au bout de cinq ans, par exemple, de la mise en état et de la location des immeubles ou logements vides. Les propriétaires toucheraient le produit de ces locations, moins les frais de fonctionnement de l’organisme gestionnaire. Cette mesure-guillotine permettrait notamment de gérer les nombreux cas où l’immeuble est gelé le temps que se règlent les litiges de succession.

  • La lutte contre la pied-à-terrisation. Ce phénomène, qui frappe les quartiers historiques, se traduit par des immeubles inoccupés en grande partie pendant la majeure partie de l’année. Or, le centre-ville ne doit pas devenir un simple lieu de villégiature saisonnière. Une politique fiscale pourrait être mise en place, ou bien une réglementation qui réserve la majeure partie des surfaces à la résidence principale.

  • Finalement, à un moment où l’Etat traque les sources de revenu et referme les niches fiscales, est-ce bien raisonnable de ne pas taxer les plus-values issues de la revente d’une résidence principale ?

Si l’accession à la propriété était seule en cause, la situation pourrait être supportable. Après tout, pendant des siècles Paris a été une ville de locataires. Mais ce sont désormais les loyers qui repartent à la hausse. Il devient plus que nécessaire de les plafonner, voire même de réintroduire (ou d’en brandir la menace) des mesures comme les fameux « Lois de 1948 ». Car il est bien connu que si la frénésie patrimoniale est responsable en grande partie de la ruée sur l’immobilier, la modération imposée aux loyers, comme dans le passé, y ferait beaucoup pour la freiner.

  Affaire brûlante, au même titre que le logement, l’inflation des baux commerciaux. La mairie prétend lutter contre la monoactivité, mais elle a laissé l’essentiel du Quartier latin devenir une interminable et monotone litanie de boutiques du prêt-à-porter, qui, bien loin de servir de vitrine à la confection nationale, ne sont que des déversoirs du Made in China.

Là encore, réintroduire l’agrément préalable en cas de changement de commerce, voire même des exigences de zonage, prescrivant un pourcentage obligatoire de commerces de proximité, me semblerait une exigence raisonnable.

On m’objectera que dans un pays qui ne connaît même pas les facilités de l’ « Eminent Domain » qui donne aux édiles anglo-saxons des capacités d’intervention plus étendues, ces mesures seraient présentées comme des atteintes inacceptables à la propriété privée. Je ferais remarquer qu’il s’agira surtout d’assortir au droit de propriété l’exigence que celui-ci se conforme à l’intérêt collectif, et qu’il est néfaste que des logements demeurent vides pendant des décennies parfois. Et surtout, qu’il n’y a rien d’autre à faire,à moins de laisser cette spirale frénétique se poursuivre. A moins d’attendre comme facteur de régulation l’inévitable crise avec écroulement des prix, comme cela s’est fait dans le passé.



14 réactions


  • Yohan Yohan 16 octobre 2010 11:41

    La mixité façon Delanöe consiste à chasser du parc HLM des gens solvables pour les remplacer par des assistés non solvables. Il contribue à une libanisation progressive de certains quartiers de l’est parisien, sans avoir pour autant réussi à imposer aux quartiers huppés ses protégés.
    Résultat, les jeunes couples sont exclus de l’habitat social au profit des familles très nombreuses, soit un appel d’air pour les famiilles africaines qui sont les grands bénéficiaires du système Delanoe. Sans les bobos, Paris serait une ville morte (elle l’est déjà pour les étrangers) et il y aurait encore plus de logements vides .
    L’habitat social se dégrade, achevant de faire fuir les classes intermédiaires qui s’y maintenaient. Bravo la gauche !


  • Waldgänger 16 octobre 2010 13:58

    Salut Armand,

    Je viens de lire l’article, il est excellent. J’ai des impératifs et je repasserai faire un commentaire plus long ce soir, j’aurai plus de temps.

    Bonne journée.

  • Capone13000 Capone13000 16 octobre 2010 15:50

    Lisez ceci :

    Vers une baisse des prix de l’immobilier d’ici 2015 ?
    http://www.lavieimmo.com/prix-immobilier/vers-une-baisse-des-prix-de-limmobilier-d-ici-2015-8837.html

  • bo bo 16 octobre 2010 19:14

    Pour l’hopital LAENNEC c’est, parait-il, la municipalité parisienne qui est RESPONSABLE ... alors elle peut se targuer de quelques logement sociaux.... c’est le (SOCIAL)-CAPITALISME. De toute façon, la mairie de Paris mise sur le tourisme et fait tout pour lui (fêtes, Paris Plage, nuit verte, blanche ou rose, vélo <plutôt que d’améliorer les transports en commun pour les travailleurs...> et ne semble avoir AUCUNE réflexion sur l’habitat. Il est vrai qure M. DELANOE a récemment déclaré que 10.000 Euros par mois (plus primes de 30.000 à 50.000 Euros par an ) est un salaire moyen raisonnable pour ses 20 directeurs d’activités de la Mairie (suite aux remarques de la Cour des Comptes). Il pense donc que la classe moyenne a des revenus confortables pour se loger à Paris....
    OUI, il faut très fortement TAXER les plus values et au premier centime, car la spéculation mise sur la plus value.
    D’autres pays n’ont pas attendu pour réglementer, voire interdire. Dernier exemple Hong Kong ; plus value 13% en un mois. : réaction du gouvernement : interdiction aux étrangers non résidents d’acheter en empruntant pour spéculer...taxation de toutes les plus values.
    Chez nous, au contraire, les élus ne font que noter qu’un milliardaire du Golfe ait acheté une « petite résidence » (immeuble de presque 1.000 m 2) au prix faramineux de 53.000 Euros le M2...avec vue sur la semaine.... (mais la mairie encaisse des droits dur la mutation !!! et va pouvoir communiquer.....sur son « effort » pour le logement social et le maintient (? ???) des classes sociales justes au dessus du niveau du logement social.
    Il faut donc avoir le courage d’aller plus loin et remettre à plat la politique globale du logement en prenant en compte la mondialisation de la spéculation immobilière .....


    • armand armand 16 octobre 2010 21:30

      bo,

      Pourquoi vous en prendre au vélo ? Paris intra muros est l’une des capitales les plus réduites en superficie, tout déplacement ou presque peut s’effectuer à vélo et la voiture, pour ceux qui habitent le centre, est un luxe coûteux. Les Velib c’est une des rares initiatives que j’approuve de tout coeur, pour en bénéficier tous les jours.

      Non seulement les milliardaires du Golfe, mais toute l’hyper-classe mondiale, apparemment, veut son pied-à-terre à Paris. Je ne crois pas à une interdiction (vous imaginez la réaction des commissaires européens !) mais décider en conseil que pas plus de tant de millièmes par copropriété ne peut être acheté en résidence secondaire, pour maintenir l’équilibre, ne devrait pas poser de difficulté juridique. Enfin, je pense...

      Ppour Laënnec, on avait là l’occasion rêvée d’aménager des immeubles de rapport pour revenus moyens. Au lieu de cela, il y a de l’hyper-luxe (avec domotique, conciergerie, sécurité, etc.) en lieu fermé - comme les ghettos pour très riches aux USA, saupoudrés de quelques HLM pour pauvres méritants...


    • bo bo 17 octobre 2010 11:15

      Armand

      Je ne m’en prends pas au vélo en tant que tel.

      Je m’en prends au vélo en tant que politique mise en avant pour ne pas faire les investissements nécessaires pour les transports en commun. Les millions de personnes qui galèrent chaque jour dans des RER et lignes de métro surchargées...n’ont rien à faire de vélos mis à la disposition de touristes ou d’oisifs qui ont le temps devant eux. Ils ont besoins de passer une demi-heure à une heure de moins de trajet par jour. A l’interconnection RER A et RER B il arrive que l’on ne puisse pas monter dans une rame et qu’on laisse passer 5 à 6 RER...pareil sur des lignes de métro.
      Il est plus « GRATIFIANT » pour une municipalité ou une communauté de commune de « communiquer » sur le vélo ecolo (sans dépenser un SOUS car confier en REGIE à une entreprise privée) que de réellement faire des efforts pour les infrastructures de transport en commun...c’est le sens de mes propos.
      Quand à la réglementation de l’achat de logements....BRUXELLES n’a rien à y dire. En autriche des vallées entières ont été « annexées » par des non résidents...ce qui a entrainé une réglementation pour préserver l’habitat local.
      A New York,certains règlements intérieurs des co-propriétés sont « draconniens » : vous ne pouvez acheter ou louer que si l’ensemble ou un quota vous agrée...le cas du président NIXON a été souvent médiatisé : il n’a jamais pu acheter. C’est pour cela que vous y avez des quartiers ou blocs.
      Il y a plein de solutions juridiques pour empêcher la spéculation HONTEUSE sur le logement. Le droit au logement, le droit d’accès à l’eau, et autres droits fondamentaux ne doivent pas être offert aux spéculateurs. C’est un devoir des ELUS français, et accessoirement bruxellois de le défendre, faute de le faire, ils n’ont AUCUNE LEGITIMITE.
      Hors dans bien des cas, malheureusement, ils sont hautement coupable LAENNEC est un exemple (d’autant plus douloureux que la municipalité parisienne bafoue outrageusement sa sensibilité politique.....et justifie le sigle UMPS !!).Il n’y a pas que Paris : regarder les « juteuses ventes » des biens publics dans toute la France : casernes, emplacements d’hôpitaux fermés, ect....c’est un pur pillage des biens publics au profit de la SPECULATION et du maximum de POGNON à faire. Ou sont les règles draconiennes encadrant ces opérations ? où est l’intérêt du PEUPLE (au sens noble : c’est à dire du bien commun ???.
      L’argent EDICTE en DIEU unique règne et massacre une très grande partie de la population avec la complicité active et en tout cas très passive de l’ensemble des élus.... c’est une des raisons du désespoir des urnes vides de bulletins d’électeurs.....


    • armand armand 17 octobre 2010 12:59

      bo,

      Je maintiens que le vélo est le moyen de transport le plus adapté pour se rendre à son travail dès lors qu’on a la chance d’habiter intra-muros. Ou pour se rendre à une gare d’où on prendra un train pour se rendre à son travail. Il n’y a pas de raisons que cela soit le cas dans la plupart des grandes villes européennes et non à Paris, où les distances sont moindres.
      Mais il y a une certaine « culture » de la bagnole qui fait partie du bagage culturel français - tout comme l’actuel obsession de devenir propriétaire dont parle Wald.
      Et cela a toujours été - dès la guerre de 14 pratiquement plus un seul transport hippotracté à Paris.

      Pour le reste, nous sommes d’accord. Mais j’ignore avec précision, dans la perspective d’une régulation, ce qui relève du Parlement et ce qui relève de la Mairie.


  • armand armand 16 octobre 2010 21:21

    Bonjour à tous,

    Bien entendu, si je devais dresser la liste des responsabilités de cet état de fait quasi unique parmi les grandes capitales actuellement (à New York, on voit des prix de présentation qui ont baissé de 20% depuis deux ans... et ça continue ; idem à Londres), un petit article n’y suffirait pas.
    Je ne crois pas à une volonté malveillante de la part de la Mairie - elle a notamment consenti d’importants abattements pour atténuer le choc des surloyers voulus par Christine Boutin. Je dirais même que sont sont les communistes du conseil de Paris qui défendent avec le plus d’âpreté la place des classes moyennes dans ce centre ville.
    D’un côté on a le dogme de la libre circulation des capitaux et de la liberté des prix, imposé par directive européenne. On voit mal des plafonnements réglementaires, tout comme on ne verra aucune intervention pour taxer les importations de textiles à bas prix, aucune interdiction de délocaliser. De l’autre, l’application tatillonne des critères pour accéder à un logement social favorise automatiquement les grandes familles à revenus faibles - et, faut-il rappeler, à la différence de la plupart des pays, la nationalité ne joue aucun rôle.
    Les classes moyennes sont ainsi prises en tenaille.
    Sous des dehors activistes, Delanoë (et il le reconnaît) est un libéral économiquement. N’oublions pas que c’est Mitterrand qui a décrété au début des années 80 que les loyers dans le libre n’étaient pas assez chers, et a autorisé un rattrapage qui, à l’époque s’est soldé par des hausses énormes.

    Il y a un autre facteur que je n’ai pas évoqué. Le parc social « de fait » a Paris était le plus souvent vétuste. On en a fait des logements rutilants, bénéficiant du confort le plus moderne. Tout cela a un prix. Autrefois on pouvait trouver des logements moins chers, avec sanitaires sur le palier, escalier branlant, peintures écaillées. Actuellement on n’a plus le choix - tout est astiqué, ripoliné, gratté, optimisé, jusqu’au dernier mètre carré.

    Finalement, le maintien, voire la hausse à Paris et dans quelques autres grandes villes est sans doute dû aussi à la psychologie nationale. En Amérique et en GB, on achète avec ses économies, son salaire. En France l’achat est souvent une opération patrimoniale à laquelle toute la famille participe. Tant que Papamaman, aïeux, collatéraux acceptent de cracher au bassinet, quel que soit le prix, pour offrir un nid au jeune ménage, les hausses, pour douloureuses qu’elles soient, seront amorties. Et les prix se trouvent alors décorrélés de la valeur locative.


  • fifilafiloche fifilafiloche 16 octobre 2010 21:54

    La baisse de l’immobilier est inéluctable, elle est simplement retardée artificiellement pour des raisons financières. Les banques Européennes ne se sont toujours pas remises de leur moins values sur l’immobilier anglo saxon, les actifs toxiques étant désormais dissimulés en fond de bilan. Un retour de l’immobilier des pays méditerranéens sur leur fondamentaux (les salaires) les achèverait. D’où l’u(ilisation de fonds publics pour maintenir les valorisations à travers les différents systèmes de défiscalisation. Chaque contribuable paie d’une main ce que la moitié de la population encaisse de l’autre (plus values immobilières).


    Mais quels choix restent ils à une société desindustriablisée pour soutenir le pouvoir d’achat de ses populations, à part les bulles financières ?

    • armand armand 17 octobre 2010 13:09

      fifilafiloche,

      Bonne remarque - sur des forums immobiliers je lis de nombreux jeunes actifs qui affirment que devant le blocage des salaires, la seule façon de rentrer davantage de sous c’est la bourse (hautement volatile), ou l’immobilier (plus sûr... POUR LE MOMENT).
      En somme, c’est la seule spéculation que les pouvoirs publics regardent d’un bon oeuil. On traque sans merci les petits revendeurs sur eBay, mais on dispense de toute ponction fiscale les plus-values immobilières qui peuvent parfois atteindre les plusieurs dizaines de milliers d’euros.

      C’est là que se situe une des principales fractures sociales en France - car il est bien connu aussi que si l’immobilier s’est maintenu c’est parce qu’on ne prête qu’aux riches.

      Je m’explique : quand Anne-Sphie et Pierre-Edouard, tous deux lauréats d’une école de commerce, s’installent, toute la tribu leur offre le comptant, et leurs gros salaires paieront les traites. Aucun problème pour obtenir un prêt, puisque leur jeune âge permet, en outre, de s’endetter longtemps.
      Après un effort qui n’est pas si terrible que ça, les tourtereaux pourront, à l’occasion de la première poussée spéculative, engranger une confortable plus-value et passer à plus grand.

      Quand Gérard et Ginette, tous deux petits fonctionnaires, ouvriers, ou employés, veulent s’installer, la banque leur refuse un prêt car ils dépassent la sacrosainte limite des 33% d’endettement. Leur « trribu » ne peut rien pour eux, car elle est pauvre, ou décédée. Si, en plus, Ginette et Gérard ont passé 40 ans, adieu les emprunts longue durée.
      Tous deux resteront locataires, ne pourront jamais engranger de confortables plus-values et ainsi se constituer un véritable capital. Déjà la première étape dans la constitution d’un patrimoine leur est refusée.


  • ElCrustace 16 octobre 2010 22:46

    L’accroissement de la durée de vie accroit le capital des ménages, il est donc normal que les prix augmentent dans l’ancien...
    Et puis pourquoi toujours tant parler de Paris ? C’est une ville sale, chère, fatigante.. Il y a bien d’autres endroits bien plus sympa où vivre !
    À la limite vous pouvez toujours vous y rendre pour jouer les touristes, ce n’est beau que comme ça Paris..


  • Waldgänger 17 octobre 2010 00:50

    Bonsoir Armand,

    Votre point de vue est intéressant sur la hausse des loyers à Paris, car n’y habitant pas, je suis dans un cas différent, la problématique parisienne intra-muros étant fortement marquée de toute évidence par une pénurie de logements, ce qui n’est pas du tout le cas à l’échelle nationale d’après mes sources. Evidemment, elles sont parfois imparfaites dans les prévisions, mais il faut tenir compte aussi des mesures prises pour soutenir pour le moment l’immobilier à n’importe quel prix, et dans un contexte de crise. Mais cette étude me semble assez bien avoir prévu la stagnation ou baisse des années 2008-2009 et leur étude des causes réelles me semble sonner juste.

    Ce que je vois et entends autour de moi irait tout à fait dans le sens de mes sources. J’entends souvent des rumeurs sur des Parisiens qui achètent en nombre sur Lyon, du style « rien que dans mon quartier, il y en a trois qui ont acheté », ce qui génère une psychologie collective qui est prête à tout pour devenir propriétaire, avec évidemment toute une armature de valeurs qui y prédisposent, au niveau de la culture, de l’éducations et de la personnalité. Les rumeurs non vérifiées jouent un rôle, ainsi que la surestimation grossière des menaces de pénurie. Dans l’exemple que je citais, il y avait finalement peut-être bien trois Parisiens qui allaient acheter (des types qui faisaient le trajet tous les jours et se rattrapaient sur la différence de loyer), mais il s’agissait d’une zone où il y avait facilement plus de mille logements, et qui était surtout très proche de la gare, ce qui est fondamental pour ce genre de résident.

    Encore plus évident, et je l’entends de tous les côtés, c’est une véritable obsession d’être propriétaire de son logement, et ce de la part de gens jeunes parfois, et qui ne gagnent pas des sommes folles, loin de là. Mais il n’est jamais question pour eux d’attendre une baisse ou de rester locataire, il faut acheter et à n’importe quel prix. Quand ce genre d’état d’esprit existe chez des millions de personnes simultanément, il ne faut pas s’attendre à des prix bas.

    En gros, mes sources et ce que j’ai en tête rejoignent le dernier paragraphe de votre commentaire de 21 h 21, pour moi c’est la vrai clef du niveau actuel des prix à l’achat et à la location dans l’immobilier.

    Dans le cas de Paris, il faut noter que les prix énormes s’exercent aussi bien au delà de la ville, dans ses banlieues proches et lointaines. Ils sont certes moins élevés, mais cela montre que les effets de pénurie ne semblent pas jouer.

  • armand armand 17 octobre 2010 13:12

    Bonjour Wald,

    "Encore plus évident, et je l’entends de tous les côtés, c’est une véritable obsession d’être propriétaire de son logement, et ce de la part de gens jeunes parfois, et qui ne gagnent pas des sommes folles, loin de là. Mais il n’est jamais question pour eux d’attendre une baisse ou de rester locataire, il faut acheter et à n’importe quel prix. Quand ce genre d’état d’esprit existe chez des millions de personnes simultanément, il ne faut pas s’attendre à des prix bas."

    Effectivement, j’entends aussi que c’est une dépense non-négociable et prioritaire pour les jeunes ménages, en même temps que la traite de la bagnole.


    • Waldgänger 17 octobre 2010 22:15

      Je dirais même que le prestige symbolique de la propriété est désormais plus grand que celui de la voiture chez les personnes que j’ai pu cotoyer. 

      Et souvent, ce sont des personnes qui pourraient être locataires un moment, se donner le temps de la réflexion, mais c’est inconcevable, il faut avoir ses murs à soi. 

      Les jeunes ménages ont souvent des conditions d’insertion plus difficiles que les générations précédentes, mais les symboles restent et sont même plus présents que jamais. Il y a actuellement une volonté forte de montrer, chez la plupart, tous les signes de l’insertion, de la conformité sociales, et la propriété du logement en fait partie. Il faut montrer que l’on participe à l’échange généralisé des biens et des signes, et surtout que l’on occupe une bonne place dans ce jeu gigantesque, à l’échelle d’une société toute entière.

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