vendredi 11 décembre 2009 - par
N’y a-t-il pas des problèmes qui touchent un plus grand nombre de citoyens, pour lesquels il est nécessaire de trouver une solution ?
Et parmi ces moyens, il y a la méthode d’analyse, et l’envie d’apprendre.
La burqa et les hypocrites missions parlementaires
Déjà, penser à créer une mission parlementaire, coûteuse, tant en termes de moyens qu’en terme de temps pour des députés, pour 367 femmes portant la burqa dans notre pays (chiffre officiel du Ministère de l’Intérieur), certains trouvent ça gros.
N’y a-t-il pas des problèmes qui touchent un plus grand nombre de citoyens, pour lesquels il est nécessaire de trouver une solution ?
Mais lorsqu’on se propose de former une mission pour évaluer une problématique, si futile soit-elle, on se donne les moyens d’en tirer quelque chose.
Et parmi ces moyens, il y a la méthode d’analyse, et l’envie d’apprendre.
Or les parlementaires en question n’ont visiblement aucune envie d’analyser et de comprendre. Ils ont décidé avant les auditions et toutes les personnes qui ont un point de vue différent du leur sont considérés comme des épines dans le pied d’un plan déjà tracé.
Quelques exemples :
Yazid Sabeg, commissaire à l’égalité et à la diversité des chances, avait déclaré : "La crise s’aggrave dans les quartiers, note-t-il, et les tensions sociales sont à leur maximum. Il n’y a plus de travail, plus de logement, le système éducatif ne remplit plus son rôle....Occupons nous de ces vrais sujets. Au lieu de cela, la polémique sur la burqa va rouvrir des frustrations, des antagonismes, des racismes alors qu’il faut au contraire rassembler les Français".
Résultat, il s’était opposé à la mission, donc 9 députés ont demandé sa démission...
Jean Baubérot, titulaire de la chaire d’histoire et sociologie de la laïcité à l’École pratique des hautes études, a évoqué les raisons pour laquelle il pensait qu’une loi sur la burqa serait une erreur. Les parlementaires de la mission l’accusent alors d’être coupé de la réalité. Ils savent déjà tout. Ce qui se résume à une intervention du député Pierre Forgues :
"En dépit de toute l’estime que j’ai pour les intellectuels et pour votre travail, je dois dire que votre idée selon laquelle une loi irait à l’encontre de l’objectif que nous visons, n’est pas fondée en réalité."
"En dépit de toute l’estime que j’ai pour les intellectuels et pour votre travail, je dois dire que votre idée selon laquelle une loi irait à l’encontre de l’objectif que nous visons, n’est pas fondée en réalité."
La messe est encore une fois dite. Pas d’argumentation, nous n’accepterons pas de contradiction.
Autre exemple, Tarik Ramadan. L’homme est intelligent. Il sait de quoi il parle. Universitaire et conférencier brillant, considéré internationalement comme un grand spécialiste de l’islam, musulman lui-même, son audition est quelque peu houleuse. Attaques personnelles, procès d’intention, jusqu’à ce qu’un parlementaire dise en substance : "je vous avais bien dit qu’il ne fallait pas l’inviter, il n’y a rien à en tirer". Pourtant son intervention était pleine de bon sens. Pour qui a suivi l’audition, il n’y a pas de doutes sur le niveau intellectuel de chacun. Ramadan l’emporte haut la main, mais il ne va pas dans le sens de la mission...
Et puis il y a la femme au niqab. Elle est française d’origine marocaine, retire son voile devant la mission, et s’exprime. Elle a choisi d’elle même le voile intégral. Pour elle c’est une question de religion, un choix de spiritualité. Mais le président de la mission déclarera :
"La dame nous a longuement expliqué qu’elle n’a de comptes à rendre qu’à Dieu. Elle nous a semblé très militante", a dit M. Gérin. "Cela nous a renforcé dans l’idée que le voile intégral n’a rien à voir avec la République".
Parce que Monsieur Gérin du parti communiste, lui, n’est pas militant ? Oui, mais militant anti-burqa, c’est pas pareil...
"La dame nous a longuement expliqué qu’elle n’a de comptes à rendre qu’à Dieu. Elle nous a semblé très militante", a dit M. Gérin. "Cela nous a renforcé dans l’idée que le voile intégral n’a rien à voir avec la République".
Parce que Monsieur Gérin du parti communiste, lui, n’est pas militant ? Oui, mais militant anti-burqa, c’est pas pareil...
Même Antoine Sfeir (directeur des "cahiers de l’orient") a déclaré qu’il fallait replacer le débat sur ses deux pieds, qui sont la laïcité et l’intégration. "La laïcité ne doit pas être anti-religieuse ou a-religieuse, elle doit être ouverte et partagée". "Moi je ne veux pas être toléré, je veux être reconnu dans mon altérité" que "la laïcité englobe et ne dénie pas". Et il déclara qu’en aucun cas il ne fallait légiférer sur le voile.
Mais rien ne changera l’avis de la mission qui n’a pas décidé d’apprendre quoi que ce soit.
Pourquoi alors de telles dépenses de temps et d’argent ?
Tous les intervenants opposés à une législation sur la burqa sont persuadés que la burqa et le niqab ne sont pas justifiés par la lecture du Coran (à part bien sûr la jeune femme portant le niqab elle-même).
Lorsqu’on décide de s’informer, on s’informe. On écoute, on réfléchit, on apprend.
Mais dès le départ, le but était tout autre. Tous bords confondus, l’extrême droite avec Myard, les communistes avec Gérin, tous trompent la France et utilisent leur position pour donner le change. Cette mission ne sert à rien, sinon à justifier une prochaine loi pour laquelle on dire "ça a été vu à l’assemblée, on a pris le temps d’enquêter".
367 burqas, c’est tout de même moins que nos 577 députés.
La prochaine mission parlementaire devrait être nommée "du bon emploi des 577 députés de l’assemblée."