Syrie : du conflit exporté à un possible éclatement
Pour ceux qui observent l'évolution du conflit Syrien depuis 2 ans et demi, il est de plus en plus évident que plus le temps passe, moins on se dirige vers une fin du conflit. Plus le temps passe et moins les protagonistes du conflit (hormis les civils) souhaitent une solution négociée.
1. L’ INVOLUTION DU CONFLIT :
L’évolution est rigoureusement contraire. Ce conflit débuté en mars 2011, sur des revendications internes de réformes et de plus de démocratie, ce conflit débuté sur des manifestations pacifiques réclamant plus d’ouverture de la société syrienne, revendications auxquelles Bachar-Al-Assad avait fait mine de répondre pour ensuite durcir sa répression, ce conflit évolue sous les influences et les financements extérieurs, vers une guerre civile qui se radicalise en conflit ethnique et confessionnel et qui est de plus en plus marqué par des attaques de populations civiles.
D'ailleurs, à l'échelon local, on voit aujourd'hui se développer des opérations d'épuration qui touchent plus les civils que les combattants. Ainsi « Human Rights Watch » (HRW) a annoncé le 14 octobre 2013 que des djihadistes et des rebelles avaient tué le 4 août 2013, 190 civils, dont 67 ont été exécutés alors qu'ils n'étaient pas armés et ont pris en otage 200 personnes dans des villages alaouites de la province côtière de Lattaquié."
2. DES MOTIVATIONS EXTERIEURES A LA SYRIE ET UN CONFLIT EXPORTE :
Aujourd'hui la "rébellion" autrefois Syrienne est de plus en plus "noyautée" par des djihadistes étrangers à la Syrie qui font dériver les revendications de politique interne en guerre confessionnelle.
L'ennemi n'est plus la politique de Bachar, mais l'ensemble des Alaouites symboles de l'oppression de la majorité Sunnite.
Aujourd'hui les groupes rebelles se massacrent presque plus entre eux qu'ils ne luttent contre les forces gouvernementales. Le 12 octobre, des combats entre djihadistes étrangers de l'Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL), et combattants de l'Armée syrienne libre (ASL) ont fait plus de 50 morts en 2 jours, dans la métropole d'Alep.
Dès lors que des intérêts et des mobiles étrangers interviennent dans une guerre civile, on sait que ce sont les nationaux qui en paieront le prix. Le Liban en a été la démonstration.
La Syrie qui paye, près d’un siècle plus tard, l’artificialité de sa création au moment de l’éclatement de l’empire Ottoman souffre de divisions tant ethniques que religieuses qui ne lui ont pas permis de développer un sentiment national fort. Le pays existe, mais la nation Syrienne est éclatée.
A l’exception des civils, aucun des protagonistes ou de ceux qui les financent, n’ont un intérêt à l’arrêt du conflit.
Pour les pays du Golfe, pour l’Iran, pour le Hezbollah, le conflit Syrien présente l’avantage du conflit exporté : Il a bien lieu, mais ce sont d’autres qui en payent le prix.
Et dès lors, qu’il est alimenté de l’extérieur, loin de se rapprocher d'une solution, le conflit Syrien s'enfonce dans un processus de longue durée qui risque de ne finir que par l'éclatement du territoire.
C'est dire que pour le moment, il n'y aura probablement pas de "Genève 2" ou alors sans conséquences réelles.
La seule revendication qui unit encore aujourd'hui les groupes rebelles, c'est la volonté du départ de Bachar-Al-Assad, mais il n’y a aucun accord sur les projets de l’après Bachar.
3. UN DEPART TROP RISQUE :
Cependant, pour de nombreux observateurs, ce départ de Bachar, s'il survenait actuellement, risquerait d'être le signal d'une période de chaos politique plus grande encore et d'opérations d'épuration à plus grande échelle, qui pourraient atteindre les différentes minorités.
C’est cette crainte de ce qui pourrait advenir aux minorités après son départ qui constitue le ferment du soutient à Bachar-Al-Assad.
Même les solutions de "partition fédérale" les plus "raisonnables", personne n'en veut pour le moment.
C'est un des principes des conflits. Tant que les partis en présence veulent plus vaincre que négocier, tant que le prix payé ne leur paraît pas trop lourd, il n'y a pas de fin possible.
Et le problème d’un conflit exporté, c’est qu’il n’est pas lourd pour ceux qui l’exportent…