jeudi 31 août 2017 - par GÉOPOLITIQUE PROFONDE

Histoire de la collusion entre le Wahhabisme et le monde Anglo-Saxon (1703-1979) [2/4]

1)  ISLAM ET WAHHABISME, CONTINUITE OU RUPTURE ?

 

Pour mieux appréhender la doctrine du wahhabisme historique[1] et la suite de l'étude, quelques rappels élémentaires s’imposent.

 

Un schisme dans l’islam

 

L’islam traditionnel se divise en deux branches principales : le sunnisme et le chiisme. Tout a commencé à la mort du prophète Mahomet en 632 lors d’une guerre qui éclata entre deux groupes pour sa succession. D’un côté, nous avons les compagnons du prophète et une de ses femmes, Aïcha, qui soutiendront les trois premiers califes (« khalîfa  »)[2], Abu Bakr, Omar et Othman, pour la succession et de l’autre côté, nous avons le gendre et la fille du prophète, Ali Ibn Abi Talib et Fatma ainsi que leurs deux enfants Al-Hassan et Al-Hussein. Les chiites ne reconnaissent pas les trois premiers califes, mais reconnaitront le quatrième, Ali Ibn Abi Talib, au nom des liens du sang, car il était également le cousin de Mahomet. Les soutiens d’Ali et des descendants du prophète seront connus plus tard sous le nom de « chiites » (littéralement partisan ou disciple, sous-entendu d’Ali) tandis que les soutiens des califes seront appelés « sunnites » (ceux qui suivent la Sunna[3]). Cette époque où vivaient Mahomet et ses quatre premiers successeurs, « les califes bien guidés », est néanmoins considérée par tous comme l’âge d’or de l’islam.

Le droit coranique ou la jurisprudence islamique (« fiqh ») repose sur deux sources fondamentales : le Coran et la Sunna. Cette dernière est constituée des récits des faits et gestes du prophète (« hadîth »), compilés dans des recueils. Les chiites ne reconnaissent pas la Sunna et considèrent que l’imam est la seule source d’autorité spirituelle et temporelle de l’islam. Les sunnites quant à eux considèrent ce dernier comme un simple dirigeant de prière. Cette jurisprudence islamique repose également sur des sources secondaires pour déterminer la solution d’un problème de droit non prévu par les textes du Coran et de la Sunna. Elles sont fondées sur la raison humaine des théologiens-juristes comprenant le raisonnement par consensus (« ijma »), le raisonnement par analogie (« qiyâs ») et l’effort d’interprétation (« ijtihâd »).

Concentrons-nous sur le courant sunnite composé de quatre écoles se reconnaissant mutuellement. Elles sont nées du nom de quatre grands jurisconsultes que l’on nomme les fondateurs : Abû Hanîfa (mort en 767) donna l’école hanafite, Mâlik Ibn Anas (mort en 796) donna l’école malikite, Al-Chafii (mort en 820) donna l’école chafiite et enfin Ibn Hanbal (mort en 855) donna l’école hanbalite. Chaque école développa ses propres règles d’interprétations ; les écoles malikite et hanafite étant considérées comme les plus libérales, tandis que l’école hanbalite serait la plus littéraliste dans l’interprétation des sources.

 

Le wahhabisme, schisme ou retour à l’orthodoxie ?

 

La question wahhabite mérite une focalisation particulière sur l’école hanbalite. Au IXe siècle, sous le califat abbasside d’Al-Mamûm, les hanbalites contestèrent son pouvoir et s’opposèrent à son « islam éclairé » (comprendre trop libéral). En effet, l’interprétation du Coran et la Sunna de l’école hanbalite est particulièrement codifiée : l’interprétateur doit être un savant (« ouléma »), la situation interprétée ne doit pas faire partie du Coran ni de la Sunna (sinon l’application de ces deux sources doit être littérale) et la solution préconisée doit faire l’unanimité dans la communauté des musulmans (qui comprend les spécialistes de l’islam et non les masses populaires). Cette école juridique à ceci de particulier qu’elle refuse toute prise en compte du contexte historique et social dans l’écriture du Coran et de la Sunna ; aucune adaptation n’est donc possible selon les époques et les régions[4].

Le wahhabisme n’a pas innové sur le plan juridique et a suivi les préceptes hanbalites. Après les dernières conquêtes des années 1920, Ibn Saoud imposa le Pacte de Nejd en remplaçant les oulémas, les juges et les imams des trois rites pour imposer le seul hanbalisme[5]. Le wahhabisme historique le plus puritain se posait en négation des courants juridiques, sauf le hanbalisme dont il se réclamait tout en le dépassant par sa radicalité. Lors de la prédication puritaine des trois émirats saoudiens, les théologiens de l’ordre établi d’alors étaient considérés par les wahhabites comme responsables de la décadence de l’islam, ce qui amena à une désacralisation des jurisprudences traditionnelles. L’expertise et l’autorité des oulémas dans l’effort d’interprétation (« ijtihâd ») des sources islamiques furent donc confisquées par le wahhabisme. Ceci laissa place au libre examen du Coran et de la Sunna et à une nouvelle autorité religieuse wahhabite censée être plus légitime. Un certain parallélisme avec la réforme protestante du XVe siècle, rejetant également l’autorité en matière de savoir et prônant la liberté de jugement, peut être établi[6]. La lecture du Coran et de la Sunna sans médiation exégétique[7] traditionnelle fait du wahhabisme une doctrine immuable dans son objectif d’islam purifié, car ramenée aux principes originaux des pieux prédécesseurs (« salaf  ») des trois premières générations de l’islam (VIIe et VIIIe siècle)[8].

Si le wahhabisme s’appuie sur le hanbalisme, c’est principalement à travers la pensée du jurisconsulte syrien Ibn Tamiyya (1263-1327)[9], aujourd’hui considéré comme le père du fondamentalisme sunnite. Ibn Tamiyya s’opposait à l’apport de la philosophie grecque dans les sciences islamiques et rejetait ainsi toutes sciences étrangères et innovations (« bidâa »)[10]. En plaidant pour le retour aux sources orthodoxes de l’islam, il rejetait violemment les religions infidèles (juive, chrétienne et païenne) et fut célèbre pour son intransigeance envers les autres courants de l’islam, majoritaires à son époque[11].

Ses écrits firent le pont entre le hanbalisme et le wahhabisme, ainsi que pour tous les courants radicaux de l’islam politique contemporain qui suivront, pour lesquels il représente la principale influence et source théologico-juridique. Si sa pensée fut l’une des principales références théologiques du courant wahhabite, il est à noter qu’il existait également des courants s’inspirant profondément d’Ibn Tamiyya tout en s’opposant vigoureusement à la doctrine wahhabite à l’époque. C’est le cas par exemple du père du néologisme « wahhabisme » (« wahhabiyya ») qui n’était autre que le propre frère de son fondateur, Suleyman Ibn Abdelwahhab, qui s’opposa à cette doctrine en se fondant sur les écrits d’Ibn Tamiyya dans son ouvrage Les foudres divines réfutant le wahhabisme (« Al-sawaiqal-ila-hiyya fi al-radd ala al-wahhabiyya ») écrit en 1753[12]. Il existait également des courants hanbalites non wahhabites, notamment dans la région du Qassim, qui posèrent beaucoup de problèmes de sédition à Ibn Saoud, deuxième du nom[13].

Il est nécessaire de garder à l’esprit que le dogme wahhabite bouleversait les structures sociopolitiques d’antan, ce qui expliquerait un certain consensus des concernés dans sa diabolisation[14]. L’accusation principale sur le mouvement puritain était son zèle dans ses proclamations d’apostasie (« takfîr  »), sur les populations qui refusaient d’abroger leurs croyances populaires, souvent suivies de l’allégeance au « message » ou du meurtre. Mohammed Ben Abdelwahhab, ambitionnant d’exporter sa prédication, envoyait des lettres à l’establishment religieux de l’époque (imams, savants et théologiens) en pointant leur responsabilité dans l’affaiblissement de l’islam et en les conviant à se conformer à sa doctrine. À demi-mot, il semblerait que beaucoup de personnalités religieuses de l’époque partageaient l’avis du cheikh Abdelwahhab concernant par exemple le sujet du culte des tombes ou des saints[15].

Pour nuancer quelque peu les propos, il semblerait que le cheikh Abdelwahhab n’était pas aussi virulent dans son opposition aux quatre écoles du sunnisme, au chiisme et au soufisme[16] (à l’instar d’Ibn Tamiyya), auxquels il reprochait des points précis (par exemple l’interprétation allégorique des discours et actions du Prophète Muhammad) qu’il détaillait dans des correspondances écrites[17]. Comme Ibn Tamiyya, ces deux personnages étaient et sont toujours diabolisés, à tort ou à raison, dans leur opposition aux différents courants de l’islam.

Il est tout de même intéressant de noter que ce même Abdelwahhab a été accusé d’être un manipulateur, un égaré, un hypocrite et autres noms d’oiseaux[18] par de grands savants de l’époque, de régions (Nadjd, Hedjaz, Yémen, Irak) et de rites différents, y compris le sien, le hanbalisme[19]. Ses propres maîtres, M. Ibn Suleyman Al-Kurdi et M. Ibn Hayet Al-Sanad, l’ont soupçonné d’athéisme tandis qu’on lui déniait le statut de savant (« mujtahid  ») capable d’interpréter le Coran, car ne maitrisant pas la douzaine de sciences religieuses nécessaires[20].

 

Une doctrine puritaine mobilisatrice et destructrice

 

À l’époque de cette prédication du wahhabisme historique, la violence de la société était présente dans tous les camps. Mais ce courant se distingua particulièrement par des destructions atypiques, en s’attaquant d’une manière plus virulente qu’Ibn Taymiyya au culte des saints et autres coutumes païennes préislamiques. L’alliance saoudo-wahhabite détruisit systématiquement tout lieu de pèlerinage (tombes, reliques et sanctuaires) qui amenait selon eux à une forme de polythéisme déguisé ou associationnisme (« shirk »).

Au cours de leurs péripéties, l’alliance issue du Pacte de Nejd détruira le dôme du tombeau du fondateur du chiisme, des copies rares du Coran, des lieux saints, des sanctuaires, des tombeaux de prophètes, la coupole de la source Zamzam, les dômes des tombes du grand-père et de la première épouse de Mahomet, la mosquée du prophète (« Al-Masjid Al-Nabawi ») et des monuments historiques de l’islam à Kerbala, à Médine et à la Mecque entre 1806 et 1925. Une destruction importante s’était déroulée en 1806, lorsque les wahhabites avaient occupé Médine et avaient saccagé le cimetière Al-Baqî.

 

LE CIMETIERE AL-BAQI A MEDINE, OU REPOSENT DES MEMBRES DE LA FAMILLE ET DES COMPAGNONS DU PROPHETE, AVANT SA DESTRUCTION EN 1925 PAR IBN SAOUD

 

                               LE CIMETIERE AL-BAQI A MEDINE DE NOS JOURS

 

Par analogie, il est possible d’avancer que l’Organisation Etat islamique, sévissant actuellement un peu partout dans le monde, est l’héritier direct du wahhabisme historique du XVIIIe siècle issu du Nejd. Des similitudes s’établissent notamment au niveau des modes opératoires, de l’expansion militaire, du radicalisme proche des Ikhwans wahhabites et enfin dans cet unique objectif d’établir l’islam puritain orthodoxe comme source de juridiction totale. Contre les ennemis des wahhabites, la doctrine semblait simpliste : l’excommunication de tout musulman coupable d’idolâtrie, établie dans le livre d’Abdelwahhab, L’unicité de Dieu (« Kitâb ut-Tawhîd »). Une conception peut-être à relativiser comme nous l’avons dit, compte tenu de la structure politico-religieuse de l’époque. La croyance en un Dieu unique (« Allah ») sans associé, sans égal et sans intercesseur (« tawhid ») est le socle du wahhabisme. L’unicité est primordiale pour éviter son contraire, l’associationnisme (« shirk »), et le piège christique de la Trinité divine (considérée comme une forme de polythéisme). Selon d’autres avis, l’excommunication (« takfîr ») n’était pas prononcée contre les péchés des musulmans, mais contre ceux qui continuaient à associer Dieu et qui lui attribuaient des égaux[21]. Ceci justifiait la guerre sainte (« jihad ») contre ces musulmans excommuniés et rendait licite par décret religieux (« fatwa ») les exactions diverses commises contre eux : une première dans l’histoire de l’islam[22]. Ce fut particulièrement les chiites qui furent ciblés, car accusés de diviniser Ali, le quatrième calife et gendre du prophète Mahomet.

 

La pérennisation de la doctrine wahhabite

 

Pour dépassionner quelque peu le mouvement wahhabite, notons qu’il a existé au même siècle (XVIIIe), dans des zones géographiques différentes, d’autres fortes personnalités sans lien structurel entre elles, prônant le retour à une croyance islamique orthodoxe[23]. Mais le succès de la prédication (« da’wa  ») nejdite a quelque peu étouffé ces autres mouvements par sa capacité à subsister même après la mort de ses initiateurs.

Cette prospérité peut s’expliquer par plusieurs facteurs déterminants. D’abord, c’est bien entendu le soutien britannique qui fut déterminant, suivi de la prise de contrôle définitive de la région du Hedjaz, où se trouvaient deux grandes villes saintes de l’islam, La Mecque et Médine. Le contrôle de ces lieux saints de l’islam donne à ses maîtres la suprématie sur l’islam mondial (tous courants confondus). Le pèlerinage à La Mecque (« hadji  ») faisant l’objet de vénération, les pèlerins du monde entier allaient désormais être sous l’influence de la doctrine wahhabite et propager ensuite « le message » une fois rentrés chez eux. Le pèlerinage était également une importante source de revenus, générant environ 300 millions de francs annuels dans les années 1930[24]. C’était également le marché des esclaves qui se trouvait à La Mecque, dans une Arabie où la justice wahhabite appliquait la loi du Talion[25]. L’esclavage fut officiellement aboli en 1962 par Fayçal II et disparaitra lentement, voire très lentement lorsqu’on constate que les immigrés actuels peuvent être battus, exploités, violés sans conséquence pour leurs bourreaux[26]. Enfin, l’exploitation des plus importantes réserves de pétrole du monde par les compagnies américaines a fourni au Royaume saoudien des ressources lui permettant de se pérenniser définitivement et de propager la doctrine sur la planète.

Tout comme le puritanisme protestant a finalement supplanté le catholicisme, le même phénomène s’est déroulé avec le wahhabisme et l’ancienne orthodoxie islamique. Certaines thèses laissent même penser que ce puritanisme radical par sa violence et son intolérance serait utilisé pour détruire l’islam proprement dit, de l’intérieur...[27]

 

(A suivre)

 

Franck Pengam

 

 

[1] Le « wahhabisme historique » antérieur au « wahhabisme d’État » fondant l’Arabie Saoudite moderne, doivent être différenciés par l’extrémisme poussé du premier alors que le second étatisé serait plus « modéré ». Ces deux concepts ont été empruntés à Aïssam Aït-Yahya, op. cit., 2015.

[2] Khalîfa signifie littéralement « successeur » (sous-entendu du prophète).

[3] Le terme Sunna regroupe les enseignements du prophète et les règles d’Allah.

[4] Anne-Clémentine Larroque, Géopolitique des islamismes, Puf, 2016, p.14.

[5] Hamadi Redissi, op. cit., p.78.

[6] Jean Michel Vernochet, Les égarés, le wahhabisme est-il un contre islam ?, Sigest, 2013.

[7] L'exégèse est l'étude approfondie et critique d'un texte.

[8] Les « salaf » désignent les trois premières générations de l'islam en lien et constitués par 1) le prophète de l'islam Mahomet et ses compagnons (les Sahaba), 2) la génération suivante des Tābi‘ūn (qui ont connu des Sahaba) et 3) la dernière génération des Tābi‘ at-Tābi‘īn (qui ont connu des Tābi‘ūn).

[9] Hamadi Redissi, op. cit., p.154.

[10] Le rejet des innovations vient d'un hadith, le 5e des 40 hadith de l’imam Al-Nawawi (1233-1277) : « Celui qui apporte dans notre religion une innovation qui lui est étrangère, on doit rejeter tout ce qu'il dit », rapporté par Boukhari et Mouslim.

[11] Anne-Clémentine Larroque, op. cit., p.19 et 20.

[12] René Naba, L’Arabie Saoudite, un royaume des ténèbres, Editions Golias, 2013, p.261.

[13] Aïssam Aït-Yahya, op. cit., p.153.

[14] Pour constater les arguments et le nombre conséquent des détracteurs du wahhabisme à cette époque, voir Hamadi Redissi, op. cit., p.97 à p.109.

[15] Aïssam Aït-Yahya, Textes et contexte du Wahhabisme, Nawa, 2015, p.63.

[16] Le soufisme désigne le cœur initiatique et ésotérique de la tradition islamique. Il est lié aux orthodoxies sunnite et chiite.

[17] Aïssam Aït-Yahya, op. cit., p75.

[18] Hamadi Redissi, Le Pacte de Nadjd ou comment l'islam sectaire est devenu l'islam, Seuil, 2007, p.136.

[19] Ibid, p.97.

[20] Ibid, p.101 et 131.

[21] Aïssam Aït-Yahya, op. cit., p.93.

[22] Wahhabite connection : comment l’Arabie saoudite a déstabilisé le monde en exportant son islam radical depuis 40 ans, www.atlantico.fr/decryptage/wahhabite-connection-comment-arabie-saoudite-destabilise-monde-en-exportant-islam-radical-depuis-40-ans-david-rigoulet-roze-1838403.html/page/0/1.

[23] Nous pouvons citer le Cheikh Waliyul-Lah en Inde, le sultan Muhammad Ibn Abdallah au Maroc, le cheikh Utman dan Fodio en Afrique subsaharienne ou encore le cheikh Muhammad Ash-Shawkani au Yémen, voir Aïssam Aït-Yahya, op. cit., p.24.

[24] Xavier de Hauteclocque, op. cit., p.41.

[25] Ibid, p.115.

[26] Ceci se déroule en 2016, au Qatar et en Arabie Saoudite, voir l’entretien avec Mustafa Qadri, Géopolitique des migrants, Diplomatie-Les grands dossiers n°31, p.75.

[27] Pour creuser sur ce propos, voir Youssef Hindi, Occident et Islam, Sources et genèse messianiques du sionisme, De l'Europe médiévale au choc des civilisations Tome 1, Sigest, 2015.



21 réactions


  • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 31 août 2017 08:13

    « Tout comme le puritanisme protestant a finalement supplanté le catholicisme, le même phénomène s’est déroulé avec le wahhabisme et l’ancienne orthodoxie islamique. »


    Voilà un raccourci qui va plaire à François.

  • zak5 zak5 31 août 2017 10:53

    Un merci a l’auteur de rappeler que le wahabisme découle du hanbalisme qui est une école officielle du sunnisme et pas du tout une branche hérétique. C’est pourtant une évidence, mais il y a nécessité pour certains de faire ce rappel.

    Pourquoi l’on n’ose dire aujourd’hui que les aouds sont tout ce qu’il y a de musulmans ? Tout simplement parce que l’on n’ose même pas dire qu’il existe un Islmam intégriste et intolérant. l’ont prefere se bercer avec l’illusion de « sipasçalislam ! »

    et bien oui c’est aussi cela l’islam, un islam intégriste et intolérant qui a toujours existé, dès l’aube de l’islam, qui s’est répandu et qui a fini par s’imposer. Alors pourquoi s’est-il répandu ? la faute aux occidentaux qui soutienne l’AR et les pétromonarchies ? Oui, certainement, mais pour expliquer cette influence qui a atteint les extrémités du monde musulman, il faut aussi croire que les musulmans étaient tout à fait disposés à accepter cette doctrine, comme ils l’ont acceptée suite à la chute des mutazilites VS hanbalites

    En ce moment, plus de deux millions de musulmans sont en arabie saoudite pour le hadj (ils pourraient etre plus, mais c’est l’AS qui limite le nombre, les files d’attentes pour ce périple sont impressionnantes), beaucoup sont des musulmans qui vinent en occident. Ils prient avec les saouds, ils écoutent les prêches des saouds et reviennent faire la fêtes chez eux tous fières d’avoir accompli le hadj.


    • bouffon(s) du roi bouffon(s) du roi 2 septembre 2017 11:51

      @zak5

      N. O. — “Quelques excités” ? Mais on le dit et on le répète : le fondamentalisme islamique représente aujourd’hui une menace mondiale. 

      Z. Brzezinski. — Sottises ! Il faudrait, dit-on, que l’Occident ait une politique globale à l’égard de l’islamisme. C’est stupide : il n’y a pas d’islamisme global. Regardons l’islam de manière rationnelle et non démagogique ou émotionnelle. C’est la première religion du monde avec 1,5 milliard de fidèles. Mais qu’y a-t-il de commun entre l’Arabie Saoudite fondamentaliste, le Maroc modéré, le Pakistan militariste, l’Egypte pro-occidentale ou l’Asie centrale sécularisée ? Rien de plus que ce qui unit les pays de la chrétienté…

      Ici


    • bouffon(s) du roi bouffon(s) du roi 2 septembre 2017 11:53

      @bouffon(s) du roi

      Et rappelons aussi ceci :

      La matrice du terrorisme de Youssef Hindi


  • Lyseron 31 août 2017 11:00

    Merci pour cette suite d’articles très intéressante.


    Il est vrai que les Saoudiens ont détruits de nombreux monuments qu’ils associaient à l’idolâtrie mais ils ne sont pas allé jusqu’à détruire Al Masjid al Nabawi (la mosquée du Prophète) ) à Médine qui existe encore aujourd’hui. Peut-être ont-ils détruits quelques œuvres qui s’y trouvaient ?

    Il s’agit justement d’un des 3 lieux les plus importants de l’Islam sunnite avec Al Masjid al Haram (la mosquée sacrée) à La Mecque où se trouve la Kaaba et Al Masjid Al Aqsa (la mosquée de Jérusalem). Le courant wahhabite continue de garder ses monuments pour des raisons religieuses et symboliques, voir politique (pour la mosquée Al Aqsa et son lien avec le nationalisme palestinien) mais aussi économique lorsqu’il s’agit des mosquées Al Haram et Al Nabawi car ce sont d’importantes sources de revenus et de prestige pour le royaume saoudien (avec le Haj).

    Plusieurs rois saoudiens ont même agrandis cette mosquée en raison de l’important nombre de pélerins depuis la création du royaume en 1932.

    J’attends la suite de cette série d’article avec impatience. Merci encore pour votre travail.

    • Pascal L 1er septembre 2017 13:27

      @Lyseron
      Tout à fait. Heureusement qu’ils n’ont pas tout détruit, car ces lieux sont indispensables pour comprendre les débuts de l’Islam. En particulier la direction de la qibla des premières mosquées nous montre bien les hésitations des débuts de l’Islam. Par ailleurs les destructions de La Mecque entreprises par les Saoudiens montrent sur les photos des chantiers qu’il n’existe pas de ville ancienne sous la ville en cours de destruction. Tous ces éléments confirment l’établissement relativement récent de la ville de La Mecque. Il semblerait qu’elle a pu être établie au plus tôt par le calife ʿAbd Allah ibn Al-Zubayr qui ne régnait que sur l’Arabie et la Perse jusqu’en 692 mais pas sur la Syrie avec les premiers lieux saints (Jérusalem, Petra, le mont des figuiers, cité dans le Coran ou Khân el-Qurashiyé, un des lieux probables d’où Muḥammad est originaire). Les qibla n’ont commencé à se tourner vers la Mecque que vers 725 et ce n’est devenu une obligation qu’en 822. Il semble que la Pierre noire de forme cubique était précédemment à Petra, détruite par un tremblement de terre en 747.


  • owen meany 31 août 2017 12:05

    Bons articles qui me dépêtrent du fouillis qui a formé l’A.S.

    Au 1er article, les wahhabites nous rappellent une règle toute simple de la guerre : c’est le plus féroce qui gagne. Et non pas le gentil, parce que le méchant à tort, comme le veut notre archétype.

    Le 2ème rappelle l’antagonisme entre applicabilité et perfection d’un dogme/enseignement. Le dogme organise un groupe/peuple, mais les réalités nécessitent de l’adaptation, de l’interprétation, et rongent le dogme. Pour le maintenir, il doit être épuré, nettoyé des scories que le temps fabrique.
    Les Wahhabites sont les meilleurs gardiens de l’Islam.
    Les protestants ont doublé les catholiques en vivifiant les textes (et ont créé les USA).
    C’est le retour régulier à la Tradition qui permet la permanence des juifs : James A Michener, avec « La Source », a très bien décrit toute l’épopée du peuple Hébreux, de Ur à nos jours, avec les réajustements sanglants et chroniques de son histoire pour le maintenir.
    Le nazisme est la même chose : épurer la race pour maintenir la civilisation la plus aboutie.

    Il y a encore 3 monothéismes, la logique est qu’il n’en reste qu’un...Soit universaliste, soit ségrégationniste. Si c’est l’universaliste, il finira par mourir, comme toute espèce envahissante qui détruit un biotope (nous...). Si c’est le ségrégationniste, il peut durer, comme toute société de castes.

    Je vais me prendre un café...


    • sokom 1er septembre 2017 11:49

      @owen meany
      Il y a du génie dans votre analyse


    • Pascal L 1er septembre 2017 13:59

      @owen meany
      Dieu n’a pas inventé la bureaucratie.

      Le juridisme qui aboutit à créer des règles strictes est typique d’une religion où Dieu est absent. Ne sachant pas quoi faire pour obtenir le salut promis, les hommes inventent des règles qui selon eux peuvent optimiser les chances de réussites. Le Christianisme n’a pas besoin de règles grâce à la présence vivante du Christ qui se manifeste très souvent à l’humanité et nous rappelle sans arrêt que seul l’amour peut nous sauver et que cet amour va bien au-delà des règles et des lois que nous pouvons inventer. 

      Le nazisme comme beaucoup d’autres idéologies est un messianisme, c’est-à-dire une imitation du salut Chrétien, mais où le salut devient terrestre. Il faut donc purifier le monde pour obtenir ce salut. Cette purification ne peut se faire qu’en effaçant de la surface de la terre tous ceux qui se mettent en travers du salut. Il devient nécessaire de désigner ces ennemis pour permettre le nettoyage : Juifs, polythéistes, capitalistes et bien d’autres.

      Il existe beaucoup plus que 3 monothéismes et je ne compte pas toutes les personnes qui se prennent pour le Dieu unique. Si nus nous basons sur les livres sacrés, on peut voir des différences théologiques importantes entre d’un côté le Judaïsme/Christianisme et l’Islam de l’autre côté. Le relativisme n’est donc pas possible. Ce n’est pas réductible à partir des livres. Mais si Dieu est effectivement unique, il doit laisser des traces de son existence à l’humanité ailleurs que dans les livres. Il revient à chacun de faire sa propre expérience de l’existence de Dieu, les expériences individuelles ne sont pas transmissibles car non démontrables. Le témoignages de ceux qui ont fait cette expérience peut donner une idée d’un chemin possible mais chaque expérience est unique.

    • owen meany 1er septembre 2017 17:37

      @Pascal L

      Je m’intéressais plutôt au temps long de l’histoire. Le pacte du Quincy, c’était simplement un Big Deal : à nous les Ricains le pétrole quasi perpétuel, à nous les Saoud l’argent qui coule à flot. Rien d’autre. Sauf que, Franck Pengam va sans doute nous le montrer, ce pacte devient l’enjeu de projets messianiques concurrents.

      Je pense que vous êtes au courant que les trois monothéismes viennent du même Livre. Un peu comme si c’était trois faux siamois enfermés dans un même corps : faut faire avec, mais c’est chiant aussi.

      Le Livre, ce sont les Hébreux qui l’ont fabriqué, pas pour chanter l’amour universel, simplement pour unir 12 tribus un peu maltraitées par les voisins encombrant de l’époque : on a notre Dieu, il nous aime et même il peut être méchant avec les autres ce qui nous rassure.
      Les Chrétiens ont piqué le bouquin, en ont fait un vieux grimoire pour y ajouter les évangiles et expliquer au monde comment on va tous s’aimer (bon, ça ne marche pas toujours...). Le juif voleur, oui... Si votre voisin vous pique du matos dans votre jardin, vous ne vous gênerez plus pour lui faire la même chose. Et, de fait, il ne se gêne pas.
      Enfin les Arabes qui se sont dit, boah, on peut faire aussi, le Livre Divin pour justifier le sabre levé...

      Vous devriez essayer l’esplanade du Saint Sépulcre, à 17 h à Jérusalem. On entend la messe des orthodoxes, on entend les lamentations des juifs en contrebas, devant le Mur des lamentations, en face, depuis le bulbe d’or brillant sous le Soleil qui abrite le Rocher remis au sol par l’Ange Gabriel, monte le chant du Muezzin. Saisissant.

      Le Livre aux 3 monothéismes, cela peut ressembler à un gros casse-noix broyant un peu beaucoup l’humanité.

      En fait, il faut regarder du côté des Sumériens, parce que c’est de là que vient l’Eden : c’est un bagne, un vrai camp de travail. Le Dieu bienveillant, c’est un esclavagiste (c’est même pour cela que les arbres de la connaissance et de la vie éternelle étaient interdits), Les sumériens ont expliqué comment s’en sortir.
      Ou bien que Poutine fasse sont Eurasie, avec les Chinois et les Indiens, une portion d’humanité pas trop encombré par ces délires messianiques. Mais il faut qu’il se magne un peu plus, je ne sais pas ce qu’il fout.


    • Pascal L 1er septembre 2017 19:33

      @owen meany
      Je suis bien au courant pour les trois livres, mais la filiation est loin d’être évidente. Dans le Coran les rappels à la Bible sont plutôt du niveau subliminal et reprennent un contenu complètement différent. Il n’y a rien à voir entre le ʿĪsā du Coran et le Jésus des Evangiles (et ʿĪsā signifie Esau, l’ennemi héréditaire d’Israël et non Jésus). D’un point de vue théologique, le Coran est issue d’une secte juive qui a disparue et que nous appelons aujourd’hui judéonazaréens (Ils s’appelaient Nazaréens, mais n’ont pas de filiation connue avec les Nazaréens, les tous premiers Chrétiens - les deux appellations sont disjointes dans le temps et l’espace). Les Musulmans disent que l’Islam est une religion du livre, on ne peut en dire autant du Christianisme qui est la religion du Christ ressuscité et vivant. Celui-ci se manifeste souvent à ceux qui le prient et le fait que vous ne l’ayez jamais croisé ne veut pas dire que cela ne vous arrivera jamais. Les témoignages sont nombreux et complètent parfaitement ceux qui sont déjà dans la Bible. Le fait que la Bible est une somme de témoignages et non la parole dictée par Dieu fait que l’étude critique est possible. Ne vous gênez pas, cela fait plusieurs siècles que les exégètes scientifiques travaillent dessus. Consultez les avant d’écrire des bêtises. Le livre aux 3 monothéismes, ça n’existe pas. Le livre pour unir les tribus, c’est une idée parfaitement musulmane. Ella apparaît également chez le roi Josias qui a fait mettre la Bible par écrit en rassemblant aux moins deux traditions différentes (et peut-être quatre traditions), Mais si vous enlevez ces scories, ce qui reste devient plus intéressant encore, ces traditions racontent une même réalité sur la miséricorde et l’amour de Dieu. Le fait est que les Juifs et les Chrétiens ont mis très longtemps à comprendre, malgré quelques personnes exceptionnelles qui ont bien essayé d’expliquer : les prophètes juifs et les saints chrétiens.


      La notion d’Eden dans la Bible n’est en aucun cas le salut promis par Dieu qui n’est pas terrestre. Et c’est mieux ainsi, car personne ne doit supprimer ceux qui s’opposent à son établissement. Pour un Chrétien, le paradis terrestre peut être un lieu où l’absence de connaissance de Dieu permet tous les excès. Sans la connaissance de Dieu, vous pouvez être Dieu. Est-ce que les financiers qui vivent aujourd’hui de la prédation de l’humanité ont bien quitté le paradis terrestre original ? Je n’en suis pas sûr, car il font bien ce qu’ils veulent sans limites. C’est la connaissance de Dieu qui permet d’en sortir et de faire avancer l’humanité.
      Dieu étant extérieur à notre humanité, il nous est impossible d’en avoir une connaissance parfaite, mais la somme des témoignages permet de préciser notre savoir. Personne n’a rien piqué à personne, c’est juste l’Etat de la connaissance qui évolue et ce n’est pas fini.

    • owen meany 1er septembre 2017 23:49

      @Pascal L

      Isa Ibn Maryam, ce n’est pas Jésus fils de Marie ?
      D’ailleurs Maryam n’a pas de mari, au point qu’elle doit demander auprès d’Allah bénédiction qu’elle reçoit. Marie a pour compagnon Joseph, qui n’est pas le géniteur puisqu’elle est fécondée par l’intercession du même ange Gabriel que le Coran.
       
      Adam est créé à façonné à partir de l’argile, et l’esprit lui est insufflé : idem Torah, Bible Talmud
      Adam et son épouse vivaient nus, sans fin ni soif au Paradis avec interdiction d’approcher l’arbre. Ilbis a fait manger le fruit et le couple a été chassé du Paradis. idem les trois monothéismes.
      Ibrahim, Noé, Moussa, Ismael, Yussuf, Jacob... les 3 monothéismes revendiquent les mêmes prophètes avec les mêmes histoires, à quelques variantes près. 
      Le Coran parle régulièrement des chrétiens et des juifs, de façon ambivalentes selon les versets, plus sévères contre les juifs.

      Évidemment que c’est le même corpus. c’est plus compliqué pour le Coran après la Torah et la Bible : faire pareil mais différemment.
      Vous n’échappez pas à cette ambivalence dans votre commentaire : vous refusez la filiation entre les trois livres et plus loin vous revendiquez une même réalité divine. Vous voyez comme vous ne vous en sortez pas vous même. C’est le principe des guerres de religions.
      Et les chrétiens, c’est l’Ancienne Alliance (Bible) + la Nouvelle Alliance (Évangiles). C’est ainsi.

      Pour l’Eden (Edin) renseignez-vous, cela veut dire « la plaine » en sumérien (époque bien antérieur aux juifs d’Egypte). Au Sud de l’actuel Irak, administré par les frères Enlil et Enki, qui dirigent les dieux : les régnants Annunaki et les travailleurs Igigi, tellement épuisés à la tâche qu’ils se sont révoltés. Enki a créé l’homme, mais mortel et imparfait à la demande de Enlil, pour remplacer les Igigi. Mais il voulu aider les hommes contre la volonté de Enlil (thématique des faux frères), en leur redonnant des pouvoirs (thématique prométhéenne). Il leur a donné le fruit de la connaissance (déguisé en serpent, Ea), mais n’a pas réussi a leur fournir le fruit de la vie éternelle.
      Les éléments de la genèse sont déjà là, sauf que les rôles des personnages sont inversés par les Hébreux et le bagne est transformé en Paradis. Et Enki/Ea, le serpent est maudit.

      Maintenant, si on me dit que la Théogonie, le Bhagavad Gita, le Tao To King, le Popol Vuh, ou le Mahayana sont des livres de religions différentes, je ne peux que confirmer.


    • owen meany 1er septembre 2017 23:57

      @owen meany

      Et Abraham vient de Uruk, ville de Sumer. Toute le descendance inscrite sur les tablettes sumériennes/Akkadiennes a été reprise (et changée) pour être remise dans la Torah/Bible.


    • Pascal L 2 septembre 2017 15:45

      @owen meany
      « Isa Ibn Maryam, ce n’est pas Jésus fils de Marie ? » ->

      C’est ce que disent les Musulmans, mais ce nom pose un problème. ʿĪsā est un nom créé par les Juifs Rabbanites qui ne pouvaient dire « Dieu sauve » en prononçant le nom de Jésus. En enlevant une lettre, on fait de Jésus un ennemi d’Israël en transformant son nom en Esau qui peut être considéré comme une marque de mépris pour les Chrétiens. Les Arabes chrétiens n’ont jamais utilisé le nom de ʿĪsā et l’utilisation du nom par les Musulman montre une filiation juive plutôt que chrétienne de l’Islam.
      L’ange Gabriel est d’une utilisation tardive dans le Coran. Au départ, le discours de Muḥammad est très eschatologique et annonce un retour imminent de ʿĪsā qui était le personnage principal de l’Islam. Ce retour ne s’est pas produit et le Coran a évolué pour faire une religion plus arabe. Muḥammad est devenu le personnage central et la trinité s’est transformée pour la nier. Ainsi, on voit bien sur les Codex anciens les grattage de l’Esprit Saint qui devient l’Esprit du Saint, donc Gabriel qui dicte le Coran à Muḥammad. Le monothéisme strict dans le Coran est assez tardif, probablement au 8ème siècle.

      « Adam est créé à façonné à partir de l’argile, et l’esprit lui est insufflé » ->
      L’interprétation littérale est une injure pour la science. Le livre de la Genèse ne parle que de Dieu et de sa miséricorde et le récit n’est que le support d’un récit théologique qui n’aurait pas pu être transmis oralement sans le support d’un récit. Si vous aviez lu le livre de la Genèse, vous auriez remarqué qu’il existe un deuxième récit de la création qui est différent et reprend une autre tradition. La science dans le livre de la Genèse est la science connue à l’âge du bronze et rien d’autre.

      « les 3 monothéismes revendiquent les mêmes prophètes avec les mêmes histoires, à quelques variantes près » -> 
       en vous concentrant sur les histoires, vous avez perdu l’essentiel : l’amour et la miséricorde de Dieu qui malheureusement ne transparait pas dans le Coran. Que les premiers Musulmans ait préféré les récits merveilleux de la Bible à la théologie, c’est un fait reconnu. Le fait que ces récits sont dans le Coran signifie simplement que les premiers Musulmans les avaient entendu.

      « Le Coran parle régulièrement des chrétiens et des juifs, de façon ambivalentes selon les versets, plus sévères contre les juifs. » ->
      Le Coran est né dans un milieu ou les Juifs et les Chrétiens étaient majoritaires. L’ambivalence est la conséquence des modifications successives du texte du Coran. De nombreux exégètes ont retrouvé une bonne partie de ces modifications. Les altérations du textes sont partout. L’utilisation d’une écriture défective (16 caractères comme l’araméen) des premiers codex permet beaucoup de modifications : un mot peut avoir plus de 30 sens différents. Je n’imagine pas Dieu dictant un texte avec autant d’ambigüités. Les mots de l’arabe utilisé à cette époque ont vu également le sens changer. « Coran » voulait dire « lectionnaire », « le désiré » est devenu « le loué » pour ne plus faire référence à Jésus et l’écriture de ce mot était mḥmd qui curieusement a fini par désigner Muḥammad. « Nazaréen » désignait au début la secte juive des judéonazaréens à l’origine de l’Islam et le terme à ensuite désigné les Chrétiens qui ne se sont jamais appelé ainsi...
      L’ambivalence vient aussi du passage des scribes omeyyades à Damas aux scribes abbassides à Bagdad qui n’avaient rien compris au contexte syriaque. 

      « Évidemment que c’est le même corpus. » -> certainement pas. Une analyse des textes montre que l’Esprit de ces textes n’est pas du tout le même. La Bible est aussi un ensemble de témoignages sur l’action de Dieu parmi les hommes. Il a donc été écrit par des hommes et l’analyse critique est non seulement autorisée, mais conseillée.

      « plus loin vous revendiquez une même réalité divine » -> Là aussi, certainement pas.
      Le Christianisme n’est pas une religion du livre, mais la religion du Christ ressuscité et vivant. Les Chrétiens font souvent l’expérience de la présence du Christ, ce qu’aucun Musulman ne peut faire. Ces rencontres sont l’occasion d’un enseignement qui éclaire le texte des Evangiles, ce qui fait que cet enseignement est toujours vivant.
      L’Islam est basé sur le fait que le Coran vient de Dieu, directement dicté par Djibril. Mais aucun Musulman ne peut prouver que cela est vrai. Au contraire, l’exégèse scientifique du texte nous montre un texte qui n’a pas arrêté d’évoluer pendant deux siècles au gré des demandes des califes successifs. La théorie mathématique des codes appliquée au Coran a démontré qu’il y avait une cinquantaine d’auteurs pour le Coran (entre 30 et 100). Pour ces exégètes, le Coran est un texte idéologique dont le seul objectif est de rassembler les Musulmans pour faire la guerre et conquérir le monde.

      « Pour l’Eden (Edin) renseignez-vous » -> Les descriptions de l’Eden dans le Coran sont typiquement perses et n’ont pas grand chose à voir avec la Bible. Encore une foi, votre interprétation injurie la science. Vous préférez les histoires merveilleuses à ce que la nature nous dit. Nous savons aujourd’hui comment la terre s’est formée et que pouvaient être les premiers hommes. Cette idée d’Eden dans la Bible est uniquement là pour montrer que l’humanité qui n’avait pas le soucis de Dieu et du salut pouvait être heureuse, mais c’est le cas de toutes espèces animales que nous pouvons observer.
      Il y a une différence majeure entre cet Eden terrestre passé et le paradis. Pour le Coran, ce paradis est très terrestre, on y voit un anthropomorphisme, mais la réalité de Dieu n’est pas celle des hommes. Sa nature spirituelle nous est étrangère, mais on ne peut envisager le paradis que comme un accès à cette nature spirituelle.

    • owen meany 2 septembre 2017 20:34

       @Pascal L

      Je crois qu’on n’arrive pas mettre nos oppositions l’une en face l’autre, qui permettrait de confronter,sans tourner à vide.
      .

      Il n’y a rien à voir entre leʿ
      Īsā du Coran et le Jésus des Évangiles.

      L’exégèse que vous rapportez (il y en a d’autres) indique des perceptions différentes, selon les monothéismes, mais d’un même personnage. Ce que vous laissez dans l’ambiguïté avec vos développements. Idem avec Adam

      Vous confondez l’explication que chaque religion peut avoir, avec l’appropriation que celles ci peuvent se disputer. Ce qui ramène toujours la même question, insoluble et dangereuse dans le mouvement de l’histoire : Si Yahvé, Dieu ou Allah sont au fond un même Dieu que chacun croit a sa manière, si ce sont des dieux différents.

      Pris différemment : si les chrétiens ne s’étaient fondés que sur les 4 Evangiles+ Apocalypse,et avaient rejeté la Torah, ils pratiqueraient leur croyance sans avoir à rejeter les juifs ou au contraire les avoir aux fesses.
      .
      .
      Et puis une citation du Dalaï Lama, en pensant à l’Eden de Sumer :
      Si la science prouve que certaines croyances du bouddhismes sont fausses, alors le bouddhisme les changera.
      Pour sûr, il y des religions moins irrespirables que d’autres.


    • Pascal L 3 septembre 2017 02:51

      @owen meany
      « des perceptions différentes, selon les monothéismes, mais d’un même personnage » -> Comment peut-il s’agir d’un même personnage alors que ce qui en dit dans le Coran n’a rien à voir avec les Evangiles ? Jésus se fait connaître tous les jours à ceux qui le prient, les prophètes sont morts. La vision du Coran est dérivée de la théologie judéonazaréenne qui est une secte hérétique juive qui reconnaît Jésus, mais ne reconnaît pas sa mort et sa résurrection.

      Les exégèses scientifiques utilisent tous les éléments à leur disposition. Il y a les livres, bien sûr, mais aussi les textes historiques, les inscriptions sur les tombes et monuments, les courriers de l’époque... Les linguistes font un travail remarquable en comparant les documents comme le Coran ou la Bible avec les textes écrits à la même époque pour retrouver le sens des mots à cette époque. Les racines de la langue arabe se retrouvent dans l’araméen, le syriaque et le nabatéens. Les racines consonantiques sont les mêmes et permettent également de retrouver des filiations. 
      Les exégètes musulmans partout, eux, d’hypothèses qu’il n’est pas possible de critiquer. Si les hypothèses de départ sont fausses, on peut toujours faire le meilleur raisonnement de la terre, la conclusion sera fausse. Si vous voulez connaître mes sources, il y a : 
       - la thèse de théologie d’Edouard-Marie Gallez : le messie et son prophète - 2005
       - la thèse de Leïla Qadr : les trois visages du Coran - 2014 Leïla Qadr est une spécialiste des langues de l’époque : arabe, araméen, syriaque et nabatéen. Elle fait des rapprochements et retrouve le sens des mots du Coran.
       - la thèse de Jean-Jacques Walter : Le Coran révélé par la théorie des codes - 2014.
       - les études de Dominique et Marie-thérèse Urvoy...
      Un document intéressant sorti de l’Université de Tunis : Les derniers jours de Muhammad par Ela Ouardi. Elle a repris tous les textes de la tradition portant sur les derniers jours de Muḥammad et le moins que l’on puisse dire est que ces textes ne sont pas cohérents. Comment est-il possible de considérer comme fiables les chaînes de transmission. A propos de la mort de Muḥammad, nous savons maintenant par au moins quatre textes historiques qu’il était présent à la bataille de Gaza en 734, soit deux ans après sa mort rapportée par la tradition. Le Coran, par sa langue et son écriture pointe vers le nord de la Syrie et certainement pas vers La Mecque qui n’existait probablement pas à cette époque.

      « Idem avec Adam  » -> Au lieu d’imaginer un Adam tiré de la poussière, imaginez qu’Adam est le premier homme qui a compris qu’il y avait un Dieu d’amour au dessus de lui, que ce Dieu avait un projet pour l’homme et que la réalisation de ce projet impliquait des règles à respecter. Cet Adam là était probablement déjà un chef de tribu. Mais le plus intéressant est que nous sommes tous Adam lorsque nous découvrons pour la première fois les signes de la présence de Dieu. Théologiquement parlant c’est autrement plus intéressant que ce récit aberrant scientifiquement.

      « Si Yahvé, Dieu ou Allah sont au fond un même Dieu que chacun croit a sa manière, si ce sont des dieux différents. »->
      Tout le monde est persuadé qu’il y a un seul Dieu, mais les différences que chacun y fait ne permettent pas de penser qu’il s’agit du même. Il n’y a pas de différence entre le Dieu des Juifs et Dieu des Chrétiens, seul la dimension du Père était connu des Juifs. Par contre, il manque une dimension fondamentale à Allah : l’amour inconditionnel pour les hommes. Le Dieu des Chrétiens s’adresse individuellement à chacun de nous, pardonne nos fautes et le salut ne dépend que de nous. Il nous faut accepter cet amour. Le Dieu que je rencontre régulièrement n’est pas Allah qui évite d’ailleurs soigneusement de se révéler aux hommes. La rencontre personnelle avec le Christ et l’Esprit-Saint est une dimension fondamentale du Dieu des Chrétiens. Celui-ci confirme sans arrêt l’enseignement de l’Evangile et ne parle jamais du Coran. Pour moi, Allah ne peut être Dieu.

      « si les chrétiens ne s’étaient fondés que sur les 4 Evangiles+ Apocalypse, et avaient rejeté la Torah » -> Ce n’est pas l’enseignement de Jésus. Les Chrétiens ont repris la Torah, le livre des Psaumes, les livres des prophètes et d’autres livres du Judaïsme sans aucune altération parce qu’il s’agit bien du même Dieu. Jésus n’a pas aboli les dix commandements, son unique commandement d’amour va plus loin que ces commandements. Quand il se révèle aux hommes, Jésus se présente parfois comme le Dieu D’Abraham, de Jacob et Moïse, ce qui établit la filiation. 
       Les Musulmans ne peuvent pas dire que tel verset de la Bible est juste mais que le suivant a été trafiqué sans apporté les preuves de cette altération. Sinon, c’est de la malhonnêteté.

      « Si la science prouve que certaines croyances du bouddhismes sont fausses, alors le bouddhisme les changera. » -> Les Catholiques font évoluer leurs dogmes depuis 2000 ans sans mettre de « si » au début de la phrase. La science a toujours amélioré notre compréhension des mystères de Dieu. La science peut examiner et critiquer les textes de la Bible et des Evangiles et cet examen renforce la foi des Chrétiens. Ce n’est pas un crime d’apostasie comme pour l’analyse du Coran. Je suis scientifique et je n’ai aucun problème à faire cohabiter mes connaissances scientifiques et ma foi.

      « Pour sûr, il y des religions moins irrespirables que d’autres. » -> Et pour vous qu’est-ce qui rend une religion respirable ? Est-ce la soumission ? Est-ce la peine de mort des apostats ? Est-ce la haine des Juifs et des Chrétiens ?

  • AmonBra QAmonBra 31 août 2017 17:31

    Merci @ l’auteur pour le partage.


    Très intéressant, à suivre donc.


    @ owen meany

    (. . .) « Il y a encore 3 monothéismes, la logique est qu’il n’en reste qu’un...Soit universaliste, soit ségrégationniste. » (. . .) « Si c’est le ségrégationniste, il peut durer, comme toute société de castes. » (. . .)


    Je pense que vous n’êtes pas le seul a envisager cette hypothèse, certains, aussi monstrueusement riches que corrompus, au sens total du terme, entretenant savamment l’ignorance du plus grand nombre, font le même calcul et ont la ferme intention d’en faire une réalité à terme, mais le wahhabisme n’en sera que le dindon de la farce. . .






  • Alter 31 août 2017 18:56

    C’est instructif mais je pense que quand on parle de protestantisme et de wahhabisme nous avons une grande différence et la Réforme bien qu’elle soit raccourcie aux Thèses de Luther est pourtant pluriel. (car tous les protestants désignés ne sont pas forcément pour une interprétation littéral des textes).
    Ensuite, ce qui créa les Etats-Unis ne furent pas les protestants, ce fut des populations protestantes, catholiques (les irlandais étant majoritairement catholique), il y eut aussi des allemands, des italiens (qui étaient catholiques pour rappel), et des dedans des allemands, des anglais, des français (un peu oui) de confession juif... (les français étant eux-même majoritairement catholique) et j’en passe... enfin bref... ceux qui fondèrent les Etats-Unis furent des populations majoritairement européenne (car on sait ce qu’ils en faisaient des amérindiens) et la Constitution Nord Américaine est essentiellement déiste et inspiré de Montesquieu. (des Lumières quoi). Certains pensent que ce serait davantage des Franc-Maçon à l’origine du gouvernement et il est vrai qu’ils ont une place intéressante, sinon assez importante aux Etats-Unis. Le protestantisme d’Etat des anglais (anglicanisme n’est pas forcément un protestantisme pur de retour aux textes bibliques)

    Voilà pour casser le raccourcis. C’est un peu long mais si on est sérieux deux secondes on évite de faire des liens entre deux religions qui n’ont rien à voir. Ce qui créa l’Arabie Saoudite, c’est le pétrole et avoir le soutien des anglais et des américains par la suite permet aujourd’hui de maintenir cet Etat. Le pétrole c’est la raison essentiel de la 2de Guerre Mondiale en Europe.
    Quant à savoir si le wahhabisme va supplanter toutes les autres interprétations de l’Islam je ne pense pas. Le wahhabisme est loin d’être majoritaire et plus vous vous éloignez de la Mecques (qui serait le point de départ de l’Islam selon la tradition islamique), plus vous voyez des islams différents. (en Afrique par exemple, il y a de l’animisme mélangé à l’Islam)
    Tout le monde n’est pas prêt à se plier aux règles islamiques strictes établi par le wahhabisme.
    Qui peut dire si l’Arabie Saoudite perdurera comme Etat ? Encore une question intéressante mais si sa survie dépend des troupes américaines et que l’Oncle Sam s"écroule alors l’Arabie Saoudite s’effondrera. Il faut pas voir une histoire religieuse au soutien des Etats-Unis à l’Arabie Saoudite, c’est purement pour des raisons de pétrole et de dollars. La religion des Etats-Unis c’est le dollars roi et l’Arabie Saoudite jusqu’à présent permets la circulation de cette monnaie de singe comme monnaie de change mondiale.


    • Pascal L 1er septembre 2017 14:30

      @Alter
      Merci pour ces précisions.


      « Quant à savoir si le wahhabisme va supplanter toutes les autres interprétations de l’Islam je ne pense pas. » 
      -> Je pense plutôt que wahhabisme est ce qui survivra de l’Islam. Ce durcissement peut être une réaction face au doute qui s’insinue dans la réflexion sur l’Islam depuis déjà plusieurs siècles de contacts avec l’occident. Aujourd’hui, la réalité de la naissance de l’Islam transparaît clairement des thèses de doctorat qui sortent depuis 2001. La connaissance scientifique de ce qui a pu se passer dans les trois premiers siècles de l’Islam nous montre une réalité bien différente de ce que la tradition peut nous raconter. De ce fait, l’existence même de l’Islam est de plus en plus menacée et ce sont les Musulmans eux-même qui y mettront fin. Déjà des études sortent des Universités de pays musulmans comme l’Université de Tunis. Hela Ouardi, dans son étude sur les derniers jours de Muhammad ne dit pas que la tradition n’est pas crédible, mais elle nous en montre toutes les incohérences.

  • Durand Durand 1er septembre 2017 17:13

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