mardi 13 juin 2017 - par Jean-Philippe

Plafonner les indemnités de licenciement ?

C’est dans l’air du temps.

Quand on dispose d’un peu de recul sur ce sujet, c’est parfaitement immoral.

De la part de quelqu’un qui prétendrait moraliser la vie politique (mais pas la vie publique, peut-être ?) ce serait clairement se moquer des gens.

 

L’indemnisation du préjudice, c’est l’esprit du droit français. Contrairement au droit dans d’autres pays, le droit français ne fait même que ça, en matière civile, il indemnise le préjudice prouvé.

Le droit prud’homal, lui, à l’époque où je l’ai étudié (il y a 25 ans de ça), était clairement dérogatoire du reste du droit français, en raison de la représentation qu’on se faisait de la relation entre l’employeur et le salarié, qu’on estimait déséquilibrée par nature. Il en résultait essentiellement que le doute devait en théorie, profiter au salarié. En pratique, ce n’était déjà pas simple à l’époque, ça doit être devenu compliqué aujourd’hui.

 

Quoi qu’il en soit, il est facile de concevoir, compte tenu de la place centrale que tient l’emploi dans notre fonctionnement social aujourd’hui, qu’il peut résulter un préjudice très important d’un licenciement pour un salarié.

Lorsque ce licenciement résulte d’une réalité économique extérieure à l’employeur, ou d’un fait imputable en tout au salarié, il est hélas normal que l’indemnité du préjudice résultant du licenciement ne pèse que de manière encadrée sur l’employeur.

Mais dans le cas où celui-ci semble avoir procédé au licenciement en dehors des motifs envisagés par le droit du travail, il semble parfaitement justifié, moralement, de lui faire assumer la totalité du préjudice subi par le salarié en raison de ses actes.

 

Et dès lors, envisager un plafonnement des indemnités de licenciement, en matière de licenciement abusif, est parfaitement immoral.

 

Notre économie n’est peut-être pas assez compétitive, et il est possible que lui rendre de la compétitivité dynamiserait l’emploi. Pour ma part, je crois que c’est plus compliqué que ça.

 

Mais je suis convaincu que rendre immorales les relations du travail n’est pas le moyen le plus approprié de travailler notre compétitivité.

 

Et je ne crois pas que ce soit à celui qui prétend moraliser la pratique politique d’aller dans ce sens !



20 réactions


  • Trelawney 13 juin 2017 18:43

    envisager un plafonnement des indemnités de licenciement, en matière de licenciement abusif, est parfaitement immoral.


    C’est plus qu’immoral, c’est anticonstitutionnel. Et c’est pour cette raison que ça sera toujours retoqué par le conseil du même nom

    • Trelawney 14 juin 2017 08:54

      @Leonard
      Je parle bien de ce machin qui a déjà retoqué cet article quand il était dans la loi El Kohmri


  • flourens flourens 13 juin 2017 19:31

    les indemnités de licenciement pour motif réel et sérieux, et il n’en manque pas, sont déjà plafonnées, le CdT dit 1/5 de mois par ans plus 2/15 de mois par ans au dela de 10 ans, et il faut avoir un minimum de 2 ans d’ancienneté, les conventions collectives sont souvent meilleures mais plafonnées elles aussi, par exemple les cadres du BTP c’est 12 mois de salaire maxi, ceci dit les conventions collectives vont pouvoir disparaitres quand il y aura des accords d’entreprise puisqu’il pourra les contourner voire les annuler, un salarié à minima a donc pour 20 ans d’ancienneté, 1/5 x 20 = 4 mois plus 2/15 x 10 = 1,33 mois soit 5,33 mois de salaire, pour 20 ans, c’est misère, cela ne fait même pas un an de salaire pour toute une carrière
    les patrons peuvent donc bien prévoir le licenciement dans leur budget
    dans le cas des Prud’hommes, les patrons ont été condamnés au nom du peuple Français, ils ont donc violés la loi, ce sont donc des DELINQUANTS, or Macron veut sécuriser les délinquants, pour tout autre code ou loi tout le monde grimperait aux rideaux, là non, c’est un peu comme si on plafonnait les indemnités lors des accidents de la route pour sécuriser les chauffards, un gosse écrasé c’est tant, un tétraplégique c’est tant, une mère et ses gosses c’est tant, c’est impensable n’est ce pas
    et en dernier, c’est s’attaquer directement et frontalement à l’indépendance de la justice, quand ça commence comme ça on sait malheureusement ou ça finit, d’ailleurs c’est commencé puisqu’il veut l’état d’urgence à vie, vous savez quand un préfet peutémettre une lettre de cachet sans qu’un juge ou un avocat y mette son nez
    bon si ça commence comme ça, vous inquiétez pas dans 5 ans on a Marine


  • anamo 13 juin 2017 20:00

    Plafonnement des indemnites individuelles et reduction globale des sommes attribuées ne vont pas de pair.

    Qui gagne, qui perd ?


  • Inquiet 14 juin 2017 10:01

    On pourrait passer des heures, voir des jours à justifier ou pas le fait que certaines catégories de personnes perçoivent ou non des indemnités (par exemple, j’ai vu utiliser l’argument de l’artisan qui n’en perçoit pas puisqu’il est son propre patron, mais le problème est plus général que ce problème spécifique, il s’agit de « revenus dignes » et de ne pas tomber dans la pauvreté en général),
    mais le sujet ne porte pas sur le fait de percevoir ou non des indemnités, mais de savoir si on fixe un plafond des indemnités sur les motifs de licenciements ABUSIFS.

    Vous avez compris A.BU.SIFS

    Potentiellement un employeur pourrait anticiper le risque financier pour licenciement d’UNE EMPLOYEE réticente à « ses charmes » si vous voyez ce que je veux dire. Je ne dis pas qu’il utiliserait le motif risqué « n’a pas voulue être gentille », mais qu’il serait certainement contraint d’utiliser un motif un peu « tiré par les cheveux » donc A.BU.SIFS.


  • Buzzcocks 14 juin 2017 10:23

    Ceci dit, il faut être courageux pour aller aux prud’hommes, contester un licenciement. J’ai testé en 2002 et je sais que si je me refais virer un jour, plus jamais je n’irais me faire chier avec la pseudo justice prud’homale, entre l’ avocat (le votre que vous avez pris un peu au hasard) et les juges qui découvrent votre affaire sur le tard, et qui n’ont pas tellement envie de s’y intéresser, il faut être très fort mentalement.

    J’ai été licencié en 2002 pour avoir parait il insulté un client de ma boite, client tellement insulté qu’il m’a embauché 6 mois plus tard. J’ai été jugé en 2008 après trois tonnes de report demandés par les avocats sans que j’en comprenne la raison. Et j’ai perdu en première instance, jugé par 4 types qui n’écoutaient pas le dossier, pressés par le temps.
    J’ai produit une lettre du client « insulté » disant qu’il n’en était rien et j’ai réussi à perdre ! C’est quand même un sacré exploit.

    Bref, on ressort de là avec juste l’envie de passer le bâtiment au lance flammes.


  • Francis, agnotologue JL 14 juin 2017 11:01

    Plafonner les indemnités de licenciements abusifs revient de facto à autoriser les licenciements abusifs.

     
    Peut-être que la bonne question est : à quel niveau et comment ce plafonnement sera-il appliqué ? élevé ? Personnalisé ? 

  • Pierre 14 juin 2017 12:11

    Casser le moral des créateurs d’emploi avec la perspective parfois de la mise en faillite de leur boite est effectivement le meilleur moyen de créer la prospérité et donc de l’emploi...Dans ce pays, tellement de nazes sont incapables de comprendre que la surprotection finit par générer un handicap, mais passer sa vie à l’ANPE est tellement cool !


    • Inquiet 14 juin 2017 12:51

      @Pierre
      Si tu n’as pas compris le problème, je pense que tu es un psychopathe, un sociopathe ou un truc dans ce genre.

      En effet, comment ne pas voir l’absolue inhumanité d’aider à pratiquer les licenciements ABUSIFS.

      D’ailleurs, ce genre d’argument sur la sur-protection est de mauvaise foi, et certainement manipulateur d’opinion, puisqu’il ne s’agit pas d’encadrer tous les types de licenciements puisque ceux là sont déjà encadrés, mais de PLAFONNER les licenciements ABUSIFS.

      En fait, suivant ton commentaire, on inverse complétement la notion de bien et de mal : pour toi il est malsain de ne pas permettre à un employeur de le punir sévèrement quand il licencie quelqu’un sans réelle raison ?
      D’où mon interrogation sur la possibilité d’avoir affaire à des gens handicapés par rapport à l’empathie, qui seuls peuvent défendre une telle conception de l’injustice :)


    • flourens flourens 15 juin 2017 10:50

      @Pierre
      je suis d’accord, il ne faut pas casser le moral, allons plus loin ne soyons pas pusillanimes, pour relancer l’industrie automobile il ne faut pas casser le moral des conducteurs, outre que je propose la suppression du code de la route sur le même argument que la suppression du code du travail, pas de code du travail = pas de chômage et pas de code de la route = pas d’accident, mais s’il y en avait quand même, je propose un plafonnement des indemnités dus par les chauffards aux victimes (c’est le même processus que pour les PH) une mère et son gosse = allez soyons pas chien, 10000€, un tétraplégique 1000€, vous allez voir que les ventes de bolides vont repartir, et après on passe au code pénal, plus de code plus de délinquance
      ça vous parait absurde, non ??? et pourtant c’est le même principe que celui évoqué pour le code du travail
      de plus, comment ils ont fait depuis 100 ans que le code existe, comment Dassault, l’Oréal, Lagardère et consorts on pu faire une si grande fortune en France avec un moral cassé par cet horrible code, je suppose que sans code ils seraient encore plus riches, et c’est cela qui dérange Pierre, les riches ne sont pas assez riches, allez Français acceptez les salaires et le conditions du Bengladesh pour faire plaisir à Pierre
      ha oui, la surprotection, je suppose que ce monsieur Pierre veut plus de flics, de gendarmes, de pompiers et demande à être surprotégé, normalement in devrait les rejeter tous puisque le surprotection est un handicap, quand il y aura un incendie chez lui, je suppose qu’il n’appellera pas les pompiers et qu’il fera face avec son petit tuyau en homme responsable ne voulant pas de surprotection, non ???


    • Pierre 16 juin 2017 12:27

      @flourens
      Propos stupides sans discerner les torchons et les serviettes, de gus qui n’ont jamais crée de boite de leur vie et encore moins d’emplois que pourtant ils recherchent désespérément, sauf à être planqués aux frais du contribuable dans la fonction publique et similaire. Pas étonnant qu’avec de tels zozos, notre pays reste à la traine...


    • Pierre 16 juin 2017 12:34

      @Inquiet
      Si tu n’étais pas un franchouillard borné, tu saurais que lorsque le marché du travail est fluide, le type viré n’attend pas des années pour retrouver un boulot, mais quasi immédiatement. Ce qui signifie que notre système est finalement beaucoup plus traumatisant dès que l’on se retrouve sur la touche.


    • Saka20 Saka20 4 juillet 2017 10:57

      @rocla+


      ...

       smiley

  • Lugsama Lugsama 15 juin 2017 17:25

    On plafonne les peines de prison et les amendes pour les les crimes mais pour les licenciments ça serait immoral.. drôle de « logique ».


    • Jean-Philippe 16 juin 2017 17:57

      @Lugsama

      Bonjour,

      Méfiez-vous des comparaisons. Et des réponses trop rapides. En ce qui concerne les crimes, à ma connaissance, en France, c’est plafonné à perpétuité ; bon, ce pourrait être la peine de mort ...
      Plus sérieusement, je crois que vous faites références au « tarif » prévu pour chaque infraction ou délit. Mais justement, on fait à chaque fois référence à une infraction ou un délit précis, et il est logique de légiférer sur une sanction proportionnée à ce délit précis.

      A l’inverse, les conséquences d’un licenciement abusif peuvent être à géométrie variable.
      C’est en cela qu’il serait illogique de les plafonner, et qu’il serait immoral que quelqu’un ayant subi un immense préjudice du fait de son employeur voit son dédommagement limité. Et ceci en totale contradiction avec le principe fondateur de notre droit national, basé sur le dédommagement du préjudice prouvé.


    • Pierre 18 juin 2017 17:42

      @Jean-Philippe
      C’est vrai que mettre une boite en faillite est une peccadille qui va mettre un paquet de monde sur la paille ! Et quand comprendrez-vous que beaucoup de patrons de petites boites en particulier n’embauchent pas cette raison et aussi pour éviter des effets de seuils qui vont, du moins le croient-ils et c’est suffisant pour les dissuader, leur pourrir la vie ? Décidément indécrottables, ces franchouillards...


    • Jean-Philippe 19 juin 2017 08:22

      @Pierre

      Libre à vous de désirer vivre dans un monde d’esclaves.
      C’est vrai que pour ma part, je suis un peu attaché à l’idée de justice, c’est pourquoi je dois mériter mon titre de franchouillard ...


    • Pierre 20 juin 2017 12:32

      @Jean-Philippe
      Nous sommes tous esclaves de quelqu’un ou de quelque chose et même de notre inconscient. Mais le problème n’est pas là : il s’agit d’être efficace mais cette notion d’efficacité est totalement étrangère au bon esprit de chez nous pour lequel une théorie abstraite et souvent foireuse doit être au préalable satisfaite.


    • Jean-Philippe 23 juin 2017 19:11

      @Pierre

      Vous introduisez la notion d’efficacité dans le débat, à juste titre selon moi.
      J’ai été employeur, et avant lourdement formé en matière de stratégie managériale.
      Il existe un grand éventail de stratégies managériales, qui s’adressent en fait à des contextes différents. Mais sachez quand même que dans la plupart de ces stratégies, disons celles qui sortent du dogme totalitaire, la motivation des salariés est un élément essentiel.
      Pour répondre simplement, je ne crois pas que rendre anodins les licenciements abusifs serait de nature à favoriser la motivation au travail, en fait bien au contraire. C’était d’ailleurs ce qui se cachait derrière les réserves que j’ai écrites en fin d’article.


    • Pierre 28 juin 2017 12:47

      @Jean-Philippe
      Encore faudrait-il ne pas définir le caractère abusif du licenciement au doigt mouillé et orienté d’un tribunal qui exécute toujours le même ! Pour le reste, l’expérience montre que lorsqu’un patron possède un pouvoir discrétionnaire, les salariés sont bien plus performants et donc l’économie générale également.


Réagir