mercredi 23 mars 2016 - par Fabienm

Pourquoi je n’irai plus au salon du livre de Paris

Entre vous et moi, y'a des sujets plus graves que celui-là (j'en ai conscience). Mais de temps en temps, il faut bien se détendre.

Il paraît que nos actes ont des conséquences. Si, si.

 

Petit exemple :

Je m’appelle Jules et je suis à la maternelle. Le petit – plus petit que moi en tout cas – Léon me vole mon BN. Je lui fous une tarte (il aura bien mangé celui-là aujourd’hui).

C’est ce qu’on appelle le principe d’action - réaction.

(et le lendemain, le père de Léon vient éclater la gueule du père de Jules, c’est ce qu’on appelle une réaction en chaîne.)

Ainsi donc, les actes commis par Léon ont eu des conséquences (parfois qui dépassent ses espérances, soyons clairs).

 

Dans la vraie vie (celle des grands qui se lavent les dents et votent consciencieusement à chaque élection – ce qui ne les empêches pas d’avoir des caries et le FN à 15%), c’est pareil.

Ainsi, quand on met un prix d’entrée à un salon du livre à 12 €, que l’on monétise le marché de la dédicace en exigeant 2 € pour tout livre qui rentre, que l’on fout le parking à 40 boules, que le moindre sandwich dégueu est à plus de 5 €, que l’on loue des espaces microscopiques à des prix prohibitifs, bref qu’on fait chier tout le monde pour se faire un max de blé, eh ben on se prend -15% de fréquentation dans la tronche. Et c’est mérité. Merci le salon du livre de Paris, c’est une belle réussite populaire et culturelle.

 

 

My user experience

Ouais, je suis moderne, je maîtrise grave la langue de l’autre con qu’a fait des pièces de théâtre avec des gens qui meurent ou qui causent à des crânes et donc je dis « user experience » plutôt qu’autre chose. Et puis, ça donne une caution et me permets de dire des choses définitives sur l’état du monde, auréolé que je suis de mon statut de « customer ».

Bref, j’étais au salon du livre porte de Versailles ce vendredi 18 mars parce qu’il se trouve que je devais signer quelques exemplaires d’un recueil de nouvelles (intitulé « L’inconvenance du désastre »). Connaissant un peu le truc, je m’étais mis plein de rendez-vous pour pas trop m’emmerder. Je suis quand même resté assis une petite heure sur le stand (enfin, sur une chaise plutôt) et j’ai attendu que des passants s’égarent jusqu’à moi.

Les dix premières personnes croisées « cherchaient un éditeur ». En effet, j’avais oublié – quel poisson rouge je fais – qu’il y avait plus d’auteurs à la recherche d’un éditeur que de lecteurs au Salon du Livre. Comme « prendre de l’auteur », c’est pas trop mon créneau (qui est un peu plus au ras des pâquerettes, soyons clairs), j’ai fait comme si je n’avais pas compris la question et j’ai mal orienté ces charmants promeneurs (« au fond à droite, Gallimard cherche de nouvelles plumes »).

Au bout d’un certain nombre de refus polis (« je voudrais bien acheter, mais j’ai plus un rond et j’ai déjà claqué 12 euros pour rentrer »), je me suis dégourdi les jambes et me suis baladé.

J’ai vu beaucoup de classes, de jeunes qui se couraient après, beaucoup de files d’attente (des gens voulant voir des « people »), quelques « peoples » sans files aussi (honte suprême) et finalement pas tant de monde que ça, à part sur les stands des éditeurs de poche et autour des rares points où l’on pouvait se poser (il faut croire que les organisateurs n’aiment pas trop l’idée que les lecteurs puissent poser leur cul une fois de temps en temps).

Au final, je me suis senti assez mal à l’aise, car cela ne ressemblait pas vraiment à un salon du Livre comme je les aime où l’on prend le temps de parler aux gens, où l’on fait des rencontres. Cela ressemblait plutôt à une espèce de grosse foire où l’on doit être vu (pour certains) et où l’on veut aller à la rencontre de l’éditeur qui ne répond jamais au téléphone (sait-on jamais) si on a la chance de cibler un éditeur qui n’a pas boycotté la manifestation (ils sont de plus en plus nombreux). C’est surtout, bien évidemment, une superbe machine commerciale où tout est payant (et cher en plus). En un mot comme en cent, cette manifestation me fout la gerbe.

 

 

La polémique qui sert à rien

Alors oui, comme d’habitude, ce salon fait polémique. Ainsi, Augustin Trappenard a-t-il reproché, en plus des points déjà mentionnés, la surreprésentation des auteurs indépendants.

Ce à quoi un bloggeur a répondu qu’il ne comprenait pas très bien, parce que (en vrac) :

  • Les autoédités souffrent d’un manque de visibilité
  • Les autoédités font vivre l’édition aussi
  • Si les grandes maisons lisaient les manuscrits, on serait pas dans cette merde (je résume)
  • Il y a de la qualité aussi dans l’autoédition
  • Etc.

 

Bon, un auteur autoédité qui défend l’autoédition, rien de bien neuf vous me direz, mais la liste des arguments qu’il utilise me permet de revenir sur plusieurs billets qui ont émaillé la blogosphère récemment (notamment sur le refus de plusieurs bloggeurs de parler des auteurs à compte d’auteur ou autoédités).

Déjà, il me semble que se plaindre en tant qu’autoédité de manquer de visibilité, c’est un peu comme si un promeneur crachait en l’air et disait qu’il pleut. En effet, il semblerait que ce bloggeur ignore que le marché du livre souffre d’une surproduction globale patente, qui le rend doublement asymétrique : trop d’auteurs voulant être édités pour le nombre de livres qui paraissent, ce nombre étant lui-même trop important pour le nombre de lecteurs.

Donc évidemment, cela crée une double frustration : celle de l’auteur non publié, puis celle de l’auteur publié qui vend peu (sans parler de la frustration du lecteur qui ne sait plus quoi lire).

Ignorer ensuite que la majorité des manuscrits refusés par les éditeurs vont ruisseler sur le marché de l’autoédition et de l’édition à compte d’auteur, c’est refuser d’aller au bout du raisonnement.

La première conséquence est que l’autoédition participe largement au problème de surproduction en contournant les digues de la sélection éditoriale.

La deuxième conséquence est que s’il existe sans aucun doute des auteurs autoédités de qualité, ils sont noyés dans la masse d’une production de mauvaise qualité et dans laquelle il est peu aisé de s’y retrouver.

Ensuite, ne pas voir que la presse ne peut pas s’intéresser aux auteurs autoédités, c’est faire preuve d’une naïveté confondante. Les journalistes n’ont déjà pas le temps de prendre connaissance de la production des gros éditeurs qui font un gros travail de sélection (cela n’aura pas échappé aux auteurs recalés), comment pourraient-ils avoir le temps (et même l’envie) de se jeter dans cette jungle qu’est « l’édition indépendante » comme on dit parfois ?

Il y a de moins en moins d’espace culturel dans l’ensemble des publications et de plus en plus de livres, l’équation n’a pas de solution. Ainsi, que cela plaise ou non, il existe une réelle nécessité de régulation plus ou moins objective, il n’y a pas d’autre solution, ou alors faut qu’on me l’explique (je suis preneur, sincèrement).

Enfin, concernant la sélection des manuscrits et l’apparente injustice qui s’y cache, j’ai déjà écrit un article sur le sujet : ici.

 

 

En conclusion, personne ne dit que l’autoédition, c’est le mal. Personne ne dit qu’il n’y a que de la daube dans l’autoédition, cela serait absurde. Mais refuser de voir que mécaniquement les livres autoédités (ou pire en édition à compte d’auteurs) sont globalement moins bons parce qu’ils sont passés par moins de filtres, c’est faire preuve d’un aveuglement assez étrange (ou d’un peu de mauvaise foi). Si une maison d’édition refuse 99% des manuscrits qu’elle reçoit en prétextant que la qualité n’est pas au rendez-vous, il ne faut pas se leurrer, les 99% refusés vont grossièrement alimenter le marché de l’autoédition et de l’édition à compte d’auteur, façon vase communiquant.

 

Moins on tamise et plus il est dur de trouver de l’or.

 

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43 réactions


  • Shawford 23 mars 2016 18:00

    Chalut Paul & Mike*

    donc on ne peut qu’inviter et inciter(?) les recalés* à créer le cas échéant leur propre maison d’édition**

    * tout ressemblance bla bla toussa

    ** ça faisait un moment que je t’avais pas écrit un p’tit mot, j’allais pas faire dans le tiédasse smiley smiley smiley


  • Anthrax 23 mars 2016 18:47

    Il y a pire que le salon du livre de Paris c’est la foire du livre de Brive (mais au moins, ça porte bien son nom et ça n’a pas de prétention littéraire).

    C’est le moment où nos pipoule de l’écriture se lâchent, donc c’est fête du slip tout un week end. Si vous voulez voir des mémé emperlousées s’évanouir à la vue de Nelson Monfort c’est the place to be, 

    • Fabienm 23 mars 2016 18:58

      @Anthrax
      Oui, c’est assez célèbre chez les écrivains (étant un faux écrivain, je n’y ai jamais été invité malheureusement...)


    • Anthrax 24 mars 2016 09:12

      @Fabienm

      J’ y ai été « poussé » par mon éditeur et je te jures que ça fait partie de mes plus mauvais souvenirs. Une ambiance de foire aux bestiaux en moins sympathique et encore plus bruyant. J’en suis ressorti en me disant « C’est ça le monde littéraire parisien ? Ces Messieurs-Dames bien propres de la Rue du Bac qui viennent en province comme des marins en bordée ? » Ça donne pas envie de les fréquenter... 

    • bakerstreet bakerstreet 25 mars 2016 00:30

      @Anthrax
      Peut être qu’au marché de Brive la gaillarde, Nelson a des bottes d’oignons, pour séduire les commères, et éviter le Trafalgar !


  • bakerstreet bakerstreet 23 mars 2016 18:59

    Moralité, l’enfer c’est les autres. Ecrivez, faites vous plaisir, mais gardez ça pour vous ! Sinon attendez vous au pire si vous croyez que vous allez sortir vainqueur de ce loto, où seuls ceux à qui l’on a donné un ticket gagnant pourront jouer au malin. 

    Ca donne du Christine Angot à pleines vitrines, et du d’ormesson sur les plateaux, et à la grande librairie. Enfin, on connait le nom de loin de tous ces raseurs à la Tierweiller, où le plus important réside dans la critique derrière : Même dithyrambique, elle ne suffit pas à abandonner le libre à la page 20. 
    Les trocs et puces sont pleines de ces merdes. Personne n’en veut plus. Le livre se fait vieux con, avec toutes ces bourgeoises tentant de rentrer encore en pâmoison, mettant en accord les mille nuances de vert de gris, avec leurs problèmes d’hormones...
    Faites du vélo ou de la peinture aussi mais ne pensez pas non plus percer dans ce système de ronds de jambes et de fils de... Dans les concours de peinture, généralement les artistes locaux appartenant au jury se débrouillent toujours pour donner le premier prix à la merde la plus lamentable, montrant par là leur enthousiasme à accueillir de nouveaux talents. j’allais dire « concurrents »....
    Surtout ne pas en avoir la moindre amertume. En rire ! ...C’est ainsi...Déjà Orwell dans un des papiers en 36 dénonçait le trop plein d’auteurs, et le cirage de pompes obligés des journalistes envers les auteurs qu’on leur indiquait de flatter. C’est ainsi qu’il faut lire la critique : Les trois quart au moins ne sont que de la pub ! 
    La vie est trop courte pour être romancé, pour s’en faire épicier. Un tour de vélo est cent fois préférable pour les visions que cela apporte, sans compter les mollets supérieurs à la désillusion. 
    A la limite écrire ses voyages ses mémoires, rien que pour les refaire, les voir sous un autre jour. Les poèmes vifs argent donnent de grands bonheur au jeu de la pêche au leurre, au milieu des torrents d’écume. Car c’est un vrai bonheur d’écrire, de créer, de peindre...La douleur commence quand on veut en vivre, mettre sa peau au porte manteau, comme disait Céline. 

    • Fabienm 23 mars 2016 19:04

      @bakerstreet

      J’approuve à 100% tout ce que vous dites smiley
      (d’ailleurs, j’écris pour le plaisir)

    • Anthrax 24 mars 2016 09:16

      @bakerstreet


      C’est un débat très ancien. Mais comme je ne sais plus quel auteur - Dumas je crois - je crois que la finalité de l’écriture c’est la publication. 

    • vesjem vesjem 24 mars 2016 09:26

      @bakerstreet
      très bien analysé


  • Abou Antoun Abou Antoun 24 mars 2016 09:02

    @l’auteur,
    On dirait que vous découvrez le monde des affaires. Vous êtes adolescent, naïf, aveugle ou quoi ?
    Vous pouvez remplacer ’salon du livre’ par ’salon de n’importe quoi’.
    L’édition, c’est comme la production de musiques, de films, d’émissions télé, de n’importe quel produit prétendument culturel. C’est un moyen de faire du fric en proposant des titres ’bankables’ dus à des auteurs ’bankables’. On vend donc de la bouillie pré-digérée, complètement formatée, le seul truc capable d’être ingurgité par les foules dont les goûts sont entièrement sous contrôle.
    Bref, voici la voie la plus directe vers le succès :
    Si vous êtes hétéro essayez de coucher avec la femme d’un éditeur. Une fois que vous serez bien copain avec le cocu, dîtes lui que vous êtes prêt à pondre la première merde qu’il voudra répondant à son cahier des charges et l’affaire est conclue. Si vous êtes homo vous allez un peu plus vite en couchant directement avec l’intéressé.
    « Trompettes de la renommée, vous êtes bien mal embouchées ».
    Si vous pensez avoir du talent et vous voulez qu’il soit reconnu la démarche est différente. Il faut vous assurer des moyens de subsistance, un job idiot dans le privé ou la fonction publique ou bien braquer une banque si vous avez des c...Ensuite travaillez à vos heures ’perdues’ en espérant que la postérité reconnaîtra vote talent, mais ne vous méprenez pas ; les cimetières sont pleins de génies méconnus.


    • Fabienm 24 mars 2016 09:07

      @Abou Antoun
      lol comme disent les jeunes.

      Je comparais bien sûr « le salon du livre de Paris » à un « salon du livre » normal (ça fait 5 ans que je les écume, je commence à les connaître).
      Sinon, concernant le succès, comme la plupart des mes collègues écrivaillons, on écrit parce que ça nous fait plaisir, le succès n’est pas pour nous (comme vous l’avez si bien dit, cela demande trop d’efforts)

    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 12:43

      @Abou Antoun
      Bien vu. Le mieux c’est d’écrire pour la postérité, en laissant vos héritiers se débrouiller avec vos fautes d’orthographe. Vous êtes passé dans l’autre dimension, enfermé dans un autre livre qui ne jaunit plus.

      Rien que du bénef : Pas d’efforts en dehors celui d’écrire, et pas de désillusion d’être refusé, pas de frais de timbres pour l’expédition ; tout est dans l’imaginaire !
      Evitez de croiser Verlaine et Van Gogh, des gens dangereux et impulsifs. Pas besoin d’être un poète maudit et de se faire couper une jambe en Abyssinie.
      Mieux vaut rester un bateau ivre, et motard que jamais.
      Une saison en enfer, d’accord, mais climatisé. 
       On peut se faire un cinéma toute sa vie durant en pensant que ceux qui vous liront plus tard pédaleront sur la vague en lisant.... Ils enverront peut être tout à la poubelle mais vous n’en souffrirez pas !
      Beaucoup de rêves et d’illusions me direz vous, mais ce n’est pas grave pour un romancier, bien au contraire, son travail se teint justement dans l’imaginaire et la conversion. Une lettre changée, et vous voilà dans la convention. Tout est gâché. Au fond mieux vaut tirer la chasse d’eau derrière soi, ou alors mettre les feuillets dans son cercueil, pour continuer ses mémoires d’outre tombe. 

    • Abou Antoun Abou Antoun 24 mars 2016 13:30

      @bakerstreet
      Bien vu. Le mieux c’est d’écrire pour la postérité, en laissant vos héritiers se débrouiller avec vos fautes d’orthographe. Vous êtes passé dans l’autre dimension, enfermé dans un autre livre qui ne jaunit plus.
      Je vous retourne le compliment, bien vu !
      La rédaction des mémoires me paraît avoir un intérêt double :
      Pour soi-même ; je vois tant de gens vieillissant dont la mémoire flanche et qui sont en somme, petit à petit, dépossédés de leur souvenirs, de leur vie. Si un jour je succombe à Alzheimer, un AVC ou à une quelconque démence sénile j’aimerais qu’un de mes proches puisse me rappeler quelques passages de mon existence.
      La plupart d’entre nous, y compris moi-même, ont eu des vies bien banales, mais chaque humain est le témoin de son époque, et chaque vie, vue par le petit bout de la lorgnette a une valeur historique. On peut reconstituer une époque à partir de témoignages de gens qui l’ont vécue. Nous vivons actuellement une époque où de Gaulle est une icône et Dalida une chanteuse ’culte’. Moi j’ai connu une époque où les gaullistes formaient ce qu’on appelle la ’majorité silencieuse’ qui décrit bien une réalité, les partisans du Général n’avaient guère d’autre possibilité que de se taire. Quant à dire qu’on écoutait Dalida, comme disait un humoriste pastichant Jacques Chancel « Dali, oui, mais pourquoi Da ? »
      J’estime que la plupart des gens n’ont rien à foutre de mes souvenirs. Cela me paraît évident quand j’en parle (j’évite d’ailleurs d’en parler). Conclusion : la lecture de mes mémoires, cela se mérite. J’ai verrouillé à mort. Documents odt protégés par mot de passe puis chiffrés avec pgp. Mes héritiers n’auront donc que des xxxxx.odt.pgp. Un jeu de piste existe pour trouver la clé de déchiffrage et le mot de passe des documents, Il est possible d’accéder au contenu à condition de le vouloir. Je suis sûr ainsi que toute personne se donnant la possibilité de lire l’aura vraiment voulu.
      La valeur littéraire est nulle, question style je me suis efforcé de m’exprimer dans un français correct, ce qui devient une performance.
      Je vous adresse mon salut motard.


    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 14:39

      @Abou Antoun
      Je vous rejoint tout à fait. En vieillissant nous vient l’envie et le besoin de fixer la mémoire, un ressenti, une époque, une trace, un sens. Je regrette juste de ne pas m’être plus jeune à écrire un journal, surtout quand je voyageais, entre autres. 

      Je tente maintenant de boucher les trous, et me surprend parfois, par une étrange alchimie, en écrivant à la recherche du temps perdu, de retrouver des souvenirs enfouis. Un grand bonheur vient de ses reconstructions, et l’on ne saurait en conseiller l’usage à tous. Ainsi bien sûr que celui de la lecture, qui est elle aussi malgré tout une forme de création, au travers des images qu’elles suscitent, et qui sont réinventées par le lecteur. 
      Le passé en tout cas n’est jamais mort. C’est une matière vivante, pleine de ferments qui ne demande qu’à se réveiller dés qu’on met la main à la plume. Alors tout à coup on a tous les ages, tous les pouvoirs. 


    • Abou Antoun Abou Antoun 24 mars 2016 15:19

      @bakerstreet
      Je tente maintenant de boucher les trous,
      C’est un travail de détective, mais c’est possible. On se souvient parfois d’une chronologie par rapport à des événements ; cela se passait avant ceci, après cela. On définit donc des fourchettes. Les photos anciennes n’étaient pas datées mais parfois des dates apparaissent sur les tirages papier parce que le photographe le faisait. Et puis on peut ressortir les vieux calendriers et les anciens calendriers scolaires ; les vieux passeports, les bulletins de salaire aident également. Quand on demande de l’aide à d’autres acteurs on constate que s’ils ont des souvenirs ce ne sont généralement pas les mêmes que les vôtres, mais leur mémoire peut vous éclairer par recoupements.
      Finalement il reste toujours des zones d’ombre mais parfois une aide arrive de façon imprévue. Mon père, aujourd’hui âgé de 94 ans, m’a soudain fait don de toutes ses archives, grâce auxquelles j’ai pu reconstituer ma prime jeunesse de façon à peu près sûre, alors que de ce temps il me restait des images et des clips vidéos sans chronologie ni suite logique. Toutes les pièces sont venues s’emboîter, mais voilà j’ai la chance d’avoir un père conservateur.
      Dans une maison familiale dévastée par un cambriolage j’ai retrouvé, jonchant le sol, toute la correspondance de mes parents, intéressant reportage sur les années d’immédiat après-guerre.
      Pour la vie d’adulte c’est plus compliqué, on ne sait plus très bien pourquoi on a dit ou fait les choses, mais enfin, on n’a pas toujours droit à une seconde chance. Il y a dans la vie quelques tournants décisifs, parfois on ne s’en rend compte qu’après coup.
      Comme vous dîtes :
      Le passé en tout cas n’est jamais mort.


  • vesjem vesjem 24 mars 2016 09:59

    très bon article , fabienm
    2 petites remarques sur les éditions :
    Ce système de création pléthorique favorise les « têtes de gondole » reconnues merdiatiquement ;
    Les lecteurs potentiels , face à une telle quantité , n’ont d’autre choix , le plus souvent , que de se jeter sur les valeurs dites « sûres » , et donc de faire le jeu des peoples et par conséquences celui de leur fortune ;
    Car comment comprendre le nombre incroyable de navets édités par des éditeurs connus ?
    Le plagiat est un autre problème : les comités de lecture des grandes maisons d’édition sont un filtre pour « écrémer » mais sont également capables et coupables de garder une partie (non négligeable) d’une « lie » non dénuée d’intérêt , pour la fourguer à quelque ami ; les exemples sont nombreux et les procès rares

     


    • Fabienm 24 mars 2016 10:06

      @vesjem
      merci pour le commentaire. J’avoue très mal connaître ce phénomène de plagiat. Cela fait plusieurs fois qu’on m’en parle, je trouve ça quand même assez énorme (en d’autres termes : j’ai du mal à y croire)


    • Radix Radix 24 mars 2016 12:20

      Bonjour Fabienm

      Malheureusement cela existe. La tentation est grande pour un comité de lecture qui tombe sur un bouquin mal écrit mais dont le scénario contient une idée originale de le refiler à un copain écrivain en mal d’inspiration.

      Je connais une émission sur la trois qui est coutumière du fait, elle reçoit des reportages, comme dans l’édition, dit qu’elle n’est pas intéressée et fait tourner par son équipe le même truc : facile, tous les repérages et l’angle d’attaque sont déjà fait, c’est du travail facile !

      Radix


    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 13:00

      @vesjem

      Sans parler des concours de nouvelles. Il y a une vingtaine d’années, et oui !...J’avais envoyé il y a un bail de ça une nouvelle : Le prétexte était un concours autour du conte pour enfants...
      Deux ou trois ans plus tard je tombe sur un livre illustré, dans une collection très connue, en cherchant un livre pour mon gamin. L’intrigue ressemblait à s’y méprendre à mon texte. J’ai cru halluciné.....Impossible que ce soit un hasard, car cette histoire qui s’appelait « les monts de la lune » dans sa version originale avait pratiquement été copié-collé, et ne laissait planer aucun doute sur le plagiat...
      Assez dégoûté,...Tout cela vous laisse nauséeux...Les loups et les ogres ne sont pas que des inventions pour les gosses.
      J’ai eu le bonheur de décrocher un prix ensuite dans un concours de nouvelles dont le thème était « le vélo » ; argent que j’ai converti dans l’achat d’une nouvelle bicyclette de course. Puis mes ambitions littéraires se sont arrêtés là....Ce qui ne m’a pas guéri bien sûr de l’écriture, qui est un vrai bonheur. 

    • Shawford 24 mars 2016 13:07

      @bakerstreet

      Mais ça vous a fait les mollets, si ce n’est les pieds smiley smiley


    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 13:21

      @Shawford
      Sans compter l’exercice de méditation et de transcendance, pourvu que la côte ne soit pas trop rude. Mais le vélo ne triche pas, c’est un objet parfait. Nous ne sommes pas dans le monde de l’édition et du mensonge. 


    • Shawford 24 mars 2016 13:38

      @bakerstreet

      bien d’accord, dans le même temps ce qui est « terrible » dans le vélo, et je sais plus quel coureur avait dit ça en interview, Fignon si je me souviens bien, c’est que pour arriver à être performant, il fallait être capable d’enchainer les kilomètres d’entrainement en mettant le cerveau en position off sans pensée parasite et ainsi en oubliant la répétition de l’effort et de la douleur subséquente. Et en concluant sur le fait qu’un petit QI pouvait s’avérer assez avantageux pour cette discipline particulière smiley


    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 14:30

      @Shawford
      Moi, cet exercice m’apporte beaucoup de sérénité. L’imaginaire bat la campagne quand on roule. J’ai fait des courses étant jeune mais tout cela est derrière moi, même si je ne peux m’empêcher de suivre les épreuves à la télé, tout en sachant la vanité de la chose. Mais cela appartient à une certaine irrationalité qu’il faut me supporter, sinon l’enfant qui est toujours en moi me rendrait fou. Je n’ai jamais eu confiance dans le QI. En le multipliant par 3,14 on n’obtient rien du tout. Faisons confiance en la roue et en son diamètre. 

      Bref, le voyage commence dés le premier tour de pédale. Je pratique souvent aussi le tandem, une discipline qui n’a pas son pareil pour alimenter les conversations et les rencontres. Tout est prétexte, et on ne voyage pas de la même façon à pied, en vélo, ou en moto que je pratique aussi. Mais s’il me fallait choisir entre les deux, le vélo bien sûr l’emporterait, bien qu’il soit plus dangereux, car il n’y a de pire danger que ceux qui viennent de derrière. 
      Beaucoup d’écrivains ont écrit sur le vélo, en commençant par Zola, et Wells ; un engin qui a beaucoup travaillé d’ailleurs pour l’émancipation de la femme, et des gens pauvres, leur permettant de sortir de leur périmètre. 

    • Shawford 24 mars 2016 14:40

      @bakerstreet

      je m’apprête justement à sortir faire mon petit circuit péri urbain en VTT, et partirai donc en rêvassant sur ces choses si bien et si joliment dites ! Merci à vous


    • lefortiche (---.---.243.96) 24 mars 2016 15:57

      @Shawford
      Je connais un cycliste ....qui a choisi de faire comme si il était en permanence sur le vélo....
      Cerveau et conscience en position OFF
      ....
      Et pas que lui


    • Shawford 24 mars 2016 16:24

      @lefortiche

      salut, on se connaît je suppose, non ?

      Tu m’as tout l’air d’être de la pédale comme on dit, et d’en connaître un rayon en matière de tandem : bonne bourre smiley smiley


    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 21:32

      @lefortiche


      Pendant longtemps j’ai cru qu’un type qui aimait le vélo ne pouvait être qu’un brave type. 

      C’était avant que Sarko ne murmure à l’oreille d’Amrstrong !

    • vesjem vesjem 24 mars 2016 21:45

      @Fabienm
      si si , fabienm , ne fais pas semblant de ne pas y croire ; çà te discrèdite


    • vesjem vesjem 24 mars 2016 21:50

      @bakerstreet
      en effet , les quelques rares cas de plagiaires révélés ne sont que la partie visible de l’iceberg ;


    • vesjem vesjem 24 mars 2016 21:54

      @Shawford
      je ne crois pas au petit QI , chaud fort , car moi je pratique et je suis très très intelligent ! ! !


  • L'enfoiré L’enfoiré 24 mars 2016 12:37

    Venez au salon du livre de Bruxelles.

    Il est gratuit depuis la dernière fois.
    Il a déjà eu lieu.
    J’en ai parlé, je l’ai photographié dans ce billet 

  • L'enfoiré L’enfoiré 24 mars 2016 12:52

    Jean-Fabien bonjour,


     Cela fait des années, (bien avant que la Foire du Livre, et oui, cela ne s’appelle ainsi chez nous, n’ai plus de prix d’entrée) que j’y vais.
     Quelle différence avec un libraire ?
     La présence des auteurs auxquels on peut dire ce qu’on veut, en tant que lecteur.
     Ecoutez les forums de discussions d’auteurs qui parlent des motivations des auteurs. Du « comment est venu l’idée » d’écrire un roman ou une nouvelle
     Cela ne se trouve pas dans les livres.
     La réunion des deux permet de réagir et de tenter d’écrire soi-même.
     Oui, comme je l’ai dit, il y a souvent plus d’écrivains et donc plus de livres que de lecteurs.
     Evidemment, il y a ceux qui sont lu, qui ont eu la renommée nécessaire après un premier livre.
     Personnellement, comme cela n’a pas été ma manière de vivre, je n’écrirai jamais un livre papier.
     Je me suis amusé à demander ce que désirait les éditeurs « Premier roman ».
     La réponse fut : envoyer un manuscrit.
     Un manuscrit, mais ils sont cons, à l’ère d’Internet, me suis-je dit.
     Comme quoi.... 
     Mes romans seront du gratuit, du freeware.
     Au moins je peux écrire à mon rythme et sortir les chapitres sans en connaitre moi-même les péripéties pour arriver à la fin (qui elle est connue). 

    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 13:17

      @L’enfoiré
      Oui, vous avez raison. Après tout pourquoi ne pas amenez sa table de camping, sa chaise, et demandez à quelques copains de faire la promotion au sujet de « l’immense auteur » ....L’effet d’entrainement peut marcher, et convaincre pleins de gogos d’acheter. ( Il y a quelques années, à Cannes, des rigolos se faisant passer pour des acteurs, assis sur le capot d’une limousine, avaient réussi comme ça à faire un mouvement de foules et signer des autographes par centaines) Un geste qui est dicté non par des qualités éditoriales, mais on le sait publicitaires, scandaleuses. On peut vendre n’importe quelle daube, comme on peut faire de n’importe quel cycliste un champion, pourvu qu’on puisse cacher le moteur dans le pédalier.... Ca me fait penser à un excellent bouquin, très drôle et finalement assez critique sur ce que c’est qu’un auteur, la réputation qu’on lui fait, ce qu’on lui permet d’être ; Ca s’appelle, « L’ours est un écrivain comme un autre »..De Koetwinkle...Un peu le genre Brautigan, mais moins déjanté, car tenant tout de même du contre philosophique

      L’ours est un écrivain comme les autres - Editions ...

    • L'enfoiré L’enfoiré 24 mars 2016 16:24

      @bakerstreet,


       Merci pour la référence, je ne connaissais pas.
       Il y a aussi de plus en plus de « nègres » qui écrivent « avec les paroles de... ». 
       « Dans mes yeux » a été écrit de cette façon. Il faut voir la différence de police des caractères de la page de garde.... smiley
       Je ne sais si c’est encore le cas, mais pour la peinture, ce sont des singes qui ont été utilisés en contre emploi.
       

    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 21:27

      @L’enfoiré
      Quand le Johnny rôde, c’est jamais de la fraîche, ni même du deuxième choix ; je préfère de loin encore le Johnny walker. 

      Dans mes yeux ;..j’ai cru dans un premier temps qu’il s’agissait du film argentin, qui lui est un vrai chef d’oeuvre, mais en fait c’est « dans ses yeux »....A voir absolument pour ceux qui ne connaissent pas.
      Dans ses yeux - Bande-annonce Officielle [VOST FR ...

    • L'enfoiré L’enfoiré 27 mars 2016 11:28

      @bakerstreet,


       Oui, très beau film. 
       Le Johnny dont il était question était hier soir, à Bruxelles.
       Cette fois, il a chanté. 
       Il se retrouvait devant le même dilemme : faire le concert ou non..
       Après les attentats de Paris, il avait considéré qu’il ne le pouvait pas.
       Je serais bien intéressé de connaitre les arguments de la première et de la deuxième décision. 

  • Trelawney 24 mars 2016 17:34

    Au salon du livre, on y fait aussi de belles rencontres. Regardez cette séquence où l’on y voit un patron écrabouiller comme une merde un membre du gouvernement, une représentante de la vrai gauche expliquer la vie à ce même patron visiblement déconnecté de tout. Et un représentant de la gauche au pouvoir regarder tout cela en simple spectateur qu’il est.

    Il y a même Luchini qui dit « Mais c’est hallucinant ! »

    Et le guignol de service qui répète tels Coué « il faut y croire ». Personnellement j’ai du mal

    http://www.dailymotion.com/video/x3zohay_eldin-sapin-et-gattaz-le-grand-journal-canal_tv


    • bakerstreet bakerstreet 24 mars 2016 20:58

      @Trelawney
      .....Et on finit par en faire un spectacle...... 

      Le canal même parfois à l’égout, ou son contraire....
      Comme disait Richelieu, tant que le bon peuple en rit, laissons les chanter sous nos fenêtres, et même se moquer de nous, ils ne feront pas la révolution ! 

    • Trelawney 25 mars 2016 07:26

      @bakerstreet
      Une fois passé le comique de situation, ce reportage est très instructif. On y voit une personne subissant dans sa vie tous les désagréments occasionnés par les deux autres les apostropher avec conviction On y voit un patron tout puissant ridiculiser un représentant de l’état. On y voit ce même représentant de l’état être incapable d’intervenir dans un débat qui le concerne directement.

      Tout cela sous la baguette d’un bouffon du roi, micro à la main qui agite ses grelots, dès que la situation n’est plus sous son contrôle.

      Très schizophrénique ne trouvez-vous pas ?


    • bakerstreet bakerstreet 25 mars 2016 11:19

      @Trelawney
      Il y les termes, et il y a le ton, qui est celui de la suffisance des puissants qui vont se retrouver au dîner du siècle. Le chroniqueur faisant des ronds de jambes et rebondissant comme un ressort pour transformer en spectacle la misère du monde. 

      On peut toujours se consoler avec le bouquin de Patrick Rimbaud qui continue ses parodies sur le pouvoir de l’Élysée. 

  • 5570Canterbury (---.---.232.108) 25 mars 2016 05:21

    Je vérifie seulement si ces maudites coordonnées de paranos vont me permettre de commenter


    Pierre JC Alard

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