jeudi 4 septembre 2008 - par Antoine Gitton

HADOPI / DADVSI II, la riposte gratinée

Dans la foulée des accords de l’Élysée qui suivirent la mission OLIVENNES, le gouvernement a adopté le 18 juin 2008 un projet de loi « favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet », communément désigné « HADOPI » du nom de la « Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet » qu’il institue.

L’économie du projet de loi est simple dans son principe : il s’agit de prévoir, indépendamment et parallèlement aux procédures civiles ou pénales prévues au code de la propriété intellectuelle (CPI), une prévention et une répression spécifique du manquement par l’abonné à une obligation de surveillance, née avec la loi du 1er août 2006.

 Le mécanisme est présenté comme « préventif » et « essentiellement pédagogique » (exposé des motifs du projet de loi). Il est organisé autour d’une nouvelle autorité administrative indépendante, la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), composée de deux organes, le collège, neuf membres dont trois magistrats et la Commission de protection des droits, trois membres, tous les trois magistrats.

L’HADOPI se substitue à l’Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT) née avec la loi du 1er août 2006. Sa mission consiste à concilier mesures techniques de protection et interopérabilité d’une part et à ne pas compromettre le bénéfice de certaines exceptions, notamment copie privée, exception pédagogique, exception de conservation pour les bibliothèques et exception en faveur des personnes handicapées).

Les autorités administratives indépendantes ont connu des taux de mortalité infantile élevés en matière audiovisuelle[1]. Il semble qu’il doive en être de même s’agissant de l’autorité administrative chargée de réguler l’accès aux œuvres de l’esprit. Ainsi les jours de l’ARMT sont comptés. L’HADOPI prendra le relai de ses missions.

À l’origine de la méthode et de l’idéologie qui ont conduit au projet de loi HADOPI, un homme, président de la Fnac, et son opuscule « La gratuité c’est le vol ».

Une procédure législative inspirée ou les bons remèdes de M. Homais

 

Du bon sens au non-sens

L’on se souvient de la saga de la procédure parlementaire DADVSI, depuis un projet de loi conçu afin de traduire directement en droit français et avec quelque retard la directive du 22 mai 2001 instaurant les exceptions et les limites aux droits exclusifs de propriété littéraire et artistique, la protection des mesures techniques de protection et des informations sur le régime des droits.

L’objectif avoué du texte gouvernemental à l’époque résidait déjà, avec la transposition de la directive du 22 mai 2001, dans la lutte contre le piratage qui émeut et agite, avec quelques raisons, les industries du disque et du cinéma dans le monde occidental en général et en France en particulier.

L’on vit alors un déchaînement des lobbys parmi lesquels l’on peut distinguer notamment :

- les opérateurs de télécommunications intégrant les fournisseurs d’accès à internet ;

- les titulaires de droits en distinguant les associations et syndicats représentant les producteurs de disques ou de films, les artistes interprètes et leurs sociétés de gestion (ADAMI et SPEDIDAM), les auteurs et associations ou sociétés représentatives d’iceux ;

- les usagers représentés par diverses associations ;

- les défenseurs du logiciel libres.

L’on se souvient comment les parlementaires, mal affranchis au préalable de questions mêlant technicité et véritable orientation philosophique du droit d’auteur, s’étaient égayés au grand dam de leurs groupes respectifs, : ainsi l’esprit de KAZAA et de BIT TORRENT vint à la députée Christine BOUTIN, par le verbe du jeune Aziz RIDOUAN, qui la convainquit des vertus des échanges de fichiers musicaux, à l’encontre du gouvernement qu’elle soutenait ; ainsi le député Patrick BLOCHE devint-il le champion de cette licence globale, visant à autoriser par principe le téléchargement de fichiers d’œuvres protégées, contre le paiement d’une redevance forfaitaire reversée aux ayants droit. Les dirigeants du Parti socialiste, qui recueille notamment depuis les lois LANG du 10 août 1981 et du 3 juillet 1985 un certain capital de sympathie du côté des auteurs et des industries culturelles, eux-mêmes très majoritairement hostiles à la licence globale, ne parvinrent jamais à l’impossible synthèse.

Adopté par l’Assemblée nationale avant d’être battu en brèche par les sénateurs, l’amendement « licence globale », qui légalisait les échanges de fichiers d’œuvres protégées, laissa un avatar : l’exonération des délits de contrefaçon au bénéfice des échangistes paritaires.

Le calice du gouvernement d’alors n’en était pas à la lie : pour faire pièce à la licence globale, mais afin de donner le change aux partisans des réseaux d’échanges paritaires, le ministre de la Culture, par la voie d’un amendement (n° 263) avait voulu exonérer des délits de contrefaçon prévus aux articles L.335-2 et suivants du CPI : « la reproduction non autorisée, à des fins personnelles, d’une œuvre, d’une interprétation, d’un phonogramme, d’un vidéogramme ou d’un programme protégés par un droit d’auteur ou un droit voisin et mis à disposition au moyen d’un logiciel d’échange de pair à pair ».

Le même amendement, à qui le législateur avait prêté vie, prévoyait aussi de soustraire aux foudres de la contrefaçon « la communication au public, à des fins non commerciales, d’une œuvre, d’une interprétation, d’un phonogramme, d’un vidéogramme ou d’un programme au moyen d’un service de communication au public en ligne, lorsqu’elle résulte automatiquement et à titre accessoire de leur reproduction dans les conditions visées au premier alinéa. »

Le Conseil constitutionnel, aux termes de sa décision du 27 juillet 2006, a jugé que cette exonération, contraire au principe d’égalité, devait être censurée.

Depuis, c’était il y a deux ans, la loi DADVSI conserve les stigmates d’une gestation douloureuse et d’une naissance difficile. Elle ne satisfait au fond ni les ayants droits qui ne peuvent concurrencer les fichiers illicites, libres, ceux-ci, de mesures techniques de protection (MTP) et conformes à l’interopérabilité inhérente au dogme et à la pratique numériques.

Alors président directeur de la Fnac, M. Denis OLIVENNES, a publié en février 2007 un opuscule intitulé, comme une revanche cent soixante-sept années après PROUDHON « La gratuité c’est le vol ».[2]

M. Denis OLIVENNES, diplômé de normale sup de Saint-Cloud et de l’ENA, a commencé sa carrière comme auditeur à la Cour des comptes avant de rejoindre Pierre BEREGOVOY, dont il sera le conseiller, tant dans ses fonctions de ministre de l’Économie qu’à son cabinet de Premier ministre.

Denis OLIVENNES rejoindra ensuite Air France, puis NC Numéricable (rachetée par le groupe Canal +) puis la Fnac. Il est, depuis 2008, directeur général adjoint et directeur de la publication du journal Le Nouvel Observateur. [3]

Les points de vue de M. Denis OLIVENNES, s’ils sont éminemment respectables en tant que tels, ne faisaient pas particulièrement autorité en matière de propriété littéraire et artistique, avant que la ministre de la Culture ne loue la « hauteur de ses vues » (lettre de mission Christine ALBANEL du 26 juillet 2007) et lui confie la mission qui prospérera comme l’on sait jusqu’aux principaux palais de la république : l’Élysée, le Luxembourg, le palais Bourbon, en passant (et repassant) par le palais Royal

Sauf cette promotion inattendue, dont nous félicitions volontiers M. OLIVENNES, ses vues, toutes hautes qu’elles soient, n’en demeurent pas moins des vues éminemment discutables, en toute sérénité naturellement.

Dans son petit ouvrage, M. Denis OLIVENNNES brosse rapidement un certain panorama du bien culturel avec ce postulat : « La démocratie culturelle est née de la marchandisation des œuvres de l’esprit » (page 12 de l’ouvrage).[4]

Denis OLIVENNES y défend l’économie de « la culture populaire et mondialisée du divertissement » par opposition à la haute culture élitiste et universaliste de l’invention esthétique. « Ce n’est pas La Princesse de Clèves, Don Giovanni ou Les Demoiselles d’Avignon, mais Da Vinci Code, Britney Spears et Disney » écrit Denis OLIVENNES. Distinguo qui ne va pas sans poser en soi quelques difficultés pour les praticiens du droit d’auteur et bien qu’il y ait là une véritable question : la protection des œuvres conçues comme des produits commerciaux, avec des objectifs de rentabilité et de profit, doit-elle être identique à la protection de l’œuvre créée avec elle-même comme seule finalité ? En tout cas, M. OLIVENNES impose un postulat qui vicie sa théorie en droit positif.

L’auteur écrit ensuite : « En soutenant la croissance de production des circuits de production et de diffusion des œuvres, le développement du divertissement mondialisé sert ainsi d’écosystème à la diversité culturelle. Dans les pays comme la France, ce phénomène est renforcé par la mise en place de réglementation et de mécanismes de soutien ou de redistribution : ils protègent la diversité en aidant les « petits » producteurs et distributeurs ainsi que les œuvres moins commerciales. C’est ce qu’on a longtemps appelé « l’exception culturelle. »

Ainsi l’accès gratuit aux œuvres protégées via les réseaux de peer to peer affectent-elles directement non seulement la rémunération des producteurs des artistes et des auteurs, mais aussi directement la diversité culturelle : les « gros » ne financent plus les « petits », les « rentables ne le sont plus assez pour financer les « non rentables ».

Denis OLIVENNES choisit les philosophes « néo-tocquevilliens », contre les philosophes « marxistes » : « le processus de démocratisation et d’accomplissement des individus, malgré ses dérives et ses caricatures (est) un progrès de la civilisation, alors que pour ceux-ci « le triomphe de la culture du divertissement de masse constituerait au contraire l’avènement d’une nouvelle barbarie. » (Pages 73 et 74 de l’ouvrage)

Denis OLIVENNES distingue encore les œuvres mondiales et les œuvres universelles, celles qui renvoient au public et celles qui s’imposent au public. Citant Hannah ARENDT : « elle note l’émergence, écrit l’auteur, (à côté des « ouvrages immortels du passé ») de nouvelles marchandises qui ne sont ni des « choses » ni des « objets culturels » ni des « valeurs », mais des biens de consommation destinés à être usés jusqu’à épuisement, comme n’importe quel autre bien de consommation ». Lorsqu’Arendt prophétise la dissolution de « l’art véritable » dans la « culture légère », Denis OLIVENNES veut au contraire démontrer que celle-ci sauve celui-là.

Au rebours d’autres auteurs qu’il convoque tels Daniel COHEN (cité page 100 de l’ouvrage, La propriété intellectuelle c’est le vol in Le Monde du 08/04/01) ou Jacques ATTALI (cité page 116, Une brève histoire de l’avenir, Fayard 2006) démontrant le caractère nécessaire et inéluctable de la gratuité des œuvres et, à l’inverse, le caractère anormal du caractère onéreux, pour Denis OLIVENNES « La gratuité c’est le vol ».

Pour autant, selon l’auteur, la répression n’est pas une solution et les mesures techniques de protection sont désormais impossibles à mettre en œuvre.

Le bon sens respectable de M. OLIVENNES ne fait pas la raison, encore moins devrait-il faire une loi.

Toutes les idées développées par M. OLIVENNES dans son court essai, à savoir lutte contre la gratuité, répression amoindrie, développement de l’offre légale, abandon des DRM, se retrouvent dans les accords de l’Élysée et dans le projet de loi en objet.

Le petit ouvrage « de bon sens » vaut sans doute quelque chose - parce qu’il faut en tout cas faire quelque chose -, mais il ne vaut pas grand-chose au regard du contrat social qui fonde le droit d’auteur.[5]

Sa descendance (mission OLIVENNES, rapport OLIVENNES, accords de l’Élysée, projet de loi HADOPI) ne vaut guère plus à cette aune et, encore une fois, quelque respectable et utile soit la position de Denis OLIVENNES et quelque nécessaire soit la lutte contre le piratage.

Personne, respectueux des œuvres des esprits (grands ou petits) ne peut voir sans crainte la consommation effrénée de celles-ci au meilleur prix pour le consommateur, c’est-à-dire zéro, comme autant d’acte de mépris de ceux qui portent ces esprits : la gratuité, c’est le paroxysme de cette logique marchande, où l’œuvre de l’esprit cède le pas à l’objet marchand : le demandeur/consommateur résout son conflit avec les offreurs du mieux qu’il peut, c’est-à-dire sans payer.

La gratuité, ce n’est pas du vol, contrairement à l’assertion très spécieuse de M. OLIVENNES, d’abord parce que le public a une véritable créance d’accès sur les œuvres publiées[6], encore parce que l’œuvre est destinée au domaine public, ensuite parce que les droits d’auteur et les droits voisins confèrent un droit de propriété incorporel protégé par le droit spécial de la contrefaçon, enfin parce que rien n’est gratuit sur internet : tout trafic bénéficie aux opérateurs et le pirate laisse toujours des éléments d’identification qui ont une valeur économique.

La question fondamentale posée par la contrefaçon sur internet, nous semble t-il, réside d’abord dans cette inconscience et cet amoralisme absolu du « pirate », un pur nihiliste en fait, qui non content de jouir gratuitement - comme s’il s’agissait de jouir - détruit en plus une économie et une société qu’il ne reconnaît pas.

Le problème fondamental, c’est bien, depuis quelque temps déjà, la fracture du contrat social, qui fonde le droit d’auteur. Il ne faut pas rechercher les causes de cette fracture ailleurs que dans le matérialisme commun au fond à M. OLIVENNES et aux « pirates » : l’œuvre est une chose qui tend à se réduire à son support pour la meilleure utilité du « consommateur ».

Or, le lien qui unit le créateur, quel qu’il soit, dès lors qu’il est protégé par le droit spécial des auteurs, n’a rien à voir avec la fourniture de bien ou de service. Pourtant le public « consomme » des œuvres. On l’y incite même.

Guy DEBORD (étonnamment ignoré par Denis OLIVENNES dans son opuscule) écrivait au début de La Société du spectacle[7] :

« Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation. »

... et s’est dissout dans des reproductions, oserions-nous ajouter.

Si notre législateur est finalement bien inspiré par des traditions anglaises et des meilleures, c’est bien celle du non-sens, dans la lignée de Lewis CARROLL, à moins que ce ne soit celle de l’Utopie et de l’Eutopie, dans la lignée de Thomas MORE.[8]

Le bon sens possède souvent l’apparence ordinaire de la raison. Mais la raison n‘est jamais ordinaire.

Cette procédure, présentée avec beaucoup d’apparence de raison, fait peu de cas des garanties procédurales administratives, civiles et pénales pour instaurer une procédure « sui generis », de nature foncièrement répressive.

Son objectif déclaré n’apparaît pas tant comme la protection des auteurs/artistes que l’organisation d’un contexte favorable à la mise en place d’accords entre opérateurs et producteurs. C’est au fond une énorme différence qui relativise tant les droits de propriété littéraire et artistique que les droits fondamentaux du justiciable.

 Ainsi peut-on lire dans l’exposé des motifs du projet de loi : « il s’agit de faire comprendre au consommateur qu’internet est désormais, parallèlement à ses fonctions de communication et d’échange, un outil efficace et moderne de distribution commerciale. Elle (la lutte contre le piratage de masse) sera donc essentiellement préventive et l’éventuelle sanction de la méconnaissance des droits de propriété littéraire et artistique ne passera plus nécessairement par le juge »

C’est bien ce qui peut inquiéter : le juge, c’est aussi la garantie du bon droit, avant, pendant et après le jugement.

Manifestement fasciné par un modèle inspiré de systèmes nordiques ou anglo-saxons, plus fantasmés qu’effectifs, foncièrement basés sur la contrainte volontaire et l’acceptation mutuelle, fondés sur une forte volonté de cohésion sociale, le législateur voudrait donc que le piratage devienne un « risque inutile » au regard de l’offre légale qui serait développée en échange du mécanisme « préventif » et « pédagogique », répressif au fond, qui serait mis en place.

L’on ne voit pas en quoi le piratage deviendrait un risque inutile puisqu’il ne s’agit précisément pas de sanctionner le « pirate », mais le titulaire de l’abonnement négligent.

Le système mis en place par le projet de loi ne parvient pas à surmonter le vice essentiel sur lequel il repose : une personne innocente, en tant que telle, le titulaire de l’abonnement, est responsable pénalement, fût-ce à un degré moindre, de faits de contrefaçon commis par un tiers.

Si ce n’est toi ...

Existe-t-il d’autres exemples où une personne est réprimée pénalement non pas pour la commission de faits dont elle l’auteur, mais pour sanctionner le défaut de surveillance ou de vigilance qui aurait permis l’utilisation détournée par un tiers des moyens dont elle a la garde ? L’on songe immédiatement aux véhicules à moteur et aux infractions du Code de la route, dont l’exemple est rappelé par les promoteurs du projet gouvernemental.

Toutefois, le mécanisme est radicalement différent : il s’agit alors d’une présomption simple de conduite du véhicule par le titulaire de la carte grise. Celui-ci s’exonère de sa responsabilité dès lors qu’il démontre qu’il ne conduisait pas le véhicule en question.

L’on songe aussi aux cumuls d’infraction : l’un fabrique une fausse pièce d’identité qu’il procure au second qui commet ensuite une escroquerie. Les délits du premier et du second sont différents, mais ils ressortent tous les deux d’une intention délictuelle positive - dolus bonus - sauf si les deux sont liés dans l’escroquerie en quel cas ils sont complices et c’est le régime du cumul réel d’infraction qui s’applique.

Rien, en l’état de notre droit ne ressemble, heureusement, à notre connaissance, à ce dont nous traitons aujourd’hui :

Un défaut de surveillance, non incriminé comme tel, conduisant à une sanction de nature pénale, sans qu’il y ait pour autant aucune coaction ou complicité dans le délit de contrefaçon, afin néanmoins de faire supporter au débiteur de l’obligation de surveillance une part de responsabilité dans le délit de contrefaçon commis.

La poursuite des « pirates » est un acte d’autorité difficile à assumer pour le gouvernement[9], la constitution ne permet pas de régler le sort des pirates comme il l’aurait voulu : on décale alors la responsabilité sur un tiers au délit de contrefaçon et l’on invente pour celui-là une juridiction spéciale avec des peines spéciales.

Tant que l’on ne dissociera pas la responsabilité du titulaire de l’abonnement des faits de contrefaçon qui laissent supposer son défaut de surveillance, le dispositif légal constituera, sous un piètre déguisement, une violation permanente du principe de la personnalité des délits et des peines.

Peut-on imaginer une violation de l’obligation de surveillance sans contrefaçon en amont ? Évidemment, chacun sait comment internet permet de réaliser nombre de délits parmi lesquels l’on peut citer : l’incitation à la haine raciale, la provocation à la débauche, la pédophilie...

 

Pourquoi le titulaire de l’abonnement serait-il sanctionné pour son défaut de vigilance s’agissant d’échange de fichiers numériques lorsqu’il ne serait pas autrement inquiété, en tant que tel, c’est-à-dire hors complicité, sauf les règles civiles de la responsabilité du fait des choses que l’on a sous sa garde, c’est-à-dire dont a l’usage la direction et le contrôle, lorsqu’il s’agirait d’échanges pédophiles ?

D’abord parce que les enfants victimes de pédophiles n’ont aucune chance de devenir en tant que tels président d’un grand magasin de distribution.

Ensuite parce que le gouvernement, incapable d’appréhender le contrefacteur dans les mailles de la riposte graduée qu’il avait imaginée, a décidé d’y substituer le titulaire de l’abonnement, selon le principe de droit génial : « si ce n’est lui, c’est donc son fils ».

 

Les données personnelles dans le filet

 

La Haute autorité établit un répertoire national des personnes qui font l’objet d’une suspension en cours de leur accès internet.

Le fournisseur d’accès vérifie, à l’occasion de la conclusion de tout nouveau contrat portant sur sa fourniture de service, si le nom du cocontractant figure sur ce répertoire.

Le législateur autorise la création, par la Haute autorité, d’un traitement automatisé de données à caractère personnel portant sur les personnes faisant l’objet d’une procédure.

S’agit-il aussi des informations/avertissements prévus dans le projet de loi ? Il semble que la réponse doive aussi être forcément positive, puisque la sanction ne peut intervenir que dans le délai d’un an à compter de la recommandation. Pourtant l’abonné n’aura pas eu à ce stade le loisir de pouvoir ni vérifier ni contester ce qu’on lui reproche, sauf si, comme nous le pensons, en l’état actuel du texte, le recours au juge administratif est possible sur le fondement de l’excès de pouvoir contre les recommandations.

Le traitement a pour finalité la mise en œuvre, par la commission de protection des droits, des mesures d’information/avertissement et sanction et de tous les actes de procédure afférents, ainsi de la mise en œuvre de la vérification à la charge des fournisseurs d’accès internet afin de savoir si leur futur cocontractant ne figure pas au répertoire national des personnes dont l’accès est suspendu.

Avec le sinistre fichier Edvige[10], c’est un nouveau fichage de citoyen, dont nombre d’entre eux n’auront simplement rien à se reprocher, selon le principe du filet à mailles étroites : la mise à disposition, a priori, d’une autorité de police des éléments de la vie privée des personnes est justifiée par le niveau de sécurité requis.

La liberté a définitivement cédé le pas devant la sécurité, en contravention à la règle sociale politiquement libérale qui fonde nos États démocratique.

 

Perspectives

 

Selon la doctrine OLIVENNES qui étaye le projet de loi, l’exception culturelle est essentiellement économique et marchande. Elle justifie que l’on déroge aux lois du marché, non pas pour protéger les œuvres de l’esprit en tant que telle, mais pour les financer.

Ainsi les biens culturels doivent-ils échapper aux deux branches de la liberté du commerce et de l’industrie : liberté d’entreprendre (constitutionnalisée en 1982) et la liberté de concurrence (non constitutionnalisée). Le monopole des auteurs, artistes et producteurs est ainsi justifié.

Pourtant le droit d’auteur n’exprime pas cela : l’exception n’est pas économique, il ne s’agit pas d’instituer un monopole sur un bien en faveur de ceux qui l’ont acquis, mais d’instituer une souveraineté d’une personne, l’auteur, sur son bien, parce que l’auteur est pourvoyeur d’œuvres de l’esprit et parce que les œuvre de l’esprit, dans les États démocratiques et pacifiques, points de rencontre des personnes composants le public, sont à l’origine même du contrat social. Retirez la culture c’est-à-dire la création et le patrimoine, demeurent le pain et les jeux, ce qui est peut-être malheureusement assez conforme à l’état de nos sociétés.

 

Certes le monopole économique sur le bien découle de la souveraineté de l’auteur sur celui-ci, pour autant que l’auteur le souhaite, mais le sens de l’exception culturelle devient tout autre : ce n’est pas tant une exception monopolistique sur un bien dans une économie de libre concurrence, afin de permettre le financement des industries culturelles.

Ça c’est le moyen, ce n’est pas la fin. L’exception culturelle, qui découle du droit d’auteur, est une exception monopolistique en faveur d’un auteur afin de lui assurer la pérennité de sa relation avec le public : parce qu’il bénéficie d’un monopole d’exploitation l’auteur perçoit une rétribution qui lui permet de continuer à créer, et au niveau moral, qui est théoriquement et légalement prépondérant, de maintenir son œuvre à l’égard du public.

 

 

Qu’est-ce que ça change ? Tout : le public et particulièrement le jeune public rebelle et iconoclaste, méprisera d’autant plus l’œuvre de l’esprit que le législateur lui-même confondra un tant soit peu la répression de la contrefaçon avec la répression hasardeuse, infantilisante et injuste d’un défaut de surveillance à un abonnement.

 

Demeurent aussi nombre d’objections pratiques à l’efficacité du système HADOPI :

Quid de l’abonné, ressortissant français ou non, dont l’opérateur est à l’étranger ? Rien ne lui interdit de prendre un FAI n’importe où dans l’UE. L’HADOPI sera alors incompétente et désarmée.

 

Le projet de loi HADOPI va devoir passer au crible du Parlement puis très vraisemblablement du Conseil constitutionnel, à l’état de loi non promulguée et sans doute encore devant la même juridiction, puisque la récente réforme de la constitution permet à un justiciable de soulever par voie d’exception l’inconstitutionnalité d’une loi.

La Cour européenne des droits de l’homme est aussi susceptible de sanctionner un texte qui en l’état de sa rédaction nous semble contraire à l’article 6-I de la CESDH.

 

Extrêmement maladroit dans la méthode, fondé sur une conception courte et fausse de l’œuvre de l’esprit et du principe de sa protection, le projet de loi HADOPI rompt aussi les équilibres juridictionnels qui au fil du temps et de la jurisprudence font une civilisation.

Poser la question de la police des œuvres de l’esprit sans poser la question de leur valeur, non pas marchande, mais sociale, c’est, dans l’univers numérique, se heurter au néant.

Réprimer, fût-ce en tapant sur un tiers, le délit de contrefaçon sans faire l’effort de comprendre vraiment la société des « pirates », ces anti-sociaux, et pourquoi elle a surgi, c’est s’enfoncer dans une guerre de colonie. Et l’internet, c’est parfait pour les guérillas.

Les œuvres de l’esprit, leurs auteurs et leurs promoteurs méritent mieux que l’HADOPI. Ce ne sera pas difficile.

Antoine Gitton
www.gitton.net



[1] Haute autorité de la communication audiovisuelle avec la loi du 29 juillet 1982, Commission nationale de la communication et des libertés avec la loi du 30 septembre 1986, Conseil supérieur de l’audiovisuel avec la loi du 17 janvier 1989.

[2] Denis OLIVENNES : La Gratuité c’est le vol – Grasset 2007.

« Pierre-Joseph Proudhon : Qu’est-ce que la propriété ? Ou recherches sur le principe du droit et du gouvernement. 1840 ».

[3] Sources WIKIPEDIA.

[4] La notion de « démocratie culturelle » demanderait à être précisée. L’on peut affirmer exactement le contraire avec autant d’apparence de raison : la marchandisation des œuvres compromet l’avènement de la démocratie culturelle… L’on peut considérer, avec autant d’apparence de raison, que la culture en général et les œuvres de l’esprit en particulier sont forcément élitistes. Le postulat de M. OLIVENNES est en fait purement idéologique.

[5] Cf. notre article in Legipresse mars 2006, Le Droit d’auteur, un contrat social, Le projet de loi DADVSI – Commentaire d’une proposition d’amendement.

[6] « Le principe est double, ne l’oublions pas. Le livre, comme livre, appartient à l’auteur, mais comme pensée, il appartient – le mot n’est pas trop vaste – au genre humain. Toutes les intelligences y ont droit. Si l’un des deux droits, le droit de l’écrivain et le droit de l’esprit humain, devait être sacrifié, ce serait certes, le droit de l’écrivain, car l’intérêt public est notre préoccupation unique, et tous, je le déclare, doivent passer avant nous. » Victor Hugo, Congrès littéraire international, séance du 21 juin 1878.

« Avant la publication, l’auteur a un droit incontestable et illimité. Supposez un homme comme Dante, Molière, Shakespeare. Supposez-le au moment où il vient de terminer une grande œuvre. Son manuscrit est là, devant lui, supposez qu’il ait la fantaisie de le jeter au feu, personne ne peut l’en empêcher (…) Mais dès lors que l’œuvre est publiée l’auteur n’en est plus le maître. C’est alors l’autre personnage qui s’en empare, appelez-le du nom que vous voudrez : esprit humain, domaine public, société. C’est ce personnage-là qui dit : Je suis là, je prends cette œuvre, je fais ce que je crois devoir en faire, moi esprit humain, je la possède, elle à moi désormais. (…) l’œuvre n’appartient plus à l’auteur lui-même, il n’en peut désormais rien retrancher ; ou bien, à sa mort, tout reparaît. Sa volonté n’y peut rien (…) » Victor Hugo, Congrès littéraire international, séance du 25 juin 1878.

[7] Guy DEBORD pastichait ainsi Marx qui écrivait pour commencer Le Capital  : « La richesse des sociétés dans lesquelles règne le mode de production capitaliste s’annonce comme une "immense accumulation de marchandises". L’analyse de la marchandise, forme élémentaire de cette richesse, sera par conséquent le point de départ de nos recherches. »

 

[8] Utopie, étymologiquement ce qui est situé nulle part, Eutopie, étymologiquement le bon lieu.

 

[9] Le piratage pose une véritable question d’autorité au sens le plus politique du terme : soit la loi est bonne, c’est-à-dire non seulement légitime (votée par le Parlement régulièrement constitué), mais encore doit-elle constituer une théorie suffisamment consensuelle du juste et du bien, soit elle ne l’est pas. Le gouvernement doit toujours avoir l’autorité morale nécessaire, soit pour faire respecter la loi sans transiger sur l’ordre public, soit pour la modifier. Il semble que nos gouvernements successifs, depuis l’avènement des technologies numériques, n’aient pas cette autorité nécessaire ni pour faire appliquer la loi sur le droit d’auteur, ni pour la modifier. C’est ainsi que le Parlement est devenu en matière de droit d’auteur une arène amusante où s’affrontent les lobbys, très renforcés par la facilité des communications.

[10]  Créé par un décret du 27 juin 2008, le fichier Edvige – Exploitation documentaire et valorisation de l’information générale – est né du démantèlement des Renseignements généraux. Ce fichier géré par la Direction centrale de la sécurité publique du ministère de l’Intérieur concerne à la fois les personnes « ayant sollicité ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif » et les individus ou les organisations « susceptibles de porter atteinte à l’ordre public ». Les mineurs pourront être fichés dès 13 ans.



27 réactions


  • Antoine Gitton Antoine Gitton 4 septembre 2008 10:52

     Agoravox a raccourci le titre qui est, j’y tiens : "HADOPI / DADVSI 2, la riposte gratinée - la géniale justification d’une prise en otage de l’abonné à un FAI : "Si ce n’est toi, c’est donc ton fils" 

    AG


    • fb 4 septembre 2008 11:57

      Merci infiniment pour cet article parfaitement clair et argumenté. Une petite correction toutefois, la licence globale a sauté à l’Assemblée nationale suite à l’épique amendement 272 déposé par le gouvernement.

      J’ai une petite question, n’étant pas juriste, si HADOPI peut menacer sans fournir de justification et renverse la charge de preuve (et de plus les modalités d’appel sont renvoyées à un décret...) est-il possible alors d’attaquer HADOPI pour diffamation des la réception du premier mail afin de les obliger à user de l’exception de vérité et donc de justifier leurs allégations ?


    • Antoine Gitton Antoine Gitton 4 septembre 2008 13:29

       Merci pour votre commentaire. Il s’agirait alors d’une diffamation privée et non publique R.621-1 du code pénal punie par une contravention de première classe. Mais il est probable que le juge retiendrait la bonne foi de l’HADOPI et relaxerait des fins de poursuite.
      Le contentieux administratif (en l’état du projet de texte) me semble la meilleure voie. 


    • fb 4 septembre 2008 15:12

      M. GItton,

      j’ai fait un tour sur votre site et votre proposition[1] me semble particulièrement intelligente car elle permet une migration progressive d’un modèle vers un autre et de redonner un lien très fort entre l’oeuvre, son auteur et le public.

      Le droit moral est effectivement l’essence du droit d’auteur, alors que les lois sont faites (par) pour les ayants droit et surtout en matière de droits voisins. Au contraire, comme le démontre le logiciel libre (qui fête ses 25 ans) , privilégier le droit moral de l’auteur, rendre accessoire le droit patrimonial et inutiles les droits voisins est un principe qui fonctionne dans ce nouvel environnement.

      Je me permets de vous proposer un lien vers un texte de John Perry Barlow intitulé « The Economy of Ideas - Selling Wine Without Bottles on the Global Net »[2][*], qui, si vous ne le connaissez pas, ne manquera pas de vous intéresser.

      Désolé pour ce léger hors sujet, mais le sujet est vaste, passionnant et... passionné !

      Bien à vous

      [1] www.gitton.net/Editoriaux/proposition.htm
      [2] homes.eff.org/ barlow/EconomyOfIdeas.html (1992, en anglais)
      [*] « L’économie des idées - vendre du vin sans les bouteilles sur le Réseau global »


    • Antoine Gitton Antoine Gitton 4 septembre 2008 17:47

       Merci pour votre attention. Bien vu pour la gradation droits moraux, patrimoniaux, voisins ... Merci aussi pour le tuyau. J’y cours.


    • fb 4 septembre 2008 18:17

      Il y une erreur dans le lien, et il semble y avoir eu du ménage sur le site de l’Electronic Frontier Foundation, voici donc un lien vers l’article original paru dans Wired :

      www.wired.com/wired/archive/2.03/economy.ideas_pr.html


  • wangpi wangpi 4 septembre 2008 11:58

    merci pour cet article où le bon sens s’ajoute à une mise en perspective intelligente.
    toutefois, je demande (à l’auteur ?) : j’utilise le réseau TOR, ce qui signifie qu’un autre utilisateur de ce réseau pourrait très bien, à un moment ou à un autre "utiliser" mon ip pour télécharger.. qu’en est-il dès lors de la responsabilité personnelle ?
    d’autre part, comment s’abonner à un FAI étranger depuis la France ?
    enfin, les opérateurs ne seront-ils pas tentés d’envoyer systématiquement à TOUS leurs clients la première mise en demeure, tablant sur le fait que les plus trouillards diminueront leur appétit, et dans ce cas, comment contester cette mise en demeure, si l’on a effectivement RIEN à se reprocher ?
    merci


    • Antoine Gitton Antoine Gitton 4 septembre 2008 13:42

       Vous posez des questions de fond bien intéressantes :
      Je connais le principe de TOR, je ne le connais pas dans le détail pour vous apporter une réponse qui ait beaucoup de valeur juridique. Mais à brûle pourpoint, il est certain que des système nodaux comme TOR relativisent forcément l’adresse IP et donc l’identification du titulaire de l’abonnement. La logique HADOPI conduirait à réglementer sinon interdire des logiciels type TOR, puisqu’il équivaudrait à rouler avec des fausses plaques ... 
      Sur la deuxième question, l’on peut en tout état de cause être domicilié en Belgique par exemple avec un abonnement à Belga quelque chose. Le principe qui prévaut ensuite dans l’UE est la libre prestation de service. Sur la troisième question, ce ne sont pas les opérateurs qui expédient les "recommandations". C’est la Commission de protection des droits de l’HADOPI. La question du bien fondé des "recommandations " demeurent néanmoins, avec celle de leur contestation.
      Je compléterai ces éléments de réponse dès que j’en aurai le temps.


  • Yannick Harrel Yannick Harrel 4 septembre 2008 14:31

    Bonjour,

    Avec le projet de loi HADOPI j’hésite entre parler d’incompétence ou de manipulation tant les mesures proposées ne seront aucunement à même de résoudre le problème de la contrefaçon et pire, poseront d’autres soucis en sus de celui-ci...

    Depuis plusieurs années, l’empilement de mesures (incomplètes) destinées à favoriser l’aspect répressif de ce nouveau médium ainsi que la taxation de ce secteur économique prouvent juste une seule et unique chose : l’incompréhension totale des gouvernants d’un problème et d’une révolution technologique qui les dépasse !

    Mes propos sont durs mais à l’aune de l’incroyable sottise de ce que l’on tente de nous faire ingurgiter de force. A l’heure où l’on se mobilise de plus en plus pour EDVIGE, sait-on qu’HADOPI fait de chacun d’entre nous un potentiel délinquant et qu’il suffit pour un pirate de parasiter notre ligne (WiFi principalement) pour risquer de perdre abonnement avec lourde amende à la clef sans pour autant avoir une très grande chance de pouvoir s’innoncenter ?

    Il faut réformer surtout le circuit économique de la diffusion des oeuvres culturelles, et non ériger des digues législatives contre un mouvement technologique de fond. Hélas, les autorités Françaises sont conservatrices et sclérosées dans leur esprit. Qu’à cela ne tienne, le progrès numérique ira trouver des cieux plus cléments et la France restera avec ses chevaux boîteux...

    Cordialement


    • pierce 4 septembre 2008 17:22

      à propos du WiFi, la situation est comparable à celle d’un propriétaire d’une voiture qui se ferait retirer son permis parce qu’un individu ayant volé cette voiture a été radarisé à 200 km/h sur l’autoroute. Ainsi, de victime du vol de sa voiture, le propriétaire devient coupable, car il n’a pas pris les mesures nécessaires pour empêcher le vol de sa voiture :)

      avec de tels raisonnements, je sens que la loi française va bientôt nous proposer quelques nouveautés particulièrement intéressantes...



  • Deneb Deneb 4 septembre 2008 15:23

    Article bien documenté d’un auteur érudit, qui a, en plus du plaisir de le lire, le mérite de jetter la lumière sur la connivence mércantile entre le pouvoir economique et la société de spectacle. Cette alliance contre nature connait en effet de muliples effets pervers, que ce soit l’agression publicitaire, la profusion de médiocrité couteuse et de ce fait le pourrissement de la culture, sans parler de sa capacité de manipulation dont les victimes sont surtout nos jeunes.


  • Forest Ent Forest Ent 4 septembre 2008 16:33

    Excellent article.

    Sur les différentes magouilles derrière cette loi, je me permets encore une fois de proposer la lecture de "la forêt des médias" :

    http://forestent.free.fr/

    Je ne suis pas juriste et remercie l’auteur de son éclairage. Le principe d’un "délit de défaut de surveillance" m’avait effectivement semblé aberrant et contradictoire avec le principe de responsabilité civile.


  • Kalki Kalki 4 septembre 2008 17:02

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Omemo

    La particularité d’Omemo est d’être une grille informatique sociale, dans lequel chaque membre est invité à évaluer le contenu disponible et où l’anonymat est garanti. Il crée un disque virtuel O :\ commun à tous les utilisateurs dans lequel le contenu téléchargé et téléchargeable est disponible. L’utilisateur est invité à allouer une certaine quantité d’espace disque au logiciel afin que celui-ci puisse stocker des données partagées qui seront cryptées et dont l’utilisateur ignore la nature (un peu à l’instar du fonctionnement de Freenet).

    Les reseaux de partage anonyme sur internent.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Cat%C3%A9gorie:R%C3%A9seau_de_partage_anonyme_de_fichiers


    Freenet est un réseau informatique anonyme et décentralisé construit sur l’Internet. Il vise à permettre une liberté d’expression et d’information totale fondée sur la sécurité de l’anonymat, et permet donc à chacun de lire comme de publier du contenu. Il offre la plupart des services actuels d’Internet (email, téléchargement, web, etc.)


    GNUnet est un réseau P2P informatique garantissant l’anonymat, n’utilisant aucun service centralisé ou autre service de confiance. Une première implémentation au-dessus de la couche réseau permet un partage de fichier anonyme et résistant à la censure. GNUnet utilise un système simple basé sur un système économique d’allocation des ressources. Les nœuds GNUnet prennent en compte les demandes des autres nœuds avec un respect des ressources disponibles ; les nœuds contribuant au réseau sont récompensés par un service de meilleure qualité. Il fait partie du projet GNU.


    • pierce 4 septembre 2008 17:49

      j’ai été utilisateur de freenet, que j’ai viré intégralement de ma machine quand je me suis rendu compte que ce réseau servait en partie à des activités moralement condamnables, notamment le trafic d’images pédophiles. Donc je suis devenu farouchement contre ce logiciel et ses semblables. J’espère que le gouvernement a les moyens techniques de percer à jour ce système et j’espère que les condamnations des utilisateurs de ces systèmes qui diffuseraient de tels images seront salées.

      La seule solution au problème de la diffusion d’informations sur internet a été, est et sera toujours la licence globale et on finira par y arriver.
       
      Le problème n’est pas si compliqué à comprendre : En ce qui concerne le prix d’une oeuvre, il faudrait quand même finir par se rendre compte qu’une oeuvre en elle-même n’a aucune valeur marchande si elle est destinée à un large public si vous n’êtes pas capable d’en assurer la diffusion. La situation est tout à fait différente d’une (vraie) oeuvre UNIQUE qui a une valeur intrinsèque... comme autrefois les commandes des puissants auprès des grands compositeurs auxquels ils commandaint UNE oeuvre.

      Mais la vraie valeur d’une oeuvre destinée à la diffusion, c’est la diffusion, pas l’oeuvre. A tel point que la corrélation entre les bénéfices et la quantité d’argent investie pour réaliser l’oeuvre est plutôt faible (un film à gros budget peut faire un flop retentissant)

      Autrefois, les marchands de vinyle et de CD apportaient cette valeur indispensable en assurant la diffusion à travers la production, le transport et la vente d’un support de l’oeuvre, sous forme de disque, de CD avec un reseau de magasin, etc...

      Aujourd’hui avec internet, l’internaute peut croire qu’il paie ce transport de l’oeuvre auprès de son FAI et ne comprend pas vraiment pourquoi il devrait payer une deuxieme fois à une société de production avec laquelle il n’a aucun rapport.

      Pour que le système marche il faut donc revenir à la situation ancienne et donc, la nécessaire rétribution d’une oeuvre doit se faire comme autrefois par l’intermédiaire du DIFFUSEUR. Ce qu’il y a de merveilleux avec le P2P et la licence globale, c’est que ce sont les clients qui paient la diffusion, y compris du point de vue infrastructure (1). Et les majors sont assez débiles pour refuser un système aussi rentable. Ils manquent vraiment d’imagination...

      Toute autre démarche ne peut qu’installer un système cohercitif et malsain qui transforme tout individu en coupable a priori et tendra à limiter la liberté sur internet.

      Ce qu’il faut interdir sur internet, c’est freenet, c’est pas le P2P.

      (1) c’est tellement, vrai que je suis prêt à parier qu’en cas de licence globale, le nombre d’internautes disposés à transformer leur PC en serveur de fichier va diminuer de manière drastique :)


    • Kalki Kalki 4 septembre 2008 21:40

      Et moi je trouve mon compte avec des sites comme jamendo , http://www.jamendo.com/fr/
      mettant librement a disposition les oeuvres sous licence Creative (http://fr.creativecommons.org/).

      C’est une autre vision du monde artistique peut etre a la fois plus humaine et pragmatique.

      C’est la démocratisation de l’Art et de l’oeuvre.

      Et La diffusion libre de celui-ci.


      Ce concept par ailleur s’applique également :
      A l’art de l’image en général (photo, peinture ... ) http://www.deviantart.com/
      Au film également et au court metrages.

      Du point de vue de l’artiste, qui veut et peut par son véritable talent devenue populaire, c’est un aubaine, il n’y a pas d’intermediare entre lui et son public. Les rémunerations sont donc théoriquement plus concéquente, sinon l’artiste peut etre amené a faire plus de scene. 

      Ce qui est un bon retour au source, pret de son public.

      Peut etre plus fatiguant pour l’artiste mais il faut mériter son travail.
      C’est un avis


    • Deneb Deneb 4 septembre 2008 21:50

      Pierce : interdisons le papier, puisqu’il peut vehiculer les images pedophiles !


  • kabreras kabreras 4 septembre 2008 17:06

    L’ article est interessant, mais tout en gras il deviens rapidement agressif.


    • anomail 4 septembre 2008 18:07

      Lorsqu’on copie-colle un texte dans AG depuis une application bureautique, celui-ci est souvent publié en gras, j’ignore pourquoi.


  • thomthom 4 septembre 2008 21:25

    ben oui, depuis mes premiers articles sur le sujet, force est de reconnaitre que les choses ont bien peu progressé :

    http://thominetweb.free.fr/benjamin/LEN_DADVSI_HADOPI.doc

    on suivra cet Nieme épisode avec intéret, mais sans illusions malheureusement.


  • Philippe Axel Philippe Axel 4 septembre 2008 21:52

    Bonjour,
    j’ai lu avec beaucoup d’interêt votre article auquel j’adhère presque totalement.
    Le presque vient de votre emploi des termes "exception culturelle".

    Si je peux me permettre, il me semble que ces termes s’appliquent bien au sujet économique et pas juridique. J’ai écrit un livre dont un chapitre est consacré à ce concept que l’Unesco définit ici :
    http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.php-URL_ID=18683&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html

    "La doctrine de " l’exception culturelle " repose sur le principe que les biens et les services culturels, du fait de leur relation à la culture sont d’une nature particulière qui va au-delà des seuls aspects commerciaux. Ils véhiculent des contenus, des valeurs et des modes de vie qui sont partie prenante de l’identité culturelle d’un pays et reflètent la diversité créatrice des individus."

    L’origine du terme vient des negociations de L’uruguay round de 1994 au cours desquels tous les pays européens (et non pas seulement la France) se sont opposés au fait que l’audiovisuel entre dans le GATT."Si l’exception culturelle n’est pas retenue, nous ne signerons pas" avaient alors menacés les représentants européens face aux seuls américains . En considérant les productions culturelles audiovisuelles comme des produits comme les autres, cela aurait en effet interdit toute politique de soutien aux productions locales , comme par exemple, les quotas de chansons françaises à la radio ou notre système de financement du cinéma.Cela aurait donc laissé libre cours à la domination économique américainesur ce secteur par le jeu des économies d’echelles.

    Monsieur Olivennes dans son livre effrayant (je suis heureux qu’au moins une autre personne que moi l’ait vraiment lu), emploi ces termes d’"exception culturelle" comme tous les ultralibéraux le font, c’est à dire avec une connotation ringarde et conservatiste. Non seulement l’exception culturelle n’est pas française , mais elle est la seule manière de conserver la diversité culturelle.Elle a d’ailleurs été réafirmée par la convention sur la diversité culturelle le 21 Octobre 2005.
    http://www.philaxel.com/2005/10/

    Cette question de l’exception culturelle est au centre du problème de l’Hadopi.
    Soit on considère le fichier numérique musical comme un produit comme un autre et l’on va vers la répression du partage libre, le fichier numérique musical étant une baguette de pain. Soit on considère, comme vous le faites dans votre article, et comme l’a fait Victor Hugo dans ce discours magnifique que vous évoquez, que la culture a des valeurs autres que marchandes et alors, on va vers la gratuité et les systèmes mutualisés de type licences légales.

    Cordialement
    Philippe Axel
    www.philaxel.com











  • lapalette 4 septembre 2008 22:47

    Pour rester dans le sujet, je voulais vous faire part de cet article

    http://www.journaldunet.com/ebusiness/publicite/actualite/le-ciblage-publicitaire-base-sur-le-tracking-des-fai-suscite-la-polemique.shtml

    Le ciblage publicitaire basé sur le tracking des FAI suscite la polémique

    Vous vous rendez compte ?
    seulement 15 personnes sur 26000 soit 0,057 % qui apres avoir lu la modification de leur contrat (ou pas) ont refusé de donner à leur FAI tout leur cheminement electronique pourque ces derniers fassent de l’argent. Ce n’est plus de cueillette, c’est du fauchage dans la Bauce !

    Chaque fois qu’une nouvelle possibilité informatique se fait jour, des entités de commerce s’engouffrent dedans en premier. Des fois le pouvoir politique s’empare à son tour de l’invention à ses fins de police.

    et si au lieu du profit, le mobile devient la police ? Vous vous rendez compte du pouvoir de l’outil ?


  • fredleborgne fredleborgne 5 septembre 2008 00:23

    Un "Bravo" personnel pour cet article.


  • Bigre Bigre 5 septembre 2008 06:58

    Florent Latrive a écrit :" Du bon usage de la piraterie" . Ce livre s’achète ou se télécharge légalement et gratuitement (http://www.freescape.eu.org/piraterie/) et il précise les mots, le mot "pirate" étant d’ailleurs un mauvais choix en ce qui concerne le sujet présent, et le contexte de l’oeuvre de l’esprit.

    C’est un éclairage intéressant, pour approfondir le sujet.

    Bigre !


    • Antoine Gitton Antoine Gitton 5 septembre 2008 09:38

      Certes et il ne vous a pas échappé que "pirate" figure entre guillemets, s’agissant d’une citation (un rien ironique) du texte de loi qui reprend d’ailleurs les termes de M. Olivennes.

      Le rapporteur du projet de loi sur le droit de reproduction devant la Convention, Lakanal, parlait déjà de "corsaires littéraires". C’était le 19 juillet 1793 ...


  • dèshnormordisvraix dèshnormordisvraix 5 septembre 2008 09:56

    jé pas lu jé pas manger... , mes la chute jespere quelle vas passer par celle du riche car c la seul facon de vous dire quil fausse dépèche que là faut dépèche car bientot de demender un héro tu sera un zéro alors profite sitoi un de dire cque tu pense car un jours tu ne poura plus penser... .
    pense à image réhelle dun debarquement en pirogue en 40 mes 2000 pour venir chercher du What. la préssion est plutot haute comme la coupur entre le "pleuple le pseudo ingénieux" et sa haut préssion passer mes encore dactu regard ya rien d si hyteck no no.. . cetais le dernier coment la jour ptet... .

    ps je ne fée que dénoncer penser au acteur ou metreur en scene et écrivain.... .


  • Pelletier Jean Pelletier Jean 5 septembre 2008 13:19
    Excellent article qui faisant le point sur la loi HADOPI dite "Création et Internet" selon les proches collaborateurs de la ministre démontre l’intérêt de la « licence globale ».
     
    Toutefois celle-ci n’est pas prête à voir le jour avec cette majorité politique inféodé aux industriels du disque et de l’image.
     
    Par ailleurs le président ayant décidé de brancher le robinet en faveur de la télévision publique pour compenser la fin de la publicité sur ses écrans il n’ya aura pas de sitôt la possibilité de taxer les FAI.
     
    En fait au-delà des arguments juridiques si bien exposés dans ce papier il y a surtout une évidence : cette problématique du piratage aurait du être posée il y a dix ans…. Aujourd’hui la discussion proposée est totalement obsolète.
     
    Enfin la ministre a quelques difficultés à faire rentrer son projet de texte dans l’ordre du jour du Sénat, elle parlait d’octobre à mon avis le texte ne pourra même pas passé avant 2003 sans doute en début d’année prochaine..
     
    Jean pelletier
     
     

  • happeningjuridique 2 octobre 2008 11:23

    Le projet de loi HADOPI, ou selon son intitulé officiel « projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet », a pour objet de mettre en place un système de riposte graduée contre le téléchargement illégal et de créer un fichier national des contrevenants, sous la responsabilité d’une nouvelle autorité administrative indépendante dénommée Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI).

    Nous vous proposons d’en débattre sur le blog http://happeningjuridique.wordpress.com/ et de vous prononcer dans le cadre d’un débat public qui aura lieu à La Cantine 151, rue Montmartre (Passage des panoramas) à Paris (IIème arrdt), le 16 octobre 2008 à partir de 19 h et qui sera également diffusé sur internet. Il vous sera alors possible de voter pour ou contre ce projet de loi.

    http://happeningjuridiq.video.metrofrance.com/


Réagir