mardi 13 novembre 2012 - par jean-pierre castel

Y a-t-il plus de violence religieuse dans le monde monothéiste que dans le monde non-monothéiste ?

Comment repérer la violence monothéiste dans l'histoire ?

Il n'existe sans doute pas de violence purement et strictement religieuse, hormis les violences rituelles comme les sacrifices Aztèques : il s'agit en l'occurrence d'une sorte de cas limite par sa simplicité, la clarté de ses règles et de ses motivations. La plupart des conflits mêlent en revanche motivations identitaires, questions de souveraineté et de territoire, enjeux politiques, objectifs religieux, et autres intérêts divers. Toute religion implique en outre une communauté, de sorte qu'un conflit religieux prend souvent la forme d'une compétition entre groupes sociaux. Comment identifier, repérer concrètement dans l'histoire des violences qu'on puisse qualifier de religieuses autres que le cas limite des violences Aztèques ?

On qualifiera une violence de "religieuse" - il serait plus précis de dire violence "pour exclusivisme religieux" - si les protagonistes se différencient d'abord par la religion, et si le but qui mobilise la majorité des combattants est de remplacer les dieux ou les croyances de l'autre camp par les siens propres. En bref, une violence sera dite "religieuse" si la motivation des troupes est l'élimination d'une doctrine considérée erronée[1], autrement dit s'il y a une dimension prosélyte. Les violences idéologiques répondent aux mêmes critères.

Cette définition permet d'éliminer les conflits essentiellement identitaires, ceux dans lesquels la religion n'est qu'un attribut secondaire, les traits distinctifs étant d'abord ethniques, politiques ou sociaux, et le principal enjeu un territoire ou une souveraineté politique. Ainsi il arrive souvent dans les conflits ethniques que les protagonistes soient de religions distinctes - voire parfois de langue - : catholiques et protestants en Irlande, hindous Tamouls et bouddhistes Cingalais au Sri-Lanka, bouddhistes Rakhines et musulmans Rohingyas dans l'Arakan Birman[2], chrétiens et musulmans en Arménie. C'est néanmoins l'appartenance ethnique et non la religion qui constitue alors le marqueur de différenciation déterminant, le but n'étant pas d'imposer à l'adversaire sa religion - ou sa langue -, mais d'arracher ou de refuser un territoire, l'indépendance, l'accès à des ressources : ces conflits sont à considérer comme plus politiques que religieux.

En revanche la religion représente le caractère de différenciation déterminant dans des conflits comme les guerres de religion européennes, l'Inquisition ou l'évangélisation. Catherine de Médicis et les Guise poursuivaient sans doute des objectifs personnels et tâchaient de tirer les marrons du feu, mais chaque camp était caractérisé aux yeux de la masse des combattants d'abord par sa religion, et non par sa région ou par sa classe sociale : la frontière entre catholiques et protestants traversait peu ou prou toutes les régions françaises et tous les milieux. L'Inquisition fabriquait l'ennemi sur des critères spécifiquement religieux, même si elle contribuait à l'assise du nouveau pouvoir de l'Eglise et des princes. "L'extirpation de l'idolâtrie" dans les colonies, la destruction des objets de culte des indigènes ou l'extorsion du baptême en échange d'un avantage matériel correspondaient à un objectif manifeste de conversion, même si celle-ci facilitait aussi la mise au pas par la métropole.

Les Croisades et la Reconquista (c'est-à-dire la reprise par les chrétiens du pouvoir en Espagne sur les musulmans) représentent des cas plus ambigus, car il y est plus délicat de déterminer le rôle exact du religieux par rapport au politique - ce dernier l'ayant par exemple clairement emporté dans la quatrième Croisade qui aboutit au sac de la très chrétienne Constantinople (1204). Toutefois la fanatisation populaire n'aurait pas été la même si les Papes n'avaient pas souvent pris le premier rôle, si le but affiché n'avait été la ville sainte de Jérusalem, si l'ennemi n'avait pas été identifié au musulman.

Ainsi seule une analyse au cas par cas permet d'évaluer la part respective des différentes motivations et de positionner chaque conflit dans le spectre des violences dites religieuses : de principalement politiques (ou ethniques) à principalement religieuses (ou idéologiques). Même la destruction d'objets de culte ne suffit pas pour attester de la nature religieuse d'un conflit : les temples zen n'échappèrent pas à la destruction d'Hiroshima par l'aviation américaine, dont le pilote était vraisemblablement chrétien, et pourtant cette violence était évidemment politique.

On pourrait objecter qu'imposer son ou ses dieux à un peuple vaincu n'est qu'une façon de mieux l'asservir, et qu'en conséquence la violence dite religieuse comme on la définit ici n'est jamais qu'une modalité de la violence politique. Mais ceci relève d'une conception anthropologique qui réduit la religion à un seul instrument de pouvoir, qui considère que la religion n'a pas d'autonomie propre, qu'elle n'est qu'une superstructure réductible au politique. Cette option anthropologique du "tout est politique" ou "tout est économique", dans la lignée de Marx, n'est pas celle prise ici.

Distinguer persécutions religieuses, guerres de religion, ethnocides.

Il faut encore distinguer les violences "intérieures" menées contre les hérétiques - et parmi celles-ci les persécutions religieuses et les guerres de religion - des violences "extérieures" menées contre les étrangers, incroyants, infidèles, païens, etc.

Les persécutions représentent la violence religieuse la mieux partagée, présente sous tous les cieux et à toutes les époques[3]. Décidées par une autorité, politique ou/et religieuse, elles sont conçues dans un but de maintien de l'ordre, de respect du pouvoir : "la tolérance ne cède devant la persécution que lorsque les prétentions […] ou les pratiques religieuses […] paraissent devenir une menace politique pour l'ordre existant."[4] Elles sont mises en œuvre par les forces de l'ordre, publiques ou/et religieuses. Elles s'exercent plus contre des personnes qui sont perçues comme menaçant l'ordre public ou défiant le pouvoir en place que contre des doctrines. On procède plus à des procès - le cas de la condamnation de Socrate est emblématique à cet égard - et à des destructions qu'à des massacres.

Les exemples foisonnent, tant dans le monde non-monothéiste que dans le monde monothéiste. On pourra citer à titre d'exemples :

- les violences romaines à l'égard des chrétiens. Ces persécutions ne visaient pas leurs croyances, mais leur refus de respecter ce que les Romains considéraient comme constitutifs de "l'identité romaine" - par exemple le refus du service militaire, des jeux, du culte de l'empereur -, leurs attitudes de désobéissance civique considérées comme sectaires, un renfermement communautariste, une activité prosélyte[5], la menace d'une minorité particulièrement dynamique.[6] Il est d'ailleurs éclairant de comparer les injonctions aux chrétiens de déserter l'armée et de refuser tout emploi public du Père de l'Eglise Tertullien ( 155 - 235), et après la conversion de Constantin l'excommunication contre les déserteurs que prononcera le concile d'Arles (314). Rappelons que c’est une patricienne convertie Proba Faltonia, qui a envoyé ses esclaves occuper la porte et a fait livrer Rome à Alaric, roi des Wisigoths, barbare mais chrétien, dont Saint Augustin dit qu’il fut l’envoyé de Dieu et le vengeur du christianisme,

- dans la Perse sassanide, les mazdéistes persécutèrent des juifs, des chrétiens, des bouddhistes, des brahmanes et des manichéens[7],

 - la chasse aux hérétiques dans l'Europe chrétienne tout au long du Moyen Age, illustrée par son bras ecclésiastique, l'Inquisition.

 - les explosions anticléricales sous la Révolution Française ou sous le Front Populaire espagnol[8],

 - de nombreux exemples de persécutions en Asie.

Par contraste, les guerres de religion sont des explosions populaires, qui embrasent toute la société. Il s'agit de véritables guerres civiles, qui montent les uns contre les autres, au nom de leurs croyances, des citoyens d'une même ethnie, d'une même classe ou d'une même nation[9]. Le but n'est plus seulement la mise au pas ou l'intimidation, mais la purification religieuse, jusqu'à l'éradication complète de l'hérésie. Elles se traduisent par des massacres qui se nourrissent de la symbolique de l'Apocalypse. Les autorités, quelle qu'ait été leur responsabilité à l'origine, se trouvent rapidement débordées. A plus ou moins long terme elles sont amenées à mettre en place une politique visant à prévenir de tels débordements, comme la paix d'Augsbourg[10], l'Edit de Nantes[11], ou la laïcité républicaine. "Une guerre de religion, c'est une guerre pour la religion ; autrement dit une guerre dont le principal objet est la relation des hommes à Dieu […] C'est une guerre totale dont le salut de la communauté des croyants est le but, la guerre civile le moyen, la dislocation de la nation et la ruine de l'Etat les effets."[12]

Ethnocide

Enfin les violences dites "extérieures", qui s'exercent contre un peuple étranger (voire contre une minorité intérieure), visent le remplacement d'une religion indigène par celle du colonisateur (ou de la majorité). Il ne s'agit plus de simple maintien de l'ordre ni d'explosion populaire, mais de l'éradication de croyances considérées comme primitives ou idolâtres : on parlera alors d'ethnocide[13]ou de "déculturation"[14]. C'est ce type de violence que vise la Déclaration universelle des droits des peuples autochtones  : "Tout peuple a le droit de ne pas se voir imposer une culture qui lui soit étrangère"[15].

L'anthropologie moderne a en effet mis en évidence la relation intime entre cultes et culture : dans les sociétés non sécularisées, la religion n'est pas une superstructure mais bien le fondement de la civilisation, de sorte qu'éliminer par la force les pratiques religieuses d'une population, c'est détruire son identité, son tissu social[16]. La conversion religieuse, chrétienne ou musulmane, a accompagné la volonté coloniale de domination, centralisation, uniformisation, pour l'étendre aux croyances, aux mœurs, aux règles matrimoniales, aux pratiques sanitaires, voire à la langue. "Cette action avait souvent une conséquence inattendue : la destruction des cadres sociaux et éthiques trop liés à ce paganisme pour pouvoir subsister sans lui"[17]. "Aujourd'hui encore, partout où des missionnaires le portent, il a la même action de déracinement."[18]

Sans doute mieux soignés et instruits, mais clochardisés ou massacrés, ces hommes, victimes d'une "déculturation" et d'un affaissement d'identité, n'ont plus eu "d'yeux pour se voir, de parole pour se dire, de bras pour agir"[19]

Cette politique fut systématique lorsque l'envahisseur était chrétien, au nom de l'évangélisation. Si on se gausse volontiers de ces instituteurs français qui faisaient réciter à leurs élèves africains "nos ancêtres les Gaulois", en revanche l'élimination des coutumes et des rituels indigènes et l'imposition du dieu de Moïse restent encore aujourd'hui considérées comme allant de soi, comme un quasi devoir de civilisation. Déjà pourtant Montaigne (1533–1592) avait alerté sur le fait que "chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage", et dénoncé la colonisation et l'évangélisation. "Que les missionnaires le sachent bien, ils ne sont envoyés là que pour arracher ces pauvres âmes à l'enfer et au mal, pour les éclairer, pour les rendre chrétiens. […] Qu'ils aient donc toujours en pensée qu'ils ne sont […] que des chercheurs d'âmes, [qu'ils n'ont pour but que de] faire connaître la nouvelle religion en détruisant systématiquement les pratiques du paganisme incarné, selon les pires, par la sorcellerie, la polygamie et toutes les pratiques taxées d'idolâtrie."[20] L’Eglise n'est certes pas la seule ni même la principale responsable de la colonisation, mais d'une part elle ne peut nier qu'elle en fut bien souvent complice[21], d'autre part les bons pères, en éradiquant les cultes indigènes et leurs rituels[22], n'ont pas fait que stopper l'effusion de sang des sacrifices Aztèques, ils ont aussi déraciné voire détruit ces peuples. L'évêque Stephan Neill témoigne ainsi que "les missionnaires ont rarement réussi à implanter le christianisme sans détruire les civilisations existantes au profit d'une imitation de la civilisation européenne"[23]. Le dominicain Claude Geffré confirme : "Dans un passé lié à l’aventure coloniale, la mission de l’Église a souvent coïncidé avec un non-respect des cultures étrangères"[24], ainsi que le théologien protestant Roger Mehl : "Le Blanc se présente à l'indigène avec un sentiment très net de sa supériorité. Or le missionnaire aussi, dans son activité propre, présente la religion chrétienne comme supérieure aux religions païennes. La prédication missionnaire met les religions indigènes au rang des superstitions, la refoule dans les temps de l'ignorance. Et il est inévitable que le missionnaire apparaisse souvent aux yeux de l'indigène comme l'une des formes de la supériorité du Blanc."[25] "Saisit-on ce que comportent ici de viol de conscience l’évangélisation, les concepts judéo-chrétiens ?"[26] "Les Anglo-Saxons ont extirpé le paganisme de presque tout le Nord-Amérique ; mais avec lui ils ont pareillement extirpé la plus grande partie de la race rouge."[27] En Polynésie, Victor Segalen décrit "l’influence délétère que la religion chrétienne exerce sur une population étrangère à son enseignement […] Le Jesus sémite transformé par les Latins qui naviguent sur la mer intérieure fut mortel aux Atuas maoris et à leurs sectateurs."[28] Ce ne sont ni la résignation à un certain syncrétisme ni les timides avancées de Vatican II, notamment avec la promotion de "l'inculturation", qui ont significativement changé la donne. Le fait que les premiers ethnologues aient été des missionnaires[29] n'est pas de nature à modifier le diagnostic globalement ethnocidaire de l'évangélisation[30].

Les pratiques d'islamisation forcée par les conquérants musulmans ne furent pas systématiques, comme en atteste par exemple la protection des religions au sein des millets de l'empire ottoman.

Les peuples asiatiques pratiquèrent l'ethnocide à l'égard de leurs minorités intérieures adeptes de cultes animistes, les "religions populaires", mais ils ne manifestèrent pas ce type de prosélytisme à l'égard de leurs ennemis extérieurs. Les conquérants polythéistes de l'Antiquité, grecs (Alexandre), perses (Cyrus) ou romains (avant le IIIème siècle), voire asiatiquesn'imposèrent pas non plus leurs dieux aux peuples vaincus.

Les ethnocides opposent souvent - comme ce fut le cas lors des colonisations européennes depuis le XVIème siècle -, des civilisations caractérisées par une production écrite développée et largement diffusée, où l'écrit n'est plus limité à un emploi sacré ou administratif mais est devenu un moyen de communication majeur - on serait tenté de dire : des "civilisations du livre"[31]-, à des civilisations où l'écriture n'existe pas ou reste réservée à une élite[32] ; les "civilisations du livre" bénéficient alors d'une supériorité militaire écrasante. Les cas les plus connus sont l'élimination de cultes animistes, chamaniques, aztèques et autres par les missionnaires chrétiens, musulmans voire bouddhistes, ou des "religions populaires" par les autorités asiatiques. Ce qui constituait l'essence même de certaines sociétés amérindiennes, africaines ou asiatiques fut ainsi éradiqué. La misère identitaire et sociale dans laquelle sont tombées ces anciennes populations tient non seulement à l'exploitation coloniale, mais aussi à ce déracinement culturel.

Mais il est aussi arrivé, et cela a été le cas en particulier dans le bassin méditerranéen avec le christianisme et l'islam, que l'ethnocide intervienne entre une religion monothéiste (christianisme ou islam) et une religion polythéiste au sein d'une culture de développement comparable (mesuré par exemple par la production écrite). Tel fut par exemple le cas lors de l'éradication :

- des religions gréco-romaines par les évêques, d'abord sous les empereurs romains à partir de Constantin, puis sous les rois germaniques[33],

- du judaïsme espagnol par les évêques, une première fois sous les rois wisigoths[34], puis sept siècles plus tard sous les rois catholiques,

- du bouddhisme du Nord de l'Inde par l'islam à partir du Xème siècle,

- et des cultures et civilisations (persane, syriaque, berbère …) qui furent écrasées lors de la construction de l'empire arabe[35], au point que furent niées les civilisations antérieures à l'islamisation (le monde arabe ne commença à s'intéresser à l'Egypte ancienne qu'à la suite de Napoléon[36]).

Violences religieuses en Asie[37]

L'Asie n'a rien d'une terre de paix, son histoire sur le plan de la violence n'a rien à envier à celle de l'Occident. Mais les massacres n'y ont guère connu de motivation religieuse telle que définie ci-dessus[38]. Le pluralisme et le syncrétisme prévalent sur le dogmatisme. "Les religions asiatiques s'occupent d'ailleurs plus d’apaisement que de paix, de délivrance que de liberté, englobent plus qu’elles n’excluent"[39].

Les conflits asiatiques sont ainsi plus identitaires, politiques, militaires, économiques que doctrinaux, religieux au sens défini ci-dessus : le prosélytisme y est peu agressif, il y a peu de conversions par la contrainte. Un Chinois ou un Japonais pratique d'ailleurs fréquemment plusieurs religions. Le souverain reconnaît et autorise des pratiques religieuses extrêmement diverses, mais n'hésite pas à écraser des divergences qui paraîtraient menacer son pouvoir, d'où une alternance entre pluralisme et violence, les deux n’étant nullement exclusifs l’un de l’autre.

Le prosélytisme du bouddhisme procède par assimilation et transformation des divinités et des rituels antérieurs, dans un syncrétisme "soft", beaucoup plus que par un quelconque exclusivisme avec destruction violente des dieux antérieurs[40].

Esquisse de bilan

Ainsi, les violences religieuses en Asie non-monothéiste ressortent plus de la persécution que de la guerre de religion[41], et l'ethnocide ne s'y exerce que contre les minorités intérieures. Les persécutions y ont été plus occasionnelles, limitées dans l'espace et dans le temps, que le combat systématique, organisé, séculaire et universel, du catholicisme contre les hérésies : "[in other parts of the world] the persecutions were not part of a continuous and developing process of the kind that may be observed in European history"[42] ; nulle part ailleurs qu'en Europe la persécution n'a stigmatisé une telle variété de victimes ni inventé des mécanismes aussi sophistiqués que l'Inquisition ; "the exceptional character of persecution in Latin West […] has lain in its capacity of long term growth"[43]. Même si en Chine les luttes d'influence furent quasi permanentes entre taoïsme confucianisme et bouddhisme, au Japon entre shintoïsme et bouddhisme, elles ne dégénérèrent jamais en guerres de religion sanglantes et durables comparables à celles provoquées en Europe par la Réforme et la Contre‑Réforme, ou dans le monde musulman par l'opposition entre chiites et sunnites.

En conclusion, l'affirmation répétée à satiété par les théologiens, historiens et commentateurs chrétiens selon laquelle il n'y aurait pas plus de violence religieuse dans le monde monothéiste que dans le monde non-monothéiste relève de l'ignorance ou de la mauvaise foi[44]. A se demander quelle violence les monothéistes ont bien à cacher pour avoir tant besoin de dénoncer, fût-ce par le mensonge, la violence des autres !

 Remarque

Ceci n'est qu'un essai d'autodidacte. Je n'ai pas trouvé d'historien qui ait entrepris une telle recherche. Merci de vos critiques et références complémentaires



[1] En tant que de besoin on pourra dans cette définition remplacer "religion" par "idéologie", " religieuse" par "idéologique".

[2] Dans la province de l'Arakan en Birmanie, où une minorité ethnique, les Rohingyas, musulmans, est maltraitée par la majorité locale, les, bouddhistes, sur fond d’histoire de rivalité ethnique : les Rohingyas avaient servi de supplétifs à l'armée britannique lors de sa conquête de la Birmanie au XIXe siècle. L’enjeu n’est pas tant de convertir les Rohingyas au bouddhisme que de les chasser de Birmanie.

Cf. Joseph Jacoub, Au nom de Dieu ! Les guerres de religion aujourd’hui et demain, JC Lattès, 2002.

[3] Malgré la pluralité des religions en présence, le continent indien avant l'arrivée du monothéisme n'aurait pas connu les persécutions religieuses..

[4] Confucianisme et taoïsme, Max Weber, 1916.

[5] La loi romaine interdisait le prosélytisme.

[6] Les chrétiens à partir de 250, date où débutent les grandes persécutions, constituaient le culte étranger le plus nombreux et le mieux organisé. Dèce aurait dit qu'il préférait voir se dresser un autre ennemi aux frontières de l'Empire qu'un évêque à Rome. D'après Cyprien, Lettres 59, 9, cité par M.F. Baslez, op. cit.

[7] Une motivation supplémentaire s'ajouta lorsque le christianisme devint au IVème siècle la religion officielle de l'ennemi, l'Empire Romain. Les persécutions s'apaisèrent à la fin du Vème siècle lorsque l'église perse, nestorienne, prit ses distances vis-à-vis de Rome

[8] Cf. Ambiguïté de la violence politique : la persécution religieuse durant la guerre civile espagnole (1936-1939), Gabriele Ranzato, Revue Cultures et Conflits, n° 9-10, 1993.

[9] Ainsi El Kenz David estime que "les deux tiers des massacres catholiques sont le fait de l'action autonome des citadins." in Les massacres au temps des guerres de Religion, Encyclopédie des violences de masse, Sciences Po, Paris 2010, disponible sur

 <http://www.massviolence.org> - ISSN 1961-9898 - Jacques Sémelin.

[10] Le 29 septembre 1555, la Paix d'Augsbourg suspend les hostilités entre les États luthériens et les États catholiques en Allemagne. Elle repose sur un principe fondamental : cujus regio, ejus religio c'est-à-dire : « tel prince, telle religion ». Cette paix relative prendra fin en 1618 avec la défenestration de Prague, qui sera à l'origine de la guerre de Trente Ans.

[11] Edit de tolérance signé le 13 avril 1598 par Henri IV, qui sera révoqué en 1685 par Louis XIV.

[12] Tuez-les tous !:La guerre de religion à travers l'histoire VIIe-XXIe siècle. Élie Barnavi, Anthony Rowley, Perrin, 2006.

[13] La dimension ethnocidaire de l'évangélisation est pourtant très largement méconnue, voire considérée comme relevant d'un anticléricalisme primaire. L'Eglise poursuit ainsi sans états d'âme son effort missionnaire. On feint d'oublier que l'Eglise, lors de la fameuse controverse de Valladolid, reconnut officiellement le recours à la force pour la prédication missionnaire.

La List of wars and anthropogenic disasters by death toll, Wikipédia, attribue à la colonisation des Amériques (du XVI au XIXème siècle) et à celle de l'Afrique et de l'Asie (du XVIII au XXème siècle) les nombres de morts les plus élevés de tous les conflits, génocides et famines connus

[14] Cf. Serge Latouche, L'occidentalisation du monde, La Découverte, 2005, 1èr édition en 1989.

[15] Article 15. Cette déclaration, rédigée en 1976, a été approuvée par l'ONU en 2007 avec une majorité de 143 voix pour, 4 contre (États-Unis, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande) et 11 abstentions (Colombie, Azerbaïdjan, Bangladesh, Géorgie, Burundi, Fédération de Russie, Samoa, Nigéria, Ukraine, Bhoutan et Kenya)

[16] Cf. en particulier Robert Jaulin,

[17] Traité de sociologie du protestantisme, Roger Mehl, Labor et Fides, 1965. A comparer à la vision d'un Fernand Braudel.

[Roger Mehl (1912-1997) : agrégé de philosophie, docteur en théologie, professeur émérite et doyen honoraire à la faculté de théologie protestante de l'université des sciences humaines de Strasbourg (1945 – 1981), fondateur du Centre de sociologie du protestantisme (Université et CNRS)]

[18] Simone Weil, Lettre à un religieux, point 35.

[19] Id. note 14.

[20] Instructions données aux Pères Blancs par le cardinal Lavigerie, citées dans La naissance de l'église au Bushi : l'ère des pionniers 1906-1908, Baciyunjuze Justin Nkunzi, Gregorian&, Biblical BookShop, 2005. Lors du couronnement de la statue de Marie la Reine d'Afrique dans la basilique Notre Dame d'Afrique d'Alger en 1876 fut apposé en présence du cardinal Lavigerie un bref de Pie IX enjoignant les fidèles à adresser à Dieu "de ferventes prières pour la concorde entre les princes chrétiens, l'extirpation des hérésies, la conversion des pécheurs et l'exaltation de notre sainte mère l'Eglise", selon la formule couramment utilisée dans l'Eglise (cf. par exemple Le Mémorial catholique, Troisième année, tome V, 1826, ou Bulle, mandement, instructions et prières pour le Jubilé universel de l'Année sainte : imprimé par ordre de Mgr l'Evêque de Cambrai, A. F. Hurez, 1826). Parlant du peuple algérien, le cardinal Lavigerie dira encore : "Il faut que la France lui donne, je me trompe, lui laisse donner l'Evangile, ou qu'elle le chasse dans les déserts, loin du monde civilisé."

[21] Lors du traité de Tordesillas de 1494, le Pape délèguera l'évangélisation des peuples d'Amérique aux souverains espagnols (arrangement du "patronato") et portugais ("patroado"). Cf. Religions et colonisation, Dominique Borne et Benoît Falaize, Les éditions de l'atelier, 2009. Lorsque les Jésuites tentèrent de prendre leur indépendance par rapport aux pouvoirs coloniaux (les fameuses reducciones), ils furent désavoués par Rome.

Discours du roi Léopold II à l’arrivée des premiers missionnaires au Congo en 1883 : "Prêtres et Pasteurs, vous venez certes pour évangéliser mais que cette évangélisation s’inspire de notre grand principe : avant tout, les intérêts de la métropole […] Votre rôle est l’enseignement, de faciliter les tâches aux administratifs et industriels. C’est donc dire que vous interpréterez l’évangile de la façon qui sert mieux nos intérêts dans cette partie du monde." Loin de le désavouer, le Vatican sera l'un de ses plus fidèles alliés (cf. par exemple The King, the Cardinal and the Pope : Leopold II's genocide in the Congo and the Vatican, Weisbord RG. J. Genocide Res. 2003, et La religion du prince : Léopold II, le Vatican, la Belgique et le Congo (1855 - 2909), Vincent Viaene, ).

[22] Cf. La lutte contre les religions autochtones dans le Pérou colonial : l'extirpation de l'idolâtrie entre 1532 et 1660, Pierre Duviols, Presses Univ. du Mirail, 2008.

[23] Stephan Neill, id.

[24] Pour une théologie de la différence - Identité, altérité, dialogue, Claude Geffré, disponible sur <http://sedosmission.org/old/fre/geffre_1.htm&gt ;

[25] Roger Mehl, id.

[26] Les Derniers Rois de Thulé, avec les Esquimaux polaires, face à leur destin , Jean Malaurie, Paris, Plon, 1955.

[27] Taïpi,  Herman Melville, , édit. Gallimard, 1952.

[28] Journal des Îles, Victor Segalen, A Frontefroide, Bibliothèque Artistique et Littéraire, 1989.

[29] Cf. par exemple le remarquable Codex Mendoza, texte majeur de l'ethnographie de la culture aztèque (1541-42).

[30] De même que le recrutement majoritaire des philosophes et des scientifiques dans le milieu ecclésiastique au Moyen Age,.

[31] Ne confondre ni avec "les religions du livre", désignées ainsi parce qu'elles ont sacralisé un livre réputé contenir une révélation divine exclusive, ni avec les "peuples avec écriture" (concept qui fit l'objet de débats et de controverses avec en particulier Lévi-Strauss, Marcel Détienne, et bien d'autres).

[32] Par exemple les persécutions des chamanes mongols par les lamas bouddhistes du XII au XIXème siècle.

[33] Cf. Les Racines chrétiennes de l'Europe. Conversion et liberté dans les royaumes barbares, V-VIIIème siècles, Bruno Dumézil Paris, Fayard, 2005.

[34] De 589 (Troisième Concile de Tolède) à 711(chute du royaume wisigoth). L'arrivée des musulmans permit aux Juifs entretemps de se réinstaller.

[35] Cf. par exemple P. Crone et M. Cook, Hagarism : the making of the Muslim world, Cambridge, 1977.

[36] Al-Tahtawi fut en 1868 le premier auteur musulman à publier une histoire de l'Egypte accordant une place à l'époque pharaonique.

[37] Pour des exemples voir en particulier :

- Nathalie Kouamé, Arnaud Brotons, Yannick Bruneton, État, religion et répression en Asie. Chine, Corée, Japon, Vietnam (XIIIe-XXIe siècles), Paris, Karthala, 2011,

- Vincent Goossaert, Le concept de religion en Chine et l'Occident, P.U.F. | Diogène, 2004/1 - n° 205,

- Christine Mollier dans La pensée asiatique, (Sous la direction de C. Weill), CNRS Editions, 2010.

- Joseph Jacoub, Au nom de Dieu ! Les guerres de religion aujourd’hui et demain, JC Lattès, 2002.

- Bernard Faure, Bouddhisme et violence, Le Cavalier Bleu, 2008

[38] Les Mongols par exemple commirent des massacres innommables, dont les plus atroces furent sans doute le sac de la Hongrie (1241) et celui de Bagdad (1258). Mais en général, ils se montraient indifférents en matière de religion. Ainsi Gengis Khan protégea à peu près tous les cultes, et ses descendants, même quand ils se firent bouddhistes en Chine et musulmans en Perse, ne furent jamais sectaires. Son petit-fils Khoubilaï Khan, fondateur de la dynastie chinoise Yuan, était bouddhiste, mais il accordait droit de cité aux Chrétiens, aux Musulmans et aux Juifs..

[39] Amartya Sen : Identité et violence, Odile Jacob, 2007.

[41] Quelques témoignages de spécialistes :

- "La Chine n'a jamais connu de guerre de religion" Christine Mollier dans La pensée asiatique, (Sous la direction de C. Weill), CNRS Editions, 2010.

- "En Chine, les guerres de religions ont été des phénomènes locaux et sur de courtes périodes." China-Europa Forum 2007

- "Ce n’étaient pas des guerres de religion(s), c’étaient plutôt des luttes entre clans, l’un pro-bouddhique, l’autre pro « shintô »" Civilisation Japonaise, www.cours-univ.fr/cours010108.doc,

- "La notion d'hérésie n'est que rarement employée dans le bouddhisme, et elle ne déboucha pas sur les excès de fanatisme familiers à l'Occident." d'après Bernard Faure, auteur de Bouddhisme et violence, Le Cavalier Bleu, 2008, cité dans Le bouddhisme, une religion tolérante ? Sciences Humaines Hors-série N° 41 - Juin-Juillet-Août 2003. Cf. aussi Christophe Richard, Bouddhisme : religion ou philosophie ? L'Harmattan 2010 ; Jacques Pous : La tentation totalitaire, L'Harmattan 2009, Odon Vallet : Petit Lexique des guerres de religion d'hier et d'aujourd'hui, op.cit.

- "Some of the many religious differences can be understood in terms of "right/wrong" mentality of the West in contrast to the "both/and" orientation of the East. Eastern religions are characterized by tolerance and interpenetration of religious ideas. One can be Confucian, a Buddhist, and a Christian in Korea and Japan. Religious wars in the East have been relatively rare, whereas they have been endemic in the West for hundred years : Monotheism often carries with it the insistence that everyone accede to the same notion of God." The Geography of Thought : How Asians and Westerners Think Differently...and Why, Richard Nisbett..

- Sans sombrer dans l'irénisme d'un José Frèches, auteur de Moi, Bouddha, XO Editions, 2004 : "Toutes les religions monothéistes sont passées par la force ou la conquête par les armes. Tandis que le bouddhisme s'est répandu en Asie sans faire de guerres, uniquement par la valeur de l'exemple et la porosité des esprits à cette philosophie du bien. C'est par leur bon comportement que les moines indiens ont converti les Chinois, jusqu'à représenter la première religion du pays sous les Tang.", « Le bouddhisme est une leçon de tolérance », L'Express, 12.11.2004.

[42] The formation of a persecuting society : power and deviance in Western Europe, 950-1250, Robert Ian Moore, op. cit.

[43] Id.

[44] Cf. par exemple les textes de Paul Valadier, Pierre Gibert, Frédéric Rognon, Claude Geffré, JC Guillebaud, ou le blog de Didier Long. Les arguments sont toujours les mêmes : les peuples polythéistes sont violents - violents, certes, mais sans la violence religieuse définie dans cet essai -, leurs mythologies sont violentes - certes mais sans exhortation pour autant à brûler les idoles" -, la violence religieuse est toujours une violence politique. Le fait que le monothéisme ait apporté une nouvelle motivation de violence, celle d'imposer ses dieux, de brûler les idoles, n'est tout simplement pas vu, pas reconnu, dénié.



125 réactions


  • King Al Batar King Al Batar 13 novembre 2012 13:18

    BOnjour à l’auteur,
    Je suis surpris par la teneur de votre article, tant il me parait que les violences perpétuées durant tout le 20èm siècle sont en contradiction.
    Je ne vais pas forcément évoqué le nazisme (cette idéologie athée, pronant un nationalisme, un patriotisme exacerbé, et profondément athée).
    Mais rien qu’à regarder la violence qu’on généré les conflits communistes, et particulièremet en Asie justement, on peut s’interroger sur votre propos.
    Selon moi, la violence est humaine, elle fait partie de notre nature. Et la religion, tout comme le patriotisme d’ailleurs, font parti des outils les plus fréquemment utilisé pour « motiver ses troupes ».
    En effet, la religion dispose de ce remarquable avantage de recompenser les individus après leu mort. C’est l’outil revé pour les dictateurs qui veulent inciter les leurs a combat.
    S’ils meurent ils seront récompensé dans l’au dela, et s’ils gagnent ils ne seront recompensés que plus tard, quand ils mouront... N’est ce pas la une magnifique manipulation de la religion... ?
    Pour le patriotisme, c’est un peu la même chose. Comprenez par patriotisme exacerbé, cette manière de penser, nous sommes les meilleurs, la race supérieure de l’humanité et nous allons nettoyer le monde des infames... L’idéologie est similaire que celle de la religion avec les mecréants. Sauf que dans ces idéologies (comme le nazisme en est l’une des plus belle illustration) il n’y a rien au dessus de l’homme. Pas de dieu.
    Le communisme aussi se veut anti religion par dessus tout. Et pourtant il a massacré au nom de son idéologie...

    Non franchement, même si je reconnais que votre essai est très interessant, je ne penses pas que les religions monothéistes soient plus des causes de massacres que le reste.
    Je penses que l’homme (avec un petit h, car il s’agit surtout des hommes et pas forcément des femmes) est par nature violent et dominateur. Et qu’il a depuis tout temps, utilisé des vecteurs de rassemblement pour assouvir son besoin de domination. Et effectivement la religion est un de ses favoris, pour la raison que j’évoquais plus haut. Mais qu’il a très bien su en trouver d’autre, tout aussi violent.


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 14:33

      Le monothéisme n’est évidemment pas LA cause de LA violence humaine !!!! Toute violence obéit à un faisceau de motivations : politique, intérêt, identité, etc ;
      Ce que je prétends , c’est que le monothéisme a inventé UNE MOTIVATION SUPPLEMENTAIRE de violence, celle consistant à vouloir remplacer les dieux de l’autre, qui n’exsite nulle part ailleurs. En outre, en lui donnant une dimension sacrée, elle pousse la violence au radicalisme et à l’extrémisme.

      Quant aux totalitarismes du XXème siècle, je sais qu’il y a débat sur la question de leur filiation par rapport à l’Eglise, mais elle me paraît pourtant aveuglante : vérité unique, parti unique, messianisme, inquisition, etc.

      Enfin citez moi un ethnocide (pas génocide, mais destruction d’une religion, fondation de la culture et de l’identité dans les civilisations non sécularisées ) perpétré par une civilisation non monothéiste contre un peuple qui lui est étranger ?


    • King Al Batar King Al Batar 13 novembre 2012 15:05

      J’ai bien compris ce que vous venez d’écrire et effectivement, c’est unoutil de manipulation, certainement l’un des meilleurs...
      Après je ne suis pas expert en histoire, mais Gengis Khan par exemple, en grand conquérant qu’il fut, n’ a t il pas chercher a exterminer des peuplades lors de ses guerres ?
      Il s’agit d’une question, et je n’en ai pas la réponse.
      Toutefois, pour rejoindre un peu ce que vous dites, j’ai lu l’Art de la gurre de Sun Tzu, et il est clair que dans ce précis militaire, l’auteur précise qu’il est complétement inutile de massacrer le peuple, et qu’au contraire l’intimider suffit... Tout le contraire des methodes Européenes...


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 15:17

      Les Mongols commirent des massacres innommables, dont les plus atroces furent sans doute le sac de la Hongrie (1241) et celui de Bagdad (1258). Mais en général, ils se montraient indifférents en matière de religion. Ainsi Gengis Khan protégea à peu près tous les cultes, et ses descendants, même quand ils se firent bouddhistes en Chine et musulmans en Perse, ne furent jamais sectaires. Son petit-fils Khoubilaï Khan, fondateur de la dynastie chinoise Yuan, était bouddhiste, mais il accordait droit de cité aux Chrétiens, aux Musulmans et aux Juifs

      Ne pas confo dre génocide et ethnocide


    • Hermes Hermes 13 novembre 2012 15:17

      @ l’auteur, bonjour.

      Toujours une bonne recherche et des analyses intéressantes, il n’en reste pas moins que les religions restent des prétextes et des justifications qui ont l’immense intérêt pour les pouvoirs politiques de mobiliser,les foules à travers la croyance.

      La violence préexiste et est liée la recherche du pouvoir, de la richesse en compensation à une perte de contact avec soi-même, son propre tréfond humain et est motivée par la peur et la possession qui reflètent les instincts fondamentaux de survie dans cet état dégradé d’existence (rêve éveillé).

      Le piège consiste dans l’identfication religieuse de la prise de contact avec soi-même et son intégrité ne tant qu’être humain. Celà rend la manipulation possible dans les contextes de forte collusion entre le pouvoir et la religion : la violence générée par la perte de contact peut être retournée vers ce qui s’oppose au symbole de ce contact : la religion, ce qui évite qu’elle s’exprime contre le pouvoir et l’accumulation de richesses (qui est la réelle source de violence, que le contexte soit monothéiste ou pas).

      Et de fait effectivement cette collusion pouvoir-religion a eu lieu sur une longue période de la chrétienté, comme c’est le cas actuellement dans certains pays musulmans, mais je suis sûr qu’en cherchant bien vous trouverez celà aussi dans d’autres civilisations..

      Toutefois chacun reste reponsable de sa propre violence et la justifie ensuite. Les contextes de collusion religieux-politiquent tendent à déresponsabiliser l’individu, de sa violence, mais au final il est perdant car celà l’éloigne encore plus de lui-même.

      Le problème de la violence c’est avant tout celui de se réveiller.

      Cdt.

      PS : je ne sais si je me suis fait comprendre sur ma dernière réponse à votre précédent article.


    • Hermes Hermes 13 novembre 2012 15:34

      En complément sur les autres civilisations, je vous renvoie au paragraphe sur le shintoisme d’état sur cette page, qui a été fortement imbriqué avec une politique expansioniste du Japon.

      Et il y a certainement beaucoup d’autres exmples.

      Par contre celà conforte mon propos sur la problématique de la collusion religion-pouvoir.

      Bonne soirée, Cdt


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 16:26

      @Hermes
      Vous disiez effectivement sur l’autre fil : "Je voulais insister sur le fait qu’il ne s’agit que d’une justification de la violence, et que celle-ci pré-existe à toute justification chez l’homme dès lors qu’il s’endort".
      Oui, mais ce que je dis c’est que le monothéisme apporte une motivation, vous dites une justification, supplémentaire, inédite jusque là, inconnue des autres civilisations : l’idée de remplacer les dieux d’autrui, au nom d’un dieu, d’une vérité prétendues uniques. C’est cette spécificité que les monothéistes refusent de reconnaître. Son symbole : le dieu jaloux. C’est le coeur de ma problématique.


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 16:36

      @Hermes
      Oui, autres exemples, mais où toujours les enjeux déterminants ne sont pas de remplacer les dieux de l’autre (merci de me corriger éventuellement)

      * en Chine :
      o « Le fanatisme religieux des populations, qui a fréquemment dégénéré en soulèvements, ne s’est manifesté qu’au sein de courants sectaires, en marge des grandes religions »1,
      o l’une des plus grandes persécutions religieuses fut celle menée contre le bouddhisme par l’empereur Wuzong en 845 : pour favoriser le retour à la tradition chinoise (confucianiste et taoïsme), il proscrivit toutes les religions étrangères, au premier rang desquelles le bouddhisme. Les temples, les autels et les monastères furent détruits, un demi-million de personnes furent déplacées. Les monastères bouddhistes avaient amassé une grande fortune ; leurs membres échappaient aux taxations et au service militaire ; nombreux étaient les habitants qui s’étaient fait moines par intérêt matériel ; les monastères étaient soupçonnés d’abriter des complots ; la Chine était plongée dans une guerre civile2 ; les impôts ne rentraient plus. Les mobiles prioritaires de cette violence sont considérés par la plupart des spécialistes comme l’état des finances, le maintien de l’ordre, une réaction conservatrice, plutôt que la rivalité doctrinale ou spirituelle entre bouddhisme et taoïsme3.
      o la guerre des Taiping (1851-1864) fut l’une des guerres les plus sanglantes de l’histoire de l’humanité (près de 50 millions de morts). Bien que son chef, Hong Xiuquan (1812-1864), se prétendît le deuxième fils du Dieu de la religion chrétienne, son but était d’instaurer un système quasi communiste, avec de objectifs essentiellement sociaux et économiques. La révolte échoua en raison des divisions internes aux rebelles et de l’appui qu’apportèrent les Occidentaux au pouvoir « légitime » chinois.

      * au Japon :
      o « durant tout le Moyen-âge japonais, les monastères bouddhistes, qui s’étaient constitué de véritables armées, avaient pris pour habitude d’effectuer des démonstrations de force à Kyoto afin d’impressionner l’Empereur et la Cour, et d’obtenir ainsi la satisfaction de leurs revendications de toutes sortes. Ces monastères joueront souvent un grand rôle durant les guerres qui ont ensanglantées l’archipel nippon. Cela dit, les affrontements armés impliquant des moines soldats n’avaient pas pour motif une querelle sur un aspect du dogme, même s’il a aussi existé des sectes bouddhistes intolérantes »4,
      o la rébellion des paysans chrétiens de Shimabara fut noyée dans le sang en 1637, ce qui marqua la fin de la pratique ouverte du christianisme au Japon. Il s’agissait d’une révolte paysanne contre les impôts prélevés par le Shogunat Tokugawa dans un contexte de mauvaises récoltes et de famine,
      o « la tolérance et la souplesse d’adaptation du bouddhisme ? qui au cours de son expansion vers l’Est avait pris l’habitude d’intégrer les croyances locales qu’il rencontrait ? sont pour beaucoup dans la paradoxale résistance du shintoïsme »5,
      o les moines bouddhistes, zen en particulier, ont souvent participé activement à l’impérialisme et au militarisme japonais, mais en tant que citoyens nationalistes et non pas en tant que missionnaires chargés d’apporter la bonne parole,
      o le bouddhisme japonais Nichiren a adopté une attitude proche de celle du monothéisme : prétention à la vérité unique, intolérance, prosélytisme. L’école de Nichiren devint le 3ème courant principal du bouddhisme japonais aux côtés de l’amidisme et du zen. Elle perdure aujourd’hui notamment à travers la Sokka Gakaï. Les bouddhistes japonais eux-mêmes la considèrent comme une secte nationaliste et dangereuse, un cas exceptionnel au sein du monde bouddhiste : l’exception qui confirme la règle ?

      1 Christine Mollier, op. cit.
      2 La rébellion d’An Lushan (755 – 763).
      3 La dynastie Tang (618-907), taoïste, avait maintenu son soutien au bouddhisme arrivé en Chine plusieurs siècle auparavant. La persécution lancée en 845 par l’empereur Wuzong fut violente mais courte. Wuzong était sous forte influence taoïste, au point selon certaines sources de prendre des pilules que les alchimistes taoïstes lui avaient recommandées et devaient lui conférer l’immortalité, mais qui furent sans doute responsables de sa mort.
      4 Nathalie Kouamé, Arnaud Brotons, Yannick Bruneton, 2011.
      5 Nathalie Kouamé, Arnaud Brotons, Yannick Bruneton, 2011. 


    • Hermes Hermes 13 novembre 2012 16:52

      Merci de votre réponse.

      Effectivement c’est la variante monothéiste de la folie humaine qui accompagne la guerre, et je vous suit complètement. Ce n’est qu’une variante, une des modalités de la manipulation qui accompagne la collusion religion-pouvoir dans ce tpe de contextes. La passion jalouse de possession de LA vérité est un ressort puissant pour justifier la violence. Un renforcement subtil et spécifique du mécanisme que je décrivais plus haut certainement.

      Jene contredirai pas globalement votre approche, mais à mon sens ce point reste annexe par rapport à la problématique fondamentale de la violence. En plus ce genre de folie se renforce quand on la stigmatise... comme la jalousie dans les rapports humains. C’est une bonne raison, je trouve, pour ne pas s’arrêter à cette spécificité et pour aborder la violence de façon plus fondamentale.

      Pour illustrer mon précédent post, je vous avais mis un lien sur le Japon, avec le shintoïsme qui mélange le polythéisme et l’animisme, mais il doit y avoir bien d’autres exemples de collusion pouvoir-religion accompagnées de violences guerrières qui ne soient pas des contextes monothéistes.

      Toute vérité n’est-elle pas une erreur si il faut la défendre avec violence, puisqu’à travers la recherche de la vérité, on recherche en réalité le soulagement de l’esprit, non ?

      Bonne soirée, à bientôt peut-être, Cdt.


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 17:31

      @Hermes
      « ce point reste annexe par rapport à la problématique fondamentale de la violence ». Permettez-moi de vous renvoyer à ma réponse à Furax.

      « à travers la recherche de la vérité, on recherche en réalité le soulagement de l’esprit, non ? » Oui toute la différence est entre la quête de la vérité (les Grecs, les philosophes, les scientifiques) et ceux qui croient détenir la vérité, comme un acquis. C’est tout le problème des véritésé révélées, à partir du moment où elles sont exclusivistes, ce qui nous ramène au monothéisme et aux idéologies.


    • Dwaabala Dwaabala 14 novembre 2012 00:53

      La réflexion est évidemment intéressante, mais le titre de l’article est choquant car il laisse penser que le monde est divisé selon la croyance en un seul dieu ou non.
      Il faut bien reconnaître, en gros, que dans l’histoire moderne la violence sans pareille a appartenu aux parties du monde, mais pas toutes, dans lesquelles beaucoup croyaient en un seul dieu .
      Sans qu’il soit possible d’établir la moindre causalité, ni même corrélation entre ce fait de culture et les raisons et le déroulement des conflits : quand les Japonais faisaient main basse sur l’Asie et les Allemands sur l’Europe et au-delà, les intérêts en jeu étaient d’ordre très matériel et n’avaient rien à voir avec la spiritualité des peuples.
      Sinon on pourrait aussi bien poser la question : y-a-t-il plus de violence dans le monde de la musique dodécaphonique que dans le monde non dodécaphonique ?


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 09:11

      @Dwaabala
      Pas de relation de causalité ? Excusez-moi, mais vous avez mal lu le titre : je ne parle que de violence religieuse.


    • Hermes Hermes 14 novembre 2012 13:59

      Bonjour,

      Je suis globalement d’accord avec votre commentaire ci-dessus.

      j’ai lu votre réponse à Furax. La violence est bien dans la nature humaine, car l’homme est dans la nature, comme il est dans la nature humaine de la justifier. Ce besoin de justification tient à mon sens au fait que la nature humaine contient aussi un germe de conscience, la plupart du temps endormi, qui lui fait condamner cette violence qui se manifeste bien souvent contre son gré dans sa veille altérée. Qiu n’a jamais regretté et tenté de justifier un acte violent ?

      Celà étant, y-at-il des justifications qui ne soient pas dans la nature humaine ? Dire le contraire, comme parler d’une source de violence non humaine, serait accréditer la thèse monothéiste, non ? Tout ce que fait ou pense l’homme est dans sa nature comme la justrification monothéiste est une des possibles justifications de la violence. L’homme préfère se justifier plutot que se réveiller et accepter qu’il s’est trompé.

      C’est compréhensible, car la justice des hommes pardonne peu, elle n’est pas basée sur la compréhension mais sur l’application de principes et laisse peu de place à une possible évolution personnelle car elle est aussi l’émanation de la société dans laquelle les hommes préfèrent dormir. Ici même, chacun a tendance à défendre des principes et des idées arrêtées et peu admettent se tromper, non ?

      Celà se comprend, mais dès lors qu’on entrevoit la possibilité de ne plus se justifier, mais au contraire de se réveiller pour être dans une dynamique vivante, on sort de la violence « humaine » liée à l’altération de la présence. Ce saut quasi quantique est plus facile si on comprend qu’on n’a rien à défendre. Là où je vous rejoins, c’est que ce saut est probablement plus difficile à faire pour certains monothéistes convaincus, mais méfions nous tout de même des généralisations.

      Par aileurs prendre la justification pour une cause (pas seulement chez l’autre mais surtout chez soi-même) est un des mécanismes les plus puissants qui existent et est un des fondements de nos prisons psychologiques individuelles (à tous) : l’autre est un con ce qui justifie mon mépris, d’ailleurs voir comment il réagit qui manifeste sa connerie. Mais celà sort un peu du sujet....

      Merci de ce dialogue enrichissant ! smiley


  • sirocco sirocco 13 novembre 2012 13:35

    @ l’auteur

    Vous dites : « Il n’existe sans doute pas de violence purement et strictement religieuse, hormis les violences rituelles comme les sacrifices Aztèques... » 

    Plus loin : « L’Inquisition fabriquait l’ennemi sur des critères spécifiquement religieux... » (et elle l’envoyait souvent au bûcher en confisquant tous ses biens.)

    Ne voyez-vous pas là une contradiction ?


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 14:42

      Non, je me répète : toute violence est le faisceau de plusieurs motivations. Les violences purement rituelles, comme l’étaient les sacrifices humains Aztèques et autres, constituent de ce point de vue une exception : la seule motivation est (en principe) rituelle, donc religieuse .

      Dans l’Inquisition, la dimension politique ne peut être niée, l’Inquisition visant à renforcer le pouvoir de l’Eglise. Mais la dimension proprement religieuse non plus ne peut pas être niée : sans le catholicisme, pas d’Inquisition, comme sans le communisme, pas de KGB, sans le nazisme pas de Gestapo.

      C’est dans ce sens que je dis que dans l’Inquisition, la motivation religieuse n’était pas unique, mais néanmoins déterminante


  • Gollum Gollum 13 novembre 2012 14:00

    On qualifiera une violence de « religieuse » - il serait plus précis de dire violence « pour exclusivisme religieux »


    Je ne pense pas que le monothéisme soit vraiment en cause, bien qu’il y ait quand même une incitation, dans ce genre de problématique mais bien en effet l’exclusivisme, c’est-à-dire la prétention à se déclarer comme la seule religion vraie ce qui sous-entend que les autres sont fausses..

    À ce que je sache les soufis sont monothéistes, et beaucoup d’ésotéristes musulmans, juifs ou chrétiens le sont aussi et il n’y a pas de violence de leur part, car ils s’attachent au noyau de la doctrine et pas à la forme religieuse. Ils peuvent donc parfaitement cohabiter ensemble..

    La meilleure religion quelque part de ce point de vue est l’Hindouisme car tout en étant un monothéisme elle a su intégrer en son sein une diversité telle que n’importe quel tempérament peut y trouver son compte. Et cette diversité favorise la tolérance. (Bon je sais qu’il y a des hindous fanatiques mais c’est l’exception, etc..)

    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 14:58

      Bien sûr le monothéisme n’est pas toujours ni partout violent ! 

      Tous les fumeurs ne meurent pas d’un cancer du poumon. Néanmoins le tabac est reconnu comme un facteur de risque majeur de cancer du poumon.

      De même, le monothéisme comporte un FACTEUR DE RISQUE de violence de par son ordre de brûler les idoles, de par sa certitude divine d’avoir la vérité, de par le devoir sacré de la défendre et , dans le cas du christianisme et de l’islam, de l’exporter.


    • sirocco sirocco 13 novembre 2012 23:03

      L’hindouisme est un monothéisme ?


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 09:34

      @Gollum
      Le problème n’est pas monothéiste ou pas, mais dieu jaloux ou pas. Le titre aurait été plus précis si j’avais écrit "

      Y a-t-il plus de violence religieuse dans le monde abrahamique que dans le monde non-abrahamique ?

      L’hindouisme est (ou a été, avant l’arrivée de l’islam en Inde, avant la colonisation chrétienne) foncièrement tolérant. Il est certes associé à un type d’organisation sociale générateur de violence, les castes. Mais à la différence des religions abrahamiques qui persistent dans le déni de leur violence, les Indiens, jusque dans leur Constitution, ont condamné le système des castes (ce qui ne suffit pas bien entendu à le faire disparaître, mais est au moins un préalable)


    • Gollum Gollum 14 novembre 2012 11:32

      Oui je suis bien globalement d’accord. Il suffit de comparer les saints hindous et certains saints chrétiens pourtant cités comme exemplaires.. Ramakrishna ne voit aucun inconvénient à l’existence des multiples religions. Idem pour Ramana Maharshi ou Ananda Moyi.. Mieux même, certains n’ont pas hésité à pratiquer d’autres religions (Ramakrishna)..


      Par contre Thérèse d’Avila n’a pas de mots assez durs pour les protestants.. Il est clair que ce n’est pas le même climat mental. Quant à adopter certaines vues religieuses extérieures, cela est impensable pour une religion occidentale..

      Je suis plus réservé quant aux castes. Je pense qu’à l’origine il ne s’agissait de rien d’autre que de la reconnaissance de la diversité humaine que l’on pouvait répartir ainsi en 4 grandes catégories..
      Malheureusement le système s’est figé et a dégénéré. Actuellement ce système ne correspond plus à rien et est clairement une monstruosité.. Kali Yuga oblige smiley

      Mais je persiste à penser que nous faisons partie à des degrés divers de l’une des 4 castes, mentalement.. Un philosophe est un Brahmane qui s’ignore, un général ou un politicien, un ksatrya, etc... 

    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 16:49

      @Gollum
      Oui, bien d’accord.
      Sur le problème des castes, je n’y vois pas très clair. Je vous serais reconnaissant si voulez bien critiquer les § suivant :

      Le système des castes, première illustration de la tri-fonctionnalité indo-européenne, a sans doute permis à l’Inde d’éviter tout au long de son histoire tout cumul des trois pouvoirs, religieux, militaire et économique, mais s’est au fil du temps rigidifié jusqu’à former une multiplicité de groupes sociaux endogamiques. Par comparaison avec la séparation entre Juifs et Goym, il ne s’agit pas d’une règle séparant un peuple élu du reste des nations mais d’un système d’organisation sociale à l’intérieur d’un même peuple, il ne relève pas d’une conception ethnique (la notion de nation est à l’opposé de la mentalité hindoue) ni d’une conception victimaire1 ; les violences qui en résultent sont comparables à nos troubles sociaux, mais n’ont jamais atteint le niveau de violence de nos guerres de religion, ou de nos révolutions, voire de nos révoltes d’esclaves ; si le système perdure aujourd’hui dans la société indienne, il est publiquement dénoncé, non seulement dans la constitution indienne contemporaine mais par le Bouddha lui-même. Rappelons que la condamnation officielle et générale de l’esclavage en Occident ne date que du XIX ou XXème siècle, et qu’aucune grande voix publique ou religieuse n’a dénoncé à ce jour la violence monothéiste.


    • Gollum Gollum 15 novembre 2012 09:13

      Bonjour Castel. Sur le concept des fonctions tripartites apportées par Dumézil, je pense qu’il fait une erreur. Influencé sans doute en cela par la théologie chrétienne qui accorde une grande importance à la notion de Trinité. Il a donc de façon tout à fait abusive réuni les deux dernières castes au sein d’une seule : les travailleurs.


      Hors un modèle trinitaire ne fonctionne pas. Le modèle quaternaire par contre suit la logique de la double contradiction croisée que l’on trouve chez Abellio. Ainsi on peut dire que Prêtres et Guerriers forment une entité qui s’opposent aux travailleurs, qui eux s’occupent de l’aspect matériel des choses alors que les deux premiers s’occupent du spirituel.

      On a donc une première opposition esprit/matière. Au sein du spirituel, les Prêtres assurent la cohésion idéologique, les guerriers étant le bras armé chargé d’appliquer cette vision idéologique.. Dans l’Hindouisme il existe une spiritualité des Brahmanes comme des Kshatryias (Arjuna est un bon exemple). Il n’y en a pas pour les deux autres castes « inférieures ».. Notons que l’on a la même chose dans le monde hébreu.. Ce n’est pas un hasard si le mot Melek qui veut dire Roi est sur la même racine que le mot Malak qui veut dire Envoyé, Ange.. Il illustre le fait que le Roi est dépendant du sacerdotal.

      Les deux autres castes « inférieures » sont aussi divisées en deux avec un pôle actif, les vaisyas, et un pôle passif, les sudras..

      Les premiers font bosser les seconds. A notre époque les vaisyas correspondraient à la bourgeoisie ploutocratique. Les autres au monde ouvrier.

      J’estime d’ailleurs que ce n’est pas un hasard si conformément à cette fin de cycle de Kali Yuga les deux premières castes ont disparues et qu’il ne reste que les deux autres (ce qui entraîne un déséquilibre..), mais cela nous entraînerait bien loin... d’autant que vous n’avez pas une mentalité gnostique et que vous aurez du mal à me suivre.. smiley

      Je ne peux cependant m’empêcher de noter ceci tiré de Wikipédia, à propos de la troisième fonction de Dumézil : Son symbole parmi les vivants est une tête de taureau


      Bien évidemment il y a un lien avec le signe zodiacal du Taureau mais cela nous entraînerait encore trop loin... smiley


  • jean rony 13 novembre 2012 14:14

    Je ne pense que ce soit le problème du monothéisme mais plutôt le problème de toute idéologie ou dogme se dotant d’une portée universelle.
    Dés lors qu’il y a une volonté de conversion ou d’expansion alors la violence se trouve toujours à l’issue des solutions.
    Et si l’amalgame est fait avec la religion monothéiste c’est parce que dans l’histoire il n’y a pas eu de phénomène d’expansion aussi important que ce type d’expansion.

    Voire le livre : Civilisation et souveraineté, aux éd. du net


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 14:51

      Je crois que nous disons à peu près la même chose. La question est celle de l’origine des idéologies du XXème siècle. Il me semble (cf ma première réponse) que les idéologies sont des sous-produits du christianisme.

      Cette question ressemble à celle de la filiation de l’antisémitisme nazi : le christianisme, le paganisme ou les Lumières ? (cf mon article précédent)

      De nombreux auteurs font dériver les idéologies des Lumières, ce qui me paraît un contresens, une manœuvre de diversion. Mais ceci méritera un autre fil. Voyons d’abord ce que donne celui-ci.

      La question est donc : connaissez vous des idéologies à tendance dogmatique et universaliste qui soit apparue en dehors du monothéisme ?


    • jean rony 13 novembre 2012 15:13

      A ma connaissance, il y a boudha de l’indouisme et le confusianisme.


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 16:16

      Oui, vous avez raison, car j’ai omis d’ajouter : qui aient usé de la force pour exporter leur doctrine vers des peuples étrangers.

      Je crois que la question se limite au bouddhisme, car à ma connaissance ni l’hindouisme ni le confucianisme n’ont cherché significativement à s’exporter (à vérifier).

      L’universalisme bouddhiste est fondé sur une conception de l’homme, alors que celui des monothéismes abrahamiques est fondé sur une conception de Dieu.

      Le prosélytisme du bouddhisme procède par assimilation et transformation des divinités et des rituels antérieurs, dans un syncrétisme « soft », beaucoup plus que par un quelconque exclusivisme avec destruction violente des dieux antérieurs. « La notion d’hérésie n’est que rarement employée dans le bouddhisme, et elle ne déboucha pas sur les excès de fanatisme familiers à l’Occident. »1

      L’institutionnalisation et le rapprochement avec le pouvoir politique ultérieur se développèrent tant dans le christianisme que dans le bouddhisme. Ainsi l’empereur Ashoka (-273, -232) se convertit au bouddhisme, Constantin au christianisme. Ashoka fit néanmoins publiquement acte de remords pour ses violences passées, et proclama par des gravures sur des parois rocheuses ou sur des colonnes son aversion pour la violence, comportements inimaginables chez Constantin.

      En matière de diffusion religieuse on peut distinguer trois grands types2 :
      - la coercition : elle a été la principale voie de diffusion du christianisme et de l’islam,
      - l’association volontaire : l’exemple type en est le bouddhisme ; elle passe souvent par le syncrétisme ; elle implique une grande souplesse dogmatique,
      - l’assimilation, lorsqu’une petite société se « dissout » dans une société plus vaste qui l’entoure.

      1 d’après Bernard Faure, auteur de Bouddhisme et violence, Le Cavalier Bleu, 2008, cité dans Le bouddhisme, une religion tolérante ? Sciences Humaines Hors-série N° 41 - Juin-Juillet-Août 2003. Cf. aussi Christophe Richard, Bouddhisme : religion ou philosophie ? L’Harmattan 2010 ; Jacques Pous : La tentation totalitaire, L’Harmattan 2009, Odon Vallet : Petit Lexique des guerres de religion d’hier et d’aujourd’hui, op.cit.
      2 D’après Jerry H. Bentley, dans Old World Encounters : Cross-Cultural Contacts and Exchanges in Pre-Modern Times, New York/Oxford, Oxford University Press, 1993.


    • Rounga Roungalashinga 13 novembre 2012 16:28

      à ma connaissance ni l’hindouisme ni le confucianisme n’ont cherché significativement à s’exporter

      Le confucianisme s’est exporté avec succès au Japon, au Vietnam et en Corée grâce à Zhu Xi au XIIème siècle. Mais, s’agissant d’un courant lettré, cela s’est fait sans violence, par simple propagation des idées.


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 17:20

      @Jean Rony
      Merci. Je l’intègre.


  • Rounga Roungalashinga 13 novembre 2012 14:36

    Il aurait été intéressant d’étudier la violence chez les peuples païens de l’Europe pré-chrétienne. On aurait pu parler, par exemple, des Vikings et de leur culte de la guerre.

    La conversion religieuse, chrétienne ou musulmane, a accompagné la volonté coloniale de domination, centralisation, uniformisation, pour l’étendre aux croyances, aux mœurs, aux règles matrimoniales, aux pratiques sanitaires, voire à la langue. "Cette action avait souvent une conséquence inattendue : la destruction des cadres sociaux et éthiques trop liés à ce paganisme pour pouvoir subsister sans lui« [17]. »Aujourd’hui encore, partout où des missionnaires le portent, il a la même action de déracinement.« [18]

    Sans doute mieux soignés et instruits, mais clochardisés ou massacrés, ces hommes, victimes d’une « déculturation » et d’un affaissement d’identité, n’ont plus eu "d’yeux pour se voir, de parole pour se dire, de bras pour agir« 

    Vous dites-là quelque chose de très pertinent, et l’on peut critiquer avec raison la maladresse, voire la brutalité, avec laquelle ces conversions ont été faites. Rares ont été les missionnaire capables de comprendre que la vocation du christianisme était l’inculturation (c’est la manière dont il s’est implanté, progressivement, en Europe), et non l’imposition soudaine et brutale de dogmes qui ont dû paraître incompréhensibles aux indigènes de l’époque.
    Mais puisque nous sommes dans le sujet, je tenais tout de même à dire qu’il existait des exemples fameux, comme Bartholomé de Las Casas dont la présence a dans certains cas plutôt contribué à adoucir les violences qui étaient faites aux colonisés. N’oublions pas également que si le clergé n’avait pas déclenché la controverse de Valladolid, les Européens ne se seraient sans doute même pas posé la question de savoir si on pouvait esclavagiser les indigènes du Nouveau Monde. Tout cela doit rentrer en ligne de compte dans le bilan.

    Il faudrait également nuancer les phrases du genre » Il s’agit de véritables guerres civiles, qui montent les uns contre les autres, au nom de leurs croyances, des citoyens d’une même ethnie, d’une même classe ou d’une même nation". En effet, en lisant cela, on dirait que la croyance religieuse est un élément séparé des autres identifiants des individus de l’époque. Je crains que cela ne soit un anachronisme, étant donné que de la croyance s’ensuivait à l’époque l’inféodation politique, les considérations morales, économiques (la question de l’usure, les métiers proscrits, etc.). Par conséquent, malgré votre effort, il reste encore, dans certains cas, à séparer ce qui est purement religieux de ce qui ne l’est pas. Mais d’après ce que je viens de dire, à certaines époques tout était mêlé de religion, donc cette tâche s’avère parfois être un non-sens.


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 15:12

      Je crois avoir déjà répondu à vos deux principales objections :
      - « on dirait que la croyance religieuse est un élément séparé des autres identifiants des individus de l’époque ». Non, j’ai pris le soin de dire les,motivations sont toujours complexes, et que chaque cas mérite examen, pour évaluer l’importance, décisive ou pas, de la motivation religieuse . Je crois que, malgré les motivations politiques évidentes, la dimension religieuse des guerres de religion européennes est difficilement contestable.
      - « 
      Rares ont été les missionnaire capables de comprendre que la vocation du christianisme était l’inculturation ». Vous auriez d’ailleurs pu citer Ricci, mais il a été formellement désavoué par le Vatican. « L’inculturation » est un concept apparu dans l’Eglise à Vatican II, et on ne peut pas dire que le clan des pluralistes l’ait franchement et durablement emporté. Donc que certains à l’intérieur de l’Eglise essaient de limiter les dégâts, bien sûr. Mais en ne s’attaquant pas à la cause racine, au dieu jaloux pour résumer, ils se donnent bonne conscience mais passent à côté du problème.

      L’essentiel me paraît là : tant qu’on en reste à des exégèses lénifiantes, tant qu’on dit « ce n’est pas Dieu qui est violent, ce sont les hommes », on passe à côté du problème, et on va accuser qui les musulmans, qui les chrétiens, qui les Juifs, qui tel ou tel courant de « ne pas avoir compris » le sens des Ecritures. Alors qu’il faudrait que tous se réunissent pour reconnaître ce vice interne au monothéisme, qu’ils partagent tous. Ce qui ne veut pas dire tout rejeter du monothéisme par dessus bord.


    • Rounga Roungalashinga 13 novembre 2012 15:39

      Non, j’ai pris le soin de dire les,motivations sont toujours complexes, et que chaque cas mérite examen, pour évaluer l’importance, décisive ou pas, de la motivation religieuse . Je crois que, malgré les motivations politiques évidentes, la dimension religieuse des guerres de religion européennes est difficilement contestable.

      Vous avez raison.

      Vous auriez d’ailleurs pu citer Ricci

      Eh bien figurez-vous que je me suis retenu de le faire, tant son exemple force l’admiration.

      « L’inculturation » est un concept apparu dans l’Eglise à Vatican II

      Pourtant c’est bien par l’inculturation que s’est greffé le christianisme en Europe. Les fêtes chrétiennes ont servi de substitution aux fêtes païennes de l’empire romain, et les campagnes ont toujours abrité en leur sein des survivances de mentalités et superstitions païennes.

      L’essentiel me paraît là : tant qu’on en reste à des exégèses lénifiantes, tant qu’on dit "ce n’est pas Dieu qui est violent, ce sont les hommes ", on passe à côté du problème, et on va accuser qui les musulmans, qui les chrétiens, qui les Juifs, qui tel ou tel courant de « ne pas avoir compris » le sens des Ecritures. Alors qu’il faudrait que tous se réunissent pour reconnaître ce vice interne au monothéisme, qu’ils partagent tous.

      Opération ô combien salutaire, mais qui pourrait s’avérer fatale pour les religions. La prétention à l’exclusivité en matière de salut est également le ferment de la ferveur religieuse des pratiquants. Remettre en question ce point doctrinal, ce serait courir le risque d’encourager les adeptes à ce qu’il y a de pire, à savoir la tiédeur. Ou alors il faudrait affiner les doctrines au point d’en faire des religions d’élite (comme le bouddhisme), ce qui contredirait la prétention universelle de ces religions. C’est donc extrêmement délicat. Possible, mais délicat.
      Sinon il y a la solution de Nicolas de Cues, qui avait déjà écrit en son temps La Paix de la foi.


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 16:51

      « Pourtant c’est bien par l’inculturation que s’est greffé le christianisme en Europe. » ????

      « Formée à l’école de la romanité, la mentalité tolérante de Constantin l’empêcha de saisir dans toute son étendue la pensée exclusiviste du christianisme, et donc de prévoir la violence qu’une telle attitude déclencherait dans l’avenir […] Par son caractère universel, que reflétait si bien le réseau de son organisation ecclésiale, le christianisme répondait parfaitement aux besoins d’un état fortement centralisé […] Constantin perçut bien cette correspondance entre christianisme et romanité et décida de s’en servir […] Il se comporta en apprenti sorcier et laissa à ses successeurs la tâche de contrôler les forces désordonnées qu’il déchaîna ».3 Théodose (379-395 et Justinien (527-565) en seront les empereurs les plus actifs de l’éradication du « paganisme »4. « A partir de l’empereur Justinien, les « païens » sont des véritables « morts civils » » 5. Les persécutions ne s’arrêteront qu’avec la disparition leur du sol européen6. Le succès des conquêtes musulmanes au Proche Orient fut d’ailleurs facilité par l’accueil des populations syriaques7 et juives de Syrie et de Palestine, qui saluèrent les musulmans comme des libérateurs par rapport à Byzance. Le philosophe néo-platonicien Pléthon (1360 ?-1452) affichait encore sa préférence pour la religion gréco-romaine8.

      La volonté d’éliminer le paganisme est certes difficilement dissociable de la politique de centralisation de l’Empire Romain. La tentative des Empereurs d’imposer une pensée unique avait débuté dès 250 avec Dèce, non chrétienne. La violence avait donc ses racines dans la société romaine, mais la religion chrétienne la reprit à son compte. Revendiquant le monopole de la vérité théologique et désireuse de bâtir une Eglise à vocation universelle, elle fit définitivement basculer l’Empire dans la théocratie, préfigurant ainsi les grands systèmes théocratiques de l’Orient médiéval, qu’il s’agisse du césaro-papisme byzantin ou du califat en terre d’Islam : une religion d’état, une législation inspirée de la religion, un Dieu unique et un souverain unique à la gloire desquels est vouée une capitale prestigieuse : « La violence est le legs de l’Empire au christianisme, legs reçu avec gratitude par son bénéficiaire et accru par lui ».9 Il y eut d’ailleurs des cas où les Empereurs tentèrent de tempérer l’ardeur des évêques soit pour fermer les écoles de philosophie, soit pour détruire les temples grecs, soit pour brûler les livres et à persécuter les philosophes.

      Il y eut ainsi complicité objective entre la volonté centralisatrice de l’Empire et l’universalisme chrétien : la parole de Paul « il n’y a ni Juif, ni Grec » avait anticipé sur le besoin des empereurs de passer d’une association de cités à un empire en recherche d’unification pour mieux résister à la pression des barbares aux frontières.

      « Ricci, son exemple force l’admiration ».
      Je suisbien d’accord, mais il a été désavoué par le Vatican. Ce n’était pas un hasard, car sa position était incompatible avec tout ce qui constitue l’exclusivisme monothéiste

      « Opération ô combien salutaire, mais qui pourrait s’avérer fatale pour les religions. »
      Bien d’accord avec votre commentaire. Je pense qu’un préalalble serait de désacraliser les textes, mais avec les difficultés que vous indiquez. Pouvez-vous me résumer ce que dit de Cues ?

      1 Cf. le cas particulier de la violence contre les donatistes légitimée par Saint Augustin.
      2 Exemple de violence entre chrétiens : « A la mort du pape Libère, deux prêtres, Ursinus et Damase, se disputèrent sa succession. La querelle en vint au point qu’on se battit dans les églises, et qu’au dire d’Ammien Marcellin (cf. note 1628 p. 160), on releva, un jour, sept cents cadavres sur le pavé d’une basilique. » La fin du paganisme, Étude sur les dernières luttes religieuses en Occident au quatrième siècle, par Gaston Boissier, 1891, disponible sur
      < http://www.mediterranee-antique.info/Boissier/FP_601.htm&gt ;
      3 Polymnia Athanassiadi, op. cit.
      4 Et souvent du judaïsme,.
      5 Chronique des derniers païens. La disparition du paganisme dans l’Empire romain, du règne de Constantin à celui de Justinien, Pierre Chuvin, Paris, Les Belles Lettres, 1990, p. 136, 138. Cf. aussi Isis et Moïse. Ses secrets de la Déesse du bonheur à la vengeance du Dieu jaloux, Jean Paul de Lagrave, Trois-Pistoles, Québec, Éditions Trois-Pistoles, 2010.
      6 Cf. Demolish Them, Vlasis Rassias, Athènes, Anichti Poli Editions, 2000, résumé sur < http://www.ysee.gr/index-eng.php?type=english
      &f=lovestories>. Exemple : « In 580, Christian inquisitors attack a secret Temple of Zeus in Antioch. The priest commits suicide, but the other Gentiles are arrested. All the prisoners, the Vice Governor Anatolius included, are tortured and sent to Constantinople to face trial. Sentenced to death they are thrown to the lions. The wild animals are unwilling to tear them to pieces and they end up crucified. Their corpses are dragged through the streets by the Christian mob and afterwards thrown unburied in the city dump. »
      « On oublie que lorsque les chrétiens s’emparent de l’Empire romain via Constantin, ils sont une minorité, qu’ils ne deviennent majorité que par les persécutions, le chantage, la destruction massive des temples, des statues, des lieux de culte et des manuscrits anciens - et finalement par des dispositions légales (Théodose le Grand) interdisant à des non-chrétiens d’habiter l’Empire. Cette ardeur des vrais chrétiens à défendre le vrai Dieu par le fer, le feu et le sang est constamment présente dans l’histoire du christianisme, oriental comme occidental (hérétiques, Saxons, croisades, Juifs, Indiens d’Amériques, objets de la charité de la sainte Inquisition, etc.) » Le Monde morcelé (Les carrefours du labyrinthe III), C. Castoriadis, Seuil, 1990.
      Sur l’attitude de l’Eglise, cf. notes 593 p. 60, 594 p. 60, 660 p. 67
      7 Les syriaques avaient refusé les conclusions du Concile de Chalcédoine. Leur église prit le nom de jacobite.
      8 Cf. Comparatio Aristotelis et Platonis , Georges de Trébizonde, 1464.
      9 P. Athanassiadi, op. cit.


    • Rounga Roungalashinga 14 novembre 2012 09:37

      Je ne nie pas que le christianisme a combattu férocement le paganisme. Cependant il n’est pas parvenu à l’extirper complétement des habitudes et des mentalités. Je ne sais pas s’il s’agit de survivances éparses ou si l’idolâtrie est une dégénérescence naturelle de la religion et qui serait donc revenue par la force des choses.
      De plus, on ne peut nier que ce qui faisait la gloire du paganisme selon Julien l’Apostat, à savoir la philosophie grecque et latine, a énormément influencé la théologie catholique, de Boèce à Thomas d’Aquin.
      Et n’oublions pas non plus à quel point le paganisme fut une source d’inspiration artistique sous la Renaissance. Le plafond de la chapelle Sixtine est bien plus païen que chrétien.


    • Rounga Roungalashinga 14 novembre 2012 09:41

      Pouvez-vous me résumer ce que dit de Cues ?

      Eh bien le cardinal a dit que tout le problème des guerres de religions serait résolu si tout le monde se convertissait au christianisme. C’est tellement simple qu’on se demande comment on n’y a pas pensé avant.


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 10:10

      Bien sûr ! La civilisation occidentale descend bien plus d’Athènes et de Rome que de Jérusalem : les droits de l’homme, la philosophie, la science, les arts, etc. La principale empreinte (la seule avec « le banc manteau d’églises » ?) laissée par le monothéisme est la subjectivité et l’hypertrophie du moi occidental


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 15:20

      Si au moins c’était vrai. C’est me semble-t-il oublier les guerres de religion (de Cues en est certes pardonnable). C’est méconnaître (c’en est même l’illustration) la dimension totalitaire du monothéisme, y compris le christianisme. Non ?


  • Rounga Roungalashinga 13 novembre 2012 15:46

    Par ailleurs, connaissez-vous le travail de René Girard, et qu’en pensez-vous ?


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 17:00

      Oui, j’ai même essayé dans mon essai (dont sont tirés ces articles, et pour lequel je cherche un éditeur, merci si vous en connaissez un qui soit motivé par ce thème) de voir comment concilier Jean Soler et René Girard.
      En 2 mots, j’adhère à sa théorie du sacrifice, mais rejette la théorie du christianisme Je fais le parallèle entre le déni de la violence monothéiste et le rejet de la théorie du sacrifice du Girard : c’est d’une certaine façon la même chose.

      Une contradiction majeure chez Girard :
      Le judaïsme biblique présente toutes les caractéristiques des religions préchrétiennes sur lesquelles René Girard a fondé sa théorie du sacrifice : les sacrifices y jouent un rôle éminent, le Temple leur est d’ailleurs dédié.2

      Selon cette théorie, le sacrifice fonctionne comme « une machine à produire des dieux », un processus de « transcendance archaïque »3 . Appliquée au judaïsme biblique4, elle devrait donc conduire à considérer que, comme dans toutes les sociétés préchrétiennes, Yahvé n’est qu’une divinité autosuggérée par les sacrifices5. La Bible désigne d’ailleurs Yahvé comme le « dieu vivant », celui qui, comme tout bouc émissaire girardien, est capable de donner la vie et la mort6.

      Or pour les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans, Yahvé, le Père ou Allah résulte non pas d’une autosuggestion produite par les sacrifices, mais d’une révélation qui préexiste aux sacrifices, et qui ne leur doit rien : les sacrifices n’ont été qu’une modalité archaïque de vénérer Dieu. Le Dieu abrahamique relève ainsi d’une forme de transcendance que l’on appellera « messianique », pour la distinguer de la transcendance « archaïque » : la première relève de la Révélation, alors que la seconde découle du sacrifice.

      Un croyant ne pouvant, par définition, accepter la transcendance « messianique », il devrait refuser l’application de la théorie girardienne du sacrifice à l’Ancien Testament : le même Dieu ne peut pas être issu, dans l’Ancien Testament, du sacrifice c’est-à-dire par auto-suggestion, et dans le Nouveau, de la Révélation ; être, un peu comme le chat de Schrödinger, à la fois « archaïque » et « messianique ».

      D’ailleurs la théorie girardienne du christianisme présente Jésus comme le dénonciateur de la « méconnaissance » qui se trouve au cœur de la « transcendance archaïque » du mécanisme victimaire : cette « méconnaissance » n’était donc pas dénoncée dans l’Ancien Testament. Pourquoi donc la théorie du bouc émissaire n’y serait-elle pas applicable ? Mais Jésus peut-il identifier son Père avec une divinité issue du mécanisme victimaire, donc partiellement apparue grâce à la « méconnaissance » qu’il dénonce lui-même 7 ?

      C’est d’ailleurs ce que refuse par exemple Marcion8, pour qui le dieu parfaitement bon du Nouveau Testament, et le dieu ambivalent ? à la fois infiniment bon (cf. l’Alliance) et infiniment violent (cf. la colère de dieu) ? de l’Ancien Testament sont nécessairement distincts : le dieu de la Grâce pour le premier, celui de la Matière pour le second. Mais Marcion, comme d’ailleurs les gnostiques, fut condamné pour hérésie de lèse-monothéisme.

      Pour résoudre cette contradiction, René Girard, qui se déclare chrétien, fait appel à la thèse de la « continuité entre l’Ancien et le Nouveau Testament », le fameux « principe ’accomplissement »9, pour en déduire que la « montée de la spiritualité chez les Prophètes »10 représente « une mutation progressive de la transcendance archaïque vers la transcendance messianique »11.

      Les théories girardiennes du sacrifice et du christianisme apparaissent ainsi bien difficilement conciliables, ensemble et séparément, avec une foi en un Dieu dont la « maison », le Temple de Jérusalem, avait pour vocation et activité centrales l’accomplissement des sacrifices12.

      2 Cf. p. 34. Le fait que dans le judaïsme des animaux aient été substitués aux humains ne change rien à la fonction sacrificielle,. Cette substitution n’est d’ailleurs que superficielle, cf. pp. 34 et 117, et non spécifique au judaïsme (elle avait cours par exemple chez les Grecs).
      NB. : La Bible, en faisant descendre toute l’humanité de Caïn, le meurtrier de son frère, et toute la prêtrise d’Israël de Lévi, l’un des frères massacreurs de Sichem, semble accréditer la théorie sacrificielle de René Girard (qui met à l’origine des civilisations et des rituels religieux le meurtre d’un bouc émissaire, cf. p. 277).
      3 Les disciples de René Girard appellent « transcendance archaïque » ce mécanisme de divinisation de la victime émissaire.
      4 Ce que René Girard lui-même, étant chrétien, se garde bien de faire.
      5 La parole de Saint Paul : « selon la Loi, presque tout est purifié par le sang, et sans effusion de sang, il n’y a pas de rémission. » (He, 9 : 22) illustre parfaitement la fonction du sacrifice d’expulser la violence, symbolisée ici par l’impureté.
      6 « C’est moi qui fais mourir et qui fais vivre ; quand j’ai frappé, c’est moi qui guéris et personne ne délivre de ma main. » Dt 32:39
      7 Aporie comparable à celle contenue dans la phrase attribuée au Christ sur sa volonté « d’accomplir la loi » ?

      10 On a dénoncé le caractère fallacieux de cette prétendue préfiguration du Nouveau Testament par l’Ancien, et de la soi disant montée de la spiritualité chez les Prophètes (cf. l’Annexe 8, Spiritualité des Prophètes, p. 296) : des interprétations ad hoc, qui ne retiennent des textes que ce qui permet de valider le fameux « je ne suis pas venu abolir la Loi et les Prophètes, mais les accomplir » (cf. p. 134).
      11 Selon l’expression de Benoît Chantre.
      12 Cette difficulté explique peut-être la position changeante de René Girard sur l’interprétation sacrificielle du christianisme (cf. note 1428 p. 143), qu’il avait d’abord rejetée, à l’époque où il écrivait La violence et le sacré, pour s’y rallier ultérieurement. Elle est sans doute aussi à mettre en relation avec le peu de place qu’occupe la spiritualité dans la théorie girardienne, qui se présente comme une théorie purement anthropologique et sociologique de la religion. D’ailleurs lors de la parution de La violence et le sacré, l’œuvre majeure de R. Girard, certains critiques y avaient vu « la première théorie athée du religieux ».
      ---------------

      ------------------------------------------------------------

      ---------------

      ------------------------------------------------------------

      *


    • Rounga Roungalashinga 14 novembre 2012 08:31

      Un croyant ne pouvant, par définition, accepter la transcendance « messianique »

      Je ne comprends pas pourquoi.

      D’ailleurs la théorie girardienne du christianisme présente Jésus comme le dénonciateur de la « méconnaissance » qui se trouve au cœur de la « transcendance archaïque » du mécanisme victimaire : cette « méconnaissance » n’était donc pas dénoncée dans l’Ancien Testament.

      René Girard dit au contraire (dans Des Choses cachées depuis la fondation du monde, et peut-être d’autres, il y en a plein que j’ai pas lu...) que cette dénonciation se trouve dans l’Ancien Testament, et de manière permanente. Cette dénonciation se trouve en effet dans le fait que la victime expiatoire est présentée comme innocente, alors que dans les sacrifices archaïques elle est considérée comme coupable. Les exemples sont nombreux, même si je ne saurais les citer tous ici (le sacrifice interrompu d’Isaac restant quand même l’épisode le plus emblématique).


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 10:01

      Excusez-moi, j’ai fait un lapsus, il fallait lire « Un croyant ne pouvant, par définition, accepter la transcendance »archaïque".
      Faute de temps, j’y reviendrai plus tard aujourd’hui.


    • Pierre Régnier Pierre Régnier 14 novembre 2012 10:07


      Sur Marcion : J’ai trouvé éclairantes les pages qu’y consacre Jean-Marc Joubert dans son livre "Foi juive et croyance chrétienne" (éd. Desclée De Brouwer 2001). L’auteur accepte mal le rejet définitif du mal pensant par ceux qui croient détenir la vérité révélée, et il suggère qu’il serait bon de réexaminer sérieusement les conséquences de ce rejet.

       

      Sur la principale contradiction girardienne, selon moi :

      http://ripostelaique.com/Reponse-a-Henri-Peter-a-propos-de.html

       

      Sur la pensée sacrificielle en général : « Critique de la pensée sacrificielle » par Bernard Lempert (Le Seuil 2000).

       

      Page 44, dans le corps du texte, cette définition pertinente d’une "opération de type sacrificiel«  : »détruire quelque chose en soi - au nom d’un discours sur le monde - afin de devenir apte à détruire le corps d’autrui, à la stricte condition que cela se fasse au nom de ce même discours".

       

      Page 101, plus directement en rapport avec le présent article (et, selon moi, avec la malhonnêteté de la démarche catholique actuelle) : «  »Cette lecture - "le sang de l’Alliancce, qui va être répandu pour une multitude en rémission des péchés« (Matthieu 26,28) » - si elle s’applique à la crucifixion, est incontestablement une régression par rapport au sacrifice du taureau tel qu’il fut relaté au livre de l’Exode, puisqu’il s’agit ni plus ni moins du retour du sacrifice humain«  »

       

      Ce n’était pas bien, en effet, de tuer son fils, comme Abraham avait cru que Dieu le lui demandait. Mais ça (re)devient très bien, beaucoup plus tard « dans la même religion » quand "le même Dieu« décide que »Jésus son propre fils« doit mourir »pour le bien de l’humanité future". Il n’est pas surprenant, dès lors, que dans cette humanité, de nombreux croyants pensent devoir tuer leur prochain « pour de bonnes raisons ».



    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 15:43

      @Reignier
      Merci, je ne connaissais pas ces éléments -ahurissants- du nouveau catéchisme. Mais n’attendez pas de Girard, fidèle entre les fidèles, une remise en cause. Le cas Girard est effectivement surprenant : La violence et le sacré, est d’esprit profondément athée, comme l’ont souligné les critiques à l’époque, alors que sa conversion est antérieure !

      Vous citez D Sibony. Mon premier débat était avec lui, j’en ai gardé un très mauvais souvenir. Quant à ses livres , je les trouve illisibles et ...amphigouriques. Mais c’est un auteur qui réussit !

      JM Joubert : oui, son livre est très intéressant, en particulier sur le judaïsme. Ce qui m’avait le plus frappé, c’est son opposition judaïsme= religion désintéressée, christianisme= religion intéressée. Cela étant, je ne sais pas quelle représentativité du judaïsme il donne : ne représente-t-il pas qu’un courant minoritaire ?

      Marcion : voilà un cas intéressant ! Dommage qu’il ait été antisémite. Il ne fut battu que par la force, et ses thèses combattues que par des arguments d’autorité.

      J’attends toujours que qq m’explique ce qu’avait voulu dire von Harnack (la dénonciation de l’AT) et pourquoi ça n’a pas eu de suite : j’imagine à cause de la Shoah, et de l’impossibilité depuis lors de critiquer l’AT ?


  •  C BARRATIER C BARRATIER 13 novembre 2012 16:02

    La violence commence lorsqu’on vous oblige à pratiquer une religion qui ne vous intéresse pas, elle commence dès que des dogmes réduisent la femme en esclavage et la privent par exemple de sa liberté sexuelle. Les religions ne sont pas seules à tuer, mais il est paradoxal par exemple que le christianisme le fasse au nom de l’amour du prochain.

    Il ne faut pas confondre les papes de tous bords, les intégristes de touts bords avec les croyants de base laïques, c’est à dire totalement respectueux de ceux qui savent qu’ils n’y a pas de dieu, ou qui en fabriquent d’autres. La violence est liée à la soif de pouvoir.

    Voir ici mon avis sur le cantonnement urgent de la religion dans la sphère privée.

    « Liberté d’opprimer dans la République, stop »

     http://chessy2008.free.fr/news/news.php?id=220


    • Rounga Roungalashinga 13 novembre 2012 16:06

      ceux qui savent qu’ils n’y a pas de dieu

      « Ceux qui savent ». Notez ! Notez !


    • jean-pierre castel 13 novembre 2012 17:09

      @C Barratier
      Qu’il y ait des monothéistes non-violents, oui bien sûr, mais c’est malgré qu’ils soient monothéistes, c’ets parce qu’ils ont su résister à l’incitation à la violence inscrite dans le monothéisme. Autrement dit, ce n’est pas parce qu’il y a de bons monothéistes que le monothéisme ne contient pas un facteur de risque de violence qui lui est spécifique (ce n’est pas parce que certains fumeurs vivent centenaires que le tabac n’est pas nocif pour la moyenne des individus).
      La laïcité est un pare-feu contre cette violence. Mais ce qui serait encore plus efficace si c’était possible, ce serait que les monothéistes acceptent de reconnaître cette violence et de se soigner (par exemple en désacralisant les textes, mais à eux de choisir le remède qui leur conviendrait)


    • hauteville 14 novembre 2012 10:58

      Elémentaire. Croire est une chose, savoir en est une autre !
      Le sapiens ne devrait logiquement pas être crédule !
      Mais il a bien le droit de l’être...


  • Furax Furax 13 novembre 2012 16:07

    Il est sain de s’attaquer à la violence et à ses sources. Pour ma part, le principal reproche que je fais aux « monothéismes » est leur silence devant des massacres épouvantables comme celui de 14-18.
    LE commandement est : « Tu ne tueras pas ». A ma connaissance, il n’existe aucune exception à cette règle.
    Cela dit, vos articles comme beaucoup d’articles du même genre, permettent de se donner bonne conscience à peu de frais.
    L’Inquisition, quelle horreur ! Bien entendu. Plusieurs dizaines de milliers de morts(en six siècles). Mais, l’an dernier, les troupes françaises se sont livrées à un joyeux « carton » sur la population libyenne. 150. 000 morts, civile pour le plupart. Où étaient nos procureurs ? Se sont-ils jetés devant les chenilles des chars ?
    En ce moment même se déroule au Congo peut-être le plus horrible carnage de l’histoire de l’humanité (génocide, ethnocide, qu’importe), six millions de morts, massacre en cours sans aucune solution à l’horizon et nous dissertons gravement, ici, des erreurs des croisés ou des Inquisiteurs.


    • Pierre Régnier Pierre Régnier 14 novembre 2012 11:07


      @ Furax


      Vous avez parfaitement raison de rappeler que le monde actuel est très sélectif dans son relevé des horreurs à condamner, et votre exemple de la situation congolaise est judicieux. Mais Jean-Pierre Castel a raison, lui, de rappeler combien le monothéisme alimente durablement la violence effective. Et je vous rappelle à ce sujet qu’il y a au Congo de nombreux hutus et tutsis qui continuent les massacres « fraternels » après avoir fui ceux de leur pays où la religion a joué un très grand rôle dans leur exécution.

       

      Mais vous répétez par ailleurs, dans votre commentaire, la tarte à la crème prétendument spirituelle et humaniste, que même de nombreux athées répètent inlassablement sans vérifier : « Tu ne tueras pas ! » seul commandement à propos du meurtre dans l’Ancien Testament !

       

      J.P Castel a dit bien souvent ici la réalité du « Dieu jaloux » qui émet les dix commandements incluant le fameux « Tu ne tueras pas ». Inutile de la répéter.

       

      Mais par ailleurs pourquoi vouloir à tout prix toujours ignorer le commandement exactement contraire, et combien plus insistant, « de Dieu » dans le Livre de Josué ? Page après page « Dieu » y demande à son peuple d’aller massacer la totalité des habitants des cités de Canaan. Quand Josué a bien effectué la besogne dans une cité, « Dieu » lui demande le lendemain de faire pareil dans une autre, etc.

       

      Je n’ai personnellement jamais vu ailleurs un aussi explicite appel à effectuer un génocide : « Dieu » insiste avec force pour que ne reste aucun survivant.

       

      Et alors que les historiens discutent à l’infini sur le fait de savoir si ce génocide a bien eu lieu, s’il n’a pas été en réalité qu’une banale agression comme il y en eut tant dans l’Histoire, si même il ne faut pas y voir qu’un appel symbolique sans aucune réalité physique, le pape Benoît XVI et son Eglise continuent d’insister sur la nécessité « d’en faire la bonne interprétation ».

       

      J’ai dit ici combien je trouve écoeurante cette « bonne interprétation » :

      http://www.centpapiers.com/benoit-xvi-premier-responsable-de-la-violence-religieuse-1/38279

       

      Mais au même endroit je réponds aussi à une remarque que font quelquefois les croyants juifs :

       

       »"Avant d’examiner cet exemple tristement significatif de « bonne interprétation » de la prétendue volonté criminelle de Dieu, écartons tout de suite l’objection de certains croyants juifs : le Livre de Josué n’est pas dans le Pentateuque (les cinq premiers livres de la Bible), qui est le seul Livre fondateur de notre religion. C’est dans le Livre de la Genèse que « Dieu » anéantit les cités de Sodome et Gomorrhe (Gen 19, 23) ; c’est dans L’Exode (12, 29) qu’il fait tuer tous les premiers-nés d’Egypte, et donne l’ordre à Moïse de massacrer son peuple qui a adoré le veau d’or (Ex 32, 21) ; c’est dans Les Nombres (31) qu’il ordonne l’extermination des Madianites ; c’est dans le Deutéronome (7-20) qu’il demande à son peuple de se préparer pour l’extermination des Cananéens…«  »



    • Furax Furax 14 novembre 2012 11:46

      Pierre Régnier,

      Ce qui se passe, actuellement, au Congo, n’a rien à voir avec les monothéismes et vous le savez très bien. Il s’agit de « nettoyer » une immense région riche en matériaux rares.
      Le MONOTHEISME que l’on se doit de condamner avec vigueur est le culte du profit, la rapacité, le goût avide de l’ARGENT. C’est ce culte là qui nous mène tout droit à notre perte. Il n’est pas nouveau. Les « conquistadores »n’ont pas exterminé les Incas pour les convertir mais pour leur piquer leurs supposés trésors. Le génocide des Indiens d’Amérique du Nord a été fort justement nommé la « ruée vers l’or ». Chrétiens et musulmans peuvent vivre en parfaite harmonie, je l’ai vécu au Tchad et en Haute-Volta, si vous découvrez du pétrole dans le sous-sol, d’autres forces vont entrer en jeu. Ce monothéisme stupide déguisé sous le joli vocable de « mondialisation » est hautement mortifère et à court terme, car on a détruit, rigardisé, moqué, toutes les résistances morales (voir les excellents articles de Dugué et Allard hier). Ce qui nous distrait de la lutte contre cette saleté n’est qu’« enfumage »
      Quant à vos citations de la Bible concernant le génocide de tribus commandé par le Dieu des Juifs ou l’ordre de tuer qui pénètre dans le Temple comme le rappelle l’auteur de l’article, comme énormément de chrétiens je pense, je m’en contrefous. Jésus était juif et ne reniait pas son peuple et son histoire, c’est normal, mais ma morale ne s’appuie pas sur la Bible qui n’est jamais que l’épopée du peuple juif.

      Pour vous réjouir un peu, lisez ceci. Ce que j’appelle une bonne nouvelle, qui change agréablement des « dénonciations » vertueuses ou non :
      http://www.gric.asso.fr/actualite-du-dialogue/article/le-gouvernement-libanais-decrete-l


    • Pierre Régnier Pierre Régnier 14 novembre 2012 15:16


      J’espère que les lecteurs ne se laisseront pas égarer par ce millième commentaire les invitant à ne voir que l’un des deux « Dieux » - ou des deux « monothéismes » si vous y tenez - qui dominent le monde et interdisent à nos enfants, petits-enfants et suivants d’en sortir.



    • Furax Furax 14 novembre 2012 15:48

      Piere Régnier,
      Vous êtes dans la menace constante de qui ne suit pas votre obsession. L’adoration du profit mène au désastre, pas difficile à vérifier je pense...
      Quant au reste le monde est plein d’espoirs aussi :
      http://www.gric.asso.fr/actualite-du-dialogue/article/le-gouvernement-libanais-decrete-l


    • Pierre Régnier Pierre Régnier 14 novembre 2012 18:44

      « Dans la menace constante » ???


      Oui, « l’adoration du profit mène au désastre » j’en suis convaincu.

      Je souligne seulement une AUTRE adoration qui mène AUSSI au désastre : la croyance en un Dieu qui appelle à de prétendues « bonnes » violences.

      Et je dis avec insistance que ces deux calamités ne sont pas opposées. HELAS, elles S’AJOUTENT !

    • Furax Furax 14 novembre 2012 19:03

      Pierre Régnier
       Quelle menace ?
      « Qui interdisent à nos enfants, petits-enfants et suivants d’en sortir ».
      Où êtes vous allé voir jouer cela ? Laissez vos enfants face au capitalisme sauvage que nous connaissons et, oui, vous verrez si ils s’en sortiront. Quant à ce que vous appelez« l’ autre monothéisme », son affaiblissement ouvre grand les portes de la voracité que nous connaissons.
      Comme je l’explique plus bas, j’ai connu des gens admirables qui faisaient vraiment don de leur vie, en Afrique. Des curés et des « bonnes soeurs ».
      Les africains sont tellement convaincus de la violence que ces gens véhiculent smiley que la plupart des paroisses qui entourent l’endroit où j’habite ont des africains pour curés !!!
      D’ailleurs l’assemblée des fidèles est de plus en plus « colorée » et c’est tant mieux !
      Et je vous assure que tous ces gens n’ont rien à faire des massacres relatés dans la Bible



    • Pierre Régnier Pierre Régnier 14 novembre 2012 21:39


      @ Furax

       

      Soit,  »interdire" n’est pas le bon mot (mais je ne vois pas en quoi l’utiliser par erreur dans une constatation serait une menace). J’ai voulu dire que le refus de voir, de reconnaître, de nommer les très explicites appels « du Dieu » de l’Ancien Testament à massacrer empêche les chrétiens sincèrement bien intentionnés - ceux qui veulent suivre ce qu’est pour eux l’excellent enseignement de Jésus - de comprendre que ce Jésus ne peut toujours pas réellement changer le monde avec leur aide puisqu’il est bien malgré lui enfermé (son message est enfermé) dans une monstrueuse contradiction maintenue sacrée pas les religieux de pouvoir se prétendant ses disciples.

       

      Quand aux curés, bonnes sœurs et autres fidèles admirables, j’en ai connu moi aussi beaucoup, et il y en a toujours beaucoup dans mon entourage et dans ma propre famille. Des juifs et des musulmans admirables j’en connais aussi.

       

      C’est très triste, je le répète, que tous soient malgré eux maintenus « complices » de la violence religieuse effective et durable, étant obligés de croire « bon » le modèle de cette violence s’ils veulent rester dans leur religion (puisque ce modèle, selon cette religion, est et doit rester sacré).

       

      Quant au »culte du profit, la rapacité, le goût avide de l’ARGENT", étant militant de gauche depuis toujours je les condamne tout aussi fermement que vous. Et je trouve tout à fait comparable le déni de leur nocivité et le déni de la nocivité de la théologie criminogène Je répète que, pour moi, les désastres issus de ces deux dénis hélas s’ajoutent.

       

      Il faut donc détruire la théologie criminogène et il faut détruire l&#8217;économisme. Et non pas choisir entre détruire l&#8217;un ou l&#8217;autre.



  • jean-pierre castel 13 novembre 2012 17:17

    @Furax
    « LE commandement est : »Tu ne tueras pas« . A ma connaissance, il n’existe aucune exception à cette règle. » O que si, il suffit de lire la Bible. Par exemple tout étranger qui péntrait dans la zone du Temple réservé aux Juifs était condamné à mort, au nom de Yahvé.
    Nous ne discutons ici encore une fois que d’une motivation de violence, qui n’est évidemment pas la principale dans l’espèce humaine, mais celle qui est peut-être la plus artificielle, celle qu’on devrait pouvoir éliminer le plus facilement, car elle n’est pas intrinsèque à la nature humaine. La preuve : seuls les monothéistes (et ceux qu’ils contaminent) en sont atteints.
    Allez-vous reprocher à un médecin de chercher à guérir la grippe sous prétexte qu’il ne sait pas guérir le cancer ? Allez-vous lui dire qu’il ne fait que se donner bonne conscience ?


    • magma magma 14 novembre 2012 14:34

      enfin quand le sacrifice d’abraham et la violence la plus absolue qu’il suggère, est inscrit dans des texte sacrés, comment une religion peut elle s’exclure de la violence qu’elle engendre


    • Furax Furax 14 novembre 2012 15:43

      Magma et Régnjer
      Lisez René Girard...


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 16:11

      @Furax
      Je crois connaître assez bien Girard, je n’ai pas trouvé de réponse convaincante à la question posée par Reignier et Magma.
      Votre radicalisme (ne considérer que la principale violence, pour simplifier celle du capitalisme si je vous comprends bien) n’est-il pas très réducteur ?
      Je ne me sens pas capable de proposer un meilleur système que le capitalisme (sinon, ça se saurait). Donc que le capitalisme provoque des horreurs, évidemment, mais ce n’est pas en jetant le bébé avec l’eau du bain qu’on a une chance de résoudre le(s) problème(s).
      Le débat Réforme ou Révolution nous ramène au débat polythéisme/monothéisme : 20 siècles de christianisme nous ont habitué à tout voir en blanc et noir, bien et mal, une pensée dualiste à l’extrême. D’où notre propension à souhaiter le grand soir, la Révolution, la Rupture disent nos managers modernes. A bas le capitalisme, à bas la mondialisation : autant dire à bas les moulins à vent (vous me direz que là, on a réussi !)
      Donc les méfaits du capitalisme : un vaste programme, qui n’est pas le sujet ici. Même si l’Eglise a sans doute joué un rôle dans l’édification du capitalisme, je ne crois pas qu’on puisse dire que le capitalisme soit fils du monothéisme (l’expérience montre d’ailleurs qu’il marche tout aussi bien en dehors du monothéisme, cf par exemple le Japon ou la Corée)
      Ici, le sujet est plus modeste, l’analyse plus simple, et il y a des modèles alternatifs qui semblent mieux marcher, ou en tout cas moins nuisibles (le bouddhisme par exemple, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y ait pas des dérives rerettables aussi dans le bouddhisme). Voire, on pourrait peut-être même expurger le monothéisme de ses travers ?. Ce n’est peut-être pas très ambiteux, ni même éventuellement réaliste. Mais pourquoi ne pas essayer si on y croit ?


    • Furax Furax 14 novembre 2012 18:18

      @ Jean-Pierre Castel
      « Je crois connaître assez bien Girard, je n’ai pas trouvé de réponse convaincante à la question posée par Reignier et Magma. »
      Si vous ne décelez pas la différence que fait Girard entre le sacrifice d’Abraham et la Passion, je crois que vos lectures sont très anciennes smiley

      "Votre radicalisme (ne considérer que la principale violence, pour simplifier celle du capitalisme si je vous comprends bien) n’est-il pas très réducteur ?« 
      Euh...vous suivez ce qui se passe dans toutes les villes d’Europe aujourd’hui ? Ce n’est qu’un tout début et relativement pacifique croyez le bien. Tous les peuples d’Europe sont gravement menacés. La course exclusive au profit, totalement mortifère, n’est pas un songe de mon »radicalisme« .

       » il y a des modèles alternatifs qui semblent mieux marcher« 
      Mais je ne suis pas en recherche d’un modèle alternatif ! Mon histoire, ma famille, ma culture sont chrétiennes. Je ne vois pas pourquoi j’irais pousser des » aoummmm« dans une robe de safran. Je ne suis pas bigot, j’ai beaucoup voyagé, je me suis fait des amitiés très fortes en terre d’Islam et je respecte toutes les convictions comme les miennes ont été respectées partout où je suis passé. Paradoxalement c’est ici que l’intolérance me semble la plus forte mais ce n’est pas bien grave. J’ai vu en Afrique, des curés et des soeurs magnifiques qui se dévouent comme personne, qui font réellement don de leurs vies.Parlez en avec les Africains que vous connaissez, d’ailleurs, dans ma région tous les curés, pratiquement, viennent d’Afrique. Je n’ai pas trouvé d’ hopitaux, d’écoles, de centres sociaux animés par les bouddhistes et encore moins par les francs maçons qui ne sont actifs qu’en zone de corruption, désolé. Allez dire là-bas que ces curés sont les suppôts d’ une pensée violente qui représente un danger pour leurs enfants... on éclatera de rire !!!
      Quant aux améliorations à apporter au fonctionnements de l’Eglise Catholique,elles sont nombreuses c’est certain mais ce n’est pas le plus important. Comme le disait Théodore Monod, encore un dangereux apôtre de la violence :  smiley
       »Les Evangiles, tout des Evangiles et rien que les Evangiles"


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 19:03

      @Furax
      Bizarre.
      Vous considérez que l’adoration du profit, c’est quelques chose dont la nature humaine pourrait sortir. Tous ceux qui expliquent la crise actuelle par la cupidité me semblent ...découvrir que l’homme est cupide, ce qui ne date pas d’hier. C’est en cela que crier contre la cupidité revient me semble-t-il à demander aux hommes de faire l’ange.
      En revanche le monothéisme est une création datée et localisée, sans laquelle l’homme a pu et peut encore (de moins en moins il est vrai) vivre sans être pollué par son « binarisme exclusiviste ». C’est tout ce qui nous sépare je crois


    • Furax Furax 14 novembre 2012 19:22

      @Jean Pierre Castel
      « Vous considérez que l’adoration du profit, c’est quelques chose dont la nature humaine pourrait sortir. »
      Oui. Et tant que nous en serons là, ce sera la préhistoire. De toutes façons, cette « adoration » nous mène tout droit dans le mur et il n’y a pas que les « croyants » pour s’en rendre compte !
      Pour ce qui est de mon « binarisme exclusiviste », je vous renvoie à un texte antérieur :
      http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/il-n-existe-rien-d-autre-que-dieu-74620
      Il est vrai que dans le texte suivant, j’expliquais que ma famille, ma culture et mon histoire étaient chrétiennes :
      http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/il-n-existe-rien-d-autre-que-dieu-74744
      Vous voyez que mes idées ne sont pas « exclusivement binaristes » smiley
      Comme nous ne serons jamais totalement d’accord mais que nous n’allons pas passer le réveillon là-dessus, je vous propose la lecture d’un texte que j’avais écrit pour AV il y a quelque temps :
      http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/il-n-y-a-plus-rien-97531
      Bonne soirée !


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 22:46

      @Furax
      "Allez dire là-bas que ces curés sont les suppôts d’ une pensée violente qui représente un danger pour leurs enfants... on éclatera de rire !!!"
      Là est pourtant bien le problème. Que ces curés fassent de leur mieux en leur ame et conscience, qui en doute ? Quand les missionnaires détruisent les cultes indigènes, ne croyez vous pas que c’est en croyant eux aussi accomplir l’ordre de dieu ? Le problème est précisément ce lavage de cerveau qui dure (et réussit) depuis 20 siècles et dont se rendent complices tous ces bons chrétiens, musulmans, juifs qui par leur bonne conscience perpétuent le dieu jaloux, sans le savoir comme vous dites


    • jean-pierre castel 15 novembre 2012 00:35

      @Furax
      « Binarisme exclusiviste. »
      Je ne voulais pas vous offenser, excusez-moi, c’est une formule un peu barbare par laquelle Jean Soler résume son bouquin La violence monothéiste (si je me souviens bien) Toutes mes recherches sont parties de cette lecture..
      L’article auquel vous faites référence « Il n’y a rien d’autre que Dieu » m’inspire le plus grand respect. Mais permettez-moi de vous donner mon ressenti :
      1) il relève d’une dimension mystique. D’ailleurs vous l’avez ramenée d’Inde.Vous savez sans doute mieux que moi ce que les indiens pensent du monothéisme
      2) Cette phrase en renvoie en aucune façon aux constructions monothéistes. Je m’entends : il y a eu de grands monothéistes mystiques,mais les autorités religieuses monothéistes les ont souvent mal vu, car s’échappant des rails spécifiés par les Ecritures et ledogme.

      Autrement dit, je ne critique en rien toute forme de spiritualité, mais bien l’exclusivisme monothéiste, sa prétention à la vérité unique, ses anathèmes, qui n’ont rien à voir avecl a mystique.


    • Pierre Régnier Pierre Régnier 15 novembre 2012 08:26


      Heu... »rien à voir avec la mystique" ? Pas si sûr. Ou alors comment nommer cette force qui transforme profondément, de l’intérieur, un individu au point de l’amener à dire très explicitement, comme « Saint » Augustin pour les chrétiens ou Maïmonide pour les juifs, que "Dieu, LUI, persécute par amour", contrairement aux hommes qui persécutent par abandon à leurs bas instincts ?

       

      Si je n’ai pas cité le prophète Mohamed, c’est que, lui, c’est toute sa démarche qui justifie la persécution au nom de son Dieu, en son temps et dans le futur jusqu’à soumission totale du monde à ce Dieu.

       

      C’est ce qui me révolte tout particulièrement quand des « laïcs républicains » décervelés, du gouvernement « de gauche » après ceux tout aussi décervelés du gouvernement de droite, s’efforcent de donner à l’islam d’aujourd’hui des privilèges que les juifs et les chrétiens ont accepté qu’on leur retire (pas tout à fait puisque les intégristes juifs s’accrochent à leur cacher comme les intégristes musulmans à leur hallal).



    • jean-pierre castel 15 novembre 2012 10:03

      @Reignier
      Je crois qu’il faut distinguer mystique, ou spiritualité, qui relève d’une relation purement personnelle avec qc d’extérieur au réel tangible, qui ne passe par aucun texte ni même par des mots, et la religion, une croyance collective explicite, basée dans le monothéisme sur des textes. Le texte de Furax relevait de la première catégorie. Alors que ce dont nous parlons sur ce fil relève de la seconde, la religion..

      Les paroles de StAugustin que vous citez relèvent pour moi évidemment de la seconde.

      Mahomet, comme Jésus, et tous les prophètes, sont des cas particuliers, qui créent ou contribuent à développer une religion (laissons de côté la question de savoir si Jésus a voulu créé une religion ; de fait , via Paul, il abouti à ce résultat) , même si leur expérience personnelle relève de la mystique.

      Mais quand les Chrétiens suivent les commandements du dieu de la Bible, commme St Augustin, ou les musulmans ceux du Coran, ils suivent une religion ; une dimension mystique peut se surajouter, mais pas nécessairement.


    • Furax Furax 15 novembre 2012 12:25

      @Jean-Pierre Castel

      Il me semble que, parfois, nous pourrions nous retrouver smiley !!!
      Je ne suis pas d’accord toutefois, pour mettre les « monothéismes » dans le même sac, pour ne froisser personne. La critique assassine de la religion catholique sert de préalable obligatoire à toute attaque contre une autre religion ( politiquement incorrect !).
      La Bible ne représente rien dans ma foi. Je ne suis évidemment pas créationniste et je me contrefiche des propos guerriers que les juifs attribuent à Dieu.
      Comme je l’ai dit dans un autre article :
      http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/vanite-des-vanites-117494
      ma conviction s’appuie presque exclusivement sur le magnifique premier épitre de Jean :
      "au Dieu de l’Ecclésiaste qui exige qu’on le CRAIGNE :

      « Le bonheur est pour ceux qui craignent Dieu »

      « Craindre Dieu et observer ses commandements, c’est là ce que doit tout homme »

      répond le Dieu du premier épitre de Jean.

      « Personne n’a jamais vu Dieu.

      Si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous et son amour est parfait en nous »

      « Dieu est amour ; et celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu et Dieu demeure en lui »

      Et l’immense majorité des catholiques est dans mon cas et n’a, d’ailleurs , jamais entendu parler du commandement de tuer ceux qui pénètrent dans le Temple ou d’exterminer les Cananéens.

      Encore une petite précision. Il n’existe pas de communauté religieuse ou philosophique « angélique ». L’Hindouisme traverse une période de rapports assez musclés avec l’Islam, quand aux Bouddhistes, ils se présentent toujours comme des modèles de tolérance lorsqu’ils sont en prédication en terre de « mission », mais je dois vous rappeler qu’ils ont exécuté de manière horrible les premiers chrétiens qui sont venus les contacter au Tibet. Dernièrement, il y a eu de véhémentes manifestations anti-chrétiennes en Corée du Sud. Les Bouddhistes supportent assez mal de ne plus être la religion majoritaire.

      Enfin, pour moi, le Shivaïsme est monothéiste puisqu’il affirme qu’il n’existe rien d’autre que Dieu. Mais c’est aussi l’opinion (que je partage) du très chrétien Maître Eckart. smiley


    • Pierre Régnier Pierre Régnier 15 novembre 2012 18:23


      @ Jean-Pierre Castel

       

      Sur la mystique, la spiritualité, la religion, on pourrait faire des pages et des pages sans se comprendre…

       

      Mais je vois que vous me répondez en omettant ma référence à Maïmonide. C’est peut-être parce que j’ai été trop vague. Je croyais vous avoir pourtant déjà rapporté ces extraits du Guide des égarés de Maïmonide (si oui, excusez-moi, mais mieux vaut deux fois qu’une) :

       

      Maïmonide est tout à fait clair, explicite, insistant  :

       

      « Dieu, »parfait en actes", intervient bien pour exercer ou commander de très justes massacres d’êtres humains. "Nous trouvons, au nombre de ses actions qui se manifestent sur les hommes, de grandes calamités qui fondent sur certains individus pour les anéantir, ou qui enveloppent dans leur destruction des familles, et même une contrée entière, font périr plusieurs générations à la fois et ne laissent ni culture ni progéniture, comme, p. ex., les croulements de sol, les tremblements de terre, les foudres destructrices, l’expédition faite par un peuple contre un autre pour le détruire par le glaive et pour effacer sa trace« (c’est moi qui souligne). Ces actions de Dieu  »sont nécessaires pour gouverner les états ; car la suprême vertu de l’homme est de se rendre semblable à Dieu autant qu’il le peut, c’est-à-dire que nous devons rendre semblables nos actions aux siennes…".

       

      Maïmonide donne même ici une intéressante explication sur la fameuse précision contenue dans le Décalogue : "je suis un Dieu jaloux, châtiant la faute des pères sur les fils, sur la troisième et sur la quatrième génération« (Ex. 20,5). »On s’est borné", dit Maïmonide, "à quatre générations, parce que l’homme ne peut voir de sa postérité que tout au plus la quatrième génération. Ainsi, lorsqu’on tue la population d’une ville livrée à l’idolâtrie, on tue le vieillard idolâtre et sa race jusqu’à l’arrière-petit-fils, qui est l’enfant de quatrième génération.. On a donc, en quelque sorte, indiqué qu’au nombre des commandements de Dieu (je souligne) qui indubitablement font partie de ses actions, est celui de tuer les descendants des idolâtres, quoique jeunes enfants, pêle-mêle avec leurs pères et leurs grand-pères.

       

       On ne peut se rassurer en imaginant que, comme c’est le cas ailleurs dans Le Guide des égarés, l’auteur expose ici un point de vue qui n’est pas le sien pour mieux le critiquer ensuite. Bien au contraire ces énoncés sont d’autant plus terribles qu’ils viennent dans un chapitre exposant ce qui semble le plus largement reconnu comme un apport précieux de la pensée de Maïmonide : Les « attributs » bibliques sont des allégories. Dieu commande bien des massacres mais il le fait "en raison du démérite de ceux qui sont punis«  ; on ne doit en aucun cas y voir  »des actions comme celles qui, chez nous, émanent d’une disposition de l’âme, savoir, de la jalousie, de la vengeance, de la haine ou de la colère". C’est d’ailleurs ainsi que ce passage sur la prétendue juste violence pratiquée et voulue par Dieu se veut édifiant : "celui qui gouverne l’état, s’il est prophète« doit bien »faire disparaître tous ceux qui se détournent des voies de la vérité« , »un acte qu’exige la raison humaine" mais il doit le faire en prenant Dieu pour modèle et en tentant d’oublier ses mauvaises motivations humaines "à tel point qu’il doit ordonner de brûler un individu, sans éprouver contre lui ni indignation, ni colère ni haine, n’ayant égard, au contraire, qu’à ce qu’il lui paraîtra avoir mérité, et considérant ce que l’accomplissement de cet acte a de souverainement utile pour la grande multitude".

       

        Maïmonide ajoute enfin, comme le font presque toujours les auteurs de textes, sacralisés ou non, qui affirment et justifient la violence de Dieu :

       

      "Malgré tout cela, il faut que les actes de miséricorde, de pardon, de commisération et de bienveillance, émanent de celui qui gouverne l’état, bien plus fréquemment que les actes de punition…" C’est là le fameux second volet dont se contentent les croyants sans exigence et sans cohérence -on pourrait dire « de spiritualité superficielle »- et plus gravement encore les responsables religieux tricheurs qui s’expriment de nos jours après les massacres les plus révoltants commis au nom de Dieu et de la religion.

       

       C’est là aussi la base de la lâcheté des responsables laïcs qui se refusent à mettre en application ce nécessaire et urgent devoir républicain : exiger des responsables religieux qu’ils mettent leur religion en situation de compatibilité avec les Droits de la personne humaine."

       

      J’avais mis ça, en juin 2002, dans un texte que j’avais titré, justement "La spiritualité matérialiste" (ou Spiritualité et criminalité).

       

      Cordialement. P.R.



    • jean-pierre castel 15 novembre 2012 21:48

      @Furax
      "l’immense majorité des catholiques est dans mon cas et n’a, d’ailleurs , jamais entendu parler du commandement de tuer ceux qui pénètrent dans le Temple ou d’exterminer les Cananéens."

      Nous sommes là au cœur du problème. Bien sûr qu’il y a de superbes passages dans la Bible. Est-ce une raison pour soutenir une religion, je veux dire un système avec à sa tête l’Eglise, dont le texte de base, en quelque sorte la constitution, comporte structurellement (et non pas comme de simples« détails de l’histoire ») un appel à l’intolérance et à la violence.

      Excusez-moi de l’image, malheureusement fondée, des communistes qui vantaient la beauté (toute chrétienne d’ailleurs) de leur idéal, et fermaient les yeux sur le Goulag : la façon de la plupart des chrétiens de se réfugier dans une vision tronquée, irénique, de leur religion, encouragés par l’Eglise qui leur serine « Dieu est amour », leur façon de refuser de voir les fondements de leur religion, d’ignorer le texte de base, malgré toutes les violences religieuses commises au nom de Dieu durant toute l’ère chrétienne, est malheureusement tout à fait comparable.

      Je me suis rendu compte effectivement que de nombreux chrétiens tombent de l’arbre quand on leur rappelle « Je suis un Dieu jaloux » Exode 20, 5 et Dt. 5, 9. Ils ne connaissent pas ces versets, n’en ont jamais entendu parler. Combien de communistes sincères n’ont-ils pas adoré Staline ? Comment les Alliés n’ont pas voulu savoir ? Cette parole d’Aron à propos de la Shoah illustre merveilleuesement cette attitude : &nbsp;&raquo;Je l&#8217;ai su, mais je ne l&#8217;ai pas cru. Et parce que je ne l&#8217;ai pas cru, je ne l&#8217;ai pas su.">span>

      Désolé de ces rapprochements. Vous les récuserez sans doute. A tort selon moi.


    • Furax Furax 15 novembre 2012 22:48

      Jean-Pierre Castel

      Ce que vous ne voulez pas admettre, c’est que la Bible n’est pas le fondement de la religion catholique !
      C’est sur les Evangiles et les commentaires des premiers pères de l’Eglise (les Epitres) que sont posés les fondements de cette religion. A chaque messe on lit un Epitre et un passage de l’Evangile jamais un extrait de la Bible, qui n’est présente qu’à travers les chants, les Psaumes.
      La Bible est beaucoup plus présente chez les Protestants et elle occupe bien sûr toute la place de la foi juive.
      Mais soyons clairs. Le Judaïsme n’est pas une religion mais un culte tribal (comme son nom l’indique)
      Le Judaïsme ne cherche à convertir personne. L’étude des textes que vous mettez en cause sert à resserrer, à renforcer la cohérence d’une communauté, à lui apprendre à se protéger des dangers qui la menacent, pas du tout à s’ouvrir sur l’Universel
      Il se trouve que Jésus, fils de Marie, faisait partie de cette communauté. Comme pour nous tous à notre naissance, il hérite d’une histoire, d’une culture et d’une famille. Il va transformer cette héritage en un magnifique message universel formulé par Saint Jean !
      Cordialement.


    • jean-pierre castel 16 novembre 2012 00:17

      Je n’y avais pas réagi parce que ça me semble du même tonneau que St Augustin disant « Dieu persécute par amour »,Saint Thomas d’Aquin, disant : "Certes l’Eglise doit faire preuve de miséricorde en vue de la conversion de l’hérétique, [...] mais après un premier et un second avertissement [...] s’il se trouve que l’hérétique s’obstine encore [...] l’Eglise pourvoit au salut des autres en le séparant d’elle par une sentence d’excommunication, et ultérieurement elle l’abandonne au jugement séculier pour qu’il soit retranché du monde par la mort« [1], ou encore : »L’hérétique doit être brûlé."


      /www.agoravox.fr/spip.php?page=forum&id_article=125741&id_forum=3533321#_ftnref1" name="_ftn1" title="">[1] Citation complète : »En ce qui concerne les hérétiques, il y a deux choses à considérer, une de leur côté, une autre du côté de l’Eglise. De leur côté il y a péché. Celui par lequel ils ont mérité non seulement d’être séparés de l’Eglise par l’excommunication, mais aussi d’être retranchés du monde par la mort. En effet, il est beaucoup plus grave de corrompre la foi qui assure la vie de l’âme que de falsifier la monnaie qui sert à la vie temporelle. Par conséquent, si les faux monnayeurs ou autres malfaiteurs sont immédiatement mis à mort en bonne justice par les princes séculiers, bien davantage les hérétiques, aussitôt qu’ils sont convaincus d’hérésie, peuvent‑ils être non seulement excommuniés mais très justement mis à mort. Du côté de l’Eglise, au contraire, il y a une miséricorde en vue de la conversion des égarés. C’est pourquoi elle ne condamne pas tout de suite, mais "après un premier et un second avertissement", comme l’enseigne l’Apôtre (ndlr : Paul). Après cela, en revanche, s’il se trouve que l’hérétique s’obstine encore, l’Eglise, n’espérant plus qu’il se convertisse, pourvoit au salut des autres en le séparant d’elle par une sentence d’excommunication ; et ultérieurement, elle l’abandonne au jugement séculier pour qu’il soit retranché du monde par la mort". Summa Theologica, Secunda Secundae Pars, Question 11, l’Hérésie, article 3.


    • jean-pierre castel 16 novembre 2012 00:20

      Je crois vous avoir déjà répondu :
      Le Compendium du catéchisme de l’église catholique (2005) : « Dieu lui-même est l’auteur de la Sainte Écriture […] Les chrétiens vénèrent l’Ancien Testament comme vraie Parole de Dieu. Tous ses écrits sont divinement inspirés et conservent une valeur permanente. »


    • Furax Furax 16 novembre 2012 10:03

      Monsieur Castel
      Mais oui, mais oui...
      On apprend aux petits catholiques que, si ils ne croient pas que le monde a été créé en six jours, ils iront en enfer. Et qu’ils ne doivent pas manger de ruminants qui n’ont pas de sabots fourchus (péché mortel ! )
       smiley


    • jean-pierre castel 16 novembre 2012 10:51

      @Furax
      Dois-je comprendre qu’il y a d’un côté des cathos éclairés qui se foutent tant des Ecritures que des institutions catholiques, ne retenant en gros que le Sermon sur la Montagne et quelques passages de Jean, et de l’autre les derniers des Mohicans, quelques brebis rassemblées autour du dernier carré autour du Vatican ? D’un coté une sorte de « catholicisme pour tous », ou de « confédération du Sermon sur la Montagne », de l’autre le dernier bastion de la tradition ? Dans ce cas pourquoi les premiers ne se donnent-ils pas la peine de se distinguer explicitement des seconds ? Ce silence n’est-il pas aussi « complice objectif » que celui des communistes idéalistes qui restent ou restaient au PCF ?

      Puis-je vous rappeler que l’Eglise continue à affirmer « qu’elle existe pour évangéliser » (Evanbgelii Nuntiandi), et que si le Vatican se meurt, les idées abrahamiques exclusivistes poursuivent leur expansion mondiale ?

      Votre ironie n’est-elle pas de l’esquive ?


    • Furax Furax 16 novembre 2012 11:54

      Mais non, monsieur Castel la vie n’est pas si simple. Je suis, comme beaucoup, un catholique qui ne pratique plus et qui ne prend pas ses ordres au Vatican. Mais, dès que j’estime que cette église est attaquée de manière outrancière et obsessionnelle, comme dans votre cas, je me sens plus catho que jamais et je réagis. Voilà tout. Votre attitude est très contre-productive.
      Au revoir.


    • jean-pierre castel 16 novembre 2012 12:52

      Au lieu de dire « au revoir » - toujours l’esquive - , vous pourriez dire ce que devrait être selon vous une attitude constructive, « en vérité et en esprit », et expliquer pourquoi citer le catéchisme officiel suscite votre ironie, comment vous pouvez vous permettre de dire que le catholicisme n’est pas fondé sur la Bible (je n’oublie pas la Tradition, mais ne repose-t-elle pas à la base sur la Bible, toute la Bible comme Jésus lui-même se réfère constamment à l’AT ) ?


    • Furax Furax 16 novembre 2012 14:22

      Ca ne sert à rien nous tournons en rond, je vous l’ai déjà dit ::

      "Le Judaïsme ne cherche à convertir personne. L’étude des textes que vous mettez en cause sert à resserrer, à renforcer la cohérence d’une communauté, à lui apprendre à se protéger des dangers qui la menacent, pas du tout à s’ouvrir sur l’Universel
      Il se trouve que Jésus, fils de Marie, faisait partie de cette communauté. Comme pour nous tous à notre naissance, il hérite d’une histoire, d’une culture et d’une famille. Il va transformer cette héritage en un magnifique message universel formulé par Saint Jean !

      J’en reviens donc à mon premier post :
      "
      Il est sain de s’attaquer à la violence et à ses sources. Pour ma part, le principal reproche que je fais aux « monothéismes » est leur silence devant des massacres épouvantables comme celui de 14-18.
      LE commandement est : « Tu ne tueras pas ». A ma connaissance, il n’existe aucune exception à cette règle.
      Cela dit, vos articles comme beaucoup d’articles du même genre, permettent de se donner bonne conscience à peu de frais.
      L’Inquisition, quelle horreur ! Bien entendu. Plusieurs dizaines de milliers de morts(en six siècles). Mais, l’an dernier, les troupes françaises se sont livrées à un joyeux « carton » sur la population libyenne. 150. 000 morts, civile pour le plupart. Où étaient nos procureurs ? Se sont-ils jetés devant les chenilles des chars ?
      En ce moment même se déroule au Congo peut-être le plus horrible carnage de l’histoire de l’humanité (génocide, ethnocide, qu’importe), six millions de morts, massacre en cours sans aucune solution à l’horizon et nous dissertons gravement, ici, des erreurs des croisés ou des Inquisiteurs."

      Si l’au-revoir vous déplait à-Dieu l’ami !


    • jean-pierre castel 16 novembre 2012 18:24

      Excusez-moi, s’il y en a un ici qui se donne conscience à peu de frais, n’est-ce pas celui qui parle de 14-18 (se lamenter c’est bien, mais quelle leçon concrète tirez-vous des massacres de 14-18 ?), qui dérive sur les questions de politique économique ou internationale (en critiquant ce qui a été fait mais sans dire ce qu’il aurait fait quant à lui), mais qui en revanche fait l’autruche sur la religion qu’il cautionne, la seule chose pourtant dans tout cela dont il est vraiment responsable et sur lequel il pourrait agir.
      Bref plutôt une grande cause lointaine et glorieuse (mort au profit !) et qui de surcroît ne vous engage à rien, plutôt que de balayer devant sa porte. Thème et variation sur la paille et la poutre.
      Enfin, j’aurais appris de cette discussion que « la Bible ne représente rien dans la foi » de quelqu’un qui se dit catholique. A méditer...


  • Claude Courty Claudec 13 novembre 2012 21:35

    De quoi d’autre s’agit-il ici que de la loi du plus fort, dans tous les domaines, y compris religieux, mono ou poly théistes ?

    La violence : physique, verbale, mentale, n’est-elle pas le moyen d’imposer leur point de vue, dont ont usé de tout temps et en tous lieux ceux qui ont été en position de le faire ?
    Et l’espèce humaine n’est pas la seule concernée.

  • magma magma 14 novembre 2012 08:09

    je pense qu’il faut simplement dire que les religions ont été inventés au seul but de prendre le pouvoir, on peut le prendre par le capital : libéralisme, l’oppression : le communisme, un être supérieur commanditaire excusant tout : un dieu. ou même les 3 a la fois.

    Dieu simple ou multiple c’est bien pratique. Vous tuez au nom de dieu et vous serez absoud de vos péchés, et comme les gens au 21 eme siecle sont encore assez stupide pour croire en un ou plusieurs fieu mais pas au marsupilami au roi babar ou aux petits gris, on est pas sorti de l’auberge


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 09:21

      @Magma
      « Les religions ont été inventés au seul but de prendre le pouvoir, »
      Non, pas du tout, c’était une conception courante au XVIII et XIXème (Marx, ...) mais aujourd’hui dépassée avec les progrès de l’anthropologie. La plupart des anthropologues sont maintenant d’accord pour dire que la religion, ou plutot le religieux (rituels et sens du sacré) , ont été à l’origine de toute civilisation, de façon assez comparable au langage. Elles ont probablement été à l’origine du politique plutot que l’inverse s’il faut mettre une relation d’antériorité entre les deux.


  • magma magma 14 novembre 2012 10:59

    À partir du moment où quelqu’un revendique que l’on croit en lui en ses théories ses doctrines, il se pose en temps que forme de pouvoir. S’il part de rien, il ne peut revendiquer au départ en partant de rien, c’est a partir du moment où il est un groupe suffisant qu’il peut alors s’inscrire par la force.

    C’est par exemple tout le danger de la transition actuelle de l’Islam en France. Nous en sommes à la phase cruciale, celle ou la religion peut déjà s’affirmer en temps que victime et acteur de la politique, avant de devenir incontournable dans nos lois. Le processus n’est pas toujours le même, mais la finalité en est la même. S’il y eu une forme d’évolution sociale ou culturel c’était avant et jamais la religion ne supplante le modernisme, c’est l’inverse qui et qui doit prédominer. La grande crainte de l’émergence actuelle c’est justement le coté liberticide et obscurantiste de l’Islam dans lequel les chrétiens espèrent s’engouffrer, et quand le monde des athée seront une minorité, ils pourront se battre entre eux.

    Tout croyant me fustigera, mais c’est normal puisqu’il est sous l’emprise d’une entité paranormale issue d’une secte plus importante que les autres. Il ne peut échapper a cet endoctrinement de l’esprit


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 16:34

      @Magma
      Non, vous ne pouvez pas dire que dès que vous affirmez une idée, c’est une volonté de prise de pouvoir, sinon vous vous interdisez tout dialogue !
      La question est plutôt celle de la tolérance : il y a des attitudes plus tolérantes que d’autres : l’agora grecque était un exemple d’acceptation du pluralisme, de la contradiction, d’où a émergé d’ailleurs la science, la philosophie, la démocratie. Et pourtant les Grecs n’ont pas cherché à éradiquer ni les dieux ni leur mythologie, qui n’ont pas non plus massivement comabttu les philosophes. Donc il y a des religions plus totalitaires que d’autres.
      Un autre exemple d’intolérance due à la religion (j’ouvrirai peut-être un nouveau fil sur la question) est l’opposition à la science : je n’ai pas trouvé d’exemple d’une opposition durable à la science (hors médecine) autre que dans certains courants monothéistes (le catholicisme, les fonfamentalismes américains, l’islam depuis le XIIIème siècle)

      Enfin le discours anxiogène sur l’islam à mon avis se fourvoie. D’abord si vous craignez que les européens« de souche » ne soient submergés quantitativement par les musulmans, à ma connaissance les groupes religieux qui ont la plus forte dynamique démographique en tout cas en France (et aux USA bien sûr, mais aussi au Brésil, etc ;) sont les mouvements protestants d’origine américaine (évangéliques,...). Autrement dit, le monothéisme (juif, chrétien ou musulman) contient naturellement un risque de dérive fondamentaliste, et le fondamentalisme qui croit le plus vite (ce serait à vérifier, interrogez des démographes comme Hervé Le Bras ou ’Gérard-François Dumont -je les ai entendus, mais n’a pas de document sur la question)’ et qui a le plus fort potentiel d’influence sont les chrétiens fondamentalistes (cf leur influence notamment aux USA), plus que les musulmans (qui ont une influence il est vrai sur le pétrole du Moyen Orient)


  • Renaud Delaporte Renaud Delaporte 14 novembre 2012 12:21

    « la frontière entre catholiques et protestants traversait peu ou prou toutes les régions françaises et tous les milieux. »

    Non. Le catholicisme était le parti des propriétaires terriens qui détenaient la réalité du pouvoir, mais pas les finances, le protestantisme était le parti des commerçants, des guildes et des entrepreneurs qui détenaient les finances, mais pas le pouvoir.
    L’histoire des religions en Normandie est un cas d’école tout à fait explicite à ce sujet.


  • COVADONGA722 COVADONGA722 14 novembre 2012 12:44

    @Renaud Delaporte bonjour intérressante analyse mais quid de la nombreuse noblesse 
     huguenote y compris sa partie militaire qui aideras in fine la Prusse a se construire .



    Asinus : ne varietur


    • Renaud Delaporte Renaud Delaporte 14 novembre 2012 14:54

      En Prusse, le pouvoir était aux mains des Guildes. Une part de la noblesse était aussi commerçante. Le protestantisme est d’ailleurs parti d’Allemagne et de Suisse.
      Prusse commerçante, huguenote, vs Bavière agricole, catholique, cela reste cohérent. Les grandes trames restent visibles.
      Maintenant, je ne ferais pas dire à l’histoire, que je connais mal, ce qui convient à telle ou telle théorie que je veux défendre. Je peux juste démentir une volonté d’affrontement entre cathos et protestants pour de seules questions religieuses. Il a toujours existé une raison sous-jacente.
      Même les croisades avaient de bonnes et solides raisons économiques : la confiscation par les Turcs Seldjoukides des bénéfices de la route de la soie au détriment des Italiens (d’Amalfi)... et des shérifs arabes (du Caire). Arabes qui ont reçu d’abord les croisés comme des libérateurs (chuuuut, c’est tabou), avant de vite déchanter face à la barbarie occidentale.
      Comment demander à un Bourguignon de se battre pour Amalfi ? De la même façon, on va foutre le feu au Moyen-Orient pour l’idée que nous avons de la démocratie, qui revendique dans l’imaginaire collectif la dimension transcendantale qu’occupait le monothéisme. Comme cela ne suffit pas – et cela ne suffira jamais – on refait le coup de l’appel au Pape (qui demande que l’on pose les armes, on voit bien qu’il n’est plus de son époque) et on convoque des évangélistes trop contents de passer à la télé. Si y des dégâts, c’est pas à cause du pétrole, c’est juste la faute au monothéisme.

      Le dieu jaloux actuel, c’est le dollar.


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 17:05

      @Renaud Delaporte
      Merci pour ces compléments très intéressants. Y a t-il d’ailleurs un texte simple, je veux dire pas pour un passionné d’histoire, mais grand public, sur ces questions ?
      Vous dites donc que les enjeux socio-poiltico-économiques étaient fortement présents dans les guerres de religion européenne (ce qui est somme toute rassurant pour un esprit rationnel. Encore que, me semble-t-il, on ne comprenne pas encore pas encore bien la rationalité, les causes rationnelles de la guerre de 14 ?) . Mais quid de la dimension religieuse : n’était-elle que pur habillage, simple marqueur identitaire parmi d’autres (comme par exemple aujourd’hui en Irlande du Nord), ou les conflits auraient-ils pris une tournure totalement différente sans la dimension religieuse ?avec mes excuses pour cette question d’histoire-fiction ; mais puisque vous pouvez évaluer le poids des raisons socio-économiques, le pouvez-vous pour les raisons religieuses ? Dit plus simplement, faisaient-elles partie des causes (plurielles) déterminantes ?


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 17:09

      Pour info, autre élément :

      El Kenz David estime que "les deux tiers des massacres catholiques sont le fait de l’action autonome des citadins." in Les massacres au temps des guerres de Religion, Encyclopédie des violences de masse, Sciences Po, Paris 2010, disponible sur

       <http://www.massviolence.org> - ISSN 1961-9898 - Jacques Sémelin


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 17:12

      Pour info, autre élément :

      El Kenz David estime que « les deux tiers des massacres catholiques sont le fait de l’action autonome des citadins. » in Les massacres au temps des guerres de Religion, Encyclopédie des violences de masse, Sciences Po, Paris 2010, disponible sur
       <http://www.massviolence.org&gt ; - ISSN 1961-9898 - Jacques Sémelin


    • COVADONGA722 COVADONGA722 14 novembre 2012 19:00

      @ Renaud Delaporte merci de votre reponse argumentée.

      Asinus : ne varietur


  • easy easy 14 novembre 2012 12:59

    Il y a les religions et il y a ce que les gens en font.
    Et quand ils veulent tuer, ils savent se servir des prétextes de religion

    Mais il est indiscutable que les religions monothéistes où il est question d’un seul dieu jaloux sont celles qui offrent le meilleur prétexte.


    Qu’est au fond une religion au moment où elle sert de prétexte pour tuer ?
    A ce moment là, elle comporte deux aspects :
    Ses aspects fondamentaux et ses aspects de cursus, de parcours.
    Mettons que ses aspects fondamentaux soient à peu près fixes ou gelés (surtout s’ils sont écrits). Alors ses aspects d’application historique ressortent très vivants, changeants.

    Celui qui a envie de massacrer peut utiliser soit les aspects fondamentaux d’une religion soit ses aspects vivants. Il peut dire par exemple « Ces méchants ont persécuté les nôtres en les jetant aux lions. Nous devons nous venger »
    Plus proche de nous, la Shoah, élément historique du judaïsme, peut être utilisée de manière principale par rapport aux éléments fondamentaux de cette religion.


    Même lorsque des éléments historiques d’une religion ne sont pas évoqués au lancement d’une croisade, même lorsqu’il n’est brandi que ses fondamentaux, chacun a en tête quelques éléments historiques et ça ancre ses justifications à participer au massacre.

    Il y a effectivement des religions à fondamentaux très hégémoniques ou impérialistes et ces religions ont immédiatement provoqué des violences lesquelles ont alors constitué des élements historiques valant ensuite prétexte à entêtement, vengeance, déni...Mais que ces élements soient ou non évoqués lors d’un ordre de guerre, ils sont de toutes manières enseignés et connus et participent donc explicitement ou implicitement aux endurcissements des participants au massacre. 


    Serait réellement tolérante une religion qui interdirait très explicitement d’être utilisée de quelque manière que ce soit pour tuer ou réduire qui que ce soit.
    Or ce genre de religion, il s’en est proposé tous les jours entre amis mais ça n’aura jamais intéressé grand monde au-delà. (Le bouddhisme est toutefois proche de cette voie)

    Pour qu’elle ait des chances de succès, une religion doit soit se dire jalouse soit ne pas interdire la jalousie. Une religion qui prônerait d’abord l’anti jalousie serait vouée à l’échec.





    La paramécie, à mon sens, ne pense qu’en Toi-Moi (Elle et l’eau, elle et la bactérie qu’elle mange, elle et le rocher)
    Mais déjà le dindon, le grillon, le suricate, pensent en Toi-Moi-Lui. Ce qui ouvre la voie à la jalousie. Disons que la reproduction sexuée ouvre à la jalousie.


    Nous, les Hommes, nous avons certainement encore des relations dyades (Moi et le rocher contre lequel je viens de me cogner) Mais à l’instant même où je pense « Quel con ! », que l’insulte s’adresse au rocher ou à soi-même, nous utilisons les mots (nous entendons ces mots en notre tête même sans les prononcer)
    Or les mots sont issus de la relation plus-que-dyade, de la relation en triangle, en polygone.
    Dès que nous pensons « Oh que cette fleur est belle, Oh que j’ai soif » nous ne sommes déjà plus dans une relation absolument dyade, immédiate ou directe avec l’objet en question, nous sommes dans une relation médiate. Nous sommes encore immédiatiques pour partie mais dès que nous pensons notre relation, nous sommes médiatiques. Alors, raison de plus, dès que nous parlons, et plus encore dès que nous écrivons, nous sommes très médiatiques.

    Et comme il ne peut pas y avoir de relation à trois (ou plus) sans jalousie...


    Les religions, parce qu’elles ont forcément utilisé le canal des mots (qu’ils soient parolés ou écrits) sont médiatistes. Aucune ne peut nous renvoyer à l’immédiateté de la relation dyade Toi-Moi.
    Toutes les croyances ou religions exacerbent et majorent la relation à trois ou plus. Aucune ne nous dit « Ne considère que ce que tu as là, en face de toi et oublie tout le reste, ne pense même pas, ne compare même pas. Contente-toi de ce qui se présente à toi. Contente-toi de l’immédiateté »

    C’est pourtant dans l’immédiateté absolue qu’on ne ressent plus le temps qui passe, qu’on ne ressent plus la durée, qu’on ne ressent ni la perspective de mourir ni celle de l’éternité.

    C’est en tous cas cela que vit la paramécie (et elle le meurt effectivement pas, elle se divise, devient deux, devient huit...Chacune incarne à la fois l’ancêtre, le père, la soeur, la fille...)

    Ressentir, seulement ressentir, fait disparaître le temps (Il nous arrive, ici et là, de vivre ces situations mais elles sont alors, par essence, indicibles sur le moment)

    Penser ce qu’on ressent fait surgir le temps, conduit à comparer et induit la jalousie, donc le meurtre.


    Comme nous pensons beaucoup, comme nous sommes très médiatiques (nous ne savons pas nous présenter, nous identifier, même in petto, sans utiliser de mots) nous avons des jalousies au regard des perspectives car nous mettons alors en perspective. Nous avons donc envie de tuer (de mille manières, l’incarcération en est une)

    Il nous est possible de bloquer en nous notre envie de tuer, d’écarter, d’éliminer (tous les moustiques, toutes les araignées, tous les cafards, tous les méchants..) en installant en nous des tabous anti-crime.

    Ces tabous pourraient fonctionner.
    Mais si ces tabous nous interdisent de penser « Je vais l’égorger » ils n’interdisent pas de penser et même de dire « Ah la la qu’il m’emmerde ce type qui tire toute la couverture à lui » 
    Les tabous nous bloquent pour une part mais ils laissent la voie libre à toutes les pensées et considérations qui s’en approchent. Alors nous nous autorisons des pensées limites.
    « Bon, OK, je ne vais pas l’égorger mais je vais lui couper la main » 
    « Je ne vais pas le tuer mais je vais participer à sa lapidation en ne jetant sur lui qu’une petite pierre »
    « Je ne vais pas le tuer ni voler ses biens, je vais seulement brûler sa maison »


    Ainsi le biais du collectif, celui même par lequel est arrivé le mot, est celui qui permet le mieux de massacrer sans se sentir transgresseur du tabou interdisant de tuer.
    Comme les religions se proposent de former et de dessiner collectivité ou masse, elles nous médiatisent, elles nous installent des tabous et nous offre les moyens de les contourner de manière collective.

    « Je n’ai pas le droit de tuer ou spolier de manière individuelle mais la collectivité peut le faire à ma place. A moi de la manipuler alors ».
     
    C’est ce qui fonde nos lois religieuses ou laïques.

    La collectivité n’ayant pas de tabous, elle nous fascine et, par imitation-introjection, elle nous médiatise encore plus que par les seuls mots et idéations qu’elle nous livre déjà.
    La communauté surpense, surdit, surénonce, suragit et surcondamne. Chacun le sait, chacun en a peur et chacun s’y blottit.



    Plus tard, en devenant des smartphones, en devenant la Toile, (plus de corps en viande, même plus de corps sous forme de robot, toutes les émotions obtenues de manière artificielle et illimitée) nous ne connaîtrons plus la jalousie. Peut-être y aura-t-il encore des gens en viande qui se jalouseront à la surface de la Terre mais d’autres seront dans le sol, en sorte de mycélium, invisibles et éternels.

    Intuitivement, il me semble que ce passage de notre état en viande de 70 kilos à notre état à la fois nanométrique et diffus ne se fera pas au terme d’une progression technologique linéaire, selon la progression actuelle (qui va encore trop en direction des droïdes) mais au terme d’une brusque reconsidération des choses. Je veux dire que pendant peut-être 50 ans on va continuer d’aller en direction droïdique lorsque soudain, certains découvriront une voie nanométrique qui ressortira vraiment révolutionnaire et en peu de temps, chacun s’y sera converti.


    • jean-pierre castel 14 novembre 2012 17:39

      @esay
      Superbe texte, bravo et merci ! A méditer plus longuement. Ma première réaction : oui à la notion de médiation, qu’on retrouve effectivement avec les mots, et aussi avec les divinités. La relation triadique rappelle bien sûr la théorie mimétique de Girard.
      Mais vous dressez là la toile de fond ; Ma question est plus à la surface de cela : les religions monothéistes n’exacerbent-elles pas cette tendance à la jalousie ?
      D’ailleurs dès que les divinités sont personnalisées, elles deviennent par là même mimétiques, irivalitaires, comme^nous tous. N’empêche qu’une seule religion a cru bon d’exprimer cette jalousie, et même d’en faire sa fondation, jusqu’à que son dieu éradique tous les autres dieux.
      Une telle religion qui intronise à ce point la jalousie, sans la critiquer directement, n’est-elle pas intrinsèquement mauvaise ?
      La tolérance religieuse était implicite chez les Grecs, elle est explicite dans l’hindouisme et le bouddhisme. La construction de la personne, du sujet, ne peut pas ne pas en avoir été affectée.
      Je ne connais pas de texte qui compare cette construction du moi dans les contextes monothéistes et polythéistes. J’ai le soupçon d’une hypertrophie du moi monothéiste.

      Autre dimension à explorer : médiation et psychose. La psychose n’est-elle pas liée à l’absence de médiation ? On a souvent parlé de la paranoïa des prophètes monothéistes. Qu’en pensez-vous ?
      Merci d’avance de votre aide dans ces domaines que je ne maîtrise pas


    • easy easy 14 novembre 2012 23:53


      «  »«  » les religions monothéistes n’exacerbent-elles pas cette tendance à la jalousie ? «  »« 
      Oui.


       »«  » Une telle religion qui intronise à ce point la jalousie, sans la critiquer directement, n’est-elle pas intrinsèquement mauvaise ? «  »« 

      C’est effectivement un point très important.
      Mais ce n’est peut-être par la clef au sens où les autres dieux n’ont jamais interdit la jalousie aux hommes et qu’ils se sont montrés agressifs entre eux.

      Sur ce plan la grosse différence avec le dieu d’Abraham c’est que les autres dieux, tout en se chamaillant, n’ont jamais semblé vouloir exterminer les autres dieux pour se retrouver seuls. Les dieux des païens n’ont souvent pas grand chose à faire des hommes et ne les considèrent pas comme leur production. Les dieux païens engendrent des dieux ou à la rigueur des demi-dieux, pas des mortels.
      Les Païens sont à leurs dieux ce que les rémoras sont aux requins.

      Un Romain avait donc en tête : Moi+mon esclave+mon ami / Jupiter+Vénus+Mars. Soit deux groupes au sein desquels règnent les relations triangulaires, polygonales.

      Le Romain, n’accède pas directement à Jupiter, ni même à Hercule. Il ne peut accéder à eux que par l’intermédiaire d’un médium et encore il n’est pas certain que ce dernier parle vraiment au dieu. Au fond, le médium n’est sollicité que pour deviner l’avenir. Or Il n’y a quasiment qu’Apollon qui sait l’avenir ; pas les autres dieux.

      Les Romains hésitent peu à dire qu’ils sont descendants de dieux ou demi dieux. Mais aucun n’a l’idée de voir un dieu et encore moins de papoter avec. Pas d’apparition, pas de papotages privatifs. Ca fait qu’aucun Romain n’imagine avoir de rapport privilégié avec un quelconque dieu. (A moins d’en incarner carrément un en manière de pharaon)

      Quand il a en tête son esclave et son ami, un romain peut se dire
        »Oh punaise, j’ai l’impression que mon ami a le béguin avec mon esclave« Il est alors jaloux mais il s’agit d’une jalousie banale, comme celle d’un lion ou d’un cerf.
      Un Romain ne peut penser  »Oh punaise, j’ai l’impression que mon ami a une relation privilégiée avec Vénus«  

      Les païens ne concevant aucune relation privative avec un dieu, ils n’ont aucune envie d’arracher la chemise d’un dieu, de se disputer le privilège de lui laver les pieds ou de lui masser le dos.




      Les abrahamistes ont en tête : Moi+mon esclave+mon ami / Dieu.

      Or leur dieu n’a rien d’autre à foutre que de regarder les hommes et leur parler.

      Puisque Dieu parle et qu’il ne parle pas à d’autres dieux, il parle donc forcément aux hommes.

      Un abrahamiste peut donc concevoir de s’adresser directement à dieu. Il peut le voir, il peut l’entendre, il peut coucher avec, il peut le boire, le manger...
      De sorte qu’il peut penser »Punaise, ya mon ami qui semble avoir une relation privilégiée avec dieu alors que moi je ne l’ai même pas encore vu« 
      Sa jalousie est alors spéciale, métaphysique ; en rien comparable à celle qu’éprouve un cerf.
      C’est une jalousie irréductible à la raison (Car l’ami ne peut pas prouver qu’il n’est pas en relation avec dieu)

      Et puisque l’abrahamiste peut concevoir que son voisin papote avec dieu, il peut aussi concevoir que son voisin papote avec le diable

      C’est la religion de l’hystérie solitaire, sourde, profonde.  »Ha ha Dieu est avec moi mais il m’a dit de n’en rien dire«  

      En fait chacun se sent habitable, habité, mais aussi bien par dieu que par le diable.





      C’est de l’abrahamisme et de lui seul que peuvent surgir des déclinaisons en »Bin moi, j’ai reçu la visite des Martiens"
      C’est dans le pays des Soubirous que surgissent les OVNIS.

      L’abrahamisme est la seule réligion où il est permis de délirer et conseillé d’affabuler avoir vu un mec marcher sur l’eau.


      Au Vietnam, 50 ans plus tôt, il y avait bien 10% des gens qui disaient avoir vu des fantômes (soit spectre blanc soit personne comme jamais décédée).
      Mais jamais personne n’a prétendu avoir vu le moindre dieu, la moindre forme divine, le moindre dragon. (C’est un endroit où toutes les religions du monde sont passées et où il y a tout de même 5% de chrétiens)


      Les Romains paiens n’étaient pas fétichistes. Où ils se rendaient, ils érigeaient un temple à leur dieu, y plaçaient une statue toute neuve et ça le faisait.

      Les Chrétiens sont fétichistes. Le moindre bout de d’ongle, de clou, de croix, de suaire, est pour eux déjà divin. 

      Louis IX, Saint Louis, a fait construire la sainte chapelle pour 40 000 livres tournoi. Il voulait y placer la couronne d’épines achetée 135 000 livres

      Le monde abrahamique est un monde de reliques dont il est très jaloux.
      Mais c’est par ce biais que les villes abrahamistes, dont Paris, ont fini par supplanter Rome.





      Ici, il se répète que les schizophrènes sont 1% partout dans le Monde.
      Possible, mais je n’ai jamais vu à partir de quelle enquête on en a déduit cette constante.
      Je ne serais pas du tout étonné qu’une véritable enquête prouve qu’ils n’existent que chez les gens ayant entendu parler des concepts abrahamistes.


    • jean-pierre castel 15 novembre 2012 00:10

      Merci easy, je me sens compris !
      Pour info, je n’ai pas trouvé d’étude
      - ni d’historiens sur la comparaison des violences entre monde abrahamique et non abrahamique
      - ni de psychologues sur une hypertrophie du moi abrahamiste
      - ni de psychiatres sur la fragilité du moi qui devrait logiquement être liée à cette hyertrophie, par exemple en termes de fréquence psychose ou de suicides (j’ai lu récemment que le record serait chez les japonais, qui sont pourtant tout sauf monothéistes !) ?
      Voyez-vous des possibilités dans ces 3 directions ?


    • easy easy 15 novembre 2012 13:39

      La violence me semble irréductible tant que nous conserverons forme biologique. Elle disparaîtra quand nous deviendrons des smartphones en allure de mycélium, quand nous vivrons dans la terre.

      Il y a d’abord la violence vécue dans l’enfance : gifles, fessées, triques, bâton, ces choses ) potentialité mortifères soutenant d’autres formes de violences.

      Ces violences éducatives ont deux aspects possibles :
      Soit elles sont une des grammaires du Moi-Toi
      (Le gamin a marché sur le pied de son éducateur qui lui a alors collé une baffe. C’est à peu près ce que vivent les lionceaux).
      Soit elles sont une grammaire du Moi-Toi-Lui. (le gamin a mal parlé à la maîtresse alors sa mère lui en colle une. Aucun animal ne vit cela)

      Je ne vais pas développer ici toutes les incidences de chacun de ces deux cas.
      J’en dirais seulement que la violence en Moi-Toi, surtout si aucun mot n’est mis dessus (aucune forme de médiation) est facilement gérable par l’enfant car toutes les relation dyades sont gérables d’un point de vue intellectuel (Ce qui fait que, dans la nature, les bestioles ne semblent pas psychologiquement tourmentées).
      Infiniment plus complexe à gérer, à digérer, est la violence en Moi-Toi-Lui car Lui est indéfini et on peut tout lui faire dire. Le Lui, le médiatique, ouvre la porte à la manipulation, au mensonge. (Deux êtres humains sur une île déserte = zéro mensonge)




      Je passe à une autre problématique.
      A sa naissance, l’enfant aurait besoin de la relation Moi-Toi avec sa mère (Il est d’ailleurs possible, comme Freud l’a suggéré, qu’il ne sache même pas distinguer Moi de Toi dans ses premiers mois). Raison de plus alors pour que la mère montre clairement à l’enfant ce qu’est son Moi, qu’elle se montre à lui de manière très individuelle. Ce qui est fort difficile ne serait-ce que si elle a d’autres jeunes enfants puisqu’elle doit dire à l’un « Je ne suis pas disponible à toi parce que je dois l’être aussi pour ton frère » (Cet enfant perçoit certes que sa mère est multiple mais que son frère l’est aussi).
      Seul un enfant aîné ou unique a quelques chances de connaître une relation immédiate avec une mère entièrement disponible quand il l’interpelle.

      S’il a la chance de connaître la relation immédiate avec sa mère, ce n’est qu’ensuite ou accessoirement que l’enfant apprendra la relation polygonale Moi-Maman-D’autres.

      Il y a peu d’enfants ayant bénéficié d’une relation immédiate avec leur mère (ou avec leur père se présentant à eux également de manière très individuelle). S’il en existe, ces enfants, une fois devenus adultes, ne seront attirés que par les relations dyades, de personne à personne et supporteront mal que leur interlocuteur se présente à eux encombré de Nous (par exemple s’il tripote tout le temps son téléphone). Ils ne se sentiront pas à l’aise face à un auditoire. On dira d’eux qu’ils sont timides, introvertis, égoïstes. En réalité, ce sont là des gens se contentant de relations très simples, très immédiates, qu’ils savent bien gérer, et n’ont aucune envie de faire quelque révolution que ce soit. Ce sont des gens qui peuvent être comblés par une seule personne, pourvu qu’elle sache se présenter de manière vraiment individuelle. Dans le film Le rayon vert, on assiste, à la fin du film, à la rencontre entre deux personnes de ce type.



      A l’opposé de ces cas, d’autres enfants ont, dès les premiers mois, une mère s’offrant à eux non pas en tant que personne unique, autonome, individualisée, mais en sorte de Nous, en sorte de Lui, en sorte de On. Ces enfants ne parviendraient jamais à avoir en face d’eux un Toi vraiment clair, stable, défini, franc.
      Or seules les relations dyades sont gérables.
      Ces enfants à mère indéfinie ou médiates ne parviennent donc pas à acquérir clairement ce qu’est la relation dyade, ils ne parviennent pas à gérer mais en ont envie. Ils veulent percer le mystère de l’immédiateté tout en ignorant ce que c’est.
      Une mère indéfinie serait par exemple une mère qui, quand elle regarde et s’occupe de son bébé, le voit en sorte de Jésus (Pour faire bonne mesure, elle l’aurait appelé son enfant Gabriel). Alors qu’elle est seule avec lui dans la pièce, elle se comporte comme si elle était accompagnée de Dieu ou de Jésus. Si par exemple l’enfant tente un geste en Moi-Toi sur elle, elle va lui répondre comme si elle était observée, censurée par quelque autre autorité, par quelque autre présence. Les réactions de la mère ne seront pas logiques de l’immédiateté « C’est bizarre -se dit l’enfant- je la caresse mais elle se recule alors que moi j’apprécie les caresses ». Il doute alors de ses propres sensations et se demande s’il ne devrait pas lui aussi reculer aux caresses. Je vois là une porte ouverte aux graves troubles de la personnalité.



      Dans les cas les plus fréquents, l’enfant perçoit sa mère tantôt individuelle, tantôt accolée à quelque autre Personne.
      Une mère ordinaire peut dire « J’aimerais bien que tu me caresses mais patati patata, la société, ceci cela » . En ce cas, les choses ont beau se présenter à l’enfant de manière médiatiques, il perçoit tout de même qu’il n’est pas fou. Il a tout de même confiance en ses propres sensations « OK, maman et moi apprécions tous deux les caresses mais, la société... ». Ces enfants n’ont pas peur de la société. Sans jamais l’apprécier entièrement, ils trouvent solution en entrant dans un sous groupe, dans une bande, dans une église

      Ces enfants du lot commun, vont interpeller chacun en considérant qu’il est en relation avec quelque tiers. Ils tiendront compte de l’importance du tiers et traiteront les choses en médiateté tout en recherchant qu’elles délivrent une sensation d’immédiateté. C’est ce qui fait par exemple les gens qui cherchent à rassembler un large public avec qui ils éprouvent, sur scène, une sentation immédiate. C’est ce qui fait le charme de la télé, des émissions en direct si possible. C’est ce qui fait le charme du théâtre, du cinéma, des concerts, de Woodstok, des manifs, des messes, des émeutes, des guerres.

      Ce n’est pas le côté pacifique ou agressif de cette messe qui importe mais son côté messe.

      L’inconvénient alors c’est que cette sensation immédiate qu’on cherche à obtenir par le biais médiatique est complexe, coûteuse, et qu’elle n’offre donc pas de sensations physiques.
      Pas de gratification simple par quelque baiser, coït ou caresse.
      Même les formules en tournantes, en libertinages ou échangistes ne résolvent pas ce besoin d’immédiateté physique. Il reste toujours une frustration car on ne parvient pas à faire l’amour avec la masse. Quand un chanteur de scène se jette dans le public censé le rattraper, il prouve qu’il recherche ce contact immédiat, donc physique, avec la masse, avec sa mère-masse.

      Car ce n’est que dans le sexage avec une personne hyper autonome et sans mot dire, qu’on ressent l’idéal de l’immédiateté.

      La sensation physique qui manque à ceux qui cherchent leur solution au travers des messes doit alors être intellectualisée. En envoyant une troupe attaquer, soigner, panser, nourrir, affamer, réduire, sauver, une autre, ces soiffards peuvent davantage ressentir, de manière intellectuelle et par procuration, cette immédiateté physique qui leur manque avec la mère-masse.





      Je reviens maintenant à la violence éducative par laquelle j’avais commencé. 
      Bien qu’elle semble avoir comme problème la violence, cet élément ne pèse pas grand chose par rapport à l’autre élément qui est l’obtention d’une satisfaction immédiate soit par la relation dyade (simple, économique, physique) soit par la voie médiatique (complexe, énergivore, intellectuelle, insatiable et ouvrant aux notions d’infinis)

      Si la violence éducative que vit un enfant ne pèse déjà pas grand chose dans son orientation, la violence qui est inscrite dans les religions ne pèse rien du tout. 

      Il y a de la violence d’écrite dans les Livres. Mais cette violence est hyper minuscule par rapport à la violence réelle, vécue de jour en jour par un enfant, un ado, un adulte et sur tous les plans. 

      Sans aucun Livre il y aurait de la violence de vécue tous les jours par chacun et chacun y verra repère, solution pour ressentir l’immédiateté physique avec les tiers (avec ce qu’un individu transporte de tiers en lui) 

      Si l’on croit que les Livres ont été inventés pour répandre la paix sur le Monde, on ne peut que s’offusquer qu’ils comportent des indications de violence. 
      C’est une méprise. Ces Livres n’ont jamais été inventés pour faire la Paix sur terre. Certes, ils semblent viser essentiellement l’amour, l’immédiateté amoureuse avec quelque Tiers commun (ce n’est pas du tout le cas du bouddhisme) car ce que chacun recherche c’est évidemment l’immédiateté douce avec quelqu’un. Il était donc logique que les Livres prétendassent à l’Amour. Mais ils ne doivent en aucun cas exclure la violence car ce n’est in fine que par la violence qu’on parvient à ressentir cette immédiateté relationnelle avec la masse. 


      En parcourant un champ de bataille jonché de cadavres, de notre camp et de l’autre camp, on est certain, absolument certain et pour toujours, qu’on a établi un contact direct Moi-Toi en toute exclusivité. Pendant le combat, aucun soldat ne s’est occupé de lire ses SMS. Chacun en est certain, il a eu son interlocuteur tout à lui réservé.

      Le moment même de la bataille, pour ceux qui ne sont pas enrôlés de force, est un orgasme.

      Et la gratification, au sortir d’une bataille ? 
      Bin elle existe aussi. Elle n’est certes pas partagée par le camp perdant. Mais pour le chef du camp gagnant, pour ses soldats survivants aussi, c’est près de l’orgasme, en version intellectuelle. 
      A l’entrée d’une bataille, chaque camp est déjà certain de jouir d’une immadiateté extraodrinaire et à vie avec ceux d’en face, avec les siens aussi, et se voit une chance sur deux d’en jouir encore longtemps après. D’où les arcs de triomphes montés sur faits de meurtres.

      Ainsi, parce que rien n’est aussi pertinent en termes de relations immédiates avec une masse qu’une Saint Barthélémy, il y en aura encore. Les Livres ne servant à rien sinon de temps en temps comme prétexte, comme support rhétorique.

      Les trois entretuages que les Français ont vécus, 1789+Terreur ; 1830 et 1848 se sont produits sans besoin des Livres. 
      Et chacune de ces vives relations sont en mémoire de tous. Ce vécu est bien plus important que tout ce que peuvent raconter les Livres.

      Toutes les études qu’on pourra faire sur l’incidence des religions seront à côté de la plaque. Le seul fait d’avoir vécu un véritable bain de sang compte mille fois plus.


      (Même une guerre dont chacun saura qu’il n’en sortira pas vivant, est intéressante à vivre pour tous les soiffards de la relation immédiate par le biais média)



      La longueur de mes textes offre à mes lecteurs le temps de s’imprégner de ce que je met en relief afin qu’il ressente la chose. J’espère que vous aurez eu le temps nécessaire pour commencer à ressentir la jouissance qu’on peut tirer d’un baiser de la mort.

      Si vous avez commencé à entrevoir cette jouissance, vous comprendrez vraiment que les Livres n’y sont pas pour grand chose dans l’état du monde et qu’il ne servirait à rien d’écrire un Livre tout en bisous.






      En attendant que nous soyons devenus un mycélium souterrain, il n’y a qu’un moyen de changer cette situation et elle consiste à ce que les parents s’offrent en accès immédiat à chacun de leurs enfants.

      Or, de nos jours, un père et une mère, se montrent à leurs enfants en étant encombrés de Twitter et autres Facebook. Alors dès leur plus jeune âge, les enfants recherchent la relation immédiate ailleurs par le biais médiatique. Il est toujours possible de se contenter pendant longtemps de la jouissance très intellectuelle que procure la sensation d’immédiateté via le médiatique et en version I Love You.
      Mais il débouche sur quoi cet I Love You virtuel à part d’avoir allumé tous ensemble notre briquet en nous balançant ?

      Dès qu’une occasion se présente de ressentir la plus puissante des sensations qu’offre une Saint Barthémémy bien saignante, ou ne serait-ce qu’une manif bien chaude, les soiffards d’immédiateté n’hésitent pas. Le hooliganisme en est un des mille avatars.


      Vérifiez, les plus grandes saignées se sont produites en internen entre soi. 
      La relation immédiate, c’est avec ses parents, avec les siens qu’on la recherche. Aucun Parisien ne fantasme d’une relation immédiate avec un Massaï. 
      C’est avec les nôtres que nous recherchons la relation immédiate. Le massacre interne est alors la meilleure solution.

      Les pays arabes n’ont pas eu l’occasion de se toucher immédiatement depuis des siècles. Ils n’ont fait que subir nos touchages, ceux des Européens. Là, ils sont en train de se toucher entre eux. 
      Mais je compte bien que les Ricains vont recommencer à se toucher vivement entre eux, que les Chinois vont recommencer à se toucher vivement entre eux, les Russes aussi.
      Ca fait trop longtemps que ces gens ne se sont pas embrassés à mort. (Ce qui n’empêche que pour en arriver à se toucher entre soi, on puisse invoquer un prétexte allant à commencer à toucher quelque exotique)...

      Nous semblons avoir deux sortes de cycles. Un cycle primaire, celui qui génère les générations par périodes de 25 ans, qui est de faible friction. Puis un cycle secondaire, par périodes d’un siècle où il faut une forte friction. Tout ça entre soi, entre gens de même culture.

       

      Les paramécies se multiplient en se divisant, Une devient deux, puis devient 4 ...
      Mais en plus de cette scissiparité, de temps en temps, elles s’accollent à une autre pendant quelques minutes histoire de se mixer leurs chomosomes. Elles vivent dont seules pendant quelques ’générations’ (le terme est impropre) et soudain ont besoin d’un gros bisou qu’on appelle conjugaison. Il y a un cycle primaire distant, isolationniste, et un cycle secondaire très rapproché.








       


    • jean-pierre castel 15 novembre 2012 23:27

      Merci pour cette brillante saga des relations affectives. Mais est-ce l’alpha et l’oméga, ou bien la toile de fond ?
      A vous écouter, la culture n’est que l’écume des choses. Et la seule qui compterait dans ce bas monde serait l’éducation affective des enfants (c’est un peu du Alice Miller ?) . Vous avez peut-être raison.
      Mon postulat est que le bain culturel dans lequel baignent les parents (et les enfants) a lui aussi son importance, y compris en influant le comportement parental via à vis de leurs enfants (ce que vous évoquez d’ailleurs). Quelle influence sur la psyché individuelle et collective de ce dieu qui élimine tous ses confrères, et qui nous est raconté de génération en génération, avec force sacralisation ?
      Que faites-vous par ailleurs de ma (tentative de) démonstration d’un surcroît de violence religieuse dans le monde monothéiste ?


    • easy easy 16 novembre 2012 12:51

      Les relations affectives sont-elles l’alpha et l’oméga, ou bien la toile de fond ?

      Les peintures rupestres, les tatouages, les habits, les os dans le nez, la musique, la culture ne peuvent pas être autre chose que la toile de fond.

      L’alpha et l’oméga c’est la relation directe en Moi-Toi.
      Relation qui est quasiment toujours altérée par quelque tiers.

      Ce n’est pas dans l’écume qu’est la culture qu’on peut trouver la source de la violence 

      Deux personnes seules sur une île ne peuvent pas se haïr alors que la haine surgit dès la présence d’un tiers. Et le tiers, c’est finalement, quand on est nombreux, les autres, ceux qui nous empêchent d’avoir une relation strictement immédiate avec telle personnes puis telle autre personne.

      Il n’y a qu’un moment de notre vie où nous sommes en relation directe avec une personne qui est toute à nous disponible, c’est quand nous sommes bébé face à notre mère. Et encore, à condition qu’elle soit vraiment toute disponible, qu’elle n’interpose pas entre elle et nous des considérations tiercées.

      Une fois devenus adultes, la masse tiers est si imposante que nous nous déguisons en Elle, que nous cherchons à lui ressembler, à nous faire plus gros qu’une grenouille. Et nous devons alors dénier être resté un bébé.
      A part ces derniers temps et encore, jamais un adulte n’évoque son enfance. Il efface tout ça. Il dissimule sa nostalgie de ce moment très immédiat qu’il a connu. Il parlera donc de tout sauf de son véritable manque.
      Or, une fois adulte, nous pouvons tout de même revivre quelques moment d’immédiateté : quand nous faisons l’amour avec une personne et quand nous la frappons.

      La sensation d’immédiateté est même plus puissante lorsque nous sommes sur le point de tuer car la personne ainsi menacée est à nous entièrerement disponible. Si on ne pige pas ça, on ne pige pas les millions de meurtres et de viols qui se produisent chaque jour. Ces crimes ne sont que l’expression de l’intense besoin que n,ous avons de relations immédiates, quitte à risquer notre vie pour les ressentir.
      Et il y a des extensions à cette recherche qui sont les confrontations de soi-même avec la mort, tout seul (Sports à risques, cascades, kamikaze et ...suicide)

      Placez-vous face à un tigre ou un cobra et vous ressentirez l’immédiateté absolue.

      Suspendez-vous par une main au-dessus de 50 m de vide et vous ressentirez aussi cette intensité de relation immédiate. Plus personne d’autre n’intervient dans le devenir de vovre relation avec le rocher auquel vous vous agrippez, il n’y a que lui et vous, il est tout à vous et vous êtes tout à lui.

      Est-ce que les millions de personnes qui chaque jour font le baiser de la mort avec quelque cobra ou requin ont une quelconque religion en tête à ce moment là ?



      Votre démonstration sur la violence inscrite dans les Livres est magistrale. J’en ai rarement vu d’aussi complète en si peu de phrases (car on peut aussi développer en douze volumes). Vous en avez tout dit en un minimum de mots et c’est une belle performance.

      Si donc il y avait à rechercher la religion qui favorise le plus la violence, qui y incite même, votre travail peut servir de référence. Cette recherche ou thèse étant par ailleurs très rebattue. Depuis 20 ans, c’est tous les jours qu’on peut lire un papier sur la même thèse « Il y a des versets sataniques dans le Livre »

      Mais cette focalisation de tout me monde sur le Livre comme source du mal est opportune.

      Cette thèse aujourd’hui très ordinaire aurait semblé incongrues dans les années 1960. A l’époque, ce qui faisait flipper les gens, la source de la violence, c’était à leur sens l’URSS ou la confrontation Est-Ouest.

      James Bond était à propos, pas la thèse des versets sataniques.

      Ce n’est qu’après la chute du Shah d’Iran, la prise des otages américains, le spectacle des incantations à la haine de Khomeini, mais aussi des incantations équivalentes côté chrétien américain, après aussi le spectacle des confrontations entre Israël et les Palestiniens, après bien entendu Gorbachev, que nos angoisses ont cessé de considérer les missiles soviétiques pour focaliser sur la vague islamiste (d’autant qu’elle s’installait en France).
      Nous ne pouvions pas faire l’économie d’un examen d’abord du Coran mais, de fil en aiguille, de toutes les versions de l’abrahamisme. Le 9/11 n’a fait que renforcer nos convictions qu’il y avait à discuter du poison des Livres.

      Pour ce qui me concerne, comme j’ai vécu une guerre et qu’elle n’était en rien liée au Livre, ni même à une ressource, j’ai pu méditer hors Livre.

      J’ai vu que mille batailles de toutes échelles se sont produites dans le monde sans aucun recours au Livre. 

      Ici ou là, des gens ont évoqué quelque verset du Livre pour lancer un putain de contact, mais combien de fois ? 

      Nos pires guerres, entre nous car ce sont toujours celles qui procurent le plus de catharsis, se sont passées sans que personne ne fasse référence au Livre.
      Et aucun de ceux qui s’affrontent dans la série des printemps arabes ne fait appel à quelque verset sinon très accessoirement, histoire de rhétoriser de quelque légitimité.

      Où était le Livre dans le Rwanda ? Où était le Livre dans la guerre de Sécession, dans la guerre de Crimée, dans la Commune, dans la bataille d’Alésia, dans les innombrables guerres intra chinoises, dans les deux guerres mondiales ? Où est le Livre dans le hooliganisme, dans les émeutes de banlieue ?
      Quel rapport y avait-il entre Sade ou Barbe Bleue et le Livre ?

      Vous pouvez développer mille pages sur la méchanceté de certains versets du Livre, vous pourrez établir que tel meurtre, telle lapidation a été justifiée ou motivée par un de ces versets.
      Mais la preuve qu’un médicament est efficace doit être livrée par des expériences en double aveugle et randomisées

      Il faudrait prouver que tous ceux qui croient au Livre ont plus que d’autres recherché une confrontation ultra violente donc très immédiate.
      Et il faudait prouver que ceux qui ignorent le Livre n’ont quasiment jamais pratiqué la violence.
      Et il faudrait faire cette étude en considérant toutes les échelles d’affrontements, par millions de personnes jusque par deux personnes.

      Rousseau avait raison de considérer que l’Homme avait une bonne nature, mais jusqu’au chiffre deux seulement.

      Cela dit, même en partant de mon point de vue a-Livre, je dois bien admettre que le fait qu’il y ait des versets aussi violents dans le Livre ne peut qu’inciter chacun à aller plus vite encore à la bataille rangée.
      Alors oui le Livre est incitateur de violence.
      Oui un autre Livre interdisant la violence freinerait la propension de chacun à rechercher cet intense contact (Fin de la boxe alors)

      Mais il y a en dessous, un fond permanent et universel de besoin de contact violent parce qu’elle est le débouché fatal de notre colère de ne plus pouvoir accéder directement à notre mère ou à quelque remplaçante. 
      Etant entendu qu’il existe des personnes ayant la chance de pouvoir établir une immédiateté douce avec quelqu’un vraiment disponible (et en toute réciprocité) et que ceux-là n’éprouvent aucune colère, aucune envie d’essayer la violence.

      Heureusement, il a existé des gens comblés parce qu’ils parvenaient à vivre une relation tendre immédiate avec quelqu’un. Mais je crains qu’avec l’incursion des smartphones dans notre vie ajoutée à la judiciarisation de nos relations, bientôt plus personne ne puisse ressentir que son interlocuteur est tout à lui disponible.

      Si nous parvenons à ressentir une immédiateté avec un smartphone, avec la Toile, ces objets pourtant médiatiques, nous n’aurons plus du tout besoin de rechercher le contact vif qu’offre la violence. 
      Apparemment, ce n’est pas le cas.
      Les gens ont beau disposer d’objets étranges, à la fois accaparables et impossibles à posséder en leur entièreté, ils semblent ne pas en être comblés. Ces objets semblent offrir la solution de contact immédiat avec Tout, on se précipite donc sur eux mais on ressent toujours une frustration.
      Un smartphone, le Web, représentent le Tout avec lequel il est extrêmement tentant de faire l’amour. Mais ce Tout est comme un arc-en-ciel, plus on s’en approche, moins on le saisit.

      Nous n’avons que deux exutoires qui nous semblent possibles :
      soit un ami tout à soi réservé
      soit Tout
      A défaut d’avoir un ami à soi réservé, on cherche à posséder tout ce qui l’enveloppe, donc Tout.

      Si l’on dispose d’un ami tout à soi réservé, on ne s’intéresse pas au Tout. Mais comme c’est une chance rarissime, on se tourne vers Tout.
      Comme 99% des gens se tournent vers Tout, chacun a l’impression que les autres y trouvent comblement et cette culture augmente le désir de ce Tout. Ce qui ne peut aboutir qu’à la frustration finale donc à la jalousie et la colère ou à la dépression.



      Dans une tribu de 1000 personnes, chacun est en contact direct avec chacun. De sorte que chacun a l’impression d’immédiateté avec Tout. Aucun membre de la tribu n’évoque quoi que ce soit d’extérieur à la tribu. Aucun ne prétend avoir vu d’OVNI. La situation n’est pas pour autant aussi simple à gérer que dans une dyade mais c’est gérable et il n’est pas concevable de construire quelque sorte de prison (alors que c’est techniquement possible). Il ne vient à l’idée de personne de concevoir un moyen de transport puisque Tout est là.

      Dans les cités, surgit l’anonymat et plus personne n’a le sentiment de pouvoir toucher directement chacun. On se retrouve obligé de considérer le hors la vue, l’inconnu.
      L’inconnu devient carrément l’objet recherché et on se met à fabriquer des moyens de transport, on invente les vertiges et les infinis. Cela afin d’essayer de cerner tout ce que les autres conçoivent pour les envelopper, les ramener à soi.
      « Maman, regarde-moi ! »
      On conçoit des prisons parce qu’on impose ainsi une enveloppe à quelqu’un, on l’empêche de penser à autre chose qu’à soi (Cas flagrant de Louis XI mais de Tristane Banon aussi qui tient à cerner DSK). On jouit d’avoir enveloppé quelqu’un. La torture c’est « Ha ha, tu ne peux pas penser à autre chose, tu es tout à moi dévolu »

      Dans la phylogénèse de la violence, il y a donc l’étape qui va de l’apparition de la troisième personne jusqu’au village de 1000 personnes (où il n’y a pas d’infinis et où elle est de faible intensité) et la seconde étape qui va de la cité au monde entier (où il y a des infinis et où elle est très intense).


    • jean-pierre castel 16 novembre 2012 18:52

      @easy
      En tout cas, ce que vous dites sur le besoin d’immédiateté est très intéressant. Vous avez écrit un livre là-dessus ? Ou avez-vous une référence à indiquer pour en savoir plus ?

      On m’a dit : déplacer les dieux d’autrui (comme le roi assyrien Sennacherib quand il prit le contrôle de Babylone) relève d’un comportement névrotique, mais les détruire (comme nos bons missionnaires) d’un comportement psychotique, paranoïaque. Qu’en pensez-vous ? Quelle relation avec votre discours sur l’immédiateté ? Et quel rapport entre immédiatété, absolu, transcendance ?

      Autre question : le dieu jaloux incarne, à sa façon de dieu tout puissant, le syndrome du rejet : toute sa fureur et sa puissance s’exercent contre ses rivaux (il les nie) et contre les hommes qui lui préfèrent un rival, donc qui le rejettent. Il est littéralement obédé par le rejet, alors que les dieux polythéistes se contentent d’exiger un minimum de respect. Qu’en pensez-vous ?


    • jean-pierre castel 16 novembre 2012 20:53

      @easy
      PS : je suis aussi d’accord avec vous que la taille croissante des groupes humains (la bande, le clan, le chefferie, le royaume, l’empire, le village planétaire) a dû être l’un des facteurs majeurs de l’évolution des rapports humains. On l’imagine facilement sur la question du règlement des conflits : du règlement en famille au règlement par des procédures impersonnelles dans un système judiciaire moderne. La contrepartie a été la montée de l’anonymat dans les relations, et de l’individualisme.
      Cela étant, même à deux sur une île, le risque de conflit me paraît évident, par exemple en cas de rareté. Pour Girard , la relation mimétique, rivalitaire, commence à 2. Le dieu monothéiste n’a pas non plus pu supporter un alter ego, Ashera, la déesse pourtant encore présente dans certains textes de l’Ancien Testament


Réagir