Nicolas Sarkozy, l’intouchable ?

Notre
ministre d’Etat est-il un intouchable ? « Un être que l’on ne peut
critiquer ou condamner » (définition
classique) ?
La
question mérite d’être posée, compte tenu du traitement médiatique qui en est
fait et de l’échéance prochaine.
Les
autres sont en bonne partie gérés par le « service public », dont la
gestion a été confiée entièrement à des proches de l’Elysée, de la majorité
parlementaire et donc de M. Sarkozy. Notons que cette « délégation »
se fait dans des proportions inédites depuis l’ORTF (Office de
radiodiffusion-télévision française).
Pour
exemples, l’amitié proclamée de Jean-Paul Cluzel (PDG de Radio France) pour le président Jacques Chirac sur
l’antenne de France Inter ; l’importante médiatisation de Nicolas Sarkozy
sur les chaînes du service public (Il est
le seul à avoir été invité trois fois à l’émission « Cent minutes pour
convaincre. »)
Les
groupes privés susvisés vivent essentiellement des commandes publiques,
c’est-à-dire payées par les contribuables français.
Quel
est pour eux l’intérêt d’investir dans la presse qui est largement déficitaire,
si ce n’est de faire du lobbying et de promouvoir leurs idées auprès de la
population, pour ensuite en tirer les bénéfices auprès du pouvoir mis en
place ? Soulignons que les déclarations de Serge Dassault lui-même vont dans
ce sens : « [Mon groupe doit] posséder un journal ou un hebdomadaire pour
y exprimer son opinion. »
« Proches »,
le mot est faible dans certains cas : M. Bouygues, qui dirige la première
chaîne de télévision, est le parrain du fils de M. Sarkozy, MM. Lagardère et
Etienne Mougeotte sont de « grands amis ». Son « cercle »
comprend également Michel Denisot (directeur général adjoint de Canal+) et
Marc-Olivier Fogiel.
Soyons
honnêtes, il peut également s’interroger sur l’intention d’autres politiques,
puisqu’un proche de Ségolène Royal déclarait récemment : « Nous
faisons comme Sarkozy, nous cannibalisons l’espace médiatique. »
Mais
Madame Royal n’a pas le « statut » de M. Sarkozy, ni ses
« mauvaises intentions ». Elle ne maîtrise pas les médias autant que
certains le pensent. Il est ainsi fort possible que sa médiatisation soit en
réalité souhaitée, voire parfois décidée, par le ministre de l’Intérieur, qui
voit peut-être en elle une candidate « facile à battre ».
Une
autre raison pour les médias et le ministre d’imposer un tel
« duel » : donner l’illusion d’un combat indiscutable afin de
faire taire les velléités de candidature dans son propre camp (l’UMP). En
effet, Michèle Alliot-Marie, Dominique Galouzeau de Villepin et certains
gaullistes acceptent mal la ligne atlantiste et ultra-libérale (ligne bien divergente de celle du général
de Gaulle) du candidat « autoproclamé ».
Ligne
atlantiste confirmée lors du voyage de « campagne
électorale » de Nicolas Sarkozy (payé par les contribuables français) aux
Etats-Unis, qui participe à une « glorification » du président
américain George W. Bush.
Qui
connaît sérieusement les idées de fond de M. Sarkozy, si ce n’est son thème de
prédilection : « la rupture » ?
La
rupture d’avec quoi ? Faut-il lui rappeler qu’il est ministre d’Etat (et donc n°2), ministre de l’Intérieur
et de l’Aménagement du territoire, anciennement ministre de l’Industrie, de
l’Economie et des Finances, qu’il est en poste depuis 2002, et qu’il dirige le
parti majoritaire ?
Il
lui serait difficile d’avoir un poste plus influent que le sien actuellement.
Mais il est évident que celui de président de la République lui donnerait un
pouvoir plus élargi, et surtout la possibilité de modifier certains cadres
institutionnels.
Je vous renvoie vers un autre de mes
articles : « Le gouvernement à l’attaque de l’indépendance de la Justice »,
tout en rappelant la nomination en 2002 de M. Yves Bot, proche de Nicolas
Sarkozy, au poste de procureur général de Paris, afin de traiter avec plus de
complaisance les affaires du RPR. Dans le but d’empêcher toute poursuite contre
le président à la fin de son mandat, son remplaçant pourrait être Laurent Le
Mesle, directeur de cabinet du Garde des Sceaux, ancien conseiller juridique de
Jacques Chirac.
Dernièrement,
l’on pouvait lire un article de Guillaume Durand (journaliste réputé sérieux que l’on
pourrait penser « centriste » ou « gauche caviar »)
dans Gala sur le mariage de Jean Reno : loin de nous rappeler que
le ministre avait promis de ne plus parler de sa vie privée, l’article
constitue une véritable propagande pro-sarkoziste - sur cet évènement se
déroulant aux Baux-de-Provence, site totalement et illégalement « privatisé »
pour l’occasion - parlant de la « grande tendresse qui unit Nicolas
à Cécilia » à cette occasion ; alors même que tout un chacun connaît
le véritable état de leur couple : la rupture, thème qui dans ce cas
précis ne plaît pas à l’intéressé.
A
tel point que lorsqu’il apprend la liaison de sa femme avec Richard Attias, il
fait pression pour que ce dernier soit démis de ses fonctions au sein de
Publicis Events, en faisant notamment perdre le contrat d’exclusivité
publicitaire qui liait l’entreprise à l’UMP.
Notons
que la femme de M. Namias est la directrice de communication de la première
dame Bernadette Chirac pour l’opération
« pièces jaunes ».
Une
telle information, qui n’est pas des plus anodines, n’a pourtant pas été diffusée
dans un seul média, si ce n’est l’indépendant et notable Canard enchaîné.
Ici,
le terme « chacun » signifie les médias. Mais ce qui est peut-être
encore plus inquiétant est que cette désinformation que nous subissons depuis
des années a pour conséquence directe le désintérêt porté par la majorité de la
population pour les faits politiques.
En
effet, ce désintérêt est favorisé par des médias et certains gouvernants qui
transforment tous les combats politiques comme « écrits d’avance » (cf. Traité constitutionnel européen et
aujourd’hui, le duel « Sarko-Ségo »)
De
fait, parfois, même lorsque les médias diffusent une information choquante, les
citoyens ne sont plus toujours réceptifs ni contestataires.
C’est
là tout l’objectif des grands groupes et d’une certaine « élite »
représentée par M. Sarkozy.
Finalement,
la proximité entre l’acteur et le politique est évidente. La star d’Hollywood
aime tout contrôler : on le constate avec sa femme, Katie Holmes, privée,
semble-t-il, de toute action indépendante. Nicolas Sarkozy a cette même
obsession de contrôle permanent. Pour chacun de ses déplacements, même les plus
quelconques, en dehors de ses fonctions, le ministre est entouré d’une armada
d’agents de police ou de CRS payés par ses concitoyens.
A
propos de la vidéosurveillance, le ministre d’Etat se serait exclamé : « Je veux tout voir
et tout savoir ».
Pour Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des Droits de l’homme,
« c’est le signe d’une volonté de toute-puissance qu’expriment les jeunes
enfants avant qu’ils soient éduqués et socialisés. Une telle exigence est
inquiétante de la part d’un adulte au pouvoir. Vouloir tout contrôler est une
course folle : on n’atteindra jamais les objectifs sécuritaires et on y
laissera toute espèce de liberté individuelle. »